Texte intégral
Je suis particulièrement heureuse que ce débat ait lieu aujourd'hui : trois jours après la conférence de la famille qui a vu la création d'un véritable congé de paternité, premier pas décisif vers une meilleure conciliation de la vie familiale et professionnelle, vers plus d'égalité entre les femmes et les hommes dans leurs responsabilités au sein de la famille.
Cette concordance des dates me permet de souligner combien la réforme d'aujourd'hui s'inscrit dans une réflexion globale sur les évolutions de la famille contemporaine et la solidarité des différents chantiers d'une politique familiale qui doit permettre de mieux articuler les libertés, les responsabilités et les sécurités nécessaires, les choix privés et les solidarités publiques.
Refonder et rénover l'autorité parentale qui procède du lien de filiation, quel que soit le statut juridique du couple ou les désunions parentales susceptibles d'intervenir, soutenir dans la vie de tous les jours l'exercice concret de la parentalité en veillant à ce que le père prenne toute la place, de droit et de devoir, qui lui revient, à ce que le droit de tout enfant à être éduqué par ses deux parents, y compris après leur séparation, soit mieux garanti et à ce que l'égalité formelle entre père et mère devienne une égalité plus réelle : telle est l'inspiration de la politique familiale que je conduis.
La réforme du droit civil de la famille dont nous avons, avec Marylise Lebranchu, Ministre de la Justice, posé les principes dans un document d'orientation, constitue en quelque sorte le socle de toutes les autres dont le point commun est de considérer que les droits et les devoirs auxquels nous donnons force de loi ne vont jamais sans les moyens de les exercer.
Le droit de la famille est la clef de voûte de la politique familiale, il est bien autre chose qu'une simple technique de régulation sociale au service d'impératifs gestionnaires : il fait sens, c'est-à-dire, au besoin sanction mais avant tout institution et promotion familiales.
Il est devenu un droit du principe et non plus un droit du modèle comme l'était celui du code Napoléon qui ensérait la famille patriarcale dans le carcan uniforme de la puissance maritale et de la puissance paternelle. Cela siginifie qu'il appartient désormais à notre droit civil d'énoncer des règles communes et de fixer au bon vouloir de chacun les limites résultant du principe essentiel de l'indisponibilité de l'état des personnes, garant de l'asymétrie des places dans la famille et de l'impossibilité de leur permutation, avec l'interdit fondamental de l'inceste.
Un droit qui témoigne que la famille, domaine par excellence des sentiments privés, est aussi une affaire d'Etat : non au sens où il reviendrait aux pouvoirs publics de normaliser les modes de vie, d'empiéter sur les intimités ou d'instrumenter les familles à des fins étrangères à leur mission mais au sens de la solidarité assumée. En définissant un droit commun porteur de repères stables et en mettant en place les moyens qu'elle estime nécessaire à l'exercice des fonctions parentales, la collectivité des adultes assume sa commune responsabilité générationnelle et lui donne force de loi. Je l'ai déjà dit ici même. Ce droit-là est un droit de la bonne distance : ni incertain ni intrusif. Il n'a pas à saisir tout le vif et doit donc s'obliger à une certaine retenue. Trop loquace, il serait envahissant. Trop silencieux, il s'effacerait devant la loi du plus fort et du fait accompli.
C'est en même temps un droit très présent dans la vie quotidienne. En instituant les parents dans l'espace public, il édifie des bases claires pour les fonctionnements privés. C'est pour valoriser cette institution des parents dans l'espace public que je prépare, en concertation avec l'association des maires de France, des mesures qui permettront de solenniser le moment de la reconnaissance d'un enfant et de proposer à tous les parents une cérémonie civile parentale célébrée par les maires ou leurs adjoints.
Le droit civil, qui définit les statuts et les places de chacun, a valeur référentielle.
C'est à partir de ses concepts que s'organisent le droit social, plus sensible aux situations concrètes, le droit pénal qui sanctionne, les droits fiscaux et administratifs qui régulent les fonctionnements quotidiens.
Pour garder toute sa force expressive et symbolique, le droit de la famille doit aussi être mieux connu et mieux compris des parents qui tirent de l'autorité que la loi leur reconnaît la source première de leur légitimité. Les parents mais aussi les administrations et les organismes en charge des politiques familiales et éducatives, les professionnels au contact de l'enfance et des familles méconnaissent parfois les dispositions utiles au respect desquelles ils sont tenus.
L'accès véritable de chacun à la plénitude de ses droits et de ses devoirs exige que l'on fasse mieux connaître à tous les parents la nature et l'étendue de leurs prérogatives et de leurs obligations. C'est la raison pour laquelle je prépare, en concertation avec les maires, des mesures permettant une meilleure information et une sensibilisation précoce des deux parents : cérémonie civile parentale devant le maire ou ses adjoints pour encourager la reconnaissance conjointe, carnet de paternité, livret des parents remis lors de la reconnaissance
Cette réforme du droit de l'autorité parentale contribue à refonder une vision partagée de la famille, forte d'une légitimité nouvelle, de valeurs communes, d'espoirs partageables et d'un pacte d'obligations acceptées.
