Texte intégral
Monsieur le Président, Cher Claudy LEBRETON,
Monsieur le Président du Conseil général du Puy-de-Dôme, cher Jean-Yves GOUTTEBEL,
Mesdames et Messieurs les Présidents de Conseils généraux,
Chers amis,
Je suis particulièrement heureux de vous retrouver, à Clermont Ferrand, dans ce beau département du Puy-de-Dôme, à l'occasion du 79ème Congrès de l'Assemblée des Départements de France.
C'est un moment important dans la vie de notre République décentralisée. C'est un rendez-vous marquant dans la vie de l'ADF. Et pour moi, ce congrès est un lieu d'échange, de débat et de dialogue privilégié ; c'est un espace que je connais bien et que j'apprécie. Je tiens, à ce titre, à saluer Claudy Lebreton qui, depuis 2004, préside et anime l'ADF avec engagement et détermination.
Mais aujourd'hui, ayant la charge de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, j'ai la chance de faire valoir mon expérience du monde local au sein du gouvernement, au service d'une grande ambition nationale, qu'est l'aménagement du territoire, qui nous concerne tous. Et c'est d'abord à ce titre que je m'adresse à vous.
Cette année, et les échanges de cette première journée l'ont bien montré, le débat est particulièrement nourri !
Il faut bien dire que l'enjeu de la réforme territoriale est particulièrement important.
Tout comme vous, je connais les compétences essentielles et les lourdes responsabilités qu'exercent les départements, dans la mise en oeuvre des politiques publiques.
Tout comme vous, je sais que le département, à côté de la région et de l'Etat, joue un rôle important en matière d'aménagement du territoire.
Mais tout comme vous, je sais aussi que nous pouvons aller encore plus loin dans la recherche de cohérence et dans la convergence des politiques publiques.
Nous savons tous ici que le département est une des pierres angulaires de l'architecture territoriale française
C'est d'abord un acteur essentiel de la cohésion sociale au service des personnes âgées, des personnes handicapées, de la petite enfance mais aussi des personnes en situation d'exclusion. Sa vocation sociale n'est plus à démontrer. Elle est aujourd'hui une référence sur l'ensemble du territoire. Et notre responsabilité, mes chers collègues, est largement reconnue et appréciée. C'est d'ailleurs une des raisons principales pour lesquelles nos concitoyens sont très attachés à leurs départements.
Pour mettre en oeuvre ces politiques, de très nombreux départements se sont organisés de façon à rendre un service au plus près des habitants, en créant sur l'ensemble du territoire départemental, des maisons du département. Ces antennes constituent aujourd'hui un véritable réseau territorial de proximité favorisant la cohésion sociale. Je suis d'ailleurs persuadé que ces maisons du département peuvent accueillir en leur sein, d'autres services publiques, qu'ils relèvent de l'Etat ou de grands opérateurs, comme les CAF, EDF...
Les départements exercent aussi une mission de cohésion sociale au plan du développement économique : c'est particulièrement vrai en ce moment dans le domaine des aides aux entreprises en difficulté, aux côtés de la région et de l'Etat.
Mais nous savons tous également qu'ils sont un acteur à part entière de l'aménagement du territoire, que ce soit en matière de cohésion territoriale ou de grands projets
Au plan de la cohésion territoriale, indissociable d'ailleurs de la cohésion sociale, c'est vrai pour les compétences qu'ils exercent en matière de transports « intercités » ; de routes, ce qui a été considérablement renforcé, ou encore des décisions qu'ils prennent de construire de nouveaux collèges, et cela arrive fréquemment. Ce sont des nouveaux services sur le territoire.
Par ailleurs, les départements sont un acteur majeur pour le lancement et la réalisation des grands projets.
Je pense au numérique, qui est un formidable défi que nous devons relever, et pour lequel l'Etat a aussi un rôle considérable à jouer. Les départements sont souvent les fers de lance des grands projets de couverture du territoire. Le cas du département du Puy de Dôme est patent, l'objectif de 100% d'accès au haut débit sera bientôt atteint en proposant au 0,4% de la population à l'écart du haut débit via les lignes téléphoniques, une aide financière jusqu'à 600 euros couvrant des solutions individuelles par satellite.
