Déclaration de M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, sur les besoins de sécurité et d'approfondissement de la démocratie locale et sur la nécessité d'une plus importante déconcentration de l'Etat, Mantes-la-Jolie le 1er juin 2001.

Prononcé le 1er juin 2001

Intervenant(s) : 

Circonstance : Inauguration de la sous-préfecture de Mantes-la-Jolie (Yvelines), le 1er juin 2001

Texte intégral


Monsieur le Préfet,
Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Maire de Mantes-la-Jolie,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Répondant à l'invitation de Monsieur le préfet des Yvelines, je suis particulièrement heureux d'être ce matin parmi vous pour inaugurer les nouveaux locaux de la sous-préfecture de Mantes-la-Jolie.
Il s'agit de l'une des opérations immobilières les plus significatives, et des plus réussies je dois le dire, que le ministère de l'intérieur réalise actuellement, et en particulier en Ile-de-France, pour tenir compte de l'évolution des besoins qui s'y manifestent.
Après Sarcelles où j'étais le 2 février dernier pour poser la 1° pierre de la future sous-préfecture, et avant Torcy, Le Raincy puis Saint Denis, l'aboutissement de l'opération de restructuration de Mantes s'inscrit dans un ensemble de grands projets destinés à mieux accueillir le public dans un contexte illustrant la volonté de la présence de proximité de l'Etat pour être le plus efficace possible, mais visant aussi à donner aux agents qui y sont affectés les conditions de travail modernes et adaptées aux enjeux.
J'éprouve donc une vive satisfaction de me retrouver dans la maison de l'Etat, avec les agents de tous grades et de toutes fonctions du cadre national des préfectures qui y travaillent et dont je connais la passion qui les anime pour leur métier.
L'événement qui nous réunit ce matin me permet aussi de saluer un grand nombre de ceux, élus, responsables socio-économiques et associatifs, acteurs de la vie locale, qui sont les interlocuteurs et les partenaires quotidiens de cette sous-préfecture.
Je ne veux bien sur pas oublier les usagers qui sont les premiers concernés au travers des démarches qu'ils viennent y effectuer, que ce soit pour la délivrance d'un titre ou l'accomplissement d'une formalité administrative, par le bon fonctionnement et la qualité de l'accueil qu'ils trouvent ici.
Les habitants de cet arrondissement, dont la population a fortement augmenté, et qui ressentent je le sais une inquiétude réelle, face à la montée de différentes formes de violence, sont ceux vers lesquels je veux d'abord me tourner.
J'en viendrai tout naturellement ensuite au rôle et aux missions que les préfectures et les sous-préfectures qui la première ligne de l'Etat de proximité peuvent et doivent jouer dans ce contexte.
I - Nos concitoyens éprouvent, ici dans le Mantois comme sans doute dans d'autres secteurs des Yvelines, un fort besoin de sécurité.
Je veux vous exprimer ma détermination à mettre en uvre les moyens d'assurer aux habitants la sécurité à laquelle ils ont droit.
Parce que l'insécurité est une injustice sociale et fragilise le pacte républicain, la lutte contre ce fléau doit s'affirmer comme une priorité essentielle pour tous les responsables publics et, au-delà, mobiliser l'ensemble de la société dans la lutte contre la violence sous toutes ses formes.
Voilà pourquoi le Gouvernement a voulu à travers le projet de loi relatif à la sécurité quotidienne en cours de discussion au Parlement, adopter une démarche pragmatique, au plus près des préoccupations de nos concitoyens, tournés vers l'opérationnel et le concret.
Ce projet repose sur la conviction que la sécurité est bien l'affaire de toute la société.
La sécurité est d'abord un devoir essentiel de l'Etat, parce que l'Etat est le garant de la cohésion nationale et qu'il ne saurait concéder ce rôle à d'autres.
Pour autant sa mise en uvre ne saurait relever seulement de l'Etat : c'est pourquoi je veux développer la pratique désormais mieux connue de "co-production de sécurité".
