Texte intégral
S. Paoli - Des Irlandais qui disent "non" à la ratification du traité de Nice et paralysent ainsi l'élargissement, des Français et des Allemands qui divergent sur la structure européenne, T. Blair qui nomme à la tête de la diplomatie britannique un euro-sceptique et à celle du ministère des Finances un homme opposé à la tenue rapide d'un référendum sur l'euro en Angleterre. L'Europe se bloque-t-elle ? Le sommet franco-allemand de Fribourg relancera-t-il le moteur ? Et les Français, aujourd'hui, vont-ils ratifier le traité de Nice ?
- "Ils vont voter "oui" parce que l'alliance du PS et du RPR autour de MM. Chirac et Jospin fait naturellement une majorité. Mais cette majorité est artificielle. Si le Gouvernement français ou le Président de la République avaient le courage de soumettre le traité de Nice au référendum des Français comme il a été soumis au référendum en Irlande, on aurait la même réponse : non. Ce serait "non" pour une raison profonde qui tient au coeur des Européens que nous sommes - nous sommes la famille politique la plus européenne de toutes depuis longtemps, je crois pouvoir le dire - : l'Europe qu'on construit est inefficace et incompréhensible."
Est-ce parce que les Irlandais ne comprenaient pas qu'ils ont voté "non" ?
- " C'est parce qu'ils ne comprenaient pas, qu'ils ne se reconnaissent plus dans l'aventure de l'Europe et parce qu'ils n'ont aucune information qu'ils votent non. Les Irlandais sont le peuple le plus européen de l'Europe. Depuis des décennies, chaque fois qu'il y a eu un vote européen en Irlande, il a gagné à une majorité extrêmement large et l'Irlande en a profité beaucoup pour son développement. Mais, aujourd'hui, les peuples européens ne comprennent pas ce qui se passe en Europe, n'en sont pas informé et ne savent pas de quelle manière les décisions se prennent. A ces questions, la réponse sera "non.""
Quel sera votre vote ?
- "Nous allons refuser de voter "oui", nous nous abstiendrons sur le texte parce qu'il y a une majorité claire et pour éviter de mélanger les voix euro-sceptiques et euro-positives. La question fondamentale - c'est la première fois depuis cinquante ans que la famille la plus européenne de la vie politique française, l'UDF, refuse d'adopter un traité européen - est que ce Traité n'est pas l'Europe que nous voulons, nous et les citoyens français."
Plus on approche de l'euro et plus l'Europe se bloque. Que se passe-t-il ?
- " Il y a une Europe qui se fait qui elle est bonne pour les Européens. C'est l'Europe de l'euro par exemple : la croissance que nous avons aujourd'hui - encore pour un moment - en France et pour les autres pays européens, c'est la croissance qui vient de l'euro. Donc, nous avons eu raison de voter "oui" à Maastricht. Cette Europe se fait mais il y a une Europe qui ne se fait pas et dont les citoyens ont besoin : l'Europe politique. Comment faire quand on est citoyen pour comprendre ce qui se passe en Europe, pour en être informé et pour participer à la décision. Les peuples que nous sommes avons besoin de démocratie, nous avons besoin de prendre un bulletin de vote qui puisse changer l'avenir des institutions auxquelles on appartient. La démocratie est très bête : c'est savoir qui sont les dirigeants, être informé des débats qu'ils ont et pouvoir les changer s'ils ne nous plaisent pas. En Europe, rien de tout cela ! Les gouvernements, et en particulier à Nice, organisent une Europe incompréhensible par les citoyens que nous sommes."
Pourquoi ?
- "Je crois qu'ils veulent garder le pouvoir pour eux. Cette Europe est une Europe pour les spécialistes, pour les initiés, pour les diplomates. Autrement dit, les cercles de pouvoir habituels s'y retrouvent. Ils y nagent comme un poisson dans l'eau. Mais nous, citoyens, nous les gens qui voudrions comprendre, nous n'avons sur tout cela ni information ni influence. C'est ce que les peuples refusent, c'est cela à quoi les Irlandais ont dit "non." Je suis persuadé - chacun à ses raisons, elles ne sont pas toutes bonnes, de voter "non" - que chaque fois qu'on proposera au peuple des institutions où ils ne se reconnaîtront pas, ils diront "non" et ils auront raison ! On ne fera pas l'Europe sans les peuples. C'est un projet qui va droit dans le mur et c'est pourquoi nous sommes très sévères à l'égard du traité de Nice. Nous ne sommes pas les seuls d'ailleurs : J. Delors a dit que c'était un "four" - et il a raison - V. Giscard d'Estaing s'exprimera, cette après-midi, à l'Assemblée nationale dans des termes assez forts. Tous ceux qui ont cru à l'Europe ne s'y retrouvent pas !"