Je pense aussi aux grands projets comme les LGV auxquels les départements sont très largement parties prenantes aux côtés des régions, des grandes intercommunalités et de l'Etat. L'Etat joue en la matière un rôle fondamental d'impulsion pour le lancement de réalisations nationales et internationales que d'ailleurs personnes ne conteste, et que vous soutenez, tant ces investissements sont essentiels pour la compétitivité de notre pays et le désenclavement des ces territoires. Mettre Strasbourg à 2h10 de Paris et poursuivre ensuite vers l'Allemagne et l'Est de l'Europe, c'est tout à fait fondamental : j'ai encore mesuré, lors de mon récent déplacement à Strasbourg pour y signer le contrat triennal, à quel point les collectivités territoriales étaient unanimes autour de l'Etat.
Je veux parler également du tourisme : le département a un rôle essentiel dans l'impulsion et la conduite des projets. L'investissement touristique en milieu rural, littoral ou de montagne, est très souvent onéreux au regard du coût du foncier et de la nécessité de construire, à proximité des « équipements de loisirs structurants ». L'implication financière du département est donc une nécessité.
C'est ainsi qu'au coeur de la décentralisation, le département est un point d'équilibre majeur entre les communes, les régions et l'Etat. Il est bien sûr le premier partenaire des communes et bien souvent des intercommunalités, avec lesquelles il participe au développement équilibré des espaces ruraux et urbains. Pour tout ce qui relève des infrastructures, des services publics, de l'urbanisme, les départements sont un appui de taille pour les communes dans l'exercice de leurs compétences, en particulier dans les espaces ruraux.
Mais d'une manière générale, et c'est vrai aussi pour l'aménagement du territoire, nous devons aller plus loin et renforcer la coordination et la convergence des politiques publiques, entre les collectivités et l'Etat, mais aussi entre les collectivités elles-mêmes
Nos concitoyens estiment que notre organisation territoriale est compliquée ; peu leur importe finalement que ce soit le département, la région, les communes ou l'Etat qui exercent telle ou telle compétence. Ce qu'ils souhaitent, c'est que le millefeuille qu'est notre organisation territoriale soit plus lisible, et que le même service soit rendu de façon équitable sur l'ensemble du territoire national, sans que cela leur coûte plus cher. Et de fait, ils n'ont pas tort ! L'action des territoires se trouve parfois ralentie, voire empêchée, par des complexités. Certaines sont liées à la multiplicité des intervenants et des procédures sur un même dossier. Dans ce domaine, tout ce qui peut être simplifié doit l'être. Et même si les collectivités font souvent l'effort de s'entendre pour harmoniser leurs interventions, il existe toujours des redondances voire des contradictions qui appellent une mise à plat.
La recherche d'une clarification dans la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités est donc nécessaire. La réforme prévoit le principe d'une spécialisation des départements et des régions, la discussion se poursuit, mais avec l'idée d'avoir sur chaque sujet un chef de file et un seul pour éviter les lourdeurs qui appesantissent l'action locale. Et en définitive, elle n'empêchera pas les régions et les départements de continuer à aider les autres collectivités territoriales pour le développement local, y compris lorsqu'elles ne sont pas maîtres d'ouvrage. Enfin, je suis, pour ma part, convaincu qu'au-delà des textes, c'est aussi pour beaucoup une affaire de pratique des élus.
L'objectif n'est pas d'affaiblir le département ou la région. L'objectif, c'est d'améliorer la cohérence d'action : la clarification des compétences jouera son rôle en la matière.
J'ai entendu les interventions des présidents de conseils généraux à votre assemblée. Etant moi-même Président de Conseil Général, je comprends certaines de vos interrogations. Mais j'entends aussi que si vos interventions traduisent des visions différentes, elles convergent sur un même objectif : la nécessité d'une réforme. C'est pour cela que nous devons mettre en oeuvre la réforme territoriale, pour plus de cohérence et pour renforcer la capacité des territoires à agir.
Cette réforme aura un impact fondamental au plan de l'aménagement du territoire, qui est une politique nationale partagée entre l'Etat et les régions, bien sûr, mais pour laquelle le département, je n'y reviens pas, mais aussi les intercommunalités (aménagement de l'espace) jouent un rôle éminent.
