Texte intégral
NICOLAS ESCOULAN
Bonjour Manuel VALLS et merci d'avoir choisi EUROPE 1 pour votre rentrée politique. D'abord, La Réunion, le bilan du cyclone serait d'1 mort, peut-être 2, de nombreux blessés, de très gros dégâts, faut-il s'attendre à un bilan plus lourd dans les heures qui viennent ?
MANUEL VALLS
Nous verrons bien. Il y a déjà eu des blessés, 1 mort, nous sommes en train, évidemment, d'évaluer les dégâts, 170 000 foyers ont été privés d'électricité, 40% du réseau d'eau est atteint, avec ces problèmes électriques, nous avons anticipé cette situation en envoyant une centaine de militaires de la Sécurité Civile pour renforcer les 680 sapeurs-pompiers réunionnais engagés aux côtés des agents des collectivités territoriales. Les conséquences humaines sont là, elles ont été atténuées grâce à l'appel du préfet, et jusqu'au bout je recommande une très grande vigilance puisque les vents sont encore très violents. Mon collègue Victorin LUREL, en charge des Outremers, devrait se rendre, dans les prochaines heures, sur l'île de La Réunion, à la fois pour manifester la solidarité de la Nation aux Réunionnais, mais aussi pour évaluer les dégâts, et sachez que le gouvernement, comme en Bretagne, assurera la solidarité avec La Réunion.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, vous avez peut-être été frappé par ces images venues hier des Etats-Unis, où le Colorado vient de légaliser le cannabis, le débat resurgit sur la vente de la marijuana, est-ce que c'est un sujet tabou en France, peut-on imaginer que notre pays légalise un jour le cannabis ?
MANUEL VALLS
Il n'y a pas de sujet tabou, on peut débattre de tout, vous en avez débattu il y a un instant sur EUROPE 1, sur votre antenne, mais la position du gouvernement, qui est d'ailleurs celle du président de la République, c'est de ne pas lever cet interdit. Une société a besoin de normes, de règles, d'interdits, et la consommation de drogues, et la consommation donc de cannabis, n'est pas quelque chose d'anodin.
NICOLAS ESCOULAN
Vous parlez de la position du gouvernement, dans le gouvernement, pourtant, plusieurs ministres estiment que la question mérite d'être posée, Christiane TAUBIRA, Cécile DUFLOT, Vincent PEILLON. Vos collègues sont-ils irresponsables ?
MANUEL VALLS
Non, moi je ne m'en tiens qu'à une seule position, qui est celle du président de la République et du Premier ministre, déjà énoncée à de maintes reprises. Il faut savoir d'ailleurs que le cannabis change de nature. Non seulement il contribue à l'économie souterraine, au développement de la délinquance, mais il pose d'abord, il faut toujours le rappeler, un véritable problème de santé publique. Le cannabis, aujourd'hui, est de plus en plus dur, de plus en plus dense, il pose des problèmes de santé de plus en plus lourds pour nos concitoyens et notamment pour les jeunes. Il peut y avoir un débat, la position du gouvernement, ma position, est particulièrement claire, on ne lève pas ainsi un tel interdit.
NICOLAS ESCOULAN
La prohibition doit rester alors que la France reste le pays, en Europe, où les jeunes fument le plus de cannabis.
MANUEL VALLS
Ça veut dire qu'il faut développer davantage la prévention, la santé publique dans ce domaine-là, auprès des plus jeunes.
NICOLAS ESCOULAN
Ça ne veut pas dire que la prohibition est un échec ?