Elle ne peut plus se faire ? L'Irlande a dit "non" et le système est bloqué. il suffit qu'un seul dise "non" pour qu'il n'y ait pas d'élargissement.
- "Vous avez totalement raison : c'est encore un signe. Le seul peuple invité à voter a dit non. Normalement, cela bloque le système. Mais les gouvernements continuent à nous prendre pour des imbéciles et à dire que cela ne change rien, qu'on va continuer la ratification quand même, que les Irlandais ont émis un vote qui n'a aucune signification, que dans six mois ils changeront d'avis. Je prends le pari que le peuple irlandais ne changera pas d'avis parce que les raisons pour lesquelles les peuples votent sont des raisons de fond. Ils se sont abstenus à 70 % et ils ont voté "non" à 55 %. Cela veut dire simplement qu'ils n'adhèrent pas à cette Europe qu'on leur fait. Il est urgent de reprendre les choses. On a le choix entre deux voies : soit reprendre les choses à la base, recommencer la négociation ratée - funestement ratée - à Nice, soit le Premier ministre et le Président de la République persistent à nous expliquer que ce Traité est le meilleur qu'on puisse faire, auquel cas qu'ils aient le courage de soumettre au référendum en France. On aura un débat européen sur le fond et vous verrez que sur cette Europe-là les peuples diront "non." Le peuple français dirait "non" et il aurait bien raison.
Tout cela ne résout pas la question du blocage. Pour l'instant, tel que c'est écrit dans les textes et en droit, l'Europe est paralysée par le vote irlandais.
- "Il y a une Europe qui existe, la question est celle de l'élargissement. Je crois qu'à l'élargissement de l'Europe, toutes les forces politiques principales ont dit "oui" pour des raisons historiques et culturelles parce que nous considérons que ces pays appartiennent à la même maison européenne que nous. Alors, il faut prendre une décision simple : faire l'élargissement dans l'état du Traité antérieur à Nice. Nice organise une Europe inefficace et illisible, plus inefficace et illisible qu'elle ne l'était dans l'état actuel du Traité. Essayons de faire l'élargissement dans le Traité actuel et nous sommes persuadés que c'est parfaitement envisageable."
Hors l'Europe, il y a un autre gros sujet d'actualité aujourd'hui qui est la question de la modification possible de l'article 68 de la Constitution afin que les crimes et délits imputables au chef de l'Etat sans lien avec l'exercice de ses fonctions relèvent possiblement des tribunaux de droit commun. Vous allez voter pour ou contre ?
- "Ce n'est pas comme cela qu'on fait. Ce n'est pas en quelques jours, sans réflexion, sans concertation, sans association des forces politiques qu'on traite une question aussi importante et qui, en effet, se pose. Nous sommes dans une situation e droit à partir de la décision que le Conseil constitutionnel a prise il y a quelques mois qui fait que le statut pénal du Président de la République se trouve en question. Pourquoi ? Parce que beaucoup de citoyens disent qu'on ne peut pas avoir un droit où le Président de la République est au-dessus de la loi. Nul ne peut être au-dessus de la loi. Il faut donc régler la question du statut pénal, de la responsabilité pénale pour les actes extérieurs à ses fonctions. On ne le fait pas la hussarde, au détour d'une proposition de loi qui est faite plus pour faire une campagne électorale que pour autre chose. Donc, nous ne nous associerons pas à ce vote. Nous sommes, en revanche, prêts à nous associer à toute réflexion de bonne foi sur le statut du Président de la République qui, comme les citoyens français, ne peut pas être au-dessus de la loi. Il faut qu'on le protège d'une manoeuvre judiciaire qui aboutirait à une déstabilisation. Il faut qu'il y ait un filtre comme dans toutes les démocraties du monde mais s'il y a une mise en cause, s'il y a des faits sérieux, il faut naturellement que le Président de la République puisse, comme tous les citoyens français, trouver une réponse.