La réforme territoriale doit nous donner les moyens de rendre plus lisible la politique d'aménagement du territoire en renforçant la convergence des politiques publiques.
* Une politique plus lisible grâce à l'achèvement de la carte de l'intercommunalité
L'intercommunalité a été un succès dans deux situations : lorsque les élus locaux ont su dépasser les clivages partisans au nom de l'intérêt général et là où l'Etat a su les convaincre d'y aller. Elle a globalement permis de faire mieux et moins cher, ensemble plutôt que séparément.
La France n'est pas encore totalement couverte d'intercommunalités : c'est une première étape que nous devons franchir, à condition que ces EPCI soient pertinents au plan de leur périmètre, et qu'ils bénéficient d'une densité ou d'une taille suffisante, en termes de population, d'assise territoriale, de compétences attribuées ou d'intégration fiscale, pour que cela ait du sens. Cela nous renvoie d'ailleurs à la question de la pertinence des périmètres des EPCI existants, tant en milieu urbain que rural. Pour ne parler que du secteur rural, je ne vois pas bien ce que peut faire une intercommunalité de trois communes rassemblant au total moins de 1000 habitants ! Pourtant cela existe !
En la matière, l'Etat et les conseils généraux ont une responsabilité à assumer. L'Etat doit avoir le courage de ne pas laisser se créer des intercommunalités « croupion ou de complaisance », comme il a pu parfois les laisser apparaître par le passé. Ce qui est plus difficile, c'est de revenir sur les périmètres existants, l'Etat ayant souvent été le support de la volonté des élus. C'est pourtant sur ce point qu'il y a le plus de travail à faire.
Les départements, quant à eux doivent aussi peser. Bien trop souvent par le passé, d'aucuns ont pu penser que les intercommunalités fragilisaient le département, ce qui a amené certains conseils généraux à laisser parfois se faire des projets ineptes ou à créer des intercommunalités reprenant les strictes limites des cantons, en pensant que cela ne les fragiliserait pas.
Tirons les leçons du passé et ne nous trompons pas de combat. C'est lorsque qu'ils acceptent de laisser créer des intercommunalités trop faibles que les départements s'affaiblissent eux-mêmes :
- au plan financier d'abord, car cela coûte beaucoup plus cher,
- au plan de la gouvernance aussi, puisque le nombre insuffisant d'intercommunalités a conduit les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, à créer les pays, que bien souvent les conseils généraux ont vu d'un mauvais oeil. Cette politique des pays a d'ailleurs connu une mise en oeuvre très différenciée selon les régions.
Les départements ont un rôle majeur à jouer, celui d'aider l'Etat à créer ou à recréer les structures intercommunales les plus adaptées et de lutter contre la fracture territoriale.
* Une politique d'aménagement du territoire plus lisible avec la réduction du nombre des communes
Le nombre élevé de communes françaises (36 700) et leur diversité est une particularité en Europe. Le développement de l'intercommunalité a été une première réponse à cet émiettement. Mais il faut aller plus loin en permettant aux communes qui le désirent de pouvoir se rapprocher, fusionner pour devenir des collectivités de taille suffisante et leur permettre de faire face aux enjeux et aux responsabilités qui sont les leurs. Les dispositions actuelles, issues de la loi Marcelin de 1971 n'ont eu qu'un succès limité car, elles étaient trop lourdes trop contraignantes. Le dispositif prévu par la réforme sera plus souple, plus incitatif. Plus souple car les conditions de création sont élargies et allégées, la consultation du corps électoral ne sera plus systématique, la création d'une commune nouvelle n'emportera pas nécessairement disparition de la référence au territoire des anciennes communes. Enfin, les dotations de l'Etat inciteront à ce rapprochement.
La détermination de bons périmètres est fondamentale car elle a un impact très fort sur la détermination des périmètres des documents de planifications (SCOT, PLU, carte intercommunale...) La loi Grenelle II améliorera la situation en renforçant notamment le rôle des SCOT.
