Interview de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement, à RMC le 10 novembre 2011, sur le plan "d'ajustement" du gouvernement, le bilan de l'accession à la propriété depuis 2007, la hausse de la TVA sur les travaux de rénovation, la suppression de la loi Scellier en 2013 et la politique du logement social à Paris.

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Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN Parlons logement ce matin, c’est l’une des préoccupations majeures des Français, mais avant de parler logement, je voudrais reprendre cette déclaration de Charles BEIGBEDER, secrétaire national de l’UMP en charge de la pédagogie de la réforme, il dit : « il ne faut pas survendre le plan d’austérité présenté par François FILLON, c’est un plan d’ajustement en attendant l’après élection et le vrai plan de rigueur ». Oui ! Il viendra après l’élection…
 
BENOIST APPARU Eh bien ces propos…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Le vrai plan de rigueur ?
 
BENOIST APPARU Eh bien ces propos n’engagent que lui, d’abord, premièrement…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ah ! Ca c’est sûr.
 
BENOIST APPARU Voilà ! Ca n’engage pas…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Enfin, il est quand même en charge de la pédagogie de la réforme. BENOIST APPARU Ah ! J’entends bien.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
BENOIST APPARU Mais peut-être que de temps en temps effectivement il devrait mieux faire un peu plus de pédagogie et un peu moins d’annonces…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
BENOIST APPARU Pour l’instant qu’est-ce qu’on fait ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
BENOIST APPARU La première partie de la phrase, d’accord, oui on ajuste, ça veut dire quoi on ajuste ? Ca veut dire qu’à partir du moment où nous avons considéré que la croissance en 2012 ne serait pas au rendez-vous, que nous aurions, que nous n’aurions pas, pardon, le 1,75, qu’on a réajusté comme les Allemands à 1, il fallait en tirer les conséquences, c'est-à-dire avoir des mesures pour 7 milliards d’euros nous permettant de tenir le rythme des déficits sur lequel nous nous sommes engagés.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais ça veut dire quoi ? Ca veut dire que… est-ce qu’on risque de réajuster, je ne sais pas en janvier, en février, parce qu’on ne serait même pas à 1% de croissance, vous avez vu les derniers chiffres ?
 
BENOIST APPARU Qu’est-ce qu’on a dit ? On a dit on s’ajustera…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc un troisième plan d’austérité ?
 
BENOIST APPARU Mais qu’on continuera à s’ajuster si nécessaire…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ?
 
BENOIST APPARU C'est-à-dire en fonction du rythme ou de l’évolution de l’économie mondiale et donc de la croissance française, oui on s’ajustera parce que notre priorité…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc un troisième plan de rigueur n’est pas impossible ?
 
BENOIST APPARU Mais je n’ai… Attendez ! Non ! Non, attendez, ne commencez pas à annoncer un troisième, un quatrième ou un dix-huitième, je vous dis……
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais je n’annonce pas, je vous dis…
 
BENOIST APPARU Je vous dis simplement…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Je vous dis est-ce que c’est possible, Benoist APPARU ?
 
BENOIST APPARU Je vous dis simplement que pour l’instant nous avons des prévisions de croissance qui sont à 1 point pour 2012…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Hum.
 
BENOIST APPARU A l’heure d’aujourd’hui il n’y a pas de raison de revisiter ce 1% de croissance, si dans 6 mois, dans 10 mois ou dans 3 mois, on nous dit : « ce ne sera pas 1 mais ce sera 0,5 » on s’ajustera, mais pour l’instant ce n’est pas nécessaire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien ! On va regarder le logement, Benoist APPARU, parce que dans ce plan d’ajustement, le deuxième, de lundi, on a eu la sensation que le logement était le secteur sacrifié. Pourquoi ? Parce que de nombreuses mesures… d’abord, d’abord juste un petit constat, 2007 le président de la République Nicolas SARKOZY – qui n’était président est candidat – et il annonce une France de propriétaires…
 
BENOIST APPARU Oui !
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et il promet que 70% des Français seront propriétaires à la fin de son mandat, aujourd’hui on en est à 58%, on en était à 57% en 2007, donc ça a stagné, rien n’a bougé, pourquoi ? Vous allez me dire la crise ?
 