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 12 juin 2001)
- "Ils vont voter "oui" parce que l'alliance du PS et du RPR autour de MM. Chirac et Jospin fait naturellement une majorité. Mais cette majorité est artificielle. Si le Gouvernement français ou le Président de la République avaient le courage de soumettre le traité de Nice au référendum des Français comme il a été soumis au référendum en Irlande, on aurait la même réponse : non. Ce serait "non" pour une raison profonde qui tient au coeur des Européens que nous sommes - nous sommes la famille politique la plus européenne de toutes depuis longtemps, je crois pouvoir le dire - : l'Europe qu'on construit est inefficace et incompréhensible."
Est-ce parce que les Irlandais ne comprenaient pas qu'ils ont voté "non" ?
- " C'est parce qu'ils ne comprenaient pas, qu'ils ne se reconnaissent plus dans l'aventure de l'Europe et parce qu'ils n'ont aucune information qu'ils votent non. Les Irlandais sont le peuple le plus européen de l'Europe. Depuis des décennies, chaque fois qu'il y a eu un vote européen en Irlande, il a gagné à une majorité extrêmement large et l'Irlande en a profité beaucoup pour son développement. Mais, aujourd'hui, les peuples européens ne comprennent pas ce qui se passe en Europe, n'en sont pas informé et ne savent pas de quelle manière les décisions se prennent. A ces questions, la réponse sera "non.""
Quel sera votre vote ?
- "Nous allons refuser de voter "oui", nous nous abstiendrons sur le texte parce qu'il y a une majorité claire et pour éviter de mélanger les voix euro-sceptiques et euro-positives. La question fondamentale - c'est la première fois depuis cinquante ans que la famille la plus européenne de la vie politique française, l'UDF, refuse d'adopter un traité européen - est que ce Traité n'est pas l'Europe que nous voulons, nous et les citoyens français."
Plus on approche de l'euro et plus l'Europe se bloque. Que se passe-t-il ?
- " Il y a une Europe qui se fait qui elle est bonne pour les Européens. C'est l'Europe de l'euro par exemple : la croissance que nous avons aujourd'hui - encore pour un moment - en France et pour les autres pays européens, c'est la croissance qui vient de l'euro. Donc, nous avons eu raison de voter "oui" à Maastricht. Cette Europe se fait mais il y a une Europe qui ne se fait pas et dont les citoyens ont besoin : l'Europe politique. Comment faire quand on est citoyen pour comprendre ce qui se passe en Europe, pour en être informé et pour participer à la décision. Les peuples que nous sommes avons besoin de démocratie, nous avons besoin de prendre un bulletin de vote qui puisse changer l'avenir des institutions auxquelles on appartient. La démocratie est très bête : c'est savoir qui sont les dirigeants, être informé des débats qu'ils ont et pouvoir les changer s'ils ne nous plaisent pas. En Europe, rien de tout cela ! Les gouvernements, et en particulier à Nice, organisent une Europe incompréhensible par les citoyens que nous sommes."
Pourquoi ?
- "Je crois qu'ils veulent garder le pouvoir pour eux. Cette Europe est une Europe pour les spécialistes, pour les initiés, pour les diplomates. Autrement dit, les cercles de pouvoir habituels s'y retrouvent. Ils y nagent comme un poisson dans l'eau. Mais nous, citoyens, nous les gens qui voudrions comprendre, nous n'avons sur tout cela ni information ni influence. C'est ce que les peuples refusent, c'est cela à quoi les Irlandais ont dit "non." Je suis persuadé - chacun à ses raisons, elles ne sont pas toutes bonnes, de voter "non" - que chaque fois qu'on proposera au peuple des institutions où ils ne se reconnaîtront pas, ils diront "non" et ils auront raison ! On ne fera pas l'Europe sans les peuples. C'est un projet qui va droit dans le mur et c'est pourquoi nous sommes très sévères à l'égard du traité de Nice. Nous ne sommes pas les seuls d'ailleurs : J. Delors a dit que c'était un "four" - et il a raison - V. Giscard d'Estaing s'exprimera, cette après-midi, à l'Assemblée nationale dans des termes assez forts. Tous ceux qui ont cru à l'Europe ne s'y retrouvent pas !"