D'une manière plus générale, je suis particulièrement attentif à la bonne articulation entre la réforme territoriale et le Grenelle II dans le sens d'une utilisation économe, mais intelligente et équilibrée des espaces. Il convient d'adapter les documents de planification au bon niveau de gouvernance territorial.
* Une politique d'aménagement du territoire plus lisible grâce à la création des métropoles
Les grandes agglomérations sont créatrices de richesses et d'une part très importante du PIB de notre pays. La concentration de population, d'entreprises, de savoir, et de savoir-faire joue non seulement un rôle dans la compétition mondiale, mais aussi en termes de redistribution au plan national.
Nous avons donc besoin d'un outil pour gérer de façon encore plus performante des territoires urbains très denses. La réforme prévoit de créer des métropoles sous forme d'EPCI disposant de moyens d'action étendus, capable de rayonner à l'échelle européenne et mondiale. Alors bien sûr, il ne s'agit pas de couvrir la France de métropoles. Je considère que ce statut devra être réservé à un nombre restreint de très grands pôles urbains capables de se mesurer avec leurs homologues européens. La question, pour moi, n'est pas tant démographique que fonctionnelle. Qu'est-ce qu'une métropole, qu'est-ce qui la définit, selon quels critères (enseignement supérieur, recherche, concentration d'activités économiques) ?
C'est cette approche qui m'importe, celle qui sera reconnue par nos partenaires européens.
Celle qui fait que Lyon entraîne l'ensemble du département du Rhône et- au-delà. C'est là un atout que nous devons valoriser.
* Enfin, une politique d'aménagement du territoire plus lisible par l'amélioration de la convergence des politiques entre la région et le département, avec la création du conseiller territorial
La désignation par les électeurs d'un conseiller unique le représentant au conseil général et au conseil régional, ne supprime ni la région ni le département, collectivités qui auront toujours leurs champs de compétences clarifiés et renforcés et qui pourront toujours venir en aide aux communes et aux intercommunalités. En revanche, la cohérence des politiques menées par ces deux collectivités et entre ces deux collectivités, ne peut que s'en trouver renforcer. Cela ne bride en rien le principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales.
S'agissant des modalités d'élection des conseillers territoriaux, il est, à mes yeux, essentiel que le mode de scrutin retenu maintienne un lien fort entre les élus et le territoire, dans sa diversité.
Mesdames et Messieurs les Présidents, Mes chers Collègues,
Je n'oublie pas le rôle de l'Etat sur lequel de nombreux élus m'ont interpellé depuis ma prise de fonction pour me témoigner de leurs attentes. Les modes d'intervention de l'Etat ont considérablement évolué ces dernières années, à la faveur de la décentralisation et de l'affirmation des collectivités territoriales, mais il demeure le garant de l'équité et du développement équilibré des territoires.
Nous avons besoin d'un Etat capable de rendre lisible la politique de l'aménagement du territoire et de faciliter la convergence des politiques publiques.
Nous avons besoin d'un Etat capable de soutenir sur l'ensemble du territoire une politique d'innovation ; je pense aux pôles de compétitivité, mais aussi aux pôles d'excellence ruraux dont une nouvelle vague sera lancée prochainement ; je pense aussi aux perspectives ouvertes par le Grenelle de l'environnement sur les éco-industries, ou dans le domaine de l'offre de services aux populations.
Nous avons besoin d'un Etat qui, en lien avec les pouvoirs locaux, facilite la recherche d'un consensus politique autour des priorités d'action et qui organise la mutualisation des ressources publiques, comme privées. Cette exigence est d'autant plus nécessaire que l'aménagement du territoire a un coût. Je souhaite travailler avec vous dans ce sens, il s'agit de se focaliser sur les projets qui répondent le mieux aux attentes des citoyens et de renoncer au saupoudrage pratiqué depuis trop longtemps.
En définitive, nous avons besoin d'un Etat qui tienne pleinement son rôle de stratège et de garant de l'intérêt général ; nous avons besoin d'un Etat qui sache convaincre et entraîner les collectivités territoriales pour porter des politiques de long terme au service de nos concitoyens.