BENOIST APPARU Alors pourquoi, quelle question ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Eh bien je ne sais pas ! Pourquoi est-ce que rien n’a bougé ?
 
BENOIST APPARU Mais, attendez, là encore si vous…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Pourquoi est-ce que rien n’a bougé ?
 
BENOIST APPARU Si vous ne voulez pas voir la crise, c’est votre choix…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ah ! Non, non, mais je ne dis pas…
 
BENOIST APPARU C’est votre droit.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Que je ne veux pas la voir.
 
BENOIST APPARU Je dis simplement la chose suivante : 2007…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
BENOIST APPARU Lorsque nous faisons notre projet économique, nous sommes dans une période où nous sortons de 4 années consécutives de baisse du chômage et 4 années de croissance à plus de 2%...
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Hum ! Hum.
 
BENOIST APPARU Et les perspectives qui sont devant nous sont les mêmes, donc évidemment on fait un projet politique avec ces perspectives économiques là ; 2008, un an après, crise, personne ne l’a vu venir, personne ne l’a vu venir, ni les économistes, ni le FMI, ni évidemment les politiques, et donc évidemment nous adaptons notre politique à cette nouvelle situation ; A partir de là, bien évidemment que ça a tout chamboulé sur le projet qui était le nôtre, vous avez eu une augmentation des prix, une augmentation des taux d’intérêt et donc évidemment plus difficile encore de devenir propriétaire. Maintenant, est-ce que le parent pauvre de ce « plan » ou des politique publiques…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Attendez ! On va entrer dans le plan. On va entrer…
 
BENOIST APPARU Eh bien vous m’avez posé la question il y a 2 minutes.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non ! Non, mais on va entrer dans le plan, j’ai un autre chiffre quand même Benoist APPARU, un autre chiffre important, les familles Invités du jeudi 10 novembre 2011 Département Veille et Ressources d’informations – 01.42.75.54.58 13 modestes et moyennes françaises représentaient 45% des acquéreurs de résidence principale il y a moins de 10%, à peine 30% aujourd’hui, ça c’est un chiffre encore plus parlant aujourd’hui.
 
BENOIST APPARU Ca c’est un chiffre qui est parlant, qui est inquiétant…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
BENOIST APPARU Parce que ça veut dire qu’aujourd’hui les perspectives de devenir propriétaire pour une classe modeste s’éloignent…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Voilà.
 
BENOIST APPARU Or ça reste le rêve de tout le monde…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais pourquoi ?
 
BENOIST APPARU Et ça reste non seulement le rêve de tout le monde mais c’est en plus indispensable, nécessaire que les plus propriétaires puissent devenir propriétaires pour se constituer un patrimoine.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais pourquoi est-ce que ces perspectives s’éloignent, Benoist APPARU ?
 
BENOIST APPARU Pour une raison très simple, les prix…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Qui augmentent.
 
BENOIST APPARU Les prix. Les prix ont tellement augmenté, notamment en Ile de France, qu’aujourd’hui une classe même modeste, même modeste supérieure ne peut pas accéder à la propriété en Ile de France parce que les prix ont augmenté. La question qu’on doit se poser, c’est pourquoi les prix augmentent ? Les prix augmentent parce qu’on ne produit pas assez de logements en Ile de France, c’est ça le sujet.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais c’est inéluctable, est-ce inéluctable ?
 
BENOIST APPARU Non ! Ce n’est pas inéluctable.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais pourtant…
 
BENOIST APPARU Mais ce n’est pas inéluctable.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ca ne s’arrange pas ?
 