MANUEL VALLS
Y compris ceux qui disent qu'il faut lever ce tabou, cet interdit, considèrent que cela ne peut pas concerner les jeunes. Alors que fait-on ? non, je crois qu'il faut continuer de lutter contre cette drogue, contre ces trafics, parce que de toute façon nous faisons déjà face à la pénétration sur notre territoire d'autres drogues, à l'héroïne, à la cocaïne, qui représentent la moitié du chiffre d'affaires, si vous me permettez cette expression, de la drogue, qui représentent aujourd'hui autour de 2 milliards d'euros. Donc c'est par une coopération internationale, européenne, entre les deux rives de la Méditerranée, qu'on sera beaucoup plus efficace, et nous commençons à l'être, dans le démantèlement des réseaux des trafics de drogue.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, il y a une semaine vous lanciez l'offensive contre Dieudonné et hier soir les mairies de Nancy et de Metz, où Dieudonné doit se produire mi-janvier, ont demandé à l'Etat, donc à vous, l'interdiction de ces spectacles. Que leur répondez-vous ce matin, à ces maires ?
MANUEL VALLS
Moi je suis heureux que ces maires, que je salue, s'engagent dans ce combat, parce qu'il s'agit là de lutter contre la diffusion, l'expression, de l'antisémitisme, du racisme, du négationnisme, des choses qui sont insupportables, condamnées par ailleurs par la loi. Monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA a déjà été condamné à 9 reprises
NICOLAS ESCOULAN
On y reviendra.
MANUEL VALLS
Et notamment pour les propos antisémites et racistes qu'il a tenus. Donc il faut que la loi s'applique partout, et comment accepter dans notre pays que dans des salles, dans des salles de spectacle, on diffuse ce message de haine. C'est inacceptable. Donc il faut trouver les voies juridiques, elles ne sont pas simples, elles sont compliquées, complexes, mais il faut trouver les voies juridiques pour pouvoir en effet interdire ces spectacles.
NICOLAS ESCOULAN
Et quand ces maires en appellent directement à l'Etat, donc à vous, qu'est-ce que vous leur dites ?
MANUEL VALLS
Nous allons travailler ensemble, j'ai déjà eu beaucoup de ces maires au téléphone, pour voir dans quelles conditions nous pouvons interdire ces spectacles, puisque j'ai demandé aux préfets d'examiner cas par cas la situation de chacun de ces spectacles pour pouvoir les interdire en fonction, notamment, du trouble à l'ordre public.
NICOLAS ESCOULAN
Le premier d'entre eux, qui devrait avoir lieu mercredi à Nantes, aura lieu ou pas ?
MANUEL VALLS
Nous verrons bien, nous sommes en train d'examiner cette situation, je suis prudent là encore, sur le plan juridique, mais en tout cas nous devons faire preuve d'une très grande détermination. Vous savez, ce sont des actes, des mots qui blessent, qui font mal, qui déchirent notre société, et la justice doit répondre rapidement, systématiquement, et de façon exemplaire à ces propos racistes, et le rôle d'un ministre, d'un responsable public, c'est de ne jamais accepter que ces propos se diffusent, pas uniquement dans une salle de spectacle, mais sur Internet, sur le Net, parce que c'est là précisément où cette parole raciste, antisémite, homophobe, se diffuse, et nous devons donc être intransigeants.
NICOLAS ESCOULAN
Vous parliez justement des condamnations concernant Dieudonné, l'autre sujet c'est son insolvabilité, il ne paie pas ses condamnations, plus de 65 000 euros l'année dernière, vous dites qu'il doit le faire. Alors, comment expliquez-vous que le Trésor public, donc l'Etat, ne soit pas parvenu à récupérer cet argent, il y a des condamnations qui remontent à 2008, donc il y a plus de 5 ans, 6 ans.
MANUEL VALLS
Il le faut, parce que là aussi il faut faire preuve de détermination
NICOLAS ESCOULAN
Il le faut, mais ça ne s'est pas passé.
MANUEL VALLS
Oui, mais ça veut dire que tous les services de l'Etat doivent être très déterminés.
NICOLAS ESCOULAN
Il y a eu des défaillances ?