Vous pouvez compter sur moi pour m'y employer à vos côtés.Source http://www.datar.gouv.fr, le 22 juillet 2010
Monsieur le Président du Conseil général du Puy-de-Dôme, cher Jean-Yves GOUTTEBEL,
Mesdames et Messieurs les Présidents de Conseils généraux,
Chers amis,
Je suis particulièrement heureux de vous retrouver, à Clermont Ferrand, dans ce beau département du Puy-de-Dôme, à l'occasion du 79ème Congrès de l'Assemblée des Départements de France.
C'est un moment important dans la vie de notre République décentralisée. C'est un rendez-vous marquant dans la vie de l'ADF. Et pour moi, ce congrès est un lieu d'échange, de débat et de dialogue privilégié ; c'est un espace que je connais bien et que j'apprécie. Je tiens, à ce titre, à saluer Claudy Lebreton qui, depuis 2004, préside et anime l'ADF avec engagement et détermination.
Mais aujourd'hui, ayant la charge de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, j'ai la chance de faire valoir mon expérience du monde local au sein du gouvernement, au service d'une grande ambition nationale, qu'est l'aménagement du territoire, qui nous concerne tous. Et c'est d'abord à ce titre que je m'adresse à vous.
Cette année, et les échanges de cette première journée l'ont bien montré, le débat est particulièrement nourri !
Il faut bien dire que l'enjeu de la réforme territoriale est particulièrement important.
Tout comme vous, je connais les compétences essentielles et les lourdes responsabilités qu'exercent les départements, dans la mise en oeuvre des politiques publiques.
Tout comme vous, je sais que le département, à côté de la région et de l'Etat, joue un rôle important en matière d'aménagement du territoire.
Mais tout comme vous, je sais aussi que nous pouvons aller encore plus loin dans la recherche de cohérence et dans la convergence des politiques publiques.
Nous savons tous ici que le département est une des pierres angulaires de l'architecture territoriale française
C'est d'abord un acteur essentiel de la cohésion sociale au service des personnes âgées, des personnes handicapées, de la petite enfance mais aussi des personnes en situation d'exclusion. Sa vocation sociale n'est plus à démontrer. Elle est aujourd'hui une référence sur l'ensemble du territoire. Et notre responsabilité, mes chers collègues, est largement reconnue et appréciée. C'est d'ailleurs une des raisons principales pour lesquelles nos concitoyens sont très attachés à leurs départements.
Pour mettre en oeuvre ces politiques, de très nombreux départements se sont organisés de façon à rendre un service au plus près des habitants, en créant sur l'ensemble du territoire départemental, des maisons du département. Ces antennes constituent aujourd'hui un véritable réseau territorial de proximité favorisant la cohésion sociale. Je suis d'ailleurs persuadé que ces maisons du département peuvent accueillir en leur sein, d'autres services publiques, qu'ils relèvent de l'Etat ou de grands opérateurs, comme les CAF, EDF...
Les départements exercent aussi une mission de cohésion sociale au plan du développement économique : c'est particulièrement vrai en ce moment dans le domaine des aides aux entreprises en difficulté, aux côtés de la région et de l'Etat.
Mais nous savons tous également qu'ils sont un acteur à part entière de l'aménagement du territoire, que ce soit en matière de cohésion territoriale ou de grands projets
Au plan de la cohésion territoriale, indissociable d'ailleurs de la cohésion sociale, c'est vrai pour les compétences qu'ils exercent en matière de transports « intercités » ; de routes, ce qui a été considérablement renforcé, ou encore des décisions qu'ils prennent de construire de nouveaux collèges, et cela arrive fréquemment. Ce sont des nouveaux services sur le territoire.
Par ailleurs, les départements sont un acteur majeur pour le lancement et la réalisation des grands projets.
Je pense au numérique, qui est un formidable défi que nous devons relever, et pour lequel l'Etat a aussi un rôle considérable à jouer. Les départements sont souvent les fers de lance des grands projets de couverture du territoire. Le cas du département du Puy de Dôme est patent, l'objectif de 100% d'accès au haut débit sera bientôt atteint en proposant au 0,4% de la population à l'écart du haut débit via les lignes téléphoniques, une aide financière jusqu'à 600 euros couvrant des solutions individuelles par satellite.