La famille de nos jours est bien différente de ce qu'elle était il y a 30 ou 40 ans. Il n'y a pas lieu de s'en alarmer : la famille témoigne avec une belle vigueur de ce que changer n'est pas se perdre. Plus diverse, moins prévisible, elle reste le lieu de convergence de fortes espérances et d'aspirations très voisines, mais il n'est plus de modèle unique ni de configurations familiales assurées à coup sûr de leur stabilité. Cela ne va pas sans inquiétudes, sans conflits, sans mises à l'épreuve des liens entre parents et enfants. Le mariage reste un engagement d'autant plus valorisé qu'il est affranchi des conventions et investi d'une exigence de bonheur dont la contrepartie est une moindre soumission aux situations invivables ou mal vécues. Les séparations, dès lors, ne constituent plus une réalité marginale de la vie familiale.
Liberté des choix, égalité des droits, sécurité des liens et continuité des obligations sont à redéfinir et mieux garantir en tenant compte du recentrage de la famille autour du droit de tout enfant à être élevé par ses deux parents, quel que soit le statut juridique ou le devenir de leur couple.
Il en résulte pour moi quatre principes concernant la réforme de l'autorité parentale :
- réaffirmer le bien-fondé de l'autorité parentale
- définir un droit commun à tous les enfants et à tous les parents, quelles que soient les formes de leur vie familiale dont le principe général est l' exercice partagé de l'autorité parentale
- assurer la sécurité du double lien de l'enfant à ses père et mère
- donner aux familles fragilisées par des situations de précarité sociale les moyens matériels d'assurer ce double lien.
Affirmer le bien-fondé de l'autorité parentale, lui donner toute sa force et son sens
" Autorité ", le terme légal heurte parfois ceux qui y voient le creuset des tyrannies domestiques qui nous sont devenues intolérables. Autorité, pourtant, le mot est juste et beau. Il vient du latin, d'un verbe qui signifie " augmenter " et d'un mot qui signifie " auteur ". Etymologiquement et juridiquement, l'autorité est ce par quoi les parents sont reconnus, dans la société, et se reconnaissent eux-mêmes comme " auteurs " de leurs enfants : non pas le fabricant mais l'inspirateur, le véritable fondateur, celui qui institue. Celui qui, ayant hérité, transmet à son tour.
Certains parlent à ce propos d'obligation d'acquitter " la dette généalogique " contractée lorsqu'on était soi-même enfant auprès de ses propres parents. Cette dette de vie est un mélange de protection, d'affection et d'interdits structurants qui permet à l'enfant, personne en devenir, de s'humaniser, de s'inscrire dans une histoire et une lignée ; elle est la condition de son autonomie progressive et de la construction ultérieure d'autres liens ; elle est ce qui relie liberté et responsabilité.
La proposition de loi conserve, à juste titre, l'article inaugural énonçant que " l'enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses parents ". Ce texte n'orchestre pas la soumission enfantine à la toute-puissance abusive de ses père et mère mais signifie au contraire, que parents et enfants doivent rester dans une bonne distance et une hiérarchie des places qui sont conformes à l'obligation de protection des uns par les autres et à défaut desquelles nulle autorité juste ne peut advenir et que si l'enfant a des droits, il a aussi des devoirs.
Il était donc nécessaire de maintenir cette mention mais de la compléter pour que le lien entre les droits et les devoirs soit plus ferme et pour tenir compte d'une conception de nos jours plus exigeante des droits de l'enfant.
Le droit de tout enfant d'être éduqué et protégé par ses parents dans le respect de sa personne doit avoir force de loi de même que le fait, pour ses parents, de l'associer aux décisions qui le concernent, de manière adaptée à son âge et à son degré de maturité. De 0 à 18 ans, les droits de l'enfant en effet ne peuvent être les mêmes.
Est ainsi posé le cadre structurant et sécurisé dont a besoin l'enfant, personne en devenir et, comme telle, sujet de protection.
" Affranchi de l'autorité des adultes, notait déjà Hannah Arendt, l'enfant n'est pas libéré mais soumis à une autorité plus tyrannique qui le nie comme individu ". Le reconnaître comme individu, en effet, c'est donner toute sa place à sa parole, l'entendre et y répondre mais de la place irréductible d'adulte et de parent qui doit en toutes les occasions rester la nôtre.
Un droit commun de l'autorité parentale fondé sur le principe de l'exercice partagé par le père et la mère
Le droit de l'autorité parentale qui en 1970 a remplacé la puissance paternelle par le principe, pour les couples mariés, de l'égale responsabilité du père et de la mère, puis a été étendu, en 1987 et 1993, sous certaines conditions, aux couples divorcés et aux couples non mariés, doit être aujourd'hui affermi : nous devons parachever ces réformes qui ont posé des principes forts dont nous tirons maintenant toutes les conséquences, et d'abord par la création d'un chapitre unique du code civil pour consacrer le droit commun de l'autorité parentale.
La dispersion dans notre code civil des dispositions sur l'autorité parentale entre deux chapitres dont celui consacré au divorce, obscurcit le cadre juridique donné aux parents : comme si la rupture d'un couple modifiait la responsabilité du père et de la mère.
