Texte intégral
Monsieur le Président du Conseil général,
Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais tout d'abord vous dire le plaisir que j'éprouve à me trouver aujourd'hui à Mayotte. J'ai été immédiatement sensible à l'atmosphère tout à fait particulière, qui tient à ce lieu où j'arrive, à la beauté des paysages, et surtout à la chaleur de votre accueil. Ma première rencontre avec les Mahorais, chez eux, est un moment que je n'oublierai pas. Comme vous l'avez dit, Monsieur le président : rien ne vaut une visite sur place pour prendre conscience des réalités. C'est la raison pour laquelle, après que mon gouvernement vous ait apporté une réponse que vous attendiez depuis 25 ans, je tenais à me rendre chez vous.
Les trois ministres qui m'accompagnent, le secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, Christian Paul, le ministre délégué à la ville, Claude Bartolone, le secrétaire d'Etat aux PME , au commerce, à l'artisanat et à la consommation, François Patriat et moi-même avons été très sensibles, Monsieur le président, aux mots de bienvenue que vous avez prononcés, et je vous en remercie.
Mayotte est unie à la France depuis 1841. Depuis, elle n'a pas cessé d'affirmer son attachement à ce lien Cette volonté s'est exprimée à plusieurs reprises. Ce fut le cas notamment il y a 25 ans, lorsque les Mahorais ont, par un vote quasi-unanime, manifesté leur souhait de rester dans la République française. Ce message fort a été entendu par la France.
Depuis 1976, Mayotte est une collectivité territoriale à statut particulier. Ce statut a permis à la collectivité de bénéficier de la présence des services de l'Etat et des principaux établissements publics. Il lui a également ouvert l'accès à des fonds publics importants.
Mais, la majorité des Mahorais réclamait un statut qui leur garantisse, dans la durée, l'appartenance à la République.
Longtemps, cette demande est restée en suspens. Il était temps qu'elle trouve sa réponse. C'est pourquoi mon Gouvernement a engagé une concertation très étroite avec l'ensemble des forces politiques de l'île, dont la participation a été exemplaire. Un accord sur l'avenir de Mayotte a été signé le 27 janvier 2000 par le Secrétaire d'Etat à l'Outre-mer et les représentants des principaux partis politiques mahorais. Cet accord, qui traçait les grandes lignes du futur statut, a été soumis à une consultation le 2 juillet 2000 et approuvé par près des trois quarts des électeurs. De nouvelles discussions se sont alors engagées pour la rédaction du statut. Le projet qui en est issu, et qui reprend les grandes lignes de l'accord du 27 janvier 2000, fait de Mayotte une " collectivité départementale ". Je me suis réjoui d'apprendre qu'il venait d'être approuvé par une large majorité des élus du Conseil général. Le texte est actuellement étudié par le Conseil d'Etat. Il sera très prochainement soumis au Conseil des ministres et présenté au Parlement.
La " collectivité départementale " de Mayotte sera dotée, dès l'entrée en vigueur de la loi, de compétences et de moyens nouveaux. L'exécutif du territoire, aujourd'hui exercé par le préfet, sera transféré au président du Conseil général en 2004. En 2007, le Conseil général exercera pleinement ses compétences, dans les mêmes conditions que les conseils généraux de la métropole. Enfin, à partir de 2010, le Conseil général pourra faire savoir s'il souhaite encore faire évoluer le statut de l'île. Toute proposition sera alors recevable et étudiée.
De cette façon, comme vous l'avez souligné, Monsieur le Président, le Gouvernement a tenu ses engagements. Pour la première fois, Mayotte va être dotée d'un statut que ses représentants auront largement contribué à élaborer. Ce statut renforce son enracinement dans la République. Désormais, les dernières incertitudes sont levées : Mayotte sait qu'elle fait partie intégrante de la France.
Ainsi sortis de l'incertitude institutionnelle, les Mahorais vont pouvoir se consacrer à la question essentielle du développement économique et social.
