Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, sur les conséquences de la crise des dettes souveraines pour la banque Dexia et les finances locales, la réforme des collectivités territoriales et l'accès aux soins en zone rurale, à Richelieu le 7 octobre 2011.

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Circonstance : Déplacement à Richelieu (Indre-et-Loire) le 7 octobre 2011

Texte intégral

Madame et Messieurs,
Je veux vous dire le très grand plaisir que j’ai d’être à Richelieu où nous venons de visiter, après la mairie, la Halle dont Hervé NOVELLI nous a vanté la rénovation future. C’est l’occasion pour moi d’abord de remercier Hervé de son invitation et puis de lui dire toute l’amitié que j’ai pour lui et tout le respect que j’ai pour la tâche remarquable qu’il a accomplie au Gouvernement, parce que ce n’est pas le lot de tous les ministres que de laisser des héritages dont chacun sera fier. Hervé aura laissé plusieurs réformes qui marqueront le quinquennat.
L’Etat apporte une participation très importante au projet de restauration de cette Halle que tu m’as montrée tout à l’heure et je profite de l’occasion parce que je ne peux pas venir sans payer mon écot, pour dire à Hervé que l’engagement se poursuivra d’ici la fin de l’année.
La maison de santé pluridisciplinaire que nous inaugurons maintenant doit beaucoup à la ténacité d’Hervé NOVELLI. Elle doit beaucoup, on vient de le voir, aussi à tous ceux qui ont porté ce projet : les élus locaux – et en particulier ceux de la communauté de communes - les bailleurs de fonds, les médecins et les infirmiers.
Cette maison de santé, c’est au fond le symbole de nos territoires ruraux qui s’organisent et qui se mobilisent. Il faut parfois beaucoup de temps pour qu’une belle idée s’installe dans les esprits. Hervé va trouver que je ramène la couverture du côté de la Sarthe, mais la première maison de santé a été créée au début des années cinquante à Sablé-sur-Sarthe. Simplement il a fallu cinquante ans pour qu’on s’empare de cette belle idée, qui est une idée qui permet de mutualiser les dépenses, d’organiser l’offre de soins, de faire en sorte que les médecins ne soient pas seuls et qu’ils puissent s’adapter à l’évolution de la médecine.
Les territoires ruraux ont façonné l’identité et la diversité de notre pays. Ils ont permis à la France de devenir une grande puissance et ils lui permettront, à l’avenir, d’équilibrer son développement qui ne peut pas être exclusivement concentré dans les seules zones urbaines.
Le renouveau des territoires ruraux, qui a été entamé dans notre pays à la fin des années 90, au début des années 2000, s’inscrit dans la durée. Et il se produit aujourd’hui dans un contexte qu’Hervé a évoqué tout à l’heure, qui est un contexte de contraintes budgétaires.
La crise des dettes souveraines, c'est-à-dire le fait que les Etats soient trop endettés tout simplement, est une crise qui menace notre indépendance. En Europe comme en France, cette crise résulte d’une trop longue dérive de nos finances publiques que nous avons décidé, avec le Président de la République, d’enrayer. Dans ce contexte, nous devons plus que jamais chercher à moderniser, à réorganiser, à rationaliser notre système public, économique et social. C’est la seule façon de réduire nos déficits et c’est la seule façon de conserver le meilleur de notre héritage national. Pendant trop longtemps, à chaque fois qu’un problème se posait, on ne cherchait à le résoudre qu’avec une dépense supplémentaire. Simplement ces dépenses supplémentaires sont des emprunts que nous faisons et ces emprunts, ils sont aujourd’hui d’un poids qui est insupportable pour notre pays, pour sa croissance, pour son avenir, pour son développement.
Et puisque j’évoque les finances publiques et les finances locales, je voudrais dire un mot sur un sujet d’actualité, je voudrais dire un mot des conséquences de la crise sur la situation spécifique de la banque DEXIA qui finance justement les projets des collectivités locales.