MANUEL VALLS
Je ne sais pas s'il y a eu des défaillances, en tout cas le simple citoyen qui ne paye pas une amende, on le lui réclame, avec des majorations, et donc personne ne peut être au-dessus des lois, et je sais combien je peux compter sur la garde des Sceaux, sur Christiane TAUBIRA, pour mener, là aussi, ce combat, et sur l'ensemble des services de l'Etat, pour faire en sorte que monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA, qui tente d'organiser son insolvabilité, pour s'affranchir de sanctions pénales, et ne pas payer les amendes, eh bien soit obligé de payer ses amendes. Il a été condamné, il s'est affranchi des règles et des lois de la République, donc là aussi il faut que la loi passe par là.
NICOLAS ESCOULAN
Mais concrètement comment on fait ? Là vous avez des intentions, des injonctions même, mais comment on fait concrètement ?
MANUEL VALLS
Vous verrez bien. Je pense que l'ensemble des services de l'Etat, qui aujourd'hui savent ce qu'il en est, iront jusqu'au bout.
NICOLAS ESCOULAN
D'accord. Arno KLARSFELD appelle à manifester devant tous les spectacles de Dieudonné, le risque de l'affrontement physique est maintenant là, et donc du trouble à l'ordre public que vous évoquiez. Rétrospectivement, ne regrettez-vous pas l'écho que vous avez donné à Dieudonné en s'en prenant à lui, parce que maintenant on est à ce risque physique ?
MANUEL VALLS
Ce débat je me devais de le poser, aujourd'hui, et en ces termes aussi clairs, pour rompre l'insoutenable silence de la banalisation du racisme et de l'antisémitisme. Quand vous avez des centaines ou des milliers de spectateurs qui vont au spectacle de Dieudonné M'BALA M'BALA, quand il a le succès qu'il rencontre sur Internet, on ne peut pas dire qu'on ne sait pas, on ne peut pas se taire, jeter un voile pudique sur ses déclarations. Ce personnage réussit, au fond, à faire une forme de synthèse entre tous les antisémitismes qui existent, celui traditionnel de l'extrême droite, mais celui qu'on trouve aussi dans un certain nombre de nos quartiers populaires, qui sous couvert de la critique d'Israël, ou de l'antisionisme, basculent dans l'antisémitisme. Et, aussi, il y a toute une série de personnes qui considèrent qu'il y a un complot et derrière ce complot il y a le juif. Donc non, il faut dire assez, stop
NICOLAS ESCOULAN
Au risque d'avoir ces manifestations ?
MANUEL VALLS
Mais ces manifestations elles sont saines dans notre pays, on a le droit de manifester contre ces propos antisémites et racistes, on peut même se demander pourquoi, et malgré l'engagement des organisations antiracistes, cela n'a pas fait bouger davantage les gens. Quand vos confrères, Frédéric HAZIZA, ou Patrick COHEN, sont insultés comme ils le sont non, il a fallu des reportages sur la télévision, une prise de conscience, des prises de parole, et mon engagement vient appuyer ce moment. Ça suffit, on ne peut pas ainsi tenir de tels propos. Il y a eu les propos insoutenable à l'égard de la garde des Sceaux il y a quelques semaines, il y a ces propos, aujourd'hui, qui sont ceux déjà, depuis malheureusement plusieurs années, de Dieudonné M'BALA M'BALA, qu'il faut aujourd'hui combattre. Ce n'est pas une liberté d'expression, pas le spectacle d'un soi-disant humoriste, ce sont des délits. Le racisme et l'antisémitisme doivent être prohibés dans notre pays, on ne peut pas s'exprimer ainsi, ça n'est en rien de la démocratie, ce n'est en rien de la liberté d'expression.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, on vous a vu sur tous les fronts ces jours-ci, notamment lors du réveillon du 31 décembre, qui ont été marqués par trois homicides, un jeune homme notamment est mort poignardé en plein Paris, où on en est aujourd'hui de l'enquête ?
MANUEL VALLS
L'enquête, je l'espère, avance. Un drame épouvantable, j'ai eu l'occasion de parler avec le père de ce jeune homme, lui, son épouse, sa famille, sont évidemment effondrés, et j'espère que l'enquête donnera très vite des résultats. Ça a été le cas aussi dans le Haut-Rhin
NICOLAS ESCOULAN
On parle d'une interpellation aujourd'hui, à Paris.