Au cours des vingt dernières années, Mayotte a connu un essor économique très important. La modernisation juridique s'est accompagnée d'une politique de rattrapage des équipements et des infrastructures économiques de base. Sur la seule période 1994-1999, l'Etat a consacré plus de 2 milliards de francs au développement économique et social de l'île, au travers du contrat de plan et de la convention de développement. Il faut ajouter à cette somme les crédits du Fonds européen de développement (FED) qui se sont élevés à 10 millions d'euros (plus de 65 millions de francs) pour la période de 1996 à 2000. Le dynamisme des Mahorais a fait écho à cet engagement des fonds publics, puisque le nombre des entreprises enregistrées à Mayotte est passé de 1829 en 1996 à 4843 en 1999.
Dans les années à venir, les crédits publics consacrés à Mayotte vont encore augmenter considérablement. Le contrat de plan pour la période 2000 à 2004 sera doté de 5 milliards de francs. Pour Mayotte, le Gouvernement a accepté une clé de répartition unique en France, puisque l'Etat prend à sa charge 90% du financement de ce contrat de plan. Les crédits du Fonds européen de développement s'élèveront à plus de 15 millions d'euros (près de 100 millions de francs) pour la période 2001-2006. Cet engagement public va permettre une mise à niveau des équipements dans tous les grands secteurs : l'économie, l'habitat, l'eau, l'assainissement, la santé ou encore les constructions scolaires.
Cette mise à niveau va aussi se concrétiser dans le domaine des téléphones portables. A la suite de l'appel à candidature lancé il y a un an, un opérateur a été retenu par le Secrétaire d'Etat à l'industrie. Avant l'été prochain, un réseau sera mis en place. Il couvrira près de 95 % de la population de l'île.
Vous avez évoqué, Monsieur le président, la desserte aérienne de Mayotte. Sachez que le Gouvernement ne ménage pas ses efforts sur ce dossier, dont il sait toute l'importance pour le développement de Mayotte et notamment pour le tourisme. Je veux vous dire brièvement où nous en sommes sur cette question.
Tout d'abord, s'agissant de la liaison actuelle qui s'effectue par Saint-Denis de la Réunion, la compagnie Air France est d'accord pour améliorer de façon substantielle les conditions de ce vol, d'une part, en diminuant le temps de correspondance à Saint-Denis, d'autre part, en procédant à une baisse du tarif.
Pour ce qui concerne la liaison directe par Nairobi, les discussions se poursuivent et l'Etat y est extrêmement attentif.
Enfin, s'agissant de la construction d'une piste longue à Mayotte, je vous informe qu'une somme de 400 000 francs sera consacrée cette année aux études préliminaires, techniques et économiques, nécessaires à ces travaux.
Monsieur le président, vous avez exprimé votre souhait que l'agriculture mahoraise se développe. Je sais que vous-même êtes aujourd'hui agriculteur, après une vie d'instituteur bien remplie. On m'a déjà vanté la qualité des fruits et des légumes que vous produisez à Combani.
Des actions ont déjà été entreprises pour favoriser l'installation des agriculteurs, pour améliorer leur formation, pour les aider à s'organiser par le biais par exemple de coopératives. Ces efforts seront poursuivis et intensifiés. Au cours des prochains mois, un centre de ressources sera mis en place pour coordonner l'action des agriculteurs, des organismes de recherche et de formation et des élus. En outre, le projet de loi sur Mayotte prévoit, à terme, la mise en place d'une véritable chambre d'agriculture. Enfin, le Gouvernement travaille en ce moment à l'élaboration d'un statut pour les travailleurs indépendants : commerçants, artisans, mais aussi pour les exploitants agricoles. Je suis conscient, comme vous, que tout doit être mis en uvre pour éviter un exode rural massif qui bouleverserait la société mahoraise.
J'en viens maintenant aux questions sociales. Dans ce domaine également, des progrès considérables ont été accomplis. Pour ne citer qu'un exemple, près de 14 000 logements sociaux ont été réalisés depuis 1978.
