Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, sur le rôle des maires pour accompagner, dans les départements et territoires d'outre mer, les actions de réforme du gouvernement afin de promouvoir le développement de ces collectivités locales, Paris le 22 novembre 2007.

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Circonstance : 90ème congrès des maires et des présidents des communautés de France à Paris du 19 au 22 novembre 2007-réception des maires d'outre-mer le 22

Texte intégral

Mesdames et messieurs,
C'est avec un très grand plaisir que je réponds à l'invitation de Christian Estrosi et de Michèle Alliot-Marie que je suis heureux de voir accompagnés du ministre des Sports le plus célèbre du Gouvernement : tous les Français de l'outre-mer sont ici chez eux, rue Oudinot, et je suis heureux de venir y saluer leurs élus municipaux.
Quand je rencontre les élus d'outre-mer, je partage avec eux la connivence associée au mandat de maire - à mes yeux, le plus beau de tous. Je l'ai détenu longtemps ; j'en connais toutes les richesses, toutes les joies, mais aussi toutes les astreintes. Je sais le poids de responsabilités qu'il comporte.
Mais j'ai aussi la certitude de trouver en eux des hommes et des femmes mobilisés par les particularités de leur situation.
Mieux que d'autres, vous comprenez ma détermination, quand je parle de mener la France vers le plein emploi et la croissance. Vous connaissez la difficulté d'entretenir un dialogue avec un Etat parfois lointain.
Vous voulez comme moi que le respect des différences géographiques et culturelles se conjugue avec le rappel d'une communauté de destin nationale.
Vous le savez, une fierté particulière entoure ce congrès : fierté d'une association, l'Association des maires de France, qui entre dans sa centième année plus active que jamais ; fierté d'un métier dont l'évolution fait de vous les référents permanents de toute la vie communale ; fierté de représenter, au moment où elle se met à "bouger", la République française sur trois océans.
Vous me permettrez d'y associer le souvenir particulier de Raphaël Élizé. Maire de ma commune, de Sablé-sur-Sarthe, entre 1929 et 1940, il fut le premier Antillais, le premier maire de couleur élu en métropole. Son action a marqué la ville.
Son destin n'y est pas oublié. Démis de ses fonctions par le régime de Vichy, il entra en résistance, fut arrêté, et mourut en déportation. Il y a quelques années avec quelques uns d'entre vous, nous avions transformé Sablé en une ville de l'outre-mer pour célébrer la mémoire de cet homme.
Mesdames et messieurs,
Avec Nicolas Sarkozy, nous avons fait le pari du mouvement et du changement. Nous pensons que seule la voie des réformes peut redonner à notre pays sa modernité et son prestige.
Ces réformes obéissent à une stratégie volontaire, qui consiste à aller chercher la croissance qui nous manque ; à miser pour cela sur la recherche et sur l'innovation ; à dégripper les rouages du travail. Elles répondent à une ambition large : gagner la bataille du pouvoir d'achat, gagner la bataille de l'emploi, gagner la bataille de la lutte contre la pauvreté.
Ces réformes sont à l'image de notre détermination - profondes et structurelles.
Réforme des universités, l'autonomie donnée à nos universités pour qu'elles puissent retrouver les premières places dans les classements mondiaux qu'elles ont perdues.
Réforme des régimes spéciaux, que nous sommes en train de conduire, elle n'est pas facile et doit être conduite, il n'y a aucune raison qu'il y ait des catégories de Français qui cotisent moins longtemps pour obtenir la retraite alors même que ce sont les autres qui financent.
Réforme du marché du travail, on ne peut pas se satisfaire d'un marché du travail qui nous place à la 25e place des pays européens en matière de chômage.
Réforme de la Fonction publique et de l'État : tous ces chantiers s'inscrivent dans notre mandat ; tous répondent à l'intérêt général. Cet intérêt général qui exige aussi la remise en ordre de nos finances publiques.
Toutes ces réformes sont destinées à dégager des marges de manoeuvre pour la France de demain. Cette France qui, plus que jamais, est appelée à rayonner sur tous les océans.
Nos destins sont liés. C'est pourquoi il n'y a pas, outre-mer, d'autre projet, d'autre ambition, d'autre méthode qu'en métropole.
Solliciter tous les talents, relayer toutes les initiatives, libérer les forces de croissance d'où qu'elles viennent, nos mots d'ordre s'appliquent directement aux départements et territoires d'outre-mer, qui sont la parfaite image de la diversité des énergies françaises.
Comment ne pas faire ensemble ce pari de l'intelligence et de l'initiative ?
Je suis convaincu de l'urgence de réviser un modèle économique et social qui ne répond plus à nos attentes. Je crois à la nécessité de moderniser notre pacte de solidarité qui s'essouffle. C'est vrai en métropole ; c'est aussi vrai pour l'outre-mer qui, je le dis avec franchise, ne peut se contenter, pour son développement, de dispositifs particuliers.
J'en conviens, toutes nos politiques ne peuvent pas se décliner de façon uniforme. Il va falloir contourner les handicaps locaux ; tenir compte au cas par cas d'une histoire, d'une culture. C'est le sens des lettres que Nicolas Sarkozy a adressées aux habitants de chacun des départements, de chacune des collectivités d'outre-mer, et qui sont aujourd'hui nos feuilles de route.
L'implication de tout le Gouvernement dans les dossiers de l'outre-mer est forte. Nous croyons en l'outre-mer et je vous demande de croire toujours plus en vous : je veux dire qu'il faut croire dans vos atouts et qu'il faut croire dans votre génie propre.