Regrouper dans un chapitre unique toutes les dispositions relatives à l'autorité parentale, quel que soit le statut juridique de la famille, donnera à ces dispositions plus de force et de clarté. Leur permanence doit être réaffirmée quels que soient les aléas de la vie du couple.
La condition de communauté de vie comme condition à l'exercice en commun de l'autorité parentale est supprimée.
Faire procéder l'exercice de l'autorité parentale du seul lien de filiation dès lors qu'il est établi dans la première année de la vie de l'enfant, renforce l'égale responsabilité des parents.
C'est un gage de plus grande sécurité juridique pour tous puisque la seule lecture de l'acte de naissance d'un enfant permettra d'établir que les deux parents ont l'exercice de l'autorité parentale.
C'est également inciter les pères à reconnaître le plus tôt possible leur enfant : aujourd'hui, 20 000 enfants naissent chaque année qui ne sont pas reconnus par leur père, ce nombre devrait diminuer grâce à l'information précoce des pères par le carnet de paternité qui leur sera adressé pendant la grossesse de la mère, grâce aussi au développement de ce nouvel acte fondateur de la famille que constitue la démarche commune que font les deux parents pour aller reconnaître ensemble leur enfant avant la naissance, démarche qu'il convient d'encourager.
L'exercice de l'autorité parentale par les parents séparés est stabilisé et devient permanent.
Les parents séparés sont des parents comme les autres : en droit leur statut est exactement le même qu'avant la séparation. Seuls les désaccords liés aux souffrances de la désunion, aux conflits passionnels de la séparation, à la perpétuation des conflits après la séparation, justifient l'intervention d'un juge pour régler les aménagements de la vie quotidienne des enfants. Que le dialogue repris conduise les parents à un accord et ceux-ci retrouvent la plénitude de l'autorité parentale : leurs accords priment la décision antérieure du juge et les tiers sont tenus de prendre en compte ces accords comme au temps de l'union.
Pour l'enfant, ses attentes vis à vis de ses parents restent inchangées.
Dans trop de familles séparées la réalité est encore malheureusement éloignée des affirmations de principe du droit : les pratiques évoluent rapidement, dit-on, mais nombre d'enfants de parents séparés ne voient plus leur père ou très épisodiquement.
Faire entrer le principe de la résidence alternée dans le code civil c'est favoriser un partage moins inégalitaire des temps, C'est en finir avec des formules standard qui, pour n'avoir jamais figuré dans la loi, figeaient de manière sûre l'inégalité des rôles, réservant aux pères le fameux " week-end sur deux ", laissant à la mère la charge lourde de toute la semaine, notamment pour éduquer les adolescents.
Nous ne voulons pas remplacer un standard par un autre et devons nous garder d'affirmations trop dogmatiques sur ce qu'exige l'intérêt de l'enfant face à la séparation de ses parents.
Pour atténuer " cette souffrance et la fêlure que porte en lui la parole brisée de ceux qui, à ses yeux, ne pouvaient être qu'un ", selon l'expression de la juriste Marie-Thérèse Meulders-Klein, une chose est sûre : tout doit être mis en uvre pour que les parents retrouvent une seule parole pour signifier à leur enfant ce qu'ils ont décidé ensemble et leur semble le mieux pour organiser sa vie nouvelle.
Avant d'être un droit et un devoir du père, la continuité du lien de l'enfant avec lui est d'abord un droit de l'enfant, mais c'est aussi un droit de la mère à se voir déchargée de l'assignation à des taches réputées maternelles par un partage enfin égalitaire d'éducation quotidienne de l'enfant.
Rappeler que c'est un devoir pour chaque parent de maintenir des relations personnelles avec son enfant, c'est bannir de notre vocabulaire un concept qui ne devrait déjà plus avoir cours puisqu'en matière d'autorité parentale il n'est pas de droit sans devoir : il faut bannir de notre vocabulaire cette notion absurde de " droit de visite et d'hébergement ". Que peut signifier aujourd'hui pour un père le droit de " visiter " son enfant ? Comment expliquer à tel autre père qu'il ne s'agit pas d'une prérogative discrétionnaire, que son enfant l'attend ce 3ème samedi du mois et qu'une désertion sera vécue par celui-ci comme un abandon ?
Valoriser la résidence alternée, ce n'est pas en faire une panacée ni signifier aux parents que c'est à coup sûr la solution qui répondra le mieux aux besoins singuliers de leur enfant, mais c'est prendre en compte une dimension essentielle de l'éducation des enfants car c'est au travers des mille faits, gestes et paroles de la vie quotidienne que nous transmettons, parfois à notre insu, l'essentiel à nos enfants. C'est aussi maintenir cette relation familiale dans sa dimension triangulaire, si importante aux yeux des professionnels, pour l'équilibre psychologique de l'enfant. C'est enfin inciter fortement les parents à s'entendre pour épargner aux enfants le plus possible les conflits et s'interdire de disqualifier l'autre, afin de sauvegarder le besoin qu'a l'enfant d'estimer son père et sa mère.