Mais il reste beaucoup à faire. Je sais que les attentes des Mahorais sont fortes, ainsi que vous l'avez exprimé, monsieur le Président. La population est ici en croissance rapide, la plus rapide de toute la France. Il y avait 33 000 habitants à Mayotte en 1966 ; ils sont 155 000 aujourd'hui. Pour comprendre l'impact d'une telle évolution, il faut se dire que la France, si elle avait connu la même évolution, compterait aujourd'hui 250 millions d'habitants.
La protection sociale à Mayotte, malgré l'avancée due à la création, en 1996, de la Caisse de prévoyance sociale, est très incomplète. Rien ne justifie que de nombreux habitants bénéficient d'une protection faible, voire nulle, dans des domaines aussi importants que l'enfance, la famille, la maladie, le chômage, le handicap ou encore la retraite. Le Gouvernement a donc l'intention de proposer aux Mahorais un système de protection sociale digne de ce nom. Pour être pleinement efficace, ce système doit aller de pair avec une politique de développement économique et d'aide à l'emploi. En effet, si tel n'était pas le cas, la protection sociale seule produirait des effets pervers en aggravant les inégalités et les phénomènes d'exclusion. Elle irait ainsi à l'inverse de l'objectif poursuivi.
Personne, d'ailleurs, ne prétend qu'il faille mettre en oeuvre à Mayotte, de façon aveugle, les règles qui régissent la protection sociale en métropole. Agir de cette façon, ce serait nier la situation particulière de l'économie, du travail, des relations sociales. Chacun s'accorde, au contraire, sur le fait qu'il convient d'appliquer à Mayotte un régime adapté à ses particularités.
C'est pourquoi l'amélioration de la protection sociale se fera d'une façon progressive et adaptée. C'est pourquoi, aussi, elle sera accompagnée de mesures en faveur de l'emploi. Car il faut que les Mahorais disposent avant tout de revenus tirés du travail et non de l'inactivité. Nous voulons ouvrir à Mayotte la voie du développement, de la responsabilité et de la dignité, et non celle de l'assistance. D'ailleurs, c'est la voie qu'ont choisie les élus de Mayotte eux-même, lors de la discussion sur les objectifs stratégiques du Contrat de plan comme au cours des travaux sur les mesures sociales nécessaires à Mayotte.
Les premières mesures seront prises par ordonnance dans les prochains mois. Je peux aujourd'hui vous en indiquer les grandes lignes.
Tout d'abord, l'enfance et la famille sont une priorité pour le Gouvernement, ici peut-être encore plus qu'ailleurs. A Mayotte, les allocations familiales ne bénéficient qu'aux seuls salariés, alors qu'elles ont été étendues depuis plus de vingt ans à toutes les familles en métropole. Cette disparité de traitement n'est pas justifiée. Les allocations familiales seront donc généralisées, sous réserve du respect d'une condition minimale de résidence.
L'action du Gouvernement s'exerce aussi en direction des plus défavorisés. Certaines situations sociales difficiles doivent être prises en considération. C'est le cas notamment des handicapés et des personnes âgées qui disposent de revenus très faibles. Le montant de l'allocation minimale qui leur est versée sera augmenté de manière significative. Enfin, les Mahorais qui se rendent à la Réunion ou en métropole auront accès, comme tous les autres citoyens français, à la couverture maladie universelle.
L'éducation est une autre grande priorité nationale. Cette question revêt une importance cruciale à Mayotte, où les besoins en la matière sont particulièrement élevés. C'est pourquoi, vous le savez, le Gouvernement va consentir un effort sans précédent en matière de constructions scolaires. Près de 1, 2 milliards de francs leur seront consacrées d'ici à 2004. Le nombre de collèges et de lycées doublera en 5 ans.
Mais il ne suffit pas de bâtir des écoles. Encore faut-il que les enfants les fréquentent, et dans de bonnes conditions. Nous allons donc aussi porter nos efforts sur l'aide à la rentrée scolaire et sur la restauration.
S'agissant de l'aide à la rentrée scolaire, de nombreuses familles ont des difficultés pour supporter les frais occasionnés à cette occasion. Le montant de l'allocation de rentrée scolaire sera donc augmenté de façon significative. Le Gouvernement va également mettre en place un dispositif d'aide à l'achat de fournitures scolaires.