Vous savez que nous avons été conduits en 2008 à soutenir cette banque pour éviter une défaillance qui aurait porté un préjudice grave au financement des collectivités territoriales dans notre pays.
Nous sommes intervenus avec l’Etat belge puisqu’il s’agit d’une banque franco-belge, afin de permettre que DEXIA poursuive son activité. Nous avons installé une nouvelle équipe de direction. Nous avons demandé à cette équipe de direction de rompre immédiatement avec les errements du passé qui avaient conduit cette banque à s’égarer dans des activités totalement éloignées de sa mission initiale. Nous lui avions demandé d’engager un plan d’assainissement, plan d’assainissement qui a été conduit et qui a permis de réduire les risques et les besoins de financement. Malheureusement, la crise financière qui redémarre depuis l’été dernier a interrompu l’apurement qui était en cours et a replongé DEXIA dans les difficultés.
C’est la raison pour laquelle nous avons décidé avec le Gouvernement belge d’intervenir à nouveau pour soutenir cet établissement. Cette intervention, s’agissant de la France, n’a qu’un seul but: préserver l’activité de DEXIA dans le financement des collectivités locales et en Belgique, protéger les particuliers, puisqu’il s’agit en Belgique d’une banque de dépôt.
Cette intervention prendra la forme, comme en 2008, d’une garantie des Etats. Une garantie rémunérée qui permettra d’assurer le financement de DEXIA le temps nécessaire à l’achèvement du plan d’assainissement engagé depuis trois ans.
Mais nous voulons aller plus loin, et pour sécuriser dans la durée l’offre de financement aux collectivités locales françaises, nous sommes en train de travailler à la mise en place d’un pôle de financement public des territoires qui sera organisé autour de la Banque Postale et de la Caisse des Dépôts. Le rôle de ce pôle de financement public sera d’offrir aux collectivités locales les prêts bancaires qui sont nécessaires à leur développement.
Ce pôle sera une référence sur le marché des prêts aux collectivités locales. Son offre de financement sera une offre de financement simple et transparente. Les collectivités paieront le vrai coût de leurs emprunts, sans taux artificiellement bas, comme on l’a vu parfois dans le passé ou sans montage financier permettant d’abaisser artificiellement la charge de l’endettement les premières années pour la reporter sur les années suivantes.
Mais cette solution ne pourra voir le jour qu’à moyen terme, dans les prochains mois, et je sais que les collectivités locales rencontrent dès maintenant, du fait de la crise financière, des difficultés pour se refinancer.
Nous avons donc décidé de mettre en place des moyens immédiats pour assurer les besoins de financement des collectivités locales. J’ai décidé que la Caisse des Dépôts mettrait en place une enveloppe de 3 milliards d’euros pour financer les prêts aux collectivités locales, de maintenant jusqu’à la fin de l’année.
C’est un dispositif qui sera identique à celui que nous avions déjà mis en place en 2008, lorsque la crise avait gelé les liquidités bancaires et qui avait à l’époque fonctionné, à la satisfaction des collectivités locales.
Je demande à François BAROIN et au directeur général de la Caisse des Dépôts, de faire en sorte que les adjudications de sommes correspondant aux établissements de crédit puissent être initiées dans les quinze jours, de façon à ce que les collectivités locales ne voient pas interrompus les programmes d’investissements qu’elles conduisent.
De même que certains établissements sont fragilisés, nous observons chaque jour les effets de la crise des dettes souveraines sur les pays qui ont perdu la maîtrise de leurs dépenses. La réforme de nos structures publiques, engagée dès 2007, apparaît d’autant plus nécessaire aujourd’hui. Le chantier de la modernisation de l’Etat devait être lancé et les collectivités territoriales ne pouvaient pas rester à l’écart de ce mouvement. D’ailleurs, personne ne le souhaitait, car le constat faisait consensus : trop de niveaux d’administration décentralisée, des moyens éparpillés, des réponses aux demandes de nos concitoyens mal coordonnées.