MANUEL VALLS
Dans le Haut-Rhin l'auteur présumé, âgé de 21 ans, a été interpellé quelques minutes après l'homicide, à Saint-Martin-d'Hères, dans l'Isère, l'auteur présumé a été interpellé il y a quelques heures et placé en garde à vue, et j'espère que pour l'auteur ou les auteurs de ce crime, les choses iront également très vite.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, le bilan de la sécurité routière pourrait bien marquer une année historique avec une baisse du nombre de tués sur les routes, -10%, environ 3200 morts, c'est toujours trop, mais vous aurez les chiffres définitifs fin janvier. Quel objectif vous fixez-vous pour la fin du quinquennat, donc dans 3 ans ?
MANUEL VALLS
J'ai déjà eu l'occasion de fixer un objectif qui est celui, à la fin de ces années, dans les 10 ans qui viennent, d'atteindre les 2000 tués. C'est toujours beaucoup, c'est toujours beaucoup trop, mais il y a eu un effort qui a été engagé il y a une dizaine d'années, qui est poursuivi, avec des résultats notables, nous notons aujourd'hui une baisse sans doute autour de 10%, mais 3200, 3300 tués sur les routes, ce sera sans doute cela le bilan définitif de l'année 2013, et je n'oublie pas les blessés, les blessés très graves, les blessés à vie, cela nous oblige à poursuivre cet effort. C'est une cause nationale qui doit tous nous rassembler.
NICOLAS ESCOULAN
Baisser la vitesse ça pourrait être une des pistes, notamment de 90 à 80 km/h ?
MANUEL VALLS
Il faut utiliser là aussi tous les moyens, la vitesse est une cause, sinon la première cause de la mortalité
NICOLAS ESCOULAN
Et c'est une piste que vous envisagez ?
MANUEL VALLS
Ce sont des pistes qu'il faut envisager, il faut expérimenter là-dessus, il faut continuer, évidemment là aussi, notre engagement contre la lutte contre l'alcool, mais aussi la drogue, le cannabis, au volant, qui tuent également beaucoup.
NICOLAS ESCOULAN
Dans 5 minutes vous avez rendez-vous avec le gouvernement au grand complet, chez vous place Beauvau, au ministère de l'Intérieur, c'est le petit-déjeuner traditionnel qui précède le premier conseil des ministres de l'année. C'est la dernière fois qu'on vous voit dans ce rituel puisque l'année prochaine vous serez ailleurs, à Matignon ?
MANUEL VALLS
Vous avez des informations que je n'ai pas. Vous savez, moi je respecte les traditions, et c'est évidemment un honneur pour moi, comme ministre de l'Intérieur, mais c'est une tradition qui existe maintenant depuis 30 ans, instaurée par Gaston DEFFERRE, d'accueillir les membres du gouvernement avant de nous rendre à l'Elysée avec le Premier ministre pour échanger les voeux avec le président de la République. moi je suis à la tête du ministère de l'Intérieur, c'est une mission passionnante, assurer la sécurité des Français, nous obtenons des résultats, notamment dans les Zones de Sécurité Prioritaires, mais il y a aussi beaucoup de violence, dans la société française, et ce travail, cette mission, j'espère, si j'ai la confiance du président de la République et du Premier ministre, les poursuivre le plus longtemps possible.
NICOLAS ESCOULAN
Et vous espérez y être l'année prochaine, à la même heure, au même endroit ?
MANUEL VALLS
Je pense qu'on a besoin de temps, et ce temps on doit le mettre à profit pour changer, pour réformer, pour obtenir des résultats, c'est le message du président de la République encore il y a quelques jours aux Français, nous devons obtenir des résultats dans tous les domaines, dans le domaine de l'emploi, de la lutte contre le chômage, mais aussi, bien évidemment, et c'est ma mission, dans le domaine de la lutte contre la violence, la délinquance et les cambriolages.
