Déclaration de Mme Marie-Luce Penchard, ministre de l'Outre-mer, sur les grandes orientations de la politique en faveur de l'Outre-mer, à Paris le 25 août 2010.

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Circonstance : Conférence des ambassadeurs, à Paris le 25 août 2010

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Chers amis de l'outre-mer,

Je dois d'abord vous dire que je suis ravie de vous accueillir, pour la deuxième année consécutive, à ce « petit déjeuner de l'outre-mer » dont je constate, avec une grande satisfaction, qu'il est désormais institutionnalisé. Cette maison est aussi la vôtre, vous y êtes toujours les bienvenus. Je peux vous assurer que mon Cabinet, nos trois ambassadeurs régionaux, Hadelin de la Tour du Pin, Philippe Leyssene et Stéphane Diémert, et les services de la DéGéOM, sont mobilisés pour vous faciliter la tâche dans la réalisation de nos objectifs communs.
Je souhaite ensuite vous remercier pour tout ce que vous avez fait, depuis un an, pour nos collectivités de l'outre-mer, et pour la défense de leurs intérêts. Elles sont si loin de la métropole, mais elles sont si proches de vous....Je sais aussi le temps que vous consacrez à vous coordonner avec nos Préfets, et de cela aussi je souhaite vous en remercier vivement. Le renforcement des relations de cette France et de cette Europe de proximité que sont nos collectivités d'outre-mer avec vos pays de résidence constitue un enjeu majeur de leur propre développement comme de celui de toute une région.

L'année passée a été riche en évènements, cette année le sera encore ; aussi j'ai souhaité concentrer nos discussions autour de trois sujets :

  • un tour d'horizon sur les outre-mer, que je vais vous présenter après cette brève introduction ;
  • ensuite, le Préfet Bouvier vous fera un bilan d'étape du CIOM ;
  • enfin, nous pourrons débattre sur l'arrivée des collectivités de l'outre-mer dans le champ institutionnel régional et international.

Bien évidemment, à l'issue, nous nous ménagerons un temps pour les « questions diverses ».
Pour ce « tour d'horizon » sur l'outre-mer, je souhaiterais vous présenter notre stratégie régionale et internationale, puis évoquer les évolutions institutionnelles en cours, et enfin vous faire un point sur le dossier européen.


1/ D'abord quelle est notre stratégie régionale et internationale ?
* Le premier axe de notre stratégie, c'est la défense des intérêts de chaque outre-mer, tout particulièrement dans les domaines économiques et commerciaux. C'est pour cela que nous sommes si vigilants à Bruxelles. C'est pour cela que nous allons mettre en place des « Commissaires au développement » dont je pourrai, si vous le souhaitez, vous expliquer la mission. C'est pour cela que nous faisons une priorité du développement économique à l'échelle régionale dans les secteurs où nous possédons une « plus value » tels que l'environnement, les énergies renouvelables, la santé ou le spatial. C'est pour cela que nous avons tenu à ce que l'AFD, à côté de ses stratégies « international » et « outre-mer » développe une stratégie de « coopération régionale », dont l'objectif est de s'assurer que les projets engagés dans les pays voisins sont bien conformes aux intérêts de nos collectivités.
* Le deuxième axe de notre stratégie est le passage d'une logique « de l'outre-mer » à une logique « des Outre-mers ». Cet engagement du Gouvernement obéit à une réalité simple : la diversité des Outre-mers. La conséquence, ce sont des trajectoires institutionnelles singulières. Le Président de la République l'a dit clairement : le Gouvernement est à l'écoute de ces aspirations. Nous accompagnons ces volontés, dans le respect des principes républicains. Ce sera sans doute plus compliqué à expliquer aux autorités de vos pays de résidence, mais je crois que cette approche « pragmatique » est la seule possible.
* Notre troisième axe, c'est le développement de la dimension institutionnelle régionale et internationale des Outre-mers, sur laquelle nous reviendrons dans notre troisième débat.
* Quatrième axe enfin, favoriser l'ouverture de tous les ministères sur l'Outre-mer, car il ne saurait être de « politique des Outres-mer » sans une véritable logique collaborative. Nos Ambassades ont je crois pris toute leur place dans ce dispositif. Je tiens aussi à saluer le travail exceptionnel des directeurs géographiques d'Amérique, d'Afrique et d'Asie du Quai d'Orsay. Je souhaiterais que notre prochain objectif commun soit la définition de « stratégies de coopération par zone ». Je souhaiterais également que des réunions de coopération régionale, auxquelles seraient associées l'ensemble des acteurs, y compris les élus locaux et bien sûr les entreprises puissent être organisées pour les Antilles-Guyane et l'océan indien, sur le modèle de celle qui s'est tenue l'an passé à la Réunion.