Le mode d'organisation de la vie des enfants est une dimension cruciale de leur épanouissement, mais ils ont également besoin que se manifeste clairement le respect de chaque parent vis à vis de l'autre parent avec l'enfant, et l'intérêt que chacun continue à lui porter . Il n'est par ailleurs pas nécessaire de demeurer un couple pour demeurer père et mère à part entière et je préfère pour cette raison ne pas utiliser le terme de couple parental, puisque le couple s'est défait. Mais il reste bien un double lien parental, une coparentalité.
La sécurité du double lien parental nécessite également que soient donnés aux parents les moyens matériels de l'assumer : nombre de familles monoparentales, composées pour l'essentiel de mères, sont parmi les plus exposées à l'isolement et à la précarité. Des pères séparés sont également socialement précarisés et considérés comme sans charge de famille.
C'est pourquoi je mets en place une politique globale de soutien aux familles en situation de précarité pour leur permettre d'exercer les mêmes droits et devoirs.
Rappeler la responsabilité première des parents dans l'organisation des conséquences de la séparation pour les enfants, présumer qu'une décision prise de leur commun accord est la solution qui répond le mieux aux besoins de leur enfant, n'est pas faire preuve d'angélisme.
Les conflits existent, ils n'ont pas à être niés ou évacués à tout prix mais régulés de telle sorte que les enfants en fassent le moins possible les frais et que le plus vulnérable des parents ne soit pas livré sans défense au plus fort.
Les procédures judiciaires et la mission de conciliation du juge doivent tenir pleinement leur place. Pour cette raison, il faut soulager l'institution judiciaire, dont tous les magistrats soulignent à juste titre l'encombrement par un certain nombre de procédures inutiles, afin que ses professionnels puissent se concentrer sur les contentieux où dire le droit est une nécessité incontournable.
Je voudrais également rappeler le rôle qu'à travers le ministère public, peut jouer chaque adulte, chaque institution confrontés aux difficultés graves d'un enfant liées à la séparation de ses parents. Le Procureur de la République a en effet des compétences civiles que l'on oublie parfois et auxquelles tout un chacun, y compris l'enfant, peut recourir pour demander au juge des affaires familiales de modifier une décision concernant les modalités d'exercice de l'autorité parentale.
La proposition de loi n'ajoute pas au dispositif existant qui prévoie l'audition de l'enfant par le juge : ce dispositif permet en effet que soit prise en compte la parole de l'enfant, avec la prudence que requiert sa nécessaire protection contre toute responsabilité dans les décisions qui doivent trancher un conflit entre ses parents. Il faut se tenir à égale distance de ces deux dangers jumeaux : ni l'enfant-chose , ni l'enfant-juge.
Les dispositions nouvelles concernant la délégation de l'autorité parentale permettront à d'autres adultes d'épauler des parents en difficulté sans pour autant les exclure lorsqu'ils seront en mesure d'agir pour leurs enfants.
La médiation familiale peut également être un recours pertinent dans certaines situations : en amont d'une saisine judiciaire, dans le cas où le contentieux familial peut trouver par ce biais une solution apaisée, ou pendant le cours d'une instance judiciaire pour aider, sans occulter le conflit, à restaurer des relations acceptables pour les deux parties et préserver les enfants d'effets dévastateurs. La médiation est un droit qui doit être plus largement ouvert à tous en même temps que nous devons rester attentifs à ne pas introduire, par ce biais et au motif de mieux faire, une forme de " paternalisme d'Etat " que rien ne justifie. La médiation est adaptée à certains contextes familiaux, elle n'a pas forcément sa place dans d'autres., notamment dans des situations de violence conjugales. Pour creuser cette question et contribuer à éclairer les décisions dont elle devra faire l'objet, j'ai constitué un groupe de travail associant les différents partenaires de la politique familiale ainsi que tous les acteurs directement concernés. J'ai confié à ce groupe la mission de procéder à un état des lieux quantitatif et qualitatif, de définir les conditions de développement d'une médiation de qualité en direction de tous les publics et sur tout le territoire, de déterminer les moyens à mettre en uvre pour ce faire. Ses conclusions me seront remises avant la fin du mois. Pour moi, les choses sont claires : la médiation est une aide qui doit être plus largement accessible à tous mais en aucun cas une tutelle imposée a priori aux couples et aux familles.
Aujourd'hui, dans le débat que nous allons avoir sur cette proposition de loi, il s'agit en somme de consolider l'autorité durablement protectrice de parents unis ou désunis, de consolider l'exercice d'une responsabilité qui est, pour moi, la pendant naturel de libertés acquises et pleinement reconnues des adultes.
Les dispositions relatives à l'autorité parentale constituent une étape très importante de la réforme du droit commun des familles. D'autres suivront, car il reste, pour permettre aux familles de réussir pleinement ce qu'Irène Théry a appelé leur " mutation heureuse ", d'autres droits à ouvrir, à faire vivre, et d'autres devoirs à clarifier en donnant les moyens de les exercer.
Cette réforme dont nous allons débattre est un message fort à l'égard des adultes pour les aider à surmonter les conflits et les épargner à l'enfant et à l'adolescent ; pour que, gardant l'estime de chacun d'eux, ces adolescents aient à leur tour envie, de devenir adulte afin de construire plus tard , un couple, une famille, un enfant et lui transmettre, à son tour l'envie de grandir et transmettre des valeurs.