NICOLAS ESCOULAN
Merci Manuel VALLS d'être venu ce matin sur EUROPE 1, bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 janvier 2014
Bonjour Manuel VALLS et merci d'avoir choisi EUROPE 1 pour votre rentrée politique. D'abord, La Réunion, le bilan du cyclone serait d'1 mort, peut-être 2, de nombreux blessés, de très gros dégâts, faut-il s'attendre à un bilan plus lourd dans les heures qui viennent ?
MANUEL VALLS
Nous verrons bien. Il y a déjà eu des blessés, 1 mort, nous sommes en train, évidemment, d'évaluer les dégâts, 170 000 foyers ont été privés d'électricité, 40% du réseau d'eau est atteint, avec ces problèmes électriques, nous avons anticipé cette situation en envoyant une centaine de militaires de la Sécurité Civile pour renforcer les 680 sapeurs-pompiers réunionnais engagés aux côtés des agents des collectivités territoriales. Les conséquences humaines sont là, elles ont été atténuées grâce à l'appel du préfet, et jusqu'au bout je recommande une très grande vigilance puisque les vents sont encore très violents. Mon collègue Victorin LUREL, en charge des Outremers, devrait se rendre, dans les prochaines heures, sur l'île de La Réunion, à la fois pour manifester la solidarité de la Nation aux Réunionnais, mais aussi pour évaluer les dégâts, et sachez que le gouvernement, comme en Bretagne, assurera la solidarité avec La Réunion.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, vous avez peut-être été frappé par ces images venues hier des Etats-Unis, où le Colorado vient de légaliser le cannabis, le débat resurgit sur la vente de la marijuana, est-ce que c'est un sujet tabou en France, peut-on imaginer que notre pays légalise un jour le cannabis ?
MANUEL VALLS
Il n'y a pas de sujet tabou, on peut débattre de tout, vous en avez débattu il y a un instant sur EUROPE 1, sur votre antenne, mais la position du gouvernement, qui est d'ailleurs celle du président de la République, c'est de ne pas lever cet interdit. Une société a besoin de normes, de règles, d'interdits, et la consommation de drogues, et la consommation donc de cannabis, n'est pas quelque chose d'anodin.
NICOLAS ESCOULAN
Vous parlez de la position du gouvernement, dans le gouvernement, pourtant, plusieurs ministres estiment que la question mérite d'être posée, Christiane TAUBIRA, Cécile DUFLOT, Vincent PEILLON. Vos collègues sont-ils irresponsables ?
MANUEL VALLS
Non, moi je ne m'en tiens qu'à une seule position, qui est celle du président de la République et du Premier ministre, déjà énoncée à de maintes reprises. Il faut savoir d'ailleurs que le cannabis change de nature. Non seulement il contribue à l'économie souterraine, au développement de la délinquance, mais il pose d'abord, il faut toujours le rappeler, un véritable problème de santé publique. Le cannabis, aujourd'hui, est de plus en plus dur, de plus en plus dense, il pose des problèmes de santé de plus en plus lourds pour nos concitoyens et notamment pour les jeunes. Il peut y avoir un débat, la position du gouvernement, ma position, est particulièrement claire, on ne lève pas ainsi un tel interdit.
NICOLAS ESCOULAN
La prohibition doit rester alors que la France reste le pays, en Europe, où les jeunes fument le plus de cannabis.
MANUEL VALLS
Ça veut dire qu'il faut développer davantage la prévention, la santé publique dans ce domaine-là, auprès des plus jeunes.
NICOLAS ESCOULAN
Ça ne veut pas dire que la prohibition est un échec ?
