Déclaration de Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, sur les objectifs qu'elle entend fixer sous forme d'un pacte aux organismes HLM en matière de construction de logement, de services aux locataires notamment, dans le prochain projet de loi de mobilisation pour le logement, Paris le 12 juin 2008.

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Circonstance : Assemblée générale de la Fédération Entreprises sociales pour l'habitat (ESH), à Paris le 12 juin 2008

Texte intégral

Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les directeurs,
Mesdames et Messieurs,
En un an, nous avons vécu et traversé ensemble bien des étapes :
- d'abord, votre élection, Chère Valérie FOURNIER, à la tête de la fédération,
- notre rendez-vous lyonnais à l'occasion du lancement du Chantier national pour le logement avec pour point d'orgue, le congrès de l'USH,
- les 80 ans de votre mouvement
- notre accord pour la vente HLM
- et enfin, votre mobilisation en faveur de la mise en oeuvre du nouveau droit au logement opposable depuis le 1er janvier 2008.
Cette chronologie succincte illustre, s'il en était besoin, qu'il se passe quelque chose dans le monde du logement et que nous assistons lentement mais sûrement à l'avènement d'une politique adaptée aux enjeux du XXIe siècle, plus respectueuse de la liberté des personnes, plus soucieuse d'offrir à nos concitoyens des opportunités pour s'épanouir dans leur vie professionnelle et personnelle mais aussi plus vigilante au respect des droits des plus fragiles.
Nous autres Français sommes doués pour la déploration et pour relever à l'envi ce qui cloche dans notre beau pays. Je souhaite aujourd'hui vous inviter à nous réjouir du chemin parcouru et des exploits qu'ensemble nous avons réalisé.
435 000 logements ont été commencés en France l'an passé et 108 000 logements sociaux publics financés dont 14 000 PLAI : un record absolu. Ce saut qualitatif, nul ne l'aurait cru possible il y a encore quelques années. Voilà de quoi nous inviter à l'optimisme. Quand notre pays se mobilise, il sait faire des merveilles.
Alors, pour demain me direz-vous ?
- L'effort de construction doit être maintenu, cela va sans dire.
- Nous devons poursuivre les évolutions structurelles de la politique du logement : mon projet de loi de mobilisation pour le logement est d'ailleurs fin prêt pour être envoyé au Conseil d'Etat.
- Nous devons parallèlement poursuivre la réflexion pour un pacte entre l'Etat et le monde HLM
- Et, bien sûr, tous ces chantiers doivent s'inscrire dans le cadre bien particulier non seulement de la Présidence française de l'Union européenne mais aussi, je ne l'oublie pas, des Assises du numérique car le mouvement HLM ne doit pas manquer cette révolution.
Mais revenons à l'effort de construction pour les organismes HLM
Il doit être maintenu pour l'année 2008.
Nous sommes au mois de juin, donc à mi-parcours et, comme de coutume à pareille époque, seuls quelques milliers de logements ont été financés.
Je vous demande donc de redoubler d'effort, d'apporter votre pierre, pour tendre vers notre objectif de financement de 100 000 logements PLUS et PLAI dont 20 000 PLAI.
Il faut définir des priorités pour la fin de l'année 2008, elles sont les suivantes :
- financer les opérations, en utilisant tous les outils à votre disposition, en premier lieu la Vente en Etat Futur d'Achèvement,
- faire des PLAI à hauteur de 20 % de vos programmations.
Ces efforts doivent naturellement porter prioritairement sur les zones tendues du marché privé et du parc HLM, à savoir, la région parisienne, Rhône-Alpes ainsi que Provence-Alpes-Côte-d'Azur et Midi-Pyrénées mais aussi l'Aquitaine.
Dans ces secteurs, les difficultés de logement pèseront sur la dynamique économique. Si nous ne sommes pas capables de proposer une offre diversifiée de logements aux travailleurs hexagonaux, notre pays ne pourra pas faire face aux exigences de l'économie de service. Tel est l'enjeu ! C'est pourquoi, je compte beaucoup sur la dynamique des ESH pour répondre de manière rapide et opérationnelle à ce défi.
L'offre doit porter sur la construction nouvelle : c'est l'attente première de nos concitoyens, c'est votre exigence sociale.