La réforme des collectivités territoriales de décembre 2010 a été discutée, elle a été parfois critiquée, et c’est naturel parce qu’elle modifie bien des habitudes. Mais je veux dire que personne ne peut raisonnablement dire que cette réforme n’est pas fondée. Elle représente d’ailleurs une première étape qui va permettre la mise en place d’une nouvelle organisation institutionnelle, au moment des prochaines échéances électorales locales, c'est-à-dire en 2014.
L’objectif de la rationalisation de l’intercommunalité, c’est que nos communes et nos intercommunalités soient véritablement en capacité d’exercer les nombreuses compétences qu’elles détiennent. Cet objectif, c’est une donnée fondamentale, c’est une donnée qui s’impose à nous.
Au Parlement, ce volet - je voudrais le faire remarquer - a été examiné de façon très consensuelle. De cette discussion a résulté un calendrier d’action peut-être très ambitieux avec, dans un premier temps, en 2011, l’élaboration par les préfets, en concertation avec les élus, de schémas départementaux de coopération intercommunale. Je sais que cette rationalisation de l’intercommunalité a créé de l’inquiétude chez de nombreux élus, notamment dans les départements ruraux. J’ai donc décidé de donner, partout où cela s’avère nécessaire, davantage de temps à la concertation. Les préfets viennent de recevoir des instructions. Le ministère en charge des collectivités locales va réaliser un état des lieux dans chaque département et au cas par cas, la procédure ne sera menée à son terme que lorsqu’une large majorité des élus concernés se dégagera en faveur du projet. Partout où cette majorité large ne se dégagera pas, eh bien on prendra le temps nécessaire pour revoir les schémas de coopération intercommunale. En effet, ces schémas ne peuvent reposer que sur une conception partagée de l’intérêt général et il faut prendre le temps nécessaire, sans s’enfermer dans des contraintes de calendrier.
La réforme des collectivités territoriales a également eu pour objet la création du conseiller territorial. Là encore, qui peut sérieusement s’opposer à l’idée de fusionner progressivement ces deux mandats pour essayer d’optimiser l’action des départements et des régions ? La loi a fixé le nombre de ces conseillers territoriaux, pour chaque département et pour chaque région, avec une conséquence évidemment qui est la baisse du nombre d’élus. Il faut, pour mettre cette réforme en place, redécouper les cantons. C’est une tâche qui, même si on n’avait pas fait cette réforme, était de toute façon indispensable parce que les deux tiers de nos 4.000 cantons n’ont jamais été modifiés quasiment j’allais dire depuis la construction de la Halle de Richelieu, mais ce n’est pas tout à fait vrai… depuis leur création en 1791 ! La Halle de Richelieu est plus ancienne.
La loi impose au Gouvernement d’achever cette tâche avant le 1er mars 2013. Mais je veux le dire devant vous, pour éviter toute interférence avec les élections présidentielles et législatives, et aussi pour tenir compte du nouveau recensement qui sera connu à la fin de l’année 2011, j’ai décidé que les projets de décrets ne seront préparés et publiés, après avis d’ailleurs des conseils généraux des 96 départements concernés par la réforme, puis du Conseil d’Etat, qu’au second semestre 2012. Ce qui nous donne là aussi le temps de faire les choses.
Je veux simplement pour terminer sur cette réforme des collectivités territoriales, dire qu’il faut bien sûr tenir compte de notre histoire, tenir compte de notre culture, tenir compte de nos spécificités, ne pas brusquer les choses, ne pas bouleverser les habitudes mais en même temps, vous voyez bien autour de nous la rapidité avec laquelle le monde change et dire : le monde rural est déstabilisé, le monde rural n’a plus de repères… Pourquoi le monde rural n’a plus de repères ? Parce que le monde a changé autour de nous, parce que le monde s’est urbanisé, parce que le développement des pays émergents a changé de façon profonde les équilibres économiques, en particulier dans nos vieux pays parce que les activités professionnelles ne sont plus celles d’autrefois. Donc si le monde est rural est déstabilisé par la mondialisation, déstabilisé par l’évolution de nos sociétés, déstabilisé par l’urbanisation, on ne peut pas en tirer comme conséquence qu’il ne faut surtout rien changer. Il faut en tirer la conséquence que l’on a besoin de conserver le monde rural si on veut lui garder son dynamisme, on a besoin de réformer son organisation, de regrouper les structures, de faire au fond ce que l’on vient d’inaugurer ici, c’est-à-dire une maison de santé ; il n’y avait pas besoin de maison de santé il y a quarante ou cinquante ans parce que l’organisation du territoire rural ne le nécessitait pas. Il y avait des médecins qui d’ailleurs se déplaçaient chez les malades. Tout ça a changé et la seule réponse à ces changements, ça a été de faire une maison de santé en regroupant les moyens. Eh bien, la seule façon de préserver le monde rural, c’est de faire évoluer ces structures, de regrouper un certain nombre de collectivités pour leur donner plus de capacités d’agir.