MANUEL VALLS
Y compris ceux qui disent qu'il faut lever ce tabou, cet interdit, considèrent que cela ne peut pas concerner les jeunes. Alors que fait-on ? non, je crois qu'il faut continuer de lutter contre cette drogue, contre ces trafics, parce que de toute façon nous faisons déjà face à la pénétration sur notre territoire d'autres drogues, à l'héroïne, à la cocaïne, qui représentent la moitié du chiffre d'affaires, si vous me permettez cette expression, de la drogue, qui représentent aujourd'hui autour de 2 milliards d'euros. Donc c'est par une coopération internationale, européenne, entre les deux rives de la Méditerranée, qu'on sera beaucoup plus efficace, et nous commençons à l'être, dans le démantèlement des réseaux des trafics de drogue.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, il y a une semaine vous lanciez l'offensive contre Dieudonné et hier soir les mairies de Nancy et de Metz, où Dieudonné doit se produire mi-janvier, ont demandé à l'Etat, donc à vous, l'interdiction de ces spectacles. Que leur répondez-vous ce matin, à ces maires ?
MANUEL VALLS
Moi je suis heureux que ces maires, que je salue, s'engagent dans ce combat, parce qu'il s'agit là de lutter contre la diffusion, l'expression, de l'antisémitisme, du racisme, du négationnisme, des choses qui sont insupportables, condamnées par ailleurs par la loi. Monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA a déjà été condamné à 9 reprises
NICOLAS ESCOULAN
On y reviendra.
MANUEL VALLS
Et notamment pour les propos antisémites et racistes qu'il a tenus. Donc il faut que la loi s'applique partout, et comment accepter dans notre pays que dans des salles, dans des salles de spectacle, on diffuse ce message de haine. C'est inacceptable. Donc il faut trouver les voies juridiques, elles ne sont pas simples, elles sont compliquées, complexes, mais il faut trouver les voies juridiques pour pouvoir en effet interdire ces spectacles.
NICOLAS ESCOULAN
Et quand ces maires en appellent directement à l'Etat, donc à vous, qu'est-ce que vous leur dites ?
MANUEL VALLS
Nous allons travailler ensemble, j'ai déjà eu beaucoup de ces maires au téléphone, pour voir dans quelles conditions nous pouvons interdire ces spectacles, puisque j'ai demandé aux préfets d'examiner cas par cas la situation de chacun de ces spectacles pour pouvoir les interdire en fonction, notamment, du trouble à l'ordre public.
NICOLAS ESCOULAN
Le premier d'entre eux, qui devrait avoir lieu mercredi à Nantes, aura lieu ou pas ?
MANUEL VALLS
Nous verrons bien, nous sommes en train d'examiner cette situation, je suis prudent là encore, sur le plan juridique, mais en tout cas nous devons faire preuve d'une très grande détermination. Vous savez, ce sont des actes, des mots qui blessent, qui font mal, qui déchirent notre société, et la justice doit répondre rapidement, systématiquement, et de façon exemplaire à ces propos racistes, et le rôle d'un ministre, d'un responsable public, c'est de ne jamais accepter que ces propos se diffusent, pas uniquement dans une salle de spectacle, mais sur Internet, sur le Net, parce que c'est là précisément où cette parole raciste, antisémite, homophobe, se diffuse, et nous devons donc être intransigeants.
NICOLAS ESCOULAN
Vous parliez justement des condamnations concernant Dieudonné, l'autre sujet c'est son insolvabilité, il ne paie pas ses condamnations, plus de 65 000 euros l'année dernière, vous dites qu'il doit le faire. Alors, comment expliquez-vous que le Trésor public, donc l'Etat, ne soit pas parvenu à récupérer cet argent, il y a des condamnations qui remontent à 2008, donc il y a plus de 5 ans, 6 ans.
MANUEL VALLS
Il le faut, parce que là aussi il faut faire preuve de détermination
NICOLAS ESCOULAN
Il le faut, mais ça ne s'est pas passé.
MANUEL VALLS
Oui, mais ça veut dire que tous les services de l'Etat doivent être très déterminés.
NICOLAS ESCOULAN
Il y a eu des défaillances ?