Je pense aussi aux grands projets comme les LGV auxquels les départements sont très largement parties prenantes aux côtés des régions, des grandes intercommunalités et de l'Etat. L'Etat joue en la matière un rôle fondamental d'impulsion pour le lancement de réalisations nationales et internationales que d'ailleurs personnes ne conteste, et que vous soutenez, tant ces investissements sont essentiels pour la compétitivité de notre pays et le désenclavement des ces territoires. Mettre Strasbourg à 2h10 de Paris et poursuivre ensuite vers l'Allemagne et l'Est de l'Europe, c'est tout à fait fondamental : j'ai encore mesuré, lors de mon récent déplacement à Strasbourg pour y signer le contrat triennal, à quel point les collectivités territoriales étaient unanimes autour de l'Etat.
Je veux parler également du tourisme : le département a un rôle essentiel dans l'impulsion et la conduite des projets. L'investissement touristique en milieu rural, littoral ou de montagne, est très souvent onéreux au regard du coût du foncier et de la nécessité de construire, à proximité des « équipements de loisirs structurants ». L'implication financière du département est donc une nécessité.
C'est ainsi qu'au coeur de la décentralisation, le département est un point d'équilibre majeur entre les communes, les régions et l'Etat. Il est bien sûr le premier partenaire des communes et bien souvent des intercommunalités, avec lesquelles il participe au développement équilibré des espaces ruraux et urbains. Pour tout ce qui relève des infrastructures, des services publics, de l'urbanisme, les départements sont un appui de taille pour les communes dans l'exercice de leurs compétences, en particulier dans les espaces ruraux.
Mais d'une manière générale, et c'est vrai aussi pour l'aménagement du territoire, nous devons aller plus loin et renforcer la coordination et la convergence des politiques publiques, entre les collectivités et l'Etat, mais aussi entre les collectivités elles-mêmes
Nos concitoyens estiment que notre organisation territoriale est compliquée ; peu leur importe finalement que ce soit le département, la région, les communes ou l'Etat qui exercent telle ou telle compétence. Ce qu'ils souhaitent, c'est que le millefeuille qu'est notre organisation territoriale soit plus lisible, et que le même service soit rendu de façon équitable sur l'ensemble du territoire national, sans que cela leur coûte plus cher. Et de fait, ils n'ont pas tort ! L'action des territoires se trouve parfois ralentie, voire empêchée, par des complexités. Certaines sont liées à la multiplicité des intervenants et des procédures sur un même dossier. Dans ce domaine, tout ce qui peut être simplifié doit l'être. Et même si les collectivités font souvent l'effort de s'entendre pour harmoniser leurs interventions, il existe toujours des redondances voire des contradictions qui appellent une mise à plat.
La recherche d'une clarification dans la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités est donc nécessaire. La réforme prévoit le principe d'une spécialisation des départements et des régions, la discussion se poursuit, mais avec l'idée d'avoir sur chaque sujet un chef de file et un seul pour éviter les lourdeurs qui appesantissent l'action locale. Et en définitive, elle n'empêchera pas les régions et les départements de continuer à aider les autres collectivités territoriales pour le développement local, y compris lorsqu'elles ne sont pas maîtres d'ouvrage. Enfin, je suis, pour ma part, convaincu qu'au-delà des textes, c'est aussi pour beaucoup une affaire de pratique des élus.
L'objectif n'est pas d'affaiblir le département ou la région. L'objectif, c'est d'améliorer la cohérence d'action : la clarification des compétences jouera son rôle en la matière.
J'ai entendu les interventions des présidents de conseils généraux à votre assemblée. Etant moi-même Président de Conseil Général, je comprends certaines de vos interrogations. Mais j'entends aussi que si vos interventions traduisent des visions différentes, elles convergent sur un même objectif : la nécessité d'une réforme. C'est pour cela que nous devons mettre en oeuvre la réforme territoriale, pour plus de cohérence et pour renforcer la capacité des territoires à agir.
Cette réforme aura un impact fondamental au plan de l'aménagement du territoire, qui est une politique nationale partagée entre l'Etat et les régions, bien sûr, mais pour laquelle le département, je n'y reviens pas, mais aussi les intercommunalités (aménagement de l'espace) jouent un rôle éminent.