S'agissant de la restauration, trop nombreux sont les enfants qui ne prennent pas de repas avant de partir le matin, souvent très tôt, vers l'école. Parfois, ils n'ont pas non plus de repas à midi. Cette situation ne peut pas durer. Nous allons donc mettre en place des cantines scolaires, afin de garantir une alimentation saine et régulière aux écoliers mahorais.
En matière d'aide à l'emploi, le Gouvernement mettra en place un dispositif complet et cohérent à Mayotte. La première mesure sera la création d' un dispositif d'emplois-jeunes, inspiré du dispositif métropolitain. Il permettra notamment de répondre aux besoins d'encadrement et de développement des associations et des collectivités locales.
Le Gouvernement va également favoriser la négociation entre les partenaires sociaux pour la mise en place d'un régime conventionnel d'indemnisation du chômage. Nous devrons aussi réfléchir à la façon d'indemniser le chômage partiel, de façon à diminuer les conséquences, parfois dramatiques pour les salariés, des baisses conjoncturelles d'activité des entreprises.
Telles sont les premières mesures du dispositif d'aide à l'emploi et de protection sociale que le Gouvernement entend peu à peu mettre en place à Mayotte, en application de l'accord pour l'avenir de Mayotte du 27 janvier 2000, qui stipulait que le système de protection sanitaire et sociale serait modernisé et adapté. D'autres mesures suivront, notamment pour aider l'emploi.
Ainsi, que ce soit en matière économique et sociale ou dans le domaine institutionnel, le Gouvernement respecte ses engagements. Contrat de plan, constructions scolaires, mesures sociales : c'est bien d'un nouvel effort pour Mayotte qu'il s'agit.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les élus, la sécurité du lien qui relie Mayotte à la France est désormais garantie. L'Etat s'engage fortement à vos côtés pour permettre le développement économique et social de l'île. Dans de telles conditions, Mayotte peut entrer avec confiance dans le XXIè siècle.
Vive Mayotte !
Vive la République !
Vive la France !
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 30 janvier 2001)
Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais tout d'abord vous dire le plaisir que j'éprouve à me trouver aujourd'hui à Mayotte. J'ai été immédiatement sensible à l'atmosphère tout à fait particulière, qui tient à ce lieu où j'arrive, à la beauté des paysages, et surtout à la chaleur de votre accueil. Ma première rencontre avec les Mahorais, chez eux, est un moment que je n'oublierai pas. Comme vous l'avez dit, Monsieur le président : rien ne vaut une visite sur place pour prendre conscience des réalités. C'est la raison pour laquelle, après que mon gouvernement vous ait apporté une réponse que vous attendiez depuis 25 ans, je tenais à me rendre chez vous.
Les trois ministres qui m'accompagnent, le secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, Christian Paul, le ministre délégué à la ville, Claude Bartolone, le secrétaire d'Etat aux PME , au commerce, à l'artisanat et à la consommation, François Patriat et moi-même avons été très sensibles, Monsieur le président, aux mots de bienvenue que vous avez prononcés, et je vous en remercie.
Mayotte est unie à la France depuis 1841. Depuis, elle n'a pas cessé d'affirmer son attachement à ce lien Cette volonté s'est exprimée à plusieurs reprises. Ce fut le cas notamment il y a 25 ans, lorsque les Mahorais ont, par un vote quasi-unanime, manifesté leur souhait de rester dans la République française. Ce message fort a été entendu par la France.
Depuis 1976, Mayotte est une collectivité territoriale à statut particulier. Ce statut a permis à la collectivité de bénéficier de la présence des services de l'Etat et des principaux établissements publics. Il lui a également ouvert l'accès à des fonds publics importants.
Mais, la majorité des Mahorais réclamait un statut qui leur garantisse, dans la durée, l'appartenance à la République.