Par ailleurs, vous le savez : je fais appliquer avec la plus grande rigueur l'article 55 de la loi SRU car je considère que l'effort républicain de construction et de prise en charge des plus fragiles doit être partagé par tous. Les préfets vont prendre prochainement les constats de carence. Ils pourront ensuite décider de faire réaliser directement les programmes par des organismes. Dès cette année, de telles décisions pourront être prises.
La circulaire de programmation, qui intégrera les éléments de la mission PINTE pour le logement des plus défavorisés, va paraître dans les tous prochains jours. Tout d'abord, et en cohérence avec ce que je viens de dire, elle va permettre aux services de l'Etat d'augmenter les taux de subventions par rapport aux années précédentes dans les zones A et B1 afin d'aider la production de logements là où les besoins sont les plus criants. A côté de la production de logements ordinaires, je compte beaucoup sur le développement d'une offre plus spécifique et innovante comme les résidences hôtelières à vocation sociale, les RHVS, certains d'entre vous sont à la pointe en la matière. Le financement de CHRS va être désormais possible : je pense que vous pourrez y trouver un moyen de valoriser vos compétences.
Pour le plus long terme, quelques mots sur le projet de loi
Le texte que je vais présenter avant la fin de l'été au Conseil des Ministres traduit et accompagne les ruptures en cours pour le monde du logement, c'est une loi de mobilisation, une loi de mobilisation de l'ensemble des acteurs de la chaîne du logement afin de créer et développer les synergies dont nous avons besoin entre acteurs publics et acteurs privés.
Notre politique publique a trop longtemps été compartimentée entres secteurs. Nous devons aujourd'hui faire tomber les frontières artificielles et ouvrir les champs d'intervention.
Le projet de loi aborde les questions de gouvernance du logement social, de financement, de mobilisation du foncier, de mobilité dans le parc ainsi que de développement de l'offre d'hébergement. Il sera envoyé au Conseil d'Etat dans les tous prochains jours.
Sans reprendre tous les éléments du projet de loi, il est important de vous en présenter quelques points.
Les éléments relatifs à la gouvernance vont introduire deux éléments importants :
- la convention d'utilité sociale
- la péréquation.
La convention d'utilité sociale va constituer le socle de l'engagement des organismes sociaux pour une durée de 6 ans. Elle reprend la convention globale de patrimoine qui est rendue obligatoire.
Associée à la convention d'utilité sociale, j'ai décidé d'introduire la question de la péréquation entre les organismes. Il est en effet anormal que certains organismes ne construisent pas, ou insuffisamment, quand la crise du logement est toujours aussi aiguë dans notre pays. L'objectif politique est clair : que ceux des organismes dont le potentiel financier est le plus important versent une contribution financière pour ceux qui ont les plus forts besoins de disponibilité financière. Nous ne devons pas attendre pour mettre en place cette mesure simple et compréhensible au risque sinon de décrédibiliser - aux yeux du grand public - tous les efforts de modernisation engagés. Cependant, j'ai bien entendu les remarques sur le fait que certains organismes ont pu accélérer très significativement leurs efforts depuis quelques mois : le projet de loi le prendra en compte.
Les évolutions de la gouvernance du logement vont aussi concerner le 1 % Logement afin d'introduire une plus grande transparence et un meilleur contrôle dans l'utilisation des fonds.. Les négociations vont être engagées. Je ne peux, vous le comprendrez, vous en dire plus pour l'instant.
Pour favoriser l'offre nouvelle, il faut faciliter les interventions du secteur privé. La possibilité d'acheter en VEFA a été un élément de dynamisation important.
Enfin, des dispositions seront prises pour faciliter la mobilité des locataires dans le parc HLM. Il s'agit là de traduire dans la loi les éléments de l'accord liés à la vente HLM.
Je souhaite aussi aborder l'idée d'un accord, d'un pacte avec le monde HLM
Certaines orientations du monde HLM relèvent de la loi : je viens d'en évoquer quelques-unes unes.
Beaucoup tiennent aux bonnes pratiques professionnelles, aux engagements autour de valeurs communes.
Le mouvement des ESH, et plus largement le mouvement HLM, a toujours mis l'Homme au coeur de son approche. Vous connaissez mon engagement politique qui rejoint cet enjeu crucial en particulier dans notre société du XXIe siècle - notre société post-moderne - où les gens recherchent du sens.