Car la sécurité ne peut être de la seule responsabilité de la police ou de la gendarmerie.
Elle doit mobiliser l'ensemble des acteurs concernés par la lutte contre la délinquance : police, gendarmerie, justice bien sûr, mais aussi l'éducation nationale, les acteurs sociaux, et les collectivités locales dont l'apport est indispensable.
J'ai rappelé que les maires doivent être mieux associés à la mise en uvre de toutes les politiques touchant à la sécurité de proximité et de lutte contre la délinquance.
Ce partenariat le plus large possible de tous les acteurs publics et privés prend la forme des contrats locaux de sécurité qui sont conclus entre l'Etat et les collectivités locales.
Vous savez que 550 contrats ont déjà été signés qui ont permis des progrès considérables en termes de qualité du service rendu à la population et d'efficacité.
Je sais qu'ici aussi la demande de sécurité au quotidien est très forte. Je sais aussi, et j'en félicite les acteurs, que le contrat local de sécurité de Mantes permet une concertation régulière et efficace et que la mise en uvre de la police de proximité y porte d'ores et déjà ses premiers fruits.
Vous y êtes vigilant, Monsieur le préfet, comme en témoigne le plan de sécurité que vous venez d'élaborer. Je le serai aussi, en particulier en termes d'effectifs, et je rappelle à cette occasion les efforts déjà significatifs accomplis lors de la mise en place de la police de proximité.
II - A ce besoin de sécurité qu'éprouvent nos concitoyens, vient s'ajouter un besoin de participer plus directement qu'aujourd'hui aux décisions qui les concernent. Il faut redonner confiance aux citoyens dans l'action publique et développer la participation des citoyens à la vie publique locale.
C'est tout le sens du projet de loi sur la démocratie de proximité que je vais dans les prochains jours présenter à l'Assemblée nationale. Il a pour objectif premier, dans le souci d'une décentralisation plus légitime, plus efficace et plus solidaire, en un mot plus citoyenne, le nécessaire approfondissement de la démocratie locale. C'est pourquoi ce projet de loi vise ainsi :
- à favoriser l'expression de la citoyenneté au niveau local, notamment par la création des conseils de quartier dans les communes de plus de 20.000 habitants, qui seront naturellement complémentaires et non concurrents du conseil municipal,
- à renforcer les droits des minorités dans les assemblées élues afin de contribuer à l'expression du pluralisme des opinions et à l'information générale des habitants,
- à démocratiser l'exercice des mandats locaux afin d'élargir l'accès aux fonctions électives aux catégories de la population qui y sont aujourd'hui le moins représentées et que la composition des assemblées locales soit le meilleur reflet de la diversité de la société française.
III - Dans ce contexte où l'Etat s'efforce de répondre aux besoin de renforcement de la sécurité et d'approfondissement de la démocratie locale, se pose également le nécessité d'une plus grande proximité de l'Etat, c'est à dire d'une plus grande déconcentration de son action et de ses moyens.
De tous bords s'exprime en effet une demande pour un Etat déconcentré qui soit ainsi mieux organisé et donc plus efficace.
Cela signifie naturellement que les décisions soient prises au plus près du terrain et des citoyens, mais aussi plus d'interministérialité autour du préfet, représentant de tous les ministres, pour que l'Etat fonctionne mieux et que les politiques mises en uvre soient plus compréhensibles et plus efficaces.
Au moment où le besoin de proximité que j'ai rappelé tout à l'heure se fait toujours plus fort, au moment où nos concitoyens, qui par ailleurs critiquent volontiers l'Etat mais en attendent toujours plus, en particulier dans les périodes de crise que nous connaissons régulièrement, le renforcement du service public de proximité est une véritable priorité.