Longtemps, cette demande est restée en suspens. Il était temps qu'elle trouve sa réponse. C'est pourquoi mon Gouvernement a engagé une concertation très étroite avec l'ensemble des forces politiques de l'île, dont la participation a été exemplaire. Un accord sur l'avenir de Mayotte a été signé le 27 janvier 2000 par le Secrétaire d'Etat à l'Outre-mer et les représentants des principaux partis politiques mahorais. Cet accord, qui traçait les grandes lignes du futur statut, a été soumis à une consultation le 2 juillet 2000 et approuvé par près des trois quarts des électeurs. De nouvelles discussions se sont alors engagées pour la rédaction du statut. Le projet qui en est issu, et qui reprend les grandes lignes de l'accord du 27 janvier 2000, fait de Mayotte une " collectivité départementale ". Je me suis réjoui d'apprendre qu'il venait d'être approuvé par une large majorité des élus du Conseil général. Le texte est actuellement étudié par le Conseil d'Etat. Il sera très prochainement soumis au Conseil des ministres et présenté au Parlement.
La " collectivité départementale " de Mayotte sera dotée, dès l'entrée en vigueur de la loi, de compétences et de moyens nouveaux. L'exécutif du territoire, aujourd'hui exercé par le préfet, sera transféré au président du Conseil général en 2004. En 2007, le Conseil général exercera pleinement ses compétences, dans les mêmes conditions que les conseils généraux de la métropole. Enfin, à partir de 2010, le Conseil général pourra faire savoir s'il souhaite encore faire évoluer le statut de l'île. Toute proposition sera alors recevable et étudiée.
De cette façon, comme vous l'avez souligné, Monsieur le Président, le Gouvernement a tenu ses engagements. Pour la première fois, Mayotte va être dotée d'un statut que ses représentants auront largement contribué à élaborer. Ce statut renforce son enracinement dans la République. Désormais, les dernières incertitudes sont levées : Mayotte sait qu'elle fait partie intégrante de la France.
Ainsi sortis de l'incertitude institutionnelle, les Mahorais vont pouvoir se consacrer à la question essentielle du développement économique et social.
Au cours des vingt dernières années, Mayotte a connu un essor économique très important. La modernisation juridique s'est accompagnée d'une politique de rattrapage des équipements et des infrastructures économiques de base. Sur la seule période 1994-1999, l'Etat a consacré plus de 2 milliards de francs au développement économique et social de l'île, au travers du contrat de plan et de la convention de développement. Il faut ajouter à cette somme les crédits du Fonds européen de développement (FED) qui se sont élevés à 10 millions d'euros (plus de 65 millions de francs) pour la période de 1996 à 2000. Le dynamisme des Mahorais a fait écho à cet engagement des fonds publics, puisque le nombre des entreprises enregistrées à Mayotte est passé de 1829 en 1996 à 4843 en 1999.
Dans les années à venir, les crédits publics consacrés à Mayotte vont encore augmenter considérablement. Le contrat de plan pour la période 2000 à 2004 sera doté de 5 milliards de francs. Pour Mayotte, le Gouvernement a accepté une clé de répartition unique en France, puisque l'Etat prend à sa charge 90% du financement de ce contrat de plan. Les crédits du Fonds européen de développement s'élèveront à plus de 15 millions d'euros (près de 100 millions de francs) pour la période 2001-2006. Cet engagement public va permettre une mise à niveau des équipements dans tous les grands secteurs : l'économie, l'habitat, l'eau, l'assainissement, la santé ou encore les constructions scolaires.
Cette mise à niveau va aussi se concrétiser dans le domaine des téléphones portables. A la suite de l'appel à candidature lancé il y a un an, un opérateur a été retenu par le Secrétaire d'Etat à l'industrie. Avant l'été prochain, un réseau sera mis en place. Il couvrira près de 95 % de la population de l'île.
Vous avez évoqué, Monsieur le président, la desserte aérienne de Mayotte. Sachez que le Gouvernement ne ménage pas ses efforts sur ce dossier, dont il sait toute l'importance pour le développement de Mayotte et notamment pour le tourisme. Je veux vous dire brièvement où nous en sommes sur cette question.