MANUEL VALLS
Je ne sais pas s'il y a eu des défaillances, en tout cas le simple citoyen qui ne paye pas une amende, on le lui réclame, avec des majorations, et donc personne ne peut être au-dessus des lois, et je sais combien je peux compter sur la garde des Sceaux, sur Christiane TAUBIRA, pour mener, là aussi, ce combat, et sur l'ensemble des services de l'Etat, pour faire en sorte que monsieur Dieudonné M'BALA M'BALA, qui tente d'organiser son insolvabilité, pour s'affranchir de sanctions pénales, et ne pas payer les amendes, eh bien soit obligé de payer ses amendes. Il a été condamné, il s'est affranchi des règles et des lois de la République, donc là aussi il faut que la loi passe par là.
NICOLAS ESCOULAN
Mais concrètement comment on fait ? Là vous avez des intentions, des injonctions même, mais comment on fait concrètement ?
MANUEL VALLS
Vous verrez bien. Je pense que l'ensemble des services de l'Etat, qui aujourd'hui savent ce qu'il en est, iront jusqu'au bout.
NICOLAS ESCOULAN
D'accord. Arno KLARSFELD appelle à manifester devant tous les spectacles de Dieudonné, le risque de l'affrontement physique est maintenant là, et donc du trouble à l'ordre public que vous évoquiez. Rétrospectivement, ne regrettez-vous pas l'écho que vous avez donné à Dieudonné en s'en prenant à lui, parce que maintenant on est à ce risque physique ?
MANUEL VALLS
Ce débat je me devais de le poser, aujourd'hui, et en ces termes aussi clairs, pour rompre l'insoutenable silence de la banalisation du racisme et de l'antisémitisme. Quand vous avez des centaines ou des milliers de spectateurs qui vont au spectacle de Dieudonné M'BALA M'BALA, quand il a le succès qu'il rencontre sur Internet, on ne peut pas dire qu'on ne sait pas, on ne peut pas se taire, jeter un voile pudique sur ses déclarations. Ce personnage réussit, au fond, à faire une forme de synthèse entre tous les antisémitismes qui existent, celui traditionnel de l'extrême droite, mais celui qu'on trouve aussi dans un certain nombre de nos quartiers populaires, qui sous couvert de la critique d'Israël, ou de l'antisionisme, basculent dans l'antisémitisme. Et, aussi, il y a toute une série de personnes qui considèrent qu'il y a un complot et derrière ce complot il y a le juif. Donc non, il faut dire assez, stop
NICOLAS ESCOULAN
Au risque d'avoir ces manifestations ?
MANUEL VALLS
Mais ces manifestations elles sont saines dans notre pays, on a le droit de manifester contre ces propos antisémites et racistes, on peut même se demander pourquoi, et malgré l'engagement des organisations antiracistes, cela n'a pas fait bouger davantage les gens. Quand vos confrères, Frédéric HAZIZA, ou Patrick COHEN, sont insultés comme ils le sont non, il a fallu des reportages sur la télévision, une prise de conscience, des prises de parole, et mon engagement vient appuyer ce moment. Ça suffit, on ne peut pas ainsi tenir de tels propos. Il y a eu les propos insoutenable à l'égard de la garde des Sceaux il y a quelques semaines, il y a ces propos, aujourd'hui, qui sont ceux déjà, depuis malheureusement plusieurs années, de Dieudonné M'BALA M'BALA, qu'il faut aujourd'hui combattre. Ce n'est pas une liberté d'expression, pas le spectacle d'un soi-disant humoriste, ce sont des délits. Le racisme et l'antisémitisme doivent être prohibés dans notre pays, on ne peut pas s'exprimer ainsi, ça n'est en rien de la démocratie, ce n'est en rien de la liberté d'expression.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, on vous a vu sur tous les fronts ces jours-ci, notamment lors du réveillon du 31 décembre, qui ont été marqués par trois homicides, un jeune homme notamment est mort poignardé en plein Paris, où on en est aujourd'hui de l'enquête ?
MANUEL VALLS
L'enquête, je l'espère, avance. Un drame épouvantable, j'ai eu l'occasion de parler avec le père de ce jeune homme, lui, son épouse, sa famille, sont évidemment effondrés, et j'espère que l'enquête donnera très vite des résultats. Ça a été le cas aussi dans le Haut-Rhin
NICOLAS ESCOULAN
On parle d'une interpellation aujourd'hui, à Paris.