BENOIST APPARU Je vais y venir dans un instant. Quel est le sujet ? On produit 2 fois plus de logements en Auvergne qu’en Ile de France, l’Ile de France est la région qui produit le moins de logements, le moins de logements en France par habitant, le moins de logements. Pourquoi ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais cela dit il n’y a pas que l’Ile de France qui est touchée…
 
BENOIST APPARU Il n’y a pas que l’Ile de France qui est touchée, mais vous avez un prisme très particulier en Ile de France avec ces prix qui ont explosé et qui continuent d’exploser. Vous avez d’autres territoires, 11 régions sur 22 les prix stagnent ou baissent, baissent, dans ma région en Champagne Ardenne les prix ils baissent, dans 7 régions les prix baissent, dans 4 régions les prix stagnent, donc vous avez des marchés sur le plan national qui n’ont strictement rien à voir les uns avec les autres, des marchés qui montent, certains très, très vite comme l’Ile de France et des marchés qui baissent. Pourquoi ? Une seule raison : offre – demande, d’un côté j’ai trop de logements, les prix baissent, de l’autre côté je n’ai pas assez de logements, les prix montent, il faut donc qu’on réorganise la production sur l’ensemble du territoire national pour produire des logements là où c’est nécessaire, en premier lieu en Ile de France et puis dans les régions très tendues, c'est-à-dire dans les grandes métropoles françaises, c’est là qu’il faut impérativement produire des logements si on veut lutter contre la montée des prix et donc si on veut redonner aux classes moyennes, parce que c’est ça l’objectif - et aux plus modestes – la possibilité de devenir propriétaires.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Benoist APPARU, des précisions sur l’aspect logement de ce plan d’austérité présenté par François FILLON. Alors, la hausse de la TVA, qui passe de 5,5 à 7 sur les travaux de rénovation, d’abord, est-ce que la construction dans les HLM est concernée par cette hausse de la TVA ?
 
BENOIST APPARU Oui, la construction dans le HLM, qui bénéficiait de ce qu’on appelle une niche fiscale, c'est-à-dire une TVA à 5,5 et non à 19,6…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Exact.
 
BENOIST APPARU Tout le reste de la construction est à 19,6, passera de 5,5 à 7.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN A 7.
 
BENOIST APPARU Oui.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien. Deuxième question. En ce qui concerne cette TVA à taux réduit, j’ai remarqué, comme vous, toutes les réticences, la colère même, de certains, notamment la CAPEB, tiens. Vous connaissez la CAPEB ?
 
BENOIST APPARU Bien sûr, j’étais avec eux hier après-midi, à côté, à Batimat.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors, avec cette mesure vous affaiblissez l’un des secteurs parmi les meilleurs contributeurs de la croissance. Les pertes se chiffrent à 1 milliard de chiffre d’affaires, 1 milliard d’euros, et la disparition directe et indirecte de 10 000 emplois. Est-ce que vous avez supprimé 10 000 emplois, là, en augmentant la TVA à 7% dans les travaux de rénovation ?
 
BENOIST APPARU Ecoutez, on jugera ça dans quelques mois…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc la CAPEB nous ment ?
 
BENOIST APPARU Non, il ne faut pas dire qu’on nous ment. Enfin la CAPEB, son métier c’est quoi ? C’est de défendre les artisans, et c’est de défendre ses niches fiscales…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, c’est le représentant des artisans du bâtiment.
 
BENOIST APPARU C’est logique. Rappelez-vous la phrase de Gilles CARREZ, « dans toutes les niches, il y a un gros chien », et toute…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ça c’est le gros chien ?
 
BENOIST APPARU Mais non, mais toutes les professions, c’est naturel, c’est sain, défend sa niche fiscale, et comme toujours la difficulté… c’est quoi ? C’est que tout le monde veut faire des économies, chez le voisin. Chez le voisin les économies sont toujours…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais enfin le logement est bien touché !
 
BENOIST APPARU Chez le voisin les économies sont toujours justes. Eh bien non ! Dans le logement, comme ailleurs, il faut assumer que l’on prenne notre part dans les économies nécessaires. Et moi j’assume totalement ces choix politiques, je les revendique…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Tous ?
 
BENOIST APPARU Tous. Pourquoi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Evidemment, remarquez vous n’allez pas me dire… que vous n’êtes pas content.
 
BENOIST APPARU Non, mais pourquoi, allons au fond des choses. Il faut qu’on change de modèle économique sur le logement. On ne peut pas continuer à avoir un secteur sous perfusion de la dépense publique, comme il l’est depuis 30 ans, avec une conséquence, notamment, l’augmentation des prix dont on parlait. Parce que toutes ces aides publiques, tout cet investissement public dans le logement, vous le retrouvez, vous le retrouvez dans les prix. On sait que l’APL, ça fait gonfler les prix. On sait que le prêt à taux zéro, ça fait gonfler les prix. On sait que le SCELLIER, que toutes les aides publiques au logement, ça fait monter les prix. Il faut qu’on change de modèle.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous vous en apercevez aujourd’hui ?
 