Cet effort de rationalisation de nos institutions publiques, il a aussi porté sur la sphère économique. Notre pays doit être plus compétitif, il doit être plus productif, et cela passe par un renforcement de la capacité d’investissement des entreprises françaises et c’est la raison pour laquelle nous avons réformé la taxe professionnelle. Là aussi, cela a été un débat difficile. D’un côté, tout le monde s’accordait à dire que cette taxe devait être réformée puisqu’elle avait des effets contre-productifs pour le tissu industriel et la création d’emplois. C’était une taxe qui taxait les investissements. C’est un peu étrange de récompenser les industriels qui investissent en taxant plus. Nous l’avons modifiée et remplacée par la contribution économique territoriale à la fin de l’année 2009. Nous avons prévu des clauses de rendez-vous pour mesurer l’impact de cette réforme sur les entreprises, comme sur les collectivités locales. Le Parlement a d’ailleurs largement été associé à ce travail à travers le rapport de six parlementaires en mission. Tous les travaux qui ont été conduits, que ce soit par les parlementaires ou que ce soit par l’administration, confirment que les objectifs de cette réforme ont été atteints : la suppression de l’imposition des investissements contribue au rétablissement de la compétitivité des entreprises françaises, et notamment les PME, sans peser sur les finances des collectivités territoriales.
La rationalisation de l’action publique est également en cours dans l’Éducation nationale, parce que les objectifs de réduction des effectifs doivent concerner l’ensemble des personnels de l’Etat. Mais nous veillons à ce que la qualité de notre système éducatif puisse constamment s’adapter. Et c’est la raison pour laquelle les ajustements de la carte scolaire, qui ont lieu chaque année, doivent se faire dans le cadre d’un dialogue avec les élus, afin d’aboutir à une analyse partagée de la situation et des contraintes, et de réaliser au mieux les restructurations nécessaires.
Dans certains cas, afin de garantir une offre scolaire de qualité dans les territoires ruraux, la voie des regroupements pédagogiques intercommunaux doit être envisagée comme une piste utile. La priorité au maintien d’une école rurale fait l’unanimité. Il a été ainsi possible, ici en Indre-et-Loire, de moduler les retraits d’emploi pour éviter que les conséquences ne pèsent trop sur les zones rurales. Bien sûr ça n’est pas toujours facile ! Mais je veux dire que le résultat est là : à la rentrée 2011, la moyenne d'élèves par classe dans les trois circonscriptions du premier degré en zone rurale est voisine de 23, contre plus de 26 dans les circonscriptions urbaines. Donc la solidarité ici dans ce territoir, a fonctionné à plein en faveur de l’école rurale.
La nécessité d’agir ensemble, Etat, collectivités, professionnels, se retrouve avec acuité dans la question de l’accès aux soins en zone rurale.
Cette maison de santé pluridisciplinaire est au cœur de notre double défi : d’un côté, garantir un système de soins de qualité pour tous et de l’autre nous devons maîtriser nos dépenses publiques. Pour concilier ces deux objectifs, il n’y a pas d’autre alternative que de réorganiser, de mutualiser les atouts qui sont les nôtres.