2/ Deuxième sujet que je souhaiterais aborder à l'occasion de ce « tour d'horizon » : les évolutions institutionnelles en outre-mer
Les électeurs de Guyane et de Martinique ont approuvé en janvier dernier le principe de la fusion en une seule collectivité territoriale du département et de la région. Ils ont aussi massivement refusé l'accession à un statut d'autonomie. La création d'une collectivité unique aura naturellement pour effet de renforcer la « visibilité » sur le plan international du futur exécutif territorial.
L'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne va permettre à Saint Barthélémy d'accéder au statut de P.T.O.M. La décision est attendue pour le Conseil européen d'octobre.
S'agissant de Mayotte, nous avons engagé auprès de la Commission un processus d'information sur la départementalisation, considérée désormais comme une « première étape » vers la transformation en RUP. La saisine officielle de Bruxelles est prévue au 1° trimestre 2011. D'ici là, nos ambassades européennes pourraient effectuer une démarche de sensibilisation auprès de nos partenaires. Nous devons aussi nous poser la question de l'utilité de démarches préalables d'explication et de sensibilisation auprès de nos voisins africains. Je serais ravie de recueillir votre sentiment sur ce point.
Comme vous le savez, le statut de la Nouvelle Calédonie a été modifié par la loi organique d'aout 2009 en particulier pour organiser les derniers transferts de compétence qui doivent intervenir avant 2014. Le Comité des signataires réuni en juin 2010 a validé à nouveau la méthode de travail consensuelle et partenariale entre l'Etat et la Nouvelle-Calédonie. A sa suite, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté une loi du pays définissant l'hymne, la devise et les nouveaux signes monétaires du franc pacifique en Nouvelle-Calédonie.
S'agissant de la Polynésie française, le Président de la République a souhaité qu'un projet de loi organique soit déposé avant la fin de l'année pour permettre à ce Territoire de retrouver sa stabilité institutionnelle.


3) Troisième point de ce tour d'horizon : les affaires européennes :
Vous savez l'importance du dossier européen pour les Outre-mers. A mon niveau, j'ai tenu à sensibiliser régulièrement les Commissaires européens à nos intérêts. Je les ai rencontrés à plusieurs reprises. De fait, l'agenda européen mobilise très largement mon administration sur les 4 objectifs principaux suivants :

* 1) D'abord, accompagner les évolutions institutionnelles des territoires d'outre-mer :
Il s'agit bien évidemment des évolutions de Saint Barthélémy et de Mayotte, que je viens de développer.

* 2) Deuxième objectif, contribuer à la rénovation des stratégies européennes vis-à-vis des RUP et des PTOM :
Pour les RUP, après le « mémorandum conjoint », que j'ai signé en mai 2010, je demande pour 2011 une nouvelle « communication européenne », destinée à cadrer l'action pour la période 2014-2021.
La place des PTOM au sein de l'Union pose davantage de difficultés. J'estime que la décision d'association qui court jusqu'en fin 2013 est à rénover dans le sens d'un plus grand rapprochement vers l'Europe. Pour l'avenir, je souhaite que puisse être présenté lors du « Forum PTOM », qui se tiendra en Nouvelle Calédonie en mars 2011, une nouvelle « position commune ».

* 3) Troisième objectif : assurer la défense des intérêts des Outre-mers dans le cadre des accords commerciaux négociés par l'Union européenne :
Il s'agit d'un sujet très sensible pour les Outre-mers, qui ont parfois l'impression que ces accords commerciaux se font « au détriment » des productions ultramarines, notamment agricoles. C'est la raison pour laquelle nous suivons avec une particulière attention les APE (accords de partenariat économique). Certes, nous avons obtenu une clause de sauvegarde régionalisée et le maintien des droits de douane pour l'entrée du sucre et de la banane sur deux fois 10 ans, mais cela n'est pas suffisant.
Nous demandons désormais que les intérêts des RUP soient davantage préservés, en amont de la négociation de ces accords commerciaux, ce qui signifie notamment la réalisation d'études d'impact systématiques préalables à tout accord commercial, et la protection effective du marché local au moyen de clauses de sauvegarde ainsi qu'un mécanisme de surveillance. Tout ceci devrait avoir des conséquences pour certains de vos pays de résidence. Je souhaite votre retour sur ce sujet.

* 4) Quatrième objectif : la coordination des fonds européens et des programmes de coopération territoriale :
Un aspect de cette question vous intéresse tout particulièrement : les programmes de coopération régionaux. Je sais que la DéGéOM et nos trois ambassadeurs régionaux vous associent régulièrement aux discussions. Je souhaite qu'ils vous impliquent encore davantage, non seulement dans la stratégie à adopter, mais aussi dans la mise en oeuvre concrète des programmes.
Je vous remercie de votre attention, et je vous laisse la parole.

Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 26 août 2010