La réforme territoriale doit nous donner les moyens de rendre plus lisible la politique d'aménagement du territoire en renforçant la convergence des politiques publiques.
* Une politique plus lisible grâce à l'achèvement de la carte de l'intercommunalité
L'intercommunalité a été un succès dans deux situations : lorsque les élus locaux ont su dépasser les clivages partisans au nom de l'intérêt général et là où l'Etat a su les convaincre d'y aller. Elle a globalement permis de faire mieux et moins cher, ensemble plutôt que séparément.
La France n'est pas encore totalement couverte d'intercommunalités : c'est une première étape que nous devons franchir, à condition que ces EPCI soient pertinents au plan de leur périmètre, et qu'ils bénéficient d'une densité ou d'une taille suffisante, en termes de population, d'assise territoriale, de compétences attribuées ou d'intégration fiscale, pour que cela ait du sens. Cela nous renvoie d'ailleurs à la question de la pertinence des périmètres des EPCI existants, tant en milieu urbain que rural. Pour ne parler que du secteur rural, je ne vois pas bien ce que peut faire une intercommunalité de trois communes rassemblant au total moins de 1000 habitants ! Pourtant cela existe !
En la matière, l'Etat et les conseils généraux ont une responsabilité à assumer. L'Etat doit avoir le courage de ne pas laisser se créer des intercommunalités « croupion ou de complaisance », comme il a pu parfois les laisser apparaître par le passé. Ce qui est plus difficile, c'est de revenir sur les périmètres existants, l'Etat ayant souvent été le support de la volonté des élus. C'est pourtant sur ce point qu'il y a le plus de travail à faire.
Les départements, quant à eux doivent aussi peser. Bien trop souvent par le passé, d'aucuns ont pu penser que les intercommunalités fragilisaient le département, ce qui a amené certains conseils généraux à laisser parfois se faire des projets ineptes ou à créer des intercommunalités reprenant les strictes limites des cantons, en pensant que cela ne les fragiliserait pas.
Tirons les leçons du passé et ne nous trompons pas de combat. C'est lorsque qu'ils acceptent de laisser créer des intercommunalités trop faibles que les départements s'affaiblissent eux-mêmes :
- au plan financier d'abord, car cela coûte beaucoup plus cher,
- au plan de la gouvernance aussi, puisque le nombre insuffisant d'intercommunalités a conduit les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, à créer les pays, que bien souvent les conseils généraux ont vu d'un mauvais oeil. Cette politique des pays a d'ailleurs connu une mise en oeuvre très différenciée selon les régions.
Les départements ont un rôle majeur à jouer, celui d'aider l'Etat à créer ou à recréer les structures intercommunales les plus adaptées et de lutter contre la fracture territoriale.
* Une politique d'aménagement du territoire plus lisible avec la réduction du nombre des communes
Le nombre élevé de communes françaises (36 700) et leur diversité est une particularité en Europe. Le développement de l'intercommunalité a été une première réponse à cet émiettement. Mais il faut aller plus loin en permettant aux communes qui le désirent de pouvoir se rapprocher, fusionner pour devenir des collectivités de taille suffisante et leur permettre de faire face aux enjeux et aux responsabilités qui sont les leurs. Les dispositions actuelles, issues de la loi Marcelin de 1971 n'ont eu qu'un succès limité car, elles étaient trop lourdes trop contraignantes. Le dispositif prévu par la réforme sera plus souple, plus incitatif. Plus souple car les conditions de création sont élargies et allégées, la consultation du corps électoral ne sera plus systématique, la création d'une commune nouvelle n'emportera pas nécessairement disparition de la référence au territoire des anciennes communes. Enfin, les dotations de l'Etat inciteront à ce rapprochement.
La détermination de bons périmètres est fondamentale car elle a un impact très fort sur la détermination des périmètres des documents de planifications (SCOT, PLU, carte intercommunale...) La loi Grenelle II améliorera la situation en renforçant notamment le rôle des SCOT.