Je veux dire que notre stratégie de redressement porte ses fruits : ce que l’on appelle l’ONDAM, c’est-à-dire les objectifs de dépense grosso modo pour le système de santé ont été respectés en 2010 pour la première fois depuis… 1997 ! Puisque nous sommes dans un pays qui passe son temps à voter des budgets, à se fixer des objectifs et à ne pas les tenir et à ne pas les respecter. Nous sommes en capacité de tenir encore le cap pour 2011, et en 2012. Le déficit de l’assurance-maladie sera réduit, Xavier, de moitié par rapport à 2010 grâce aux mesures de redressement qui ont été décidées ou qui seront décidées dans le cadre de la préparation du prochain Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale.
Je veux évoquer devant vous les risques de «désertification» et l’existence de zones moins dotées en professionnels de santé. Le Président de la République a fixé le cap que nous devons tenir : c’est celui du soutien à la médecine de proximité. Depuis le début du quinquennat, c’est avec une idée très claire que le Gouvernement a accompagné l’évolution de notre système de soins : pour nous, les professionnels de proximité sont en première ligne pour préserver l’excellence d’un système auquel les Français sont attachés. C’est dans cet esprit qu’un effort sans précédent a été engagé en direction des professionnels de santé. La mise en œuvre du protocole de février 2010 a permis de revaloriser les carrières des professions paramédicales. De même, nos engagements en direction des médecins ont été tenus. Et en particulier, l’acte de médecine générale a été revalorisé à 23€.
Mais, avec Xavier BERTRAND, nous voulons aujourd’hui aller plus loin. Les contrats d’engagement – et nous venons d’en signer deux – de service public visent déjà à inciter 400 étudiants en médecine à partir exercer dans des zone sous dotées en échange d’une allocation. Il faut convaincre ces jeunes que cette expérience, bien loin des clichés, peut être stimulante, enrichissante sur le plan professionnel comme sur le plan humain. Le programme « 250 maisons de santé » en zone rurale ou dans les quartiers en difficulté répond aussi à cette exigence. Nous sommes aujourd’hui à 230 maisons de santé réalisées sur ce plan. On le voit ici à Richelieu, cette formule apporte une réponse réelle aux besoins des patients et à l’aspiration des médecins pour l’exercice collectif.
Je le dis avec la plus grande clarté : si nous sommes déterminés à renforcer les incitations à l’installation, nous ne ferons jamais le choix du recours à des mesures coercitives qui sont des méthodes qui ne fonctionnent pas et qui sont, en général, contre-productives !
La loi dite Fourcade, adoptée au cours de l’été, a permis d’apporter plusieurs réponses en ce sens, en encourageant le développement des maisons de santé par la stabilisation de leur cadre juridique. Alors, certaines dispositions de cette loi ont malheureusement fait l’objet d’une censure du Conseil constitutionnel, pour des raisons qui ne tenaient pas au fond mais qui tenaient simplement à la procédure. Je pense qu’il n’y avait pas de quoi crier victoire pour les parlementaires de l’opposition qui avaient alors saisi le Conseil constitutionnel, au regard de l’urgence qu’il y avait à adopter ces dispositifs. Mais je vous le dis, nous ne renoncerons pas à ce projet et nous profiterons de toutes les occasions qui nous seront offertes, dans les prochains mois, pour relancer ces chantiers. Je pense, en particulier, à la question de la responsabilité civile professionnelle, qui est une question très sensible pour la sérénité du travail au quotidien des professionnels de santé. Après une concertation qui avait été très longue, nous étions parvenus à un dispositif innovant et équilibré. C’est un dispositif qui prenait la forme d’un fonds de mutualisation permettant, contre le versement d’une cotisation réduite pour tous les professionnels, de couvrir les risques de dommages les plus élevés, qui ne sont pas correctement pris en charge aujourd’hui. Cette disposition, je vous l’annonce, figurera dans le prochain Projet de Loi de Finances qui sera discuté dans les tout prochains jours.
