Texte intégral
Mesdames, messieurs,
Chers amis,
Je veux vous remercier d'avoir répondu à notre invitation. L'enfermement est devenu dans notre pays une question taboue qu'il est temps d'aborder en toute franchise devant les Français.
Le constat, nous le connaissons tous. Notre système carcéral n'est pas digne des principes républicains que nous prétendons défendre. Qu'il s'agisse des prisons, des centres de rétention ou même des cellules de garde à vue, les conditions de détention sont parmi les plus mauvaises d'Europe. Elles ont valu à notre pays la condamnation des commissions des droits de l'homme de l'homme de l'ONU et de l'Union européenne. Les rapports d'enquête parlementaire de l'Assemblée et du Sénat ont plusieurs fois mis en lumière la surpopulation carcérale, la vétusté des locaux, les difficultés de réinsertion des détenus. La garde des Sceaux du gouvernement Jospin, Marylise Lebranchu, avait traduit beaucoup de leurs recommandations dans un projet de loi pénitentiaire en 2001. Mais elle n'avait pu franchir l'embouteillage de la fin de la législature où chacun, et je fais amende honorable pour mon propre groupe, considérait que d'autres urgences étaient prioritaires.
La situation s'est encore dégradée ces cinq dernières années. L'inflation législative en matière pénale, le durcissement des peines et l'extension continue des motifs d'emprisonnement n'ont été accompagnées d'aucune réflexion sur le sens de la peine et son exécution. Les peines planchers symbolisent cette fuite en avant en faisant de la prison l'exutoire de toute la politique pénale. Le quantum des sanctions fait de moins en moins cas de la personnalité du délinquant, de la gravité du délit, de l'évaluation du juge. L'un des principes de base de notre système judiciaire, l'individualisation des peines est atteint.
Le dénoncer n'est pas faire preuve d'une quelconque laxisme. Dans notre programme « mieux prévenir, mieux punir », nous avons posé les bases d'une politique globale qui concilie la fermeté vis-à-vis de la délinquance et les principes de notre droit. L'enfermement demeure évidemment un recours souvent nécessaire pour protéger la collectivité, notamment vis-à-vis des multirécidivistes. Mais toutes les études en France, comme à l'étranger, démentent cette conception du pouvoir selon laquelle le durcissement continu des motifs de détention fait baisser la délinquance. Si cette assertion était vraie comment comprendre que les violences aux personnes, celles qui encourent l'incarcération, soient en progression continue. Comment comprendre que les Etats-Unis qui recourent le plus à l'emprisonnement soit aussi le pays développé qui connaît le plus fort taux de criminalité.
C'est pour sortir de ces simplismes faussement sécurisants, que nous avons déposé en 2003, sous l'égide de Marylise Lebranchu, une proposition de loi sur le sens de la peine et la rénovation du service publique pénitentiaire. Proposition de loi que nous avons actualisé depuis et dont nous souhaitons débattre avec vous aujourd'hui afin de l'enrichir de vos remarques et de vos suggestions.
Je laisse le loin à Marylise de vous en présenter la philosophie et le contenu pour m'arrêter sur le sens politique de notre démarche. Je l'ai dit à de nombreuses reprises lors des débats parlementaires touchant à l'ordre public : je crois le temps venu de sortir les questions de sécurité et de politique pénale des exploitations politiques et électorales. Je plaide pour que les forces démocratiques conclu un pacte de « non agressions », un pacte de sécurité durable. La délinquance doit savoir qu'elle aura toujours en face d'elle la même fermeté mais aussi les mêmes principes de droit qu'elle que soit la couleur de la majorité au pouvoir. L'Espagne a su longtemps forgé un tel consensus sous l'égide de Felipe Gonzalès et José Luis Zapatero.
Parce qu'il a fait de l'émotion populaire le fondement de son action, Nicolas Sarkozy, au ministère de l'Intérieur comme à l'Elysée, a toujours refusé la main que nous tendions. Il a multiplié les surenchères législatives, mis sans dessus dessous notre droit pénal, opposé les acteurs de la chaîne pénale magistrats, policiers, éducateurs, élus. Cette politique de la mentonnière n'a pas produit de résultats. La délinquance et la récidive continuent de prospérer.
Il nous faut aujourd'hui repenser collectivement nos approches. Il nous faut réunir toute la chaîne pénale autour d'une conception et d'instruments partagés. C'est tout le sens de notre débat.