Tout d'abord, s'agissant de la liaison actuelle qui s'effectue par Saint-Denis de la Réunion, la compagnie Air France est d'accord pour améliorer de façon substantielle les conditions de ce vol, d'une part, en diminuant le temps de correspondance à Saint-Denis, d'autre part, en procédant à une baisse du tarif.
Pour ce qui concerne la liaison directe par Nairobi, les discussions se poursuivent et l'Etat y est extrêmement attentif.
Enfin, s'agissant de la construction d'une piste longue à Mayotte, je vous informe qu'une somme de 400 000 francs sera consacrée cette année aux études préliminaires, techniques et économiques, nécessaires à ces travaux.
Monsieur le président, vous avez exprimé votre souhait que l'agriculture mahoraise se développe. Je sais que vous-même êtes aujourd'hui agriculteur, après une vie d'instituteur bien remplie. On m'a déjà vanté la qualité des fruits et des légumes que vous produisez à Combani.
Des actions ont déjà été entreprises pour favoriser l'installation des agriculteurs, pour améliorer leur formation, pour les aider à s'organiser par le biais par exemple de coopératives. Ces efforts seront poursuivis et intensifiés. Au cours des prochains mois, un centre de ressources sera mis en place pour coordonner l'action des agriculteurs, des organismes de recherche et de formation et des élus. En outre, le projet de loi sur Mayotte prévoit, à terme, la mise en place d'une véritable chambre d'agriculture. Enfin, le Gouvernement travaille en ce moment à l'élaboration d'un statut pour les travailleurs indépendants : commerçants, artisans, mais aussi pour les exploitants agricoles. Je suis conscient, comme vous, que tout doit être mis en uvre pour éviter un exode rural massif qui bouleverserait la société mahoraise.
J'en viens maintenant aux questions sociales. Dans ce domaine également, des progrès considérables ont été accomplis. Pour ne citer qu'un exemple, près de 14 000 logements sociaux ont été réalisés depuis 1978.
Mais il reste beaucoup à faire. Je sais que les attentes des Mahorais sont fortes, ainsi que vous l'avez exprimé, monsieur le Président. La population est ici en croissance rapide, la plus rapide de toute la France. Il y avait 33 000 habitants à Mayotte en 1966 ; ils sont 155 000 aujourd'hui. Pour comprendre l'impact d'une telle évolution, il faut se dire que la France, si elle avait connu la même évolution, compterait aujourd'hui 250 millions d'habitants.
La protection sociale à Mayotte, malgré l'avancée due à la création, en 1996, de la Caisse de prévoyance sociale, est très incomplète. Rien ne justifie que de nombreux habitants bénéficient d'une protection faible, voire nulle, dans des domaines aussi importants que l'enfance, la famille, la maladie, le chômage, le handicap ou encore la retraite. Le Gouvernement a donc l'intention de proposer aux Mahorais un système de protection sociale digne de ce nom. Pour être pleinement efficace, ce système doit aller de pair avec une politique de développement économique et d'aide à l'emploi. En effet, si tel n'était pas le cas, la protection sociale seule produirait des effets pervers en aggravant les inégalités et les phénomènes d'exclusion. Elle irait ainsi à l'inverse de l'objectif poursuivi.
Personne, d'ailleurs, ne prétend qu'il faille mettre en oeuvre à Mayotte, de façon aveugle, les règles qui régissent la protection sociale en métropole. Agir de cette façon, ce serait nier la situation particulière de l'économie, du travail, des relations sociales. Chacun s'accorde, au contraire, sur le fait qu'il convient d'appliquer à Mayotte un régime adapté à ses particularités.
C'est pourquoi l'amélioration de la protection sociale se fera d'une façon progressive et adaptée. C'est pourquoi, aussi, elle sera accompagnée de mesures en faveur de l'emploi. Car il faut que les Mahorais disposent avant tout de revenus tirés du travail et non de l'inactivité. Nous voulons ouvrir à Mayotte la voie du développement, de la responsabilité et de la dignité, et non celle de l'assistance. D'ailleurs, c'est la voie qu'ont choisie les élus de Mayotte eux-même, lors de la discussion sur les objectifs stratégiques du Contrat de plan comme au cours des travaux sur les mesures sociales nécessaires à Mayotte.