Elle ne peut plus se faire ? L'Irlande a dit "non" et le système est bloqué. il suffit qu'un seul dise "non" pour qu'il n'y ait pas d'élargissement.
- "Vous avez totalement raison : c'est encore un signe. Le seul peuple invité à voter a dit non. Normalement, cela bloque le système. Mais les gouvernements continuent à nous prendre pour des imbéciles et à dire que cela ne change rien, qu'on va continuer la ratification quand même, que les Irlandais ont émis un vote qui n'a aucune signification, que dans six mois ils changeront d'avis. Je prends le pari que le peuple irlandais ne changera pas d'avis parce que les raisons pour lesquelles les peuples votent sont des raisons de fond. Ils se sont abstenus à 70 % et ils ont voté "non" à 55 %. Cela veut dire simplement qu'ils n'adhèrent pas à cette Europe qu'on leur fait. Il est urgent de reprendre les choses. On a le choix entre deux voies : soit reprendre les choses à la base, recommencer la négociation ratée - funestement ratée - à Nice, soit le Premier ministre et le Président de la République persistent à nous expliquer que ce Traité est le meilleur qu'on puisse faire, auquel cas qu'ils aient le courage de soumettre au référendum en France. On aura un débat européen sur le fond et vous verrez que sur cette Europe-là les peuples diront "non." Le peuple français dirait "non" et il aurait bien raison.
Tout cela ne résout pas la question du blocage. Pour l'instant, tel que c'est écrit dans les textes et en droit, l'Europe est paralysée par le vote irlandais.
- "Il y a une Europe qui existe, la question est celle de l'élargissement. Je crois qu'à l'élargissement de l'Europe, toutes les forces politiques principales ont dit "oui" pour des raisons historiques et culturelles parce que nous considérons que ces pays appartiennent à la même maison européenne que nous. Alors, il faut prendre une décision simple : faire l'élargissement dans l'état du Traité antérieur à Nice. Nice organise une Europe inefficace et illisible, plus inefficace et illisible qu'elle ne l'était dans l'état actuel du Traité. Essayons de faire l'élargissement dans le Traité actuel et nous sommes persuadés que c'est parfaitement envisageable."
Hors l'Europe, il y a un autre gros sujet d'actualité aujourd'hui qui est la question de la modification possible de l'article 68 de la Constitution afin que les crimes et délits imputables au chef de l'Etat sans lien avec l'exercice de ses fonctions relèvent possiblement des tribunaux de droit commun. Vous allez voter pour ou contre ?
- "Ce n'est pas comme cela qu'on fait. Ce n'est pas en quelques jours, sans réflexion, sans concertation, sans association des forces politiques qu'on traite une question aussi importante et qui, en effet, se pose. Nous sommes dans une situation e droit à partir de la décision que le Conseil constitutionnel a prise il y a quelques mois qui fait que le statut pénal du Président de la République se trouve en question. Pourquoi ? Parce que beaucoup de citoyens disent qu'on ne peut pas avoir un droit où le Président de la République est au-dessus de la loi. Nul ne peut être au-dessus de la loi. Il faut donc régler la question du statut pénal, de la responsabilité pénale pour les actes extérieurs à ses fonctions. On ne le fait pas la hussarde, au détour d'une proposition de loi qui est faite plus pour faire une campagne électorale que pour autre chose. Donc, nous ne nous associerons pas à ce vote. Nous sommes, en revanche, prêts à nous associer à toute réflexion de bonne foi sur le statut du Président de la République qui, comme les citoyens français, ne peut pas être au-dessus de la loi. Il faut qu'on le protège d'une manoeuvre judiciaire qui aboutirait à une déstabilisation. Il faut qu'il y ait un filtre comme dans toutes les démocraties du monde mais s'il y a une mise en cause, s'il y a des faits sérieux, il faut naturellement que le Président de la République puisse, comme tous les citoyens français, trouver une réponse.
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 12 juin 2001)