C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai annoncé lors des Assises nationales des préfectures qu'aucune sous-préfecture ne sera supprimée. Bien sûr dans le même temps, les préfets sont invités à rechercher l'organisation des services préfectoraux et de l'ensemble des services déconcentrés de l'Etat qui soit la mieux adaptée aux situations locales. Je pense à cet égard que c'est l'intérêt de l'ensemble des ministères de faire en sorte que cette collégialité de l'Etat, y compris dans sa propre organisation et vis-à-vis de tous ses agents, fonctionne le mieux possible, et qu'il faut éviter la dispersion des initiatives et des moyens qui brouillerait forcément l'image de l'Etat.
Je veux citer à cet égard les projets territoriaux de l'Etat, qui sont mis en uvre à partir de cette année et sont le fruit d'un travail collégial des services de l'Etat sous l'autorité du préfet, et qui illustrent bien cette capacité nouvelle de l'Etat territorial à mette en place un cadre d'action partagé des politiques publiques en fonction des enjeux locaux.
Permettez-moi de rendre à cette occasion hommage à la qualité du projet territorial de l'Etat élaboré dans les Yvelines dont l'objectif est de rendre plus claire, plus cohérente et plus efficace l'action de l'Etat. Elaboré et validé collégialement, il illustre parfaitement le sens que nous voulons imprimer à ce nouveau mode de fonctionnement de l'Etat territorial.
Dans ce contexte, je veux souligner le rôle particulier des préfectures et des sous-préfectures. Parce qu'elles sont le symbole de l'Etat républicain, et la première ligne de l'Etat de proximité, elles doivent être aussi, par leur capacité à se transformer, à se moderniser et à innover, l'illustration de l'Etat qui se transforme en profondeur. Elles le sont d'ailleurs déjà avec l'expérimentation de globalisation de leurs crédits de fonctionnement et de rémunération, dont je souhaite, après son évaluation et en concertation avec les organisations représentatives, qu'elle puisse se poursuivre et se généraliser dans les meilleures conditions, même s'il n'est pas prévu qu'elle concerne immédiatement la préfecture des Yvelines.
C'est donc le sens de l'action que j'ai entreprise avec la préparation d'un plan d'action pluriannuel pour les préfectures qui tire les conséquences de leur place privilégiée au cur de l'Etat territorial et de l'évolution de plus en plus marquée de leurs missions.
IV - Ce plan pluriannuel que j'ai annoncé lors des assises nationales des préfectures est désormais prêt.
Il vient d'ailleurs d'être présenté aux organisations représentatives du personnel en vue d'une légitime concertation avec elles, car vous savez l'importance que j'attache au renforcement du dialogue social.
Ce plan, qui s'inscrit dans le prolongement d'une longue évolution de l'administration territoriale de l'Etat et de sa modernisation, est ambitieux.
Il s'agit de tracer à l'intention des agents des préfectures et des sous-préfectures des perspectives nouvelles, qu'il s'agisse de la nature et des conditions d'exercice de leurs missions, d'une nouvelle conception du management des femmes et des hommes fondée sur le dialogue social, ou de la rénovation des moyens et des méthodes de gestion.
Ce plan doit conduire les préfectures à concentrer leurs efforts sur les grandes actions prioritaires de l'Etat, en leur donnant plus de moyens et plus de responsabilités pour y parvenir.
Je voudrais simplement évoquer devant vous certaines de ces actions prioritaires, je pense en particulier à la sécurité des personnes et des biens, à l'accueil du public et la délivrance des titres et au respect de la légalité et de l'Etat de droit.
J'ai évoqué tout à l'heure la co-production de sécurité. Elle concerne tout aussi bien les préfectures et l'ensemble des services de l'Etat. Pour les préfectures, participer à la conduite des politiques de sécurité rentre directement dans leur compétence puisqu'elles sont le pivot indispensable à la coordination et à la mise en uvre des moyens, qu'il s'agisse d'actions préventives ou de gestion de crise. Cela recouvre bien sûr les domaines de la sécurité publique, avec la réglementation et la concertation avec des professions comme les convoyeurs de fonds, pensons à ce qui se passera prochainement avec le passage à l'Euro. Mais cela recouvre aussi la sécurité civile, la sécurité sanitaire et alimentaire ou encore la sécurité routière. Ainsi le pilotage de la co-production de sécurité est pour moi un enjeu majeur pour les préfectures aujourd'hui.