D'une manière plus générale, je suis particulièrement attentif à la bonne articulation entre la réforme territoriale et le Grenelle II dans le sens d'une utilisation économe, mais intelligente et équilibrée des espaces. Il convient d'adapter les documents de planification au bon niveau de gouvernance territorial.
* Une politique d'aménagement du territoire plus lisible grâce à la création des métropoles
Les grandes agglomérations sont créatrices de richesses et d'une part très importante du PIB de notre pays. La concentration de population, d'entreprises, de savoir, et de savoir-faire joue non seulement un rôle dans la compétition mondiale, mais aussi en termes de redistribution au plan national.
Nous avons donc besoin d'un outil pour gérer de façon encore plus performante des territoires urbains très denses. La réforme prévoit de créer des métropoles sous forme d'EPCI disposant de moyens d'action étendus, capable de rayonner à l'échelle européenne et mondiale. Alors bien sûr, il ne s'agit pas de couvrir la France de métropoles. Je considère que ce statut devra être réservé à un nombre restreint de très grands pôles urbains capables de se mesurer avec leurs homologues européens. La question, pour moi, n'est pas tant démographique que fonctionnelle. Qu'est-ce qu'une métropole, qu'est-ce qui la définit, selon quels critères (enseignement supérieur, recherche, concentration d'activités économiques) ?
C'est cette approche qui m'importe, celle qui sera reconnue par nos partenaires européens.
Celle qui fait que Lyon entraîne l'ensemble du département du Rhône et- au-delà. C'est là un atout que nous devons valoriser.
* Enfin, une politique d'aménagement du territoire plus lisible par l'amélioration de la convergence des politiques entre la région et le département, avec la création du conseiller territorial
La désignation par les électeurs d'un conseiller unique le représentant au conseil général et au conseil régional, ne supprime ni la région ni le département, collectivités qui auront toujours leurs champs de compétences clarifiés et renforcés et qui pourront toujours venir en aide aux communes et aux intercommunalités. En revanche, la cohérence des politiques menées par ces deux collectivités et entre ces deux collectivités, ne peut que s'en trouver renforcer. Cela ne bride en rien le principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales.
S'agissant des modalités d'élection des conseillers territoriaux, il est, à mes yeux, essentiel que le mode de scrutin retenu maintienne un lien fort entre les élus et le territoire, dans sa diversité.
Mesdames et Messieurs les Présidents, Mes chers Collègues,
Je n'oublie pas le rôle de l'Etat sur lequel de nombreux élus m'ont interpellé depuis ma prise de fonction pour me témoigner de leurs attentes. Les modes d'intervention de l'Etat ont considérablement évolué ces dernières années, à la faveur de la décentralisation et de l'affirmation des collectivités territoriales, mais il demeure le garant de l'équité et du développement équilibré des territoires.
Nous avons besoin d'un Etat capable de rendre lisible la politique de l'aménagement du territoire et de faciliter la convergence des politiques publiques.
Nous avons besoin d'un Etat capable de soutenir sur l'ensemble du territoire une politique d'innovation ; je pense aux pôles de compétitivité, mais aussi aux pôles d'excellence ruraux dont une nouvelle vague sera lancée prochainement ; je pense aussi aux perspectives ouvertes par le Grenelle de l'environnement sur les éco-industries, ou dans le domaine de l'offre de services aux populations.
Nous avons besoin d'un Etat qui, en lien avec les pouvoirs locaux, facilite la recherche d'un consensus politique autour des priorités d'action et qui organise la mutualisation des ressources publiques, comme privées. Cette exigence est d'autant plus nécessaire que l'aménagement du territoire a un coût. Je souhaite travailler avec vous dans ce sens, il s'agit de se focaliser sur les projets qui répondent le mieux aux attentes des citoyens et de renoncer au saupoudrage pratiqué depuis trop longtemps.
En définitive, nous avons besoin d'un Etat qui tienne pleinement son rôle de stratège et de garant de l'intérêt général ; nous avons besoin d'un Etat qui sache convaincre et entraîner les collectivités territoriales pour porter des politiques de long terme au service de nos concitoyens.
Vous pouvez compter sur moi pour m'y employer à vos côtés.Source http://www.datar.gouv.fr, le 22 juillet 2010