Source http://www.deputessocialistes.fr, le 30 novembre 2007
Chers amis,
Je veux vous remercier d'avoir répondu à notre invitation. L'enfermement est devenu dans notre pays une question taboue qu'il est temps d'aborder en toute franchise devant les Français.
Le constat, nous le connaissons tous. Notre système carcéral n'est pas digne des principes républicains que nous prétendons défendre. Qu'il s'agisse des prisons, des centres de rétention ou même des cellules de garde à vue, les conditions de détention sont parmi les plus mauvaises d'Europe. Elles ont valu à notre pays la condamnation des commissions des droits de l'homme de l'homme de l'ONU et de l'Union européenne. Les rapports d'enquête parlementaire de l'Assemblée et du Sénat ont plusieurs fois mis en lumière la surpopulation carcérale, la vétusté des locaux, les difficultés de réinsertion des détenus. La garde des Sceaux du gouvernement Jospin, Marylise Lebranchu, avait traduit beaucoup de leurs recommandations dans un projet de loi pénitentiaire en 2001. Mais elle n'avait pu franchir l'embouteillage de la fin de la législature où chacun, et je fais amende honorable pour mon propre groupe, considérait que d'autres urgences étaient prioritaires.
La situation s'est encore dégradée ces cinq dernières années. L'inflation législative en matière pénale, le durcissement des peines et l'extension continue des motifs d'emprisonnement n'ont été accompagnées d'aucune réflexion sur le sens de la peine et son exécution. Les peines planchers symbolisent cette fuite en avant en faisant de la prison l'exutoire de toute la politique pénale. Le quantum des sanctions fait de moins en moins cas de la personnalité du délinquant, de la gravité du délit, de l'évaluation du juge. L'un des principes de base de notre système judiciaire, l'individualisation des peines est atteint.
Le dénoncer n'est pas faire preuve d'une quelconque laxisme. Dans notre programme « mieux prévenir, mieux punir », nous avons posé les bases d'une politique globale qui concilie la fermeté vis-à-vis de la délinquance et les principes de notre droit. L'enfermement demeure évidemment un recours souvent nécessaire pour protéger la collectivité, notamment vis-à-vis des multirécidivistes. Mais toutes les études en France, comme à l'étranger, démentent cette conception du pouvoir selon laquelle le durcissement continu des motifs de détention fait baisser la délinquance. Si cette assertion était vraie comment comprendre que les violences aux personnes, celles qui encourent l'incarcération, soient en progression continue. Comment comprendre que les Etats-Unis qui recourent le plus à l'emprisonnement soit aussi le pays développé qui connaît le plus fort taux de criminalité.
C'est pour sortir de ces simplismes faussement sécurisants, que nous avons déposé en 2003, sous l'égide de Marylise Lebranchu, une proposition de loi sur le sens de la peine et la rénovation du service publique pénitentiaire. Proposition de loi que nous avons actualisé depuis et dont nous souhaitons débattre avec vous aujourd'hui afin de l'enrichir de vos remarques et de vos suggestions.
Je laisse le loin à Marylise de vous en présenter la philosophie et le contenu pour m'arrêter sur le sens politique de notre démarche. Je l'ai dit à de nombreuses reprises lors des débats parlementaires touchant à l'ordre public : je crois le temps venu de sortir les questions de sécurité et de politique pénale des exploitations politiques et électorales. Je plaide pour que les forces démocratiques conclu un pacte de « non agressions », un pacte de sécurité durable. La délinquance doit savoir qu'elle aura toujours en face d'elle la même fermeté mais aussi les mêmes principes de droit qu'elle que soit la couleur de la majorité au pouvoir. L'Espagne a su longtemps forgé un tel consensus sous l'égide de Felipe Gonzalès et José Luis Zapatero.
Parce qu'il a fait de l'émotion populaire le fondement de son action, Nicolas Sarkozy, au ministère de l'Intérieur comme à l'Elysée, a toujours refusé la main que nous tendions. Il a multiplié les surenchères législatives, mis sans dessus dessous notre droit pénal, opposé les acteurs de la chaîne pénale magistrats, policiers, éducateurs, élus. Cette politique de la mentonnière n'a pas produit de résultats. La délinquance et la récidive continuent de prospérer.
Il nous faut aujourd'hui repenser collectivement nos approches. Il nous faut réunir toute la chaîne pénale autour d'une conception et d'instruments partagés. C'est tout le sens de notre débat.
Source http://www.deputessocialistes.fr, le 30 novembre 2007