Notre volonté de favoriser la « médecine de proximité » n’avance pas que par la loi ; il y a aussi la voie conventionnelle. C’est le cas des discussions qui sont en cours sur la retraite supplémentaire des médecins, avec des efforts partagés par tous pour garantir la pérennité du système. La signature d’une nouvelle convention avec les principaux syndicats de médecins, le 21 juillet dernier, illustre aussi cette méthode. L’introduction de la rémunération à la performance constitue bien sûr une étape décisive, en soutien à la modernisation de l’exercice médical. C’est une innovation qui prolonge le succès rencontré par ce que l’on a appelé le contrat d’amélioration des pratiques individuelles. Le volet démographique de cette convention devrait également contribuer à répondre à l’inégale répartition des médecins sur le territoire. Le soutien à la médecine de proximité implique un concours résolu à la modernisation des pratiques et au développement des nouveaux outils. Cela passera notamment par le renforcement des démarches de coopération entre les professionnels de santé, prévues par la loi. Le développement de la télémédecine contribuera à ce même objectif, avec l’engagement, au mois de juin dernier, de ce que l’on a appelé la stratégie nationale e-santé.
La formation, enfin, des professionnels de santé en sera un autre volet, avec un financement sécurisé que nous allons proposer dans le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale. Il restera à achever la réforme de sa gouvernance et nous attendons maintenant le bouclage rapide du dossier du développement professionnel continu. Avec Xavier BERTRAND, j’attends que chacun puisse faire les derniers pas qui permettront de dégager une solution adéquate.
Les discussions conventionnelles vont aussi se poursuivre avec d’autres professions, notamment les pharmaciens, dont le rôle au sein de l’offre de soins de premier recours a été pleinement reconnu. Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2012 va élargir les possibilités de la convention pour permettre aux pharmaciens également de bénéficier de la rémunération à la performance. Il prévoit aussi d’encourager la recomposition du réseau officinal, tout en préservant bien sûr l’accès aux pharmacies en zone rurale.
Il faudra enfin continuer à aborder, sans tabou, l’ensemble des questions relatives à l’accès aux soins. Je pense en particulier à la question du secteur optionnel et des dépassements d’honoraires. Ici encore, je suis convaincu que l’esprit de responsabilité prévaudra et que nous parviendrons à un accord.
Voilà Mesdames et Messieurs, au fond le sort de notre pacte social, auquel nous sommes tellement attachés. Il est lié à l’engagement de l’Etat républicain, qui doit se repenser, qui doit se réorganiser, mais il est aussi lié à l’engagement individuel, à l’engagement personnel, à l’engagement de tous qui, par les décisions qu’ils prennent, par leur pratique quotidienne doivent agir avec responsabilité, avec énergie et avec dévouement.
Et au fond, c’est peut-être la meilleure façon de tracer une perspective et de résumer la situation dans laquelle nous sommes. On peut demander à l’Etat, aux collectivités locales, aux organisations publiques de répondre à toutes les questions que pose la société. Ils n’y parviendront jamais complètement si nous ne sommes pas capables nous-mêmes d’assumer nos responsabilités individuelles.
Les enseignants peuvent être les meilleurs du monde, si les parents ne font pas l’effort nécessaire d’éducation et l’effort nécessaire d’autorité, eh bien les enseignants sont dans une situation difficile lorsque les enfants sont devant eux. De la même façon, on ne peut pas demander à la Police et à la Gendarmerie et à la Justice de régler tous les problèmes de sécurité dans notre pays, si nous-mêmes nous n’avons pas la force de caractère, la volonté de nous engager personnellement dans l’éducation de notre jeunesse.
Nous sommes dans une situation économique qui exige du courage, du sang-froid, qui exige beaucoup de volonté, mais le sens de l’intérêt général dont témoignent ici les élus locaux, les professionnels de santé, est aussi important que les réformes que nous conduisons. Et ce sont, au fond, ces valeurs et ce message, mon cher Hervé, mes chers amis, qui permettront à notre pays de se dépasser et de franchir toutes les difficultés que nous rencontrons aujourd’hui. Je vous remercie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 10 octobre 2011