Les premières mesures seront prises par ordonnance dans les prochains mois. Je peux aujourd'hui vous en indiquer les grandes lignes.
Tout d'abord, l'enfance et la famille sont une priorité pour le Gouvernement, ici peut-être encore plus qu'ailleurs. A Mayotte, les allocations familiales ne bénéficient qu'aux seuls salariés, alors qu'elles ont été étendues depuis plus de vingt ans à toutes les familles en métropole. Cette disparité de traitement n'est pas justifiée. Les allocations familiales seront donc généralisées, sous réserve du respect d'une condition minimale de résidence.
L'action du Gouvernement s'exerce aussi en direction des plus défavorisés. Certaines situations sociales difficiles doivent être prises en considération. C'est le cas notamment des handicapés et des personnes âgées qui disposent de revenus très faibles. Le montant de l'allocation minimale qui leur est versée sera augmenté de manière significative. Enfin, les Mahorais qui se rendent à la Réunion ou en métropole auront accès, comme tous les autres citoyens français, à la couverture maladie universelle.
L'éducation est une autre grande priorité nationale. Cette question revêt une importance cruciale à Mayotte, où les besoins en la matière sont particulièrement élevés. C'est pourquoi, vous le savez, le Gouvernement va consentir un effort sans précédent en matière de constructions scolaires. Près de 1, 2 milliards de francs leur seront consacrées d'ici à 2004. Le nombre de collèges et de lycées doublera en 5 ans.
Mais il ne suffit pas de bâtir des écoles. Encore faut-il que les enfants les fréquentent, et dans de bonnes conditions. Nous allons donc aussi porter nos efforts sur l'aide à la rentrée scolaire et sur la restauration.
S'agissant de l'aide à la rentrée scolaire, de nombreuses familles ont des difficultés pour supporter les frais occasionnés à cette occasion. Le montant de l'allocation de rentrée scolaire sera donc augmenté de façon significative. Le Gouvernement va également mettre en place un dispositif d'aide à l'achat de fournitures scolaires.
S'agissant de la restauration, trop nombreux sont les enfants qui ne prennent pas de repas avant de partir le matin, souvent très tôt, vers l'école. Parfois, ils n'ont pas non plus de repas à midi. Cette situation ne peut pas durer. Nous allons donc mettre en place des cantines scolaires, afin de garantir une alimentation saine et régulière aux écoliers mahorais.
En matière d'aide à l'emploi, le Gouvernement mettra en place un dispositif complet et cohérent à Mayotte. La première mesure sera la création d' un dispositif d'emplois-jeunes, inspiré du dispositif métropolitain. Il permettra notamment de répondre aux besoins d'encadrement et de développement des associations et des collectivités locales.
Le Gouvernement va également favoriser la négociation entre les partenaires sociaux pour la mise en place d'un régime conventionnel d'indemnisation du chômage. Nous devrons aussi réfléchir à la façon d'indemniser le chômage partiel, de façon à diminuer les conséquences, parfois dramatiques pour les salariés, des baisses conjoncturelles d'activité des entreprises.
Telles sont les premières mesures du dispositif d'aide à l'emploi et de protection sociale que le Gouvernement entend peu à peu mettre en place à Mayotte, en application de l'accord pour l'avenir de Mayotte du 27 janvier 2000, qui stipulait que le système de protection sanitaire et sociale serait modernisé et adapté. D'autres mesures suivront, notamment pour aider l'emploi.
Ainsi, que ce soit en matière économique et sociale ou dans le domaine institutionnel, le Gouvernement respecte ses engagements. Contrat de plan, constructions scolaires, mesures sociales : c'est bien d'un nouvel effort pour Mayotte qu'il s'agit.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les élus, la sécurité du lien qui relie Mayotte à la France est désormais garantie. L'Etat s'engage fortement à vos côtés pour permettre le développement économique et social de l'île. Dans de telles conditions, Mayotte peut entrer avec confiance dans le XXIè siècle.
Vive Mayotte !
Vive la République !
Vive la France !
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 30 janvier 2001)