Tel est le sens du devoir fondamental des adultes, celui d'assurer l'enchaînement paisible des générations.
(Source http://www.social.gouv.fr, le 27 juin 2001)
Cette concordance des dates me permet de souligner combien la réforme d'aujourd'hui s'inscrit dans une réflexion globale sur les évolutions de la famille contemporaine et la solidarité des différents chantiers d'une politique familiale qui doit permettre de mieux articuler les libertés, les responsabilités et les sécurités nécessaires, les choix privés et les solidarités publiques.
Refonder et rénover l'autorité parentale qui procède du lien de filiation, quel que soit le statut juridique du couple ou les désunions parentales susceptibles d'intervenir, soutenir dans la vie de tous les jours l'exercice concret de la parentalité en veillant à ce que le père prenne toute la place, de droit et de devoir, qui lui revient, à ce que le droit de tout enfant à être éduqué par ses deux parents, y compris après leur séparation, soit mieux garanti et à ce que l'égalité formelle entre père et mère devienne une égalité plus réelle : telle est l'inspiration de la politique familiale que je conduis.
La réforme du droit civil de la famille dont nous avons, avec Marylise Lebranchu, Ministre de la Justice, posé les principes dans un document d'orientation, constitue en quelque sorte le socle de toutes les autres dont le point commun est de considérer que les droits et les devoirs auxquels nous donnons force de loi ne vont jamais sans les moyens de les exercer.
Le droit de la famille est la clef de voûte de la politique familiale, il est bien autre chose qu'une simple technique de régulation sociale au service d'impératifs gestionnaires : il fait sens, c'est-à-dire, au besoin sanction mais avant tout institution et promotion familiales.
Il est devenu un droit du principe et non plus un droit du modèle comme l'était celui du code Napoléon qui ensérait la famille patriarcale dans le carcan uniforme de la puissance maritale et de la puissance paternelle. Cela siginifie qu'il appartient désormais à notre droit civil d'énoncer des règles communes et de fixer au bon vouloir de chacun les limites résultant du principe essentiel de l'indisponibilité de l'état des personnes, garant de l'asymétrie des places dans la famille et de l'impossibilité de leur permutation, avec l'interdit fondamental de l'inceste.
Un droit qui témoigne que la famille, domaine par excellence des sentiments privés, est aussi une affaire d'Etat : non au sens où il reviendrait aux pouvoirs publics de normaliser les modes de vie, d'empiéter sur les intimités ou d'instrumenter les familles à des fins étrangères à leur mission mais au sens de la solidarité assumée. En définissant un droit commun porteur de repères stables et en mettant en place les moyens qu'elle estime nécessaire à l'exercice des fonctions parentales, la collectivité des adultes assume sa commune responsabilité générationnelle et lui donne force de loi. Je l'ai déjà dit ici même. Ce droit-là est un droit de la bonne distance : ni incertain ni intrusif. Il n'a pas à saisir tout le vif et doit donc s'obliger à une certaine retenue. Trop loquace, il serait envahissant. Trop silencieux, il s'effacerait devant la loi du plus fort et du fait accompli.
C'est en même temps un droit très présent dans la vie quotidienne. En instituant les parents dans l'espace public, il édifie des bases claires pour les fonctionnements privés. C'est pour valoriser cette institution des parents dans l'espace public que je prépare, en concertation avec l'association des maires de France, des mesures qui permettront de solenniser le moment de la reconnaissance d'un enfant et de proposer à tous les parents une cérémonie civile parentale célébrée par les maires ou leurs adjoints.
Le droit civil, qui définit les statuts et les places de chacun, a valeur référentielle.
C'est à partir de ses concepts que s'organisent le droit social, plus sensible aux situations concrètes, le droit pénal qui sanctionne, les droits fiscaux et administratifs qui régulent les fonctionnements quotidiens.
Pour garder toute sa force expressive et symbolique, le droit de la famille doit aussi être mieux connu et mieux compris des parents qui tirent de l'autorité que la loi leur reconnaît la source première de leur légitimité. Les parents mais aussi les administrations et les organismes en charge des politiques familiales et éducatives, les professionnels au contact de l'enfance et des familles méconnaissent parfois les dispositions utiles au respect desquelles ils sont tenus.
L'accès véritable de chacun à la plénitude de ses droits et de ses devoirs exige que l'on fasse mieux connaître à tous les parents la nature et l'étendue de leurs prérogatives et de leurs obligations. C'est la raison pour laquelle je prépare, en concertation avec les maires, des mesures permettant une meilleure information et une sensibilisation précoce des deux parents : cérémonie civile parentale devant le maire ou ses adjoints pour encourager la reconnaissance conjointe, carnet de paternité, livret des parents remis lors de la reconnaissance
Cette réforme du droit de l'autorité parentale contribue à refonder une vision partagée de la famille, forte d'une légitimité nouvelle, de valeurs communes, d'espoirs partageables et d'un pacte d'obligations acceptées.