BENOIST APPARU Non, on ne s’en aperçoit pas aujourd’hui, sauf que, aujourd’hui, il faut qu’on change tous notre logiciel, vous, comme nous, et qu’on arrête de vouloir penser, dès qu’on a un problème, dépenses publiques. Aujourd’hui, dès qu’un secteur d’activité a un problème, qu’est-ce qu’on fait ? Hop, on veut une niche fiscale. Et donc il faut arrêter.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors écoutez, on nous a vendu le Grenelle de l’environnement, et voilà qu’on réduit de 20% le crédit d’impôt développement durable.
 
BENOIST APPARU Oui.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bon ! On recentre le prêt à taux, le nouveau prêt à taux zéro…
 
BENOIST APPARU Oui, tout à fait, sur le neuf.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Pourtant on nous a dit, il y a combien de temps, il n’y a même pas un mois, Benoist APPARU…
 
BENOIST APPARU Non, il n’y a pas un mois, n’exagérons rien…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous nous avez vendu ce nouveau prêt à taux zéro en disant c’est formidable…
 
BENOIST APPARU Je rappelle que ce prêt à taux zéro, il ne date pas d’un mois, il date d’un an. Alors, vous me direz, ça reste très neuf.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN D’accord, mais il a été rénové, il a été modifié.
 
BENOIST APPARU Non non, il a été modifié, il y a un an. Ce qui est en train d’être modifié c’est encore autre chose, c’est l’éco-prêt à taux zéro pour les réhabilitations, pas pour devenir propriétaire. Là encore, quel est notre choix ? C’est de dire qu’il faut qu’on recentre le prêt à taux zéro vers le neuf, pour pouvoir continuer à aider justement le secteur économique du bâtiment. Non pas supprimer complètement ce produit-là, mais dire, voilà, on va aider le neuf, moins l’ancien. Pourquoi moins l’ancien ? Tout simplement parce que là encore, à force de mettre de l’argent public dans des produits logement, on alimente en partie les prix.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors, était-il mal conçu, à l’origine ?
 
BENOIST APPARU Pas mal conçu. Mais peut-être, d’ailleurs, ce n’est même pas le sujet, encore ne nous posons pas la question de savoir ce qu’on a fait il y a 1 an ou il y a 10 ans, posons-nous juste la question, notre responsabilité aujourd’hui…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN C’est de trouver de l’argent.
 
BENOIST APPARU Ce n’est pas de trouver de l’argent…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ah bon !
 
BENOIST APPARU C’est de protéger les Français, et pour protéger les Français il faut limiter les déficits. Vous avez vu, et je l’ai entendu ce matin, sur vos ondes, la situation actuelle de l’Italie, la situation actuelle des différentiels de prêts entre la France et l’Allemagne…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Qui se creuse. L’écart se creuse.
 
BENOIST APPARU Est-ce que vous voulez qu’on ait demain en Italie ce qu’on a aujourd’hui en Grèce, et après-demain en France ? La réponse, pour ce qui me concerne, pour ce gouvernement, c’est non, et on fera tout, tout, pour protéger les Français et éviter d’en arriver là. C’est ça l??enjeu. Et donc, la dépense publique, qui nous est promise tous les jours par François HOLLANDE, et les autres, ce n’est pas notre tasse de thé.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN La suppression du SCELLIER, la loi SCELLIER, dès 2013, on est bien d’accord ?
 
BENOIST APPARU Tout à fait.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Dès 2013, mais la loi SCELLIER finançait le logement intermédiaire, dit intermédiaire.
BENOIST APPARU Alors, la loi SCELLIER c’est quoi, c’est ce qu’on appelle de l’investissement locatif dans notre jargon…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Exactement.
 
