Déclaration de Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer, sur la politique du logement social et la lutte contre l'habitat indigne en outre-mer, à Pointe-à-Pître (Guadeloupe) le 31 janvier 2011.

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Texte intégral

Monsieur le Maire de Pointe-à-Pître,
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Député,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Voici près d'un an et demi, alors que nous étions au plus profond de la crise qui a frappé l'économie mondiale, je m'étais adressée au mouvement HLM lors du congrès de l'union sociale pour l'habitat à Toulouse. Je vous avais alors exprimé mon attention extrême au logement outre-mer, priorité de mon action au Ministère que j'ai l'honneur de diriger.
Cette attention était motivée par la situation du logement dans nos territoires. Cette situation, nous en avions fait sans concession le diagnostic cruel : baisse de la production de logements sociaux neufs et dégradation des conditions d'hébergement de nos concitoyens les plus fragiles.
Et ce diagnostic objectif fait écho à ce que nous vivons, nous ultramarins : derrière les chiffres montrant l'écart entre la demande de logement social et l'offre, je connais les familles qui sont dans la précarité, je vois les logements qui se dégradent. Il y avait, il y a là les germes de nouvelles tensions.
Mais mon attention était également orientée par la conjoncture. Alors que les économies d'outre-mer entraient dans la crise, la politique que je conduis pour le logement outre-mer devait être un moteur de la relance. D'autant plus que le secteur du bâtiment et des travaux publics demeure essentielle à la création de valeur ajoutée dans nos économies ultramarines.
Relance de la production de logements sociaux, relance de l'économie, ces deux objectifs vont de pair. Et je sais que, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs les bailleurs sociaux, vous en êtes convaincus comme je le suis.
C'est pour cela que, lors de cette intervention il y a un an et demi, j'avais exprimé de fortes attentes à l'égard des services de l'État comme à l'égard des bailleurs sociaux. L'enjeu était alors d'utiliser pleinement les nouveaux outils, les nouvelles procédures que le Gouvernement avait adopté en 2009 pour relancer la production du logement : je pense bien évidemment à la défiscalisation du logement social, je pense à la plus forte mobilisation des aides budgétaires sur les opérations de logement social, je pense aussi à la phase amont de la production avec la signature de conventions d'action foncière.
Les outils étaient à disposition ; il fallait les saisir. Et c'est pour cela qu'il y a un an et demi, j'étais extrêmement vigilante sur l'effectivité de ces réformes.
Il est temps d'en tirer un bilan intermédiaire même s'il nous reste beaucoup à faire. Et les conditions d'exécution de l'année 2010, les perspectives pour l'année 2011, me rendent confiante.
Oui, je le dis avec la force de ma conviction et avec le poids de mon expérience depuis un an demi. Oui, nous pouvons avoir confiance.
La parole de l'État a été tenue : les crédits pour la ligne budgétaire unique mis à la disposition de la Guadeloupe ont fortement augmenté sur ces dernières années. En 2011, l'enveloppe initiale est supérieure de 50 % à celle de 2008. Et c'est un engagement massif : sur ces trois dernières années, nous aurons autorisés pour 180 M€ d'opérations au titre de la ligne budgétaire. Cela représente 155 M€ de trésorerie investie dans l'économie de la Guadeloupe. Et je n'évoque pas l'aide apportée au travers de la défiscalisation du logement social dont les premières opérations – pour près de 900 logements – ont été agréées en décembre dernier.
Ces crédits soutiennent l'activité économique. Et je salue l'action décisive des bailleurs sociaux en ce domaine. Je pense en particulier à la société que j'ai visitée ce matin, dont l'État est le principal actionnaire, la société immobilière de Guadeloupe. Les conventions que nous avons signées démontrent pleinement le levier formidable qu'est la défiscalisation pour augmenter votre régime de production, notamment en vous associant aux promoteurs immobiliers. C'est là la philosophie de la LDEOM : recentrer le financement du logement au profit de ceux qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire le logement social.
Permettez-moi de m'attarder sur la défiscalisation du logement social qui a été très contestée à son époque. Avec les fédérations représentant les bailleurs sociaux, l'union sociale pour l'habitat bien sûr mais également la fédération des entreprises publiques locales, nous avons accompli un travail d'une extrême finesse, dans un souci constant de concertation, pour faciliter l'accès à cette nouvelle ressource.