La famille de nos jours est bien différente de ce qu'elle était il y a 30 ou 40 ans. Il n'y a pas lieu de s'en alarmer : la famille témoigne avec une belle vigueur de ce que changer n'est pas se perdre. Plus diverse, moins prévisible, elle reste le lieu de convergence de fortes espérances et d'aspirations très voisines, mais il n'est plus de modèle unique ni de configurations familiales assurées à coup sûr de leur stabilité. Cela ne va pas sans inquiétudes, sans conflits, sans mises à l'épreuve des liens entre parents et enfants. Le mariage reste un engagement d'autant plus valorisé qu'il est affranchi des conventions et investi d'une exigence de bonheur dont la contrepartie est une moindre soumission aux situations invivables ou mal vécues. Les séparations, dès lors, ne constituent plus une réalité marginale de la vie familiale.
Liberté des choix, égalité des droits, sécurité des liens et continuité des obligations sont à redéfinir et mieux garantir en tenant compte du recentrage de la famille autour du droit de tout enfant à être élevé par ses deux parents, quel que soit le statut juridique ou le devenir de leur couple.
Il en résulte pour moi quatre principes concernant la réforme de l'autorité parentale :
- réaffirmer le bien-fondé de l'autorité parentale
- définir un droit commun à tous les enfants et à tous les parents, quelles que soient les formes de leur vie familiale dont le principe général est l' exercice partagé de l'autorité parentale
- assurer la sécurité du double lien de l'enfant à ses père et mère
- donner aux familles fragilisées par des situations de précarité sociale les moyens matériels d'assurer ce double lien.
Affirmer le bien-fondé de l'autorité parentale, lui donner toute sa force et son sens
" Autorité ", le terme légal heurte parfois ceux qui y voient le creuset des tyrannies domestiques qui nous sont devenues intolérables. Autorité, pourtant, le mot est juste et beau. Il vient du latin, d'un verbe qui signifie " augmenter " et d'un mot qui signifie " auteur ". Etymologiquement et juridiquement, l'autorité est ce par quoi les parents sont reconnus, dans la société, et se reconnaissent eux-mêmes comme " auteurs " de leurs enfants : non pas le fabricant mais l'inspirateur, le véritable fondateur, celui qui institue. Celui qui, ayant hérité, transmet à son tour.
Certains parlent à ce propos d'obligation d'acquitter " la dette généalogique " contractée lorsqu'on était soi-même enfant auprès de ses propres parents. Cette dette de vie est un mélange de protection, d'affection et d'interdits structurants qui permet à l'enfant, personne en devenir, de s'humaniser, de s'inscrire dans une histoire et une lignée ; elle est la condition de son autonomie progressive et de la construction ultérieure d'autres liens ; elle est ce qui relie liberté et responsabilité.
La proposition de loi conserve, à juste titre, l'article inaugural énonçant que " l'enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses parents ". Ce texte n'orchestre pas la soumission enfantine à la toute-puissance abusive de ses père et mère mais signifie au contraire, que parents et enfants doivent rester dans une bonne distance et une hiérarchie des places qui sont conformes à l'obligation de protection des uns par les autres et à défaut desquelles nulle autorité juste ne peut advenir et que si l'enfant a des droits, il a aussi des devoirs.
Il était donc nécessaire de maintenir cette mention mais de la compléter pour que le lien entre les droits et les devoirs soit plus ferme et pour tenir compte d'une conception de nos jours plus exigeante des droits de l'enfant.
Le droit de tout enfant d'être éduqué et protégé par ses parents dans le respect de sa personne doit avoir force de loi de même que le fait, pour ses parents, de l'associer aux décisions qui le concernent, de manière adaptée à son âge et à son degré de maturité. De 0 à 18 ans, les droits de l'enfant en effet ne peuvent être les mêmes.
Est ainsi posé le cadre structurant et sécurisé dont a besoin l'enfant, personne en devenir et, comme telle, sujet de protection.
" Affranchi de l'autorité des adultes, notait déjà Hannah Arendt, l'enfant n'est pas libéré mais soumis à une autorité plus tyrannique qui le nie comme individu ". Le reconnaître comme individu, en effet, c'est donner toute sa place à sa parole, l'entendre et y répondre mais de la place irréductible d'adulte et de parent qui doit en toutes les occasions rester la nôtre.
Un droit commun de l'autorité parentale fondé sur le principe de l'exercice partagé par le père et la mère
Le droit de l'autorité parentale qui en 1970 a remplacé la puissance paternelle par le principe, pour les couples mariés, de l'égale responsabilité du père et de la mère, puis a été étendu, en 1987 et 1993, sous certaines conditions, aux couples divorcés et aux couples non mariés, doit être aujourd'hui affermi : nous devons parachever ces réformes qui ont posé des principes forts dont nous tirons maintenant toutes les conséquences, et d'abord par la création d'un chapitre unique du code civil pour consacrer le droit commun de l'autorité parentale.
La dispersion dans notre code civil des dispositions sur l'autorité parentale entre deux chapitres dont celui consacré au divorce, obscurcit le cadre juridique donné aux parents : comme si la rupture d'un couple modifiait la responsabilité du père et de la mère.
Regrouper dans un chapitre unique toutes les dispositions relatives à l'autorité parentale, quel que soit le statut juridique de la famille, donnera à ces dispositions plus de force et de clarté. Leur permanence doit être réaffirmée quels que soient les aléas de la vie du couple.