BENOIST APPARU C'est-à-dire un promoteur construit un immeuble, vend à un investisseur un appartement, et cet investisseur, contre une défiscalisation, moins d’impôts à payer…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Est obligé de le louer pendant 9 ou 15 ans.
 
BENOIST APPARU Il le loue 9 à 15 ans, c’est ça le principe. Ce SCELLIER, qui est un produit qui a été inventé, je vous le rappelle, après 2008, pour accompagner le secteur du BTP…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Inventé par qui ?
 
BENOIST APPARU Inventé par François SCELLIER, c’est le nom du député…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et par quel gouvernement ?
 
BENOIST APPARU Par ce gouvernement-là, juste après 2008, après la crise, pour aider le secteur de la construction, et du bâtiment. C’est pour ça qu’on a inventé ce SCELLIER-là. Depuis lors on a fait baisser le SCELLIER en question, on l’avait commencé à 4 milliards, et aujourd’hui, enfin l’année prochaine en 2012, il sera à 1 milliard de dépense.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que ça veut dire qu’on n’aide plus le secteur alors ?
 
BENOIST APPARU Ça veut juste dire la chose suivante. En 2008, on est dans une crise économique, les subprimes, il faut remettre de l’essence dans le moteur économique, et donc on fait le plan de relance. La crise, aujourd’hui, ce n’est pas la crise des subprimes, c’est une crise des dettes souveraines, c’est une crise de la dépense publique. Continuons à dépenser publiquement, refusons toutes les économies, parce que là encore, dans vos discours, aux uns et aux autres, dans nos discours, aux uns et aux autres, on est tous vertueux dès qu’il s’agit d’avoir un principe général…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui.
 
BENOIST APPARU Il faut moins dépenser d’argent. Tous vertueux là-dessus. Par contre, dès qu’effectivement on prend secteur par secteur, plus personne ne veut, effectivement, être vertueux. Eh bien nous, nous l’assumons, nous avons ce courage-là, et on ira jusqu’au bout en la matière, parce que je me répète, c’est comme ça qu’on protégera les Français. Et si ça passe par effectivement des décisions difficiles, comme celles que nous prenons en ce moment sur le logement, nous les assumerons et irons jusqu’au bout.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que Jean-Pierre CHEVENEMENT doit quitter son logement ? Qui n’est pas un HLM, je le précise, c’est un logement de 120 mètres carré, loué 1200 euros, en plein coeur…
 
BENOIST APPARU 1400 au Panthéon.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN 1400, maintenant, en plein coeur de Paris, dans le 5ème arrondissement.
 
BENOIST APPARU Ecoutez, je trouve cette histoire très amusante, mais vraiment très amusante.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Allez-y.
 
BENOIST APPARU Pourquoi. Quel est le gouvernement qui a décidé de mettre en place le surloyer et de pouvoir, donné le pouvoir aux HLM de « sortir » du HLM ceux qui avaient trop d’argent ? C’est notre gouvernement. Qui a refusé de le voter ? C’est le PS. Et c’est aujourd’hui le PS, si j’ai bien compris, qui donne des leçons de morale à l’un de ses ex-membres, sur ce thème-là. Je trouve ça très amusant.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais oui, c’est la Mairie de Paris qui lui demande de partir.
 
BENOIST APPARU Oui, c’est la Mairie de Paris, tout à fait. Alors, juste deux points…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais est-ce qu’il doit partir ? Je vous pose la question.
 
BENOIST APPARU Moi, je n’ai pas à choisir. Monsieur CHEVENEMENT il est dans les clous de la loi, donc il fera ce qu’il veut. Il est dans les clous de la loi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN … Pas « expulsable », il a 62 ans.
 
BENOIST APPARU Juridiquement il peut rester, maintenant c’est son problème, lui, dans sa glace, avec sa morale. Mais la Mairie de Paris, c’est ça qui m’intéresse, la Mairie de Paris, qu’est-ce qu’elle fait ? Un, comme par hasard, comme par hasard j’imagine, c’est au lendemain d’une déclaration de Jean-Pierre CHEVENEMENT qu’on découvre qu’il est logé par la Ville de Paris. C’est bien ça ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui.
 
