Déclaration de M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, sur la politique de lutte contre l'immigration clandestine, notamment l'emploi des étrangers sans titre de séjour, Paris le 9 février 2010.

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Circonstance : Signature de la charte de bonnes pratiques entre la SNCF et le Syndicat national des entreprises de sécurité, à Paris le 9 février 2010

Texte intégral

Monsieur le Président Directeur Général de la SNCF,
Monsieur le Président du Syndicat National des Entreprises de Sécurité,
Mesdames et messieurs,
L'immigration illégale constitue une atteinte à notre pacte républicain, mais aussi à notre pacte économique et social.
Alors que le taux de chômage des ressortissants étrangers non européens approche 30%, accueillir sans condition sur notre sol tous les ressortissants étrangers qui le souhaitent, et les régulariser, n'aurait que l'apparence de la générosité. Une telle politique se retournerait contre les étrangers eux-mêmes.
L'un des objectifs prioritaires de la mission qui m'a été confiée est de lutter contre les réseaux qui attirent en France et y exploitent l'immigration irrégulière.
Ma détermination à mener à bien cette mission est totale. 4.734 trafiquants de migrants ont été interpellés en 2009 par les services de police et de gendarmerie, contre 4.314 en 2008, soit une progression de 10%. Parmi ces trafiquants de migrants interpellés, 1.400 étaient des employeurs, soit une progression de 20%. 145 filières clandestines ont été démantelées en 2009, contre 101 en 2008, soit une progression de 44%. 1.370 opérations conjointes ont été menées contre les employeurs d'étrangers sans titre de séjour, contre 1.220 en 2008, soit une progression de 12%. Ces opérations sont menées conjointement avec les services de police et de gendarmerie, les services de l'inspection du travail, les URSSAF, les services fiscaux, les services vétérinaires, les services de la répression des fraudes. Excepté les secteurs du déménagement et du bâtiment, tous les secteurs d'activité ont fait l'objet d'un contrôle accru, tout particulièrement celui de la sécurité et du gardiennage (+33%).
En cas d'emploi d'étranger sans titre de séjour, j'ai demandé aux Préfets d'appliquer l'ensemble des sanctions administratives prévues par la loi. Les dirigeants de ces entreprises qui sont de nationalité étrangère se voient désormais retirer leur titre de séjour et notifier une obligation de quitter le territoire français, et l'ensemble d'entre eux se voient imposer la contribution financière au profit de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII).
J'ai par ailleurs pris dès février 2009 une circulaire permettant d'accorder un titre de séjour aux étrangers en situation irrégulière qui coopèrent avec les autorités administratives et judiciaires pour démanteler les filières clandestines qui les ont amenés en France et exploités de manière inhumaine. Parmi les 37 maîtres chiens qui ont dénoncé leurs conditions de travail sur les quais des gares parisiennes en 2009, 5 ont bénéficié de cette circulaire, la plupart des autres ayant bénéficié du dispositif de régularisation par le travail dans le cadre de la loi du 20 novembre 2007. Un certain nombre ne pourront cependant pas être régularisés, et n'ont pas vocation à se maintenir sur le territoire national.
Je souhaite par ailleurs renforcer notre arsenal législatif et judiciaire de lutte contre l'emploi des étrangers sans titre de séjour.
Je présenterai devant le Conseil des ministres, avant la fin du premier trimestre, un projet de loi qui interdira de recourir sciemment, directement ou par personne interposée, à un employeur d'étranger sans titre de séjour.
Ce projet de loi obligera les employeurs à tenir un registre des ressortissants étrangers employés, accompagné d'une copie du titre de séjour, qui devront être mis à disposition des autorités compétentes lors des inspections. En cas de constatation de l'emploi d'un étranger sans titre de séjour, il prévoira un ensemble de sanctions administratives et judiciaires renforcées, allant de l'interdiction de toute candidature aux marchés publics locaux, nationaux et européens, de toute subvention publique locale, nationale ou européenne, jusqu'au remboursement des aides publiques locales, nationales et européennes et à la fermeture administrative d'établissement, pour une durée pouvant aller jusqu'à 6 mois. Ces nouvelles sanctions ne seront ni automatiques, ni uniformes. Elles seront proportionnées à l'ampleur des faits constatés.
Le projet de loi responsabilisera les donneurs d'ordre, qui s'abritent quelquefois derrière leurs sous-traitants en feignant d'ignorer l'exploitation d'une main d'oeuvre en situation irrégulière. Le projet de loi prévoira que tout maître d'ouvrage informé par écrit par un agent de contrôle, par un syndicat ou une association professionnelle ou une institution représentative du personnel, de l'intervention d'un sous-traitant en situation irrégulière au regard de l'emploi d'étranger sans titre de séjour, doit enjoindre aussitôt à son cocontractant de faire cesser sans délai cette situation. A défaut, il sera tenu ainsi que son cocontractant solidairement avec le sous-traitant employant l'étranger sans titre au paiement des impôts, taxes, cotisations, ainsi que des rémunérations et charges, contributions et frais. La responsabilité solidaire des maîtres d'ouvrage sera l'un des points importants du texte.
Le guide de bonne pratique signé aujourd'hui par la SNCF et le Syndicat National des Entreprises de Sécurité (SNES) s'inscrit parfaitement dans le cadre de cette politique de lutte contre l'emploi des étrangers sans titre de séjour.
Ce guide précise l'obligation de vigilance qui incombe à tout donneur d'ordre vis-à-vis des personnels employés par ses cocontractants. Ce guide prévoit en particulier que la SNCF se verra remettre dès le début de la prestation, puis tous les six mois jusqu'à la fin de l'exécution du contrat de prestation, la liste nominative de l'ensemble des salariés étrangers, accompagnée, pour chaque salarié concerné, de sa date d'embauche, de sa catégorie professionnelle, ainsi que de la copie du titre de séjour valant autorisation de travail.
La SNCF et le SNES s'engagent par ailleurs à organiser des réunions de suivi de l'emploi de salariés étrangers, qui devraient permettre de mieux lutter contre l'emploi d'étrangers sans titre de séjour.
La SNCF nommera un interlocuteur chargé de l'application du suivi de ces engagements et de la lutte contre l'emploi d'étrangers sans titre de séjour parmi ses cocontractants. Cette obligation de moyen me semble devoir être soulignée.
Ce guide de bonnes pratiques constitue une avancée importante pour la prise de conscience, par les acteurs de l'économie eux-mêmes, de la nécessité de mieux lutter contre l'emploi d'étrangers sans titre de séjour. Il ne se substitue pas aux actions de police administrative et judiciaire, ni au renforcement de notre législation. Mais il marque un effort d'autorégulation, auquel je souhaite apporter mon soutien. Je compte proposer aux autres grands donneurs d'ordre, et en premier lieu aux donneurs d'ordre de la sphère publique, de mettre en place à leur tour de telles mesures.
La lutte contre l'emploi d'étrangers sans titre de séjour est l'un des éléments fondamentaux de la défense de notre pacte social et républicain. Elle doit être l'affaire de tous.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.immigration.gouv.fr, le 11 février 2010