J'évoquerai également le service au public et la délivrance de titres. Cette mission nécessite que soient simultanément mis en uvre la simplification des règles et des procédures et l'allégement des tâches des agents.
Cela va d'ailleurs dans le sens souhaité par les usagers sur qui pèsent souvent excessivement des réglementations obsolètes et tatillonnes.
Cela répond aussi aux attentes des agents afin de leur permettre de mieux remplir leurs missions essentielles d'accueil du public : je n'oublie par qu'en moyenne 550 personnes sont reçues chaque jour dans cette sous-préfecture.
C'est pourquoi je suis très satisfait d'avoir vu les améliorations apportées à cet accueil : amélioration de la gestion des files d'accueil, réception personnalisée des usagers, traitement en temps réel des dossiers, notamment grâce à la lecture automatique des documents qui assure gain de temps et d'efficacité.
Je sais que le projet territorial de l'Etat consacre à ces questions une de ses priorités ; cela me semble en effet nécessaire afin que l'ensemble des agents se sentent impliqués dans ce formidable mouvement de rénovation du service rendu au public.
Je veux enfin évoquer l'exercice du contrôle de légalité des actes des collectivités locales. Cette fonction reste une mission centrale des préfectures, et la poursuite de la décentralisation, que le Gouvernement veut mener, la rend encore plus importante.
Elle doit être menée dans le cadre d'une véritable stratégie de contrôle et reposer sur une compétence accrue des services qui en sont chargés, grâce notamment à la mise en place de pôles d'assistance juridique spécialisés.
Le renforcement de la qualité du contrôle de légalité est, j'en suis convaincu, une garantie de la libre administration des collectivités locales face à la complexité croissante du droit, mais aussi une garantie du respect des droits et des libertés des citoyens. C'est donc une exigence démocratique.
Ainsi, pour que les préfectures et leurs agents soient en mesure de rendre un service public toujours de meilleure qualité, ce plan repose à la fois sur une rénovation des méthodes et des moyens des services, sur une meilleure qualification des femmes et des hommes qui y travaillent et une remise à niveau de leur rémunération indemnitaire, et sur l'adaptation des effectifs tenant compte de l'évolution des missions.
Mesdames et messieurs, en venant ce matin inaugurer les nouveaux bâtiments de la sous-préfecture de Mantes-la-Jolie, j'ai voulu d'abord vous dire la confiance que je place dans les agents qui y travaillent pour remplir les missions essentielles que l'Etat doit assurer aux habitants de cet arrondissement dont la démographie et l'acuité des problèmes ont beaucoup évolué.
Pour que ces missions soient assurées dans de bonnes conditions, il faut que l'Etat se donne, et donne à ses agents, les moyens matériels nécessaires. C'est pourquoi cette opération a été décidée et réalisée pour un coût total de 17 millions de francs.
Je veux en féliciter les concepteurs et ceux qui l'ont mené à bien, au sein du ministère de l'intérieur comme au sein de la préfecture des Yvelines. Je salue tout particulièrement le sous-préfet Alain KOEGLER dont le dynamisme n'a pas été étranger à cette réussite, et tout le personnel de la sous-préfecture qui s'est considérablement impliqué dans ce projet, ce qui a été pour beaucoup dans son succès.
Mesdames et messieurs, nous nous interrogeons parfois sur l'image et le rôle de l'Etat. Nous avons ce matin sous les yeux une maison de l'Etat moderne et des fonctionnaires motivés et efficaces pour qui le service public n'est un vain mot.
Je suis pour ma part très heureux comme ministre de l'intérieur, d'avoir illustré, par cet acte symbolique de l'inauguration de ce bâtiment, la politique que je poursuis en ce sens depuis que j'exerce mes fonctions.
Je vous remercie.
(source http://www.interieur.gouv.fr, le 7 juin 2001))