Vous le savez, Michèle Alliot-Marie et Christian Estrosi s'imposent comme vos premiers interlocuteurs. Le ministre de l'0utre-Mer, en particulier, garantit la prise en compte des spécificités de vos territoires dans les politiques publiques. Il y passe d'ailleurs l'essentiel de son temps. Je veux rendre hommage à sa disponibilité et son volontarisme. En votre présence, je rends à la disponibilité et au volontarisme de Christian un hommage appuyé.
Mais lui et Michèle Alliot-Marie ne sont pas les seuls à manifester sur le terrain l'engagement du Gouvernement. Comme eux, Michel Barnier, Luc Chatel, Jean-Louis Borloo, Roselyne Bachelot, Fadela Amara, Martin Hirsch se sont rendus ou se rendront très prochainement à votre rencontre.
J'ai moi-même tenu à être présent aux Antilles, après le passage du cyclone Dean, lorsque les circonstances appelaient un témoignage de fraternité nationale et j'ai d'ailleurs pris l'engagement d'y retourner dans un délai très court pour vérifier que tous les engagements qui ont été pris ont été réalisés.
Sachez-le, le Gouvernement est au travail avec vous et pour vous. Il est au travail en métropole, où un délégué interministériel, Patrick Karam, est chargé pour la première fois de veiller aux problématiques spécifiques des Français originaire d'outre-mer.
Il est au travail au Parlement, où la loi de finances et la loi organique sur la Polynésie française sont examinées avec la participation active des parlementaires d'outre-mer.
Enfin, il est au travail à Bruxelles, et ça n'est pas le dernier endroit ou il faut que nous soyons présents, où des dossiers délicats doivent être plaidés. Michèle Alliot-Marie et Michel Barnier les défendent avec beaucoup d'énergie, en particulier les accords de partenariats économiques.
La feuille de route du Gouvernement pour l'outre-mer s'articule en quatre volets : le développement économique et social, l'environnement, la sécurité, le respect des engagements propres à chaque collectivité.
Pour assurer le développement économique, notre objectif est clair : faire reculer la logique d'assistanat, qui est désastreuse partout où elle s'installe, et assurer au contraire une égalité des chances réelle. Il faut rendre aux économies d'outre-mer une capacité de développement plus autonome.
Ce pari sera au coeur de la loi-programme pour l'outre-mer présentée au Parlement début 2008. Les consultations conduites à ce sujet par Christian Estrosi renvoient à une réalité double. Elles rappellent, à côté de ses nombreux atouts, la fragilité de l'outre-mer. C'est pourquoi je veux préciser ici que le logement social, l'emploi, les politiques d'insertion actives et l'éducation resteront quoi qu'il arrive des priorités.
L'environnement, c'est le deuxième axe de notre feuille de route. L'objectif fixé par le président de la République est de mettre en valeur l'exceptionnel potentiel de la "France des trois océans", notamment dans les domaines de la biodiversité, des énergies renouvelables et de la protection des espaces.
Dans les prochains mois, il faudra décliner de manière très opérationnelle le plan intitulé "vers un outre-mer responsable" établi lors du Grenelle de l'environnement. Sa composante "Réunion 2030", qui est un véritable projet de société, mobilise déjà tous les partenaires locaux sur l'île. En la matière, je vous invite à toutes les audaces : soyez des éclaireurs, soyez des bâtisseurs du développement durable ! Vous prendrez ainsi une longueur d'avance sur le futur.
Le troisième volet, c'est la lutte contre la délinquance, les trafics, l'immigration clandestine. Sur tout le territoire, la sécurité fait partie de nos priorités.
En outre-mer, c'est la cohésion sociale, et même le développement économique, qui peuvent être directement menacés par des situations mal contrôlées. Je pense à la Guyane, où les mouvements de clandestins et l'orpaillage sauvage doivent être combattus sans relâche.
Enfin, le Gouvernement entend tenir, pour chaque territoire, les engagements spécifiques du chef de l'État. Dans cette perspective, les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy sont en place. Il faut encore veiller à ce que des ressources adéquates permettent l'exercice de leurs compétences. De même pour Wallis-et-Futuna, et pour Saint-Pierre-et-Miquelon, dont les difficultés sont connues.
Concernant la Nouvelle Calédonie, je réunirai le 20 décembre prochain, le comité des signataires de l'accord de Nouméa. J'ai déjà exposé l'esprit de cette réunion devant la représentation nationale : je suis convaincu que seule une démarche fondée sur le respect des engagements profitera à la Nouvelle Calédonie - démarche qui n'exclut pas l'expression de sensibilités ou d'aspirations différentes.
Une année décisive s'ouvre également pour Mayotte, avec la signature d'un contrat de projet et, si le conseil général le demande, la consultation des Mahorais sur la départementalisation. En tout état de cause, si celle-ci était décidée, elle devrait être progressive et adaptée.
Enfin, l'adaptation en cours du statut de la Polynésie vise à doter cette collectivité de la stabilité politique qui lui fait actuellement défaut. Nous allons avancer sur le contrat de projet pour la Polynésie, pour qu'il puisse être signé prochainement, et mis en oeuvre dès 2008.
Mesdames et messieurs les maires,
L'approche des élections municipales placera bientôt chacun d'entre vous devant un choix important : se représenter, et consacrer à nouveau, sans compter, son temps et ses efforts à ses concitoyens ; ou bien se retirer, sans renoncer pour autant à servir son pays par d'autres voies.
Vous avez donné de grandes preuves de votre dévouement, et, je le sais, vous en donnerez encore. Au nom du Gouvernement, je vous remercie solennellement et chaleureusement de porter les valeurs de la République.Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 26 novembre 2007