La condition de communauté de vie comme condition à l'exercice en commun de l'autorité parentale est supprimée.
Faire procéder l'exercice de l'autorité parentale du seul lien de filiation dès lors qu'il est établi dans la première année de la vie de l'enfant, renforce l'égale responsabilité des parents.
C'est un gage de plus grande sécurité juridique pour tous puisque la seule lecture de l'acte de naissance d'un enfant permettra d'établir que les deux parents ont l'exercice de l'autorité parentale.
C'est également inciter les pères à reconnaître le plus tôt possible leur enfant : aujourd'hui, 20 000 enfants naissent chaque année qui ne sont pas reconnus par leur père, ce nombre devrait diminuer grâce à l'information précoce des pères par le carnet de paternité qui leur sera adressé pendant la grossesse de la mère, grâce aussi au développement de ce nouvel acte fondateur de la famille que constitue la démarche commune que font les deux parents pour aller reconnaître ensemble leur enfant avant la naissance, démarche qu'il convient d'encourager.
L'exercice de l'autorité parentale par les parents séparés est stabilisé et devient permanent.
Les parents séparés sont des parents comme les autres : en droit leur statut est exactement le même qu'avant la séparation. Seuls les désaccords liés aux souffrances de la désunion, aux conflits passionnels de la séparation, à la perpétuation des conflits après la séparation, justifient l'intervention d'un juge pour régler les aménagements de la vie quotidienne des enfants. Que le dialogue repris conduise les parents à un accord et ceux-ci retrouvent la plénitude de l'autorité parentale : leurs accords priment la décision antérieure du juge et les tiers sont tenus de prendre en compte ces accords comme au temps de l'union.
Pour l'enfant, ses attentes vis à vis de ses parents restent inchangées.
Dans trop de familles séparées la réalité est encore malheureusement éloignée des affirmations de principe du droit : les pratiques évoluent rapidement, dit-on, mais nombre d'enfants de parents séparés ne voient plus leur père ou très épisodiquement.
Faire entrer le principe de la résidence alternée dans le code civil c'est favoriser un partage moins inégalitaire des temps, C'est en finir avec des formules standard qui, pour n'avoir jamais figuré dans la loi, figeaient de manière sûre l'inégalité des rôles, réservant aux pères le fameux " week-end sur deux ", laissant à la mère la charge lourde de toute la semaine, notamment pour éduquer les adolescents.
Nous ne voulons pas remplacer un standard par un autre et devons nous garder d'affirmations trop dogmatiques sur ce qu'exige l'intérêt de l'enfant face à la séparation de ses parents.
Pour atténuer " cette souffrance et la fêlure que porte en lui la parole brisée de ceux qui, à ses yeux, ne pouvaient être qu'un ", selon l'expression de la juriste Marie-Thérèse Meulders-Klein, une chose est sûre : tout doit être mis en uvre pour que les parents retrouvent une seule parole pour signifier à leur enfant ce qu'ils ont décidé ensemble et leur semble le mieux pour organiser sa vie nouvelle.
Avant d'être un droit et un devoir du père, la continuité du lien de l'enfant avec lui est d'abord un droit de l'enfant, mais c'est aussi un droit de la mère à se voir déchargée de l'assignation à des taches réputées maternelles par un partage enfin égalitaire d'éducation quotidienne de l'enfant.
Rappeler que c'est un devoir pour chaque parent de maintenir des relations personnelles avec son enfant, c'est bannir de notre vocabulaire un concept qui ne devrait déjà plus avoir cours puisqu'en matière d'autorité parentale il n'est pas de droit sans devoir : il faut bannir de notre vocabulaire cette notion absurde de " droit de visite et d'hébergement ". Que peut signifier aujourd'hui pour un père le droit de " visiter " son enfant ? Comment expliquer à tel autre père qu'il ne s'agit pas d'une prérogative discrétionnaire, que son enfant l'attend ce 3ème samedi du mois et qu'une désertion sera vécue par celui-ci comme un abandon ?
Valoriser la résidence alternée, ce n'est pas en faire une panacée ni signifier aux parents que c'est à coup sûr la solution qui répondra le mieux aux besoins singuliers de leur enfant, mais c'est prendre en compte une dimension essentielle de l'éducation des enfants car c'est au travers des mille faits, gestes et paroles de la vie quotidienne que nous transmettons, parfois à notre insu, l'essentiel à nos enfants. C'est aussi maintenir cette relation familiale dans sa dimension triangulaire, si importante aux yeux des professionnels, pour l'équilibre psychologique de l'enfant. C'est enfin inciter fortement les parents à s'entendre pour épargner aux enfants le plus possible les conflits et s'interdire de disqualifier l'autre, afin de sauvegarder le besoin qu'a l'enfant d'estimer son père et sa mère.
Le mode d'organisation de la vie des enfants est une dimension cruciale de leur épanouissement, mais ils ont également besoin que se manifeste clairement le respect de chaque parent vis à vis de l'autre parent avec l'enfant, et l'intérêt que chacun continue à lui porter . Il n'est par ailleurs pas nécessaire de demeurer un couple pour demeurer père et mère à part entière et je préfère pour cette raison ne pas utiliser le terme de couple parental, puisque le couple s'est défait. Mais il reste bien un double lien parental, une coparentalité.