Avec le président de l'Union, M. Michel DELEBARRE, nous avons « acté » le principe d'élaborer un accord, un pacte pour définir les engagements communs pour le monde HLM. C'est un accord cadre qui va s'inscrire dans les engagements du Président de la République définis lors de son discours de Vandoeuvre-les-Nancy, tant en ce qui concerne la quantité de logements à produire que la qualité du service à rendre.
Nos services travaillent sur ce document. Je souhaite bien sûr que la voix des ESH se fasse pleinement entendre.
Les thèmes saillants qui devront ressortir sont :
- la production de logements ciblée territorialement, en prenant en compte de manière beaucoup plus importante la spécificité des zones tendues,
- l'adaptation de l'offre de logements par rapport à la demande avec une démarche volontariste pour développer des dispositifs transparents pour l'attribution des logements sociaux dans le contexte de la mise en oeuvre du Droit au logement opposable
- le développement de l'accession populaire à la propriété,
- les exigences sur la qualité de la construction : adaptation des logements pour les personnes âgées, qualité de la construction pour les économies d'énergie, accompagnement du développement de la fibre optique dans les logements ainsi que l'accompagnement des personnes.
Je n'oublie bien sûr pas les nécessaires coordinations entre les organismes au niveau local pour trouver les meilleures synergies. Pourquoi d'ailleurs ne pas aller jusqu'à des regroupements là où c'est possible ?
Ce pacte aura une portée nationale et ne se contentera pas d'être déclamatoire : son application sera scrupuleusement suivie via des indicateurs.
Je tiens aussi à ce qu'il soit décliné au niveau local pour chaque organisme. C'est-à-dire que ce pacte, dans la pratique, va devenir une composante des Chartes d'utilité sociale.
En ce qui concerne la Présidence française de l'Union européenne
Nous travaillons dans le contexte européen, ne l'oublions pas.
La récente discussion sur l'article 39 de la LME (loi de modernisation de l'économie) portant sur le Livret A a bien fait ressortir les liens entre notre politique du logement et l'Europe.
Cette dernière nous impose des réformes, notamment en ce qui concerne la concurrence et je veux y voir un moyen de moderniser nos pratiques. Etant entendu que nous devons veiller à l'équilibre de notre politique sociale qui ne saurait se rétrécir à la seule prise en charge des exclus. Nous avons obtenu en particulier la baisse des taux pour les prêts pour logement social, effectif dès le 1er août prochain. C'est 20 points de base en moins pour les PLUS. Pour les PLAI, ce serait 50 points de base en moins. L'effort de l'Etat, vous le voyez, est significatif.
Je veux voir dans dynamique de l'Union Européenne l'occasion de faire connaître et de partager nos meilleures pratiques. Nous avons toutes les raisons par exemple, de nous enorgueillir de l'innovation du Droit au logement opposable.
Ensemble, nous devons montrer toutes les implications du DALO sur nos pratiques quotidiennes, de la construction de logement sur le territoire jusqu'à l'attribution puis au suivi social des personnes, par les bailleurs seuls ou en lien avec les associations.
Mais l'innovation, la modernité, cela passe aussi par l'adaptation des logements à notre époque. Les ESH ont toujours été à la pointe du progrès. Je ne doute donc pas que vous saurez une fois encore montrer l'exemple pour intégrer sans retard le très haut-débit dans les logements. Equiper les logements en fibre optique, c'est garantir à long terme des moyens d'accès aux réseaux. Et cet accès va permettre de développer des services et favoriser des usages.
Je vous invite à imaginer le logement numérique de demain. Madame la Présidente : est-ce que ce ne pourrait pas être un sujet de réflexion ou de réalisation de projet au sein de votre fédération ? Sachez que le 2 juillet, dans le cadre des Assises du Numérique, j'organiserai un atelier de travail. D'ici là, un « wiki » sera ouvert pour permettre à chacun de contribuer à la réflexion.
En conclusion, je tiens à vous affirmer que la volonté de faire bouger la France et de la moderniser est plus que jamais au coeur de la politique du gouvernement et du Président de la République. Le mouvement doit s'appuyer sur les parties les plus dynamiques de notre pays. Le monde HLM a la capacité d'en faire partie. Certaines ESH ont déjà montré qu'elle faisait partie d'un peloton de tête. Je compte sur cette force des uns et votre capacité de mobilisation collective.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.logement.gouv.fr, le 17 juin 2008