BENOIST APPARU Et c’est au lendemain de sa déclaration de candidature que, comme par hasard, il y a une lettre qui part en disant, « quittez votre logement HLM », et que cette lettre se retrouve sur la voie publique…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN On en avait déjà parlé.
 
BENOIST APPARU J’imagine qu’il n’y a pas de relation de causalité entre les deux. Mais surtout, là encore, c’est cette même Ville de Paris, qui refuse de signer avec l’Etat, une convention, que je leur propose, pour dire voilà : sur le parc HLM de Paris il faut mettre des DALO ; vous savez, le droit opposable au logement ; et il faut qu’on ait des sorties d’hébergement, c'est-à-dire les personnes sans abri qui sont dans les centres d’hébergement. J’ai deux bailleurs sociaux, deux, en Ile-de-France, qui refusent de signer avec l’Etat. Deux. Les Hauts-de-Seine ils signent avec nous, y compris pour les DALO. J’ai deux bailleurs, la RIVP, Paris Habitat, les deux qui dépendent de la Ville de Paris, ce sont les seuls qui refusent de signer avec nous. Alors, le double langage de la Ville de Paris, où le matin je joue la morale…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Qui vous a accusé d’ailleurs d’avoir laissé… oui.
 
BENOIST APPARU Le matin je joue la morale, et effectivement je fais des grandes déclarations avec des grands trémolos dans la voix pour montrer que je défends les pauvres, mais qui dans la réalité de sa politique quotidienne, refuse de signer avec l’Etat pour reloger les DALO, y en a marre. Que la Ville de Paris dénonce Jean-Pierre CHEVENEMENT dans un logement social, je peux le comprendre, mais à ce moment-là que les mêmes nous disent, qu’ils ne reviendront pas sur les décisions, que nous avons prises, sur le surloyer, or ce sont les mêmes qui dénoncent au quotidien le surloyer et le non-maintien dans les lieux.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Benoist APPARU, la Ville de Paris qui vous accuse de refuser d’ouvrir des places d’hébergement d’urgence supplémentaires. C’est vrai ça ?
 
BENOIST APPARU Vous savez, la Ville de Paris, en ce moment…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Après le drame qui s’est produit, la mort de ce bébé dans les rues de Paris.
 
BENOIST APPARU Raconte un peu tout et n’importe quoi. Tout et n’importe quoi. Mais vraiment tout et n’importe quoi. C’est du mensonge et des contrevérités, en permanence. Cet hiver, on va ouvrir 10 000 places de plus, comme tous les hivers. Alors, qu’ils communiquent un peu moins, qu’ils travaillent un peu plus, qu’ils arrêtent de se draper de vertus qu’ils n’ont pas, et tout ira mieux.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Dernière question. Laurent WAUQUIEZ veut réserver une partie des logements sociaux à ceux qui travaillent. Vous êtes d’accord ?
 
BENOIST APPARU Aujourd’hui le logement social accueille beaucoup de travailleurs, notamment ceux qui sont financés par les partenaires sociaux, ce qu’on appelle le 1% Logement, où on réserve les logements aux travailleurs. Et donc moi j’ai le sentiment, mais on peut avoir ses différences avec Laurent WAUQUIEZ, que le logement HLM il est plutôt fait pour loger les plus modestes. Pourquoi ? Parce que si on investit de l’argent public…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Même ceux qui ne travaillent pas ?
 
BENOIST APPARU Même ceux qui ne travaillent pas, parce que sinon vous allez les loger où, ceux qui ne travaillent pas ? Ils ne pourront pas aller dans le privé, ce sera trop cher, si vous ne les mettez pas dans le HLM, vous les mettez où ? Et puis aujourd’hui, surtout, regardons la réalité des choses. Combien y a-t-il de personnes qui « travaillent » dans l’ensemble du parc HLM ? 83%. 83% des locataires HLM travaillent, 17%, donc, ne travaillent pas. Il me semble que c’est une proportion très raisonnable, et que l’équilibre actuel du logement social me paraît plutôt sain, j’aurais même plutôt tendance à dire qu’à partir du moment où l’Etat investit beaucoup d’argent dans le HLM, c’est plutôt pour loger ceux qui ne peuvent pas se loger ailleurs.
 
Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 14 novembre 2011