La sécurité du double lien parental nécessite également que soient donnés aux parents les moyens matériels de l'assumer : nombre de familles monoparentales, composées pour l'essentiel de mères, sont parmi les plus exposées à l'isolement et à la précarité. Des pères séparés sont également socialement précarisés et considérés comme sans charge de famille.
C'est pourquoi je mets en place une politique globale de soutien aux familles en situation de précarité pour leur permettre d'exercer les mêmes droits et devoirs.
Rappeler la responsabilité première des parents dans l'organisation des conséquences de la séparation pour les enfants, présumer qu'une décision prise de leur commun accord est la solution qui répond le mieux aux besoins de leur enfant, n'est pas faire preuve d'angélisme.
Les conflits existent, ils n'ont pas à être niés ou évacués à tout prix mais régulés de telle sorte que les enfants en fassent le moins possible les frais et que le plus vulnérable des parents ne soit pas livré sans défense au plus fort.
Les procédures judiciaires et la mission de conciliation du juge doivent tenir pleinement leur place. Pour cette raison, il faut soulager l'institution judiciaire, dont tous les magistrats soulignent à juste titre l'encombrement par un certain nombre de procédures inutiles, afin que ses professionnels puissent se concentrer sur les contentieux où dire le droit est une nécessité incontournable.
Je voudrais également rappeler le rôle qu'à travers le ministère public, peut jouer chaque adulte, chaque institution confrontés aux difficultés graves d'un enfant liées à la séparation de ses parents. Le Procureur de la République a en effet des compétences civiles que l'on oublie parfois et auxquelles tout un chacun, y compris l'enfant, peut recourir pour demander au juge des affaires familiales de modifier une décision concernant les modalités d'exercice de l'autorité parentale.
La proposition de loi n'ajoute pas au dispositif existant qui prévoie l'audition de l'enfant par le juge : ce dispositif permet en effet que soit prise en compte la parole de l'enfant, avec la prudence que requiert sa nécessaire protection contre toute responsabilité dans les décisions qui doivent trancher un conflit entre ses parents. Il faut se tenir à égale distance de ces deux dangers jumeaux : ni l'enfant-chose , ni l'enfant-juge.
Les dispositions nouvelles concernant la délégation de l'autorité parentale permettront à d'autres adultes d'épauler des parents en difficulté sans pour autant les exclure lorsqu'ils seront en mesure d'agir pour leurs enfants.
La médiation familiale peut également être un recours pertinent dans certaines situations : en amont d'une saisine judiciaire, dans le cas où le contentieux familial peut trouver par ce biais une solution apaisée, ou pendant le cours d'une instance judiciaire pour aider, sans occulter le conflit, à restaurer des relations acceptables pour les deux parties et préserver les enfants d'effets dévastateurs. La médiation est un droit qui doit être plus largement ouvert à tous en même temps que nous devons rester attentifs à ne pas introduire, par ce biais et au motif de mieux faire, une forme de " paternalisme d'Etat " que rien ne justifie. La médiation est adaptée à certains contextes familiaux, elle n'a pas forcément sa place dans d'autres., notamment dans des situations de violence conjugales. Pour creuser cette question et contribuer à éclairer les décisions dont elle devra faire l'objet, j'ai constitué un groupe de travail associant les différents partenaires de la politique familiale ainsi que tous les acteurs directement concernés. J'ai confié à ce groupe la mission de procéder à un état des lieux quantitatif et qualitatif, de définir les conditions de développement d'une médiation de qualité en direction de tous les publics et sur tout le territoire, de déterminer les moyens à mettre en uvre pour ce faire. Ses conclusions me seront remises avant la fin du mois. Pour moi, les choses sont claires : la médiation est une aide qui doit être plus largement accessible à tous mais en aucun cas une tutelle imposée a priori aux couples et aux familles.
Aujourd'hui, dans le débat que nous allons avoir sur cette proposition de loi, il s'agit en somme de consolider l'autorité durablement protectrice de parents unis ou désunis, de consolider l'exercice d'une responsabilité qui est, pour moi, la pendant naturel de libertés acquises et pleinement reconnues des adultes.
Les dispositions relatives à l'autorité parentale constituent une étape très importante de la réforme du droit commun des familles. D'autres suivront, car il reste, pour permettre aux familles de réussir pleinement ce qu'Irène Théry a appelé leur " mutation heureuse ", d'autres droits à ouvrir, à faire vivre, et d'autres devoirs à clarifier en donnant les moyens de les exercer.
Cette réforme dont nous allons débattre est un message fort à l'égard des adultes pour les aider à surmonter les conflits et les épargner à l'enfant et à l'adolescent ; pour que, gardant l'estime de chacun d'eux, ces adolescents aient à leur tour envie, de devenir adulte afin de construire plus tard , un couple, une famille, un enfant et lui transmettre, à son tour l'envie de grandir et transmettre des valeurs.
Tel est le sens du devoir fondamental des adultes, celui d'assurer l'enchaînement paisible des générations.
(Source http://www.social.gouv.fr, le 27 juin 2001)