Sur la base des premières expériences et compte tenu des difficultés rencontrées par les bailleurs, j'ai provoqué le 12 novembre dernier une réunion pour faire le point des blocages et identifier les axes de simplification. Grâce à ce travail, en un mois et demi, nous avons doublé le nombre d'opérations agréées depuis l'ouverture du dispositif : nous sommes passés de 1 600 logements agréés au plan central à plus de 3 200.
Au-delà du déblocage des opérations, nous sommes allés plus loin puisque nous avons décidé de rendre la procédure plus contraignante pour l'État : il sera tenu par une liste exhaustive des pièces composant le dossier et il prendra des engagements de délai – 5 mois si le dossier est déposé en début d'année. Et nous allons plus loin dans la déconcentration avec le relèvement du seuil des opérations à 20 M€ : l'instruction des dossiers – au titre de la LBU comme au titre de la défiscalisation – se fera donc au même échelon, sans ces va-et-vient avec les bureaux parisiens, pénalisants pour les bailleurs sociaux.
Pour cet exercice de simplification – toujours complexe – je tiens à nouveau à saluer les bailleurs sociaux qui ont apporté toute leur expertise. L'USH notamment a été très active ; je sais toute l'attention que le Président REPENTIN porte au développement du logement social outre-mer. J'ai eu encore l'occasion de m'en entretenir avec lui tout récemment lorsque nous avons évoqué nos déplacements respectifs en Guadeloupe. Vous le savez, j'aurais eu à cœur d'être à nouveau avec vous, à la SIKOA cette fois-ci, pour l'inauguration d'un programme de logements sociaux. Malheureusement, nos agendas respectifs ne nous ont pas permis de nous retrouver pour ce déplacement.
Mais, à côté du logement locatif social, je ne peux passer sous silence l'autre enjeu essentiel de mon action pour le logement outre-mer : je pense bien évidemment à l'habitat privé, notamment lorsqu'il est dégradé.
L'habitat indigne outre-mer est un phénomène de masse : près de 200 000 personnes vivraient dans des logements de cette nature. Bien souvent, ils en sont propriétaires ou les ont édifiés dans un cadre très précaire.
Je sais le travail mené ici pour lutter contre l'habitat insalubre. Je sais aussi que nous devons constamment veiller à ce que ces actions ne se limitent pas à traiter le bâti ; une sortie d'insalubrité, une sortie d'indignité, c'est avant tout réparer des tissus urbains dégradés, qu'il s'agisse de la réhabilitation du logement social ou de l'intervention sur le logement privé. Le rôle des collectivités est décisif en ce domaine, comme l'a rappelé Serge LETCHIMY dans son rapport commandé par le Gouvernement.
Nous en avons eu l'illustration cet après-midi pour ce qui concerne les logements locatifs sociaux avec les deux programmes de rénovation urbaine. Je rappelle que ces deux programmes – parmi les plus importants en volume sur tout le territoire national – représentent un volume global d'opérations de 790 M€ et un objectif de construction de 2 800 logements environ.
Après avoir demandé aux Préfets, en relation avec les collectivités, d'améliorer le pilotage des opérations de RHI en créant des pôles départementaux de lutte contre l'habitat indigne, après avoir signé des conventions pluriannuelles avec les deux réseaux Habitat et Développement et PACT, le Gouvernement a poursuivi son action contre l'habitat indigne outre-mer en accompagnant la proposition de loi de Serge LETCHIMY qui a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale mercredi dernier. Avec ce outil, l'État mais surtout les collectivités pourront mieux répondre aux attentes des occupants de longue date et de bonne foi, qui n'ont ni droit ni titre sur le bien qu'ils ont pourtant construit. Mais nous pourrons également substituer à la procédure de RHI – inadaptée à plusieurs formes de quartiers d'outre-mer – une procédure ciblée, conçue à partir de ce qui existe outre-mer, c'est-à-dire les quartiers d'habitat spontané ou informel.
Je vous remercie.Source http://www.guadeloupe.pref.gouv.fr, le 17 février 2011