MANUEL VALLS
Dans le Haut-Rhin l'auteur présumé, âgé de 21 ans, a été interpellé quelques minutes après l'homicide, à Saint-Martin-d'Hères, dans l'Isère, l'auteur présumé a été interpellé il y a quelques heures et placé en garde à vue, et j'espère que pour l'auteur ou les auteurs de ce crime, les choses iront également très vite.
NICOLAS ESCOULAN
Manuel VALLS, le bilan de la sécurité routière pourrait bien marquer une année historique avec une baisse du nombre de tués sur les routes, -10%, environ 3200 morts, c'est toujours trop, mais vous aurez les chiffres définitifs fin janvier. Quel objectif vous fixez-vous pour la fin du quinquennat, donc dans 3 ans ?
MANUEL VALLS
J'ai déjà eu l'occasion de fixer un objectif qui est celui, à la fin de ces années, dans les 10 ans qui viennent, d'atteindre les 2000 tués. C'est toujours beaucoup, c'est toujours beaucoup trop, mais il y a eu un effort qui a été engagé il y a une dizaine d'années, qui est poursuivi, avec des résultats notables, nous notons aujourd'hui une baisse sans doute autour de 10%, mais 3200, 3300 tués sur les routes, ce sera sans doute cela le bilan définitif de l'année 2013, et je n'oublie pas les blessés, les blessés très graves, les blessés à vie, cela nous oblige à poursuivre cet effort. C'est une cause nationale qui doit tous nous rassembler.
NICOLAS ESCOULAN
Baisser la vitesse ça pourrait être une des pistes, notamment de 90 à 80 km/h ?
MANUEL VALLS
Il faut utiliser là aussi tous les moyens, la vitesse est une cause, sinon la première cause de la mortalité
NICOLAS ESCOULAN
Et c'est une piste que vous envisagez ?
MANUEL VALLS
Ce sont des pistes qu'il faut envisager, il faut expérimenter là-dessus, il faut continuer, évidemment là aussi, notre engagement contre la lutte contre l'alcool, mais aussi la drogue, le cannabis, au volant, qui tuent également beaucoup.
NICOLAS ESCOULAN
Dans 5 minutes vous avez rendez-vous avec le gouvernement au grand complet, chez vous place Beauvau, au ministère de l'Intérieur, c'est le petit-déjeuner traditionnel qui précède le premier conseil des ministres de l'année. C'est la dernière fois qu'on vous voit dans ce rituel puisque l'année prochaine vous serez ailleurs, à Matignon ?
MANUEL VALLS
Vous avez des informations que je n'ai pas. Vous savez, moi je respecte les traditions, et c'est évidemment un honneur pour moi, comme ministre de l'Intérieur, mais c'est une tradition qui existe maintenant depuis 30 ans, instaurée par Gaston DEFFERRE, d'accueillir les membres du gouvernement avant de nous rendre à l'Elysée avec le Premier ministre pour échanger les voeux avec le président de la République. moi je suis à la tête du ministère de l'Intérieur, c'est une mission passionnante, assurer la sécurité des Français, nous obtenons des résultats, notamment dans les Zones de Sécurité Prioritaires, mais il y a aussi beaucoup de violence, dans la société française, et ce travail, cette mission, j'espère, si j'ai la confiance du président de la République et du Premier ministre, les poursuivre le plus longtemps possible.
NICOLAS ESCOULAN
Et vous espérez y être l'année prochaine, à la même heure, au même endroit ?
MANUEL VALLS
Je pense qu'on a besoin de temps, et ce temps on doit le mettre à profit pour changer, pour réformer, pour obtenir des résultats, c'est le message du président de la République encore il y a quelques jours aux Français, nous devons obtenir des résultats dans tous les domaines, dans le domaine de l'emploi, de la lutte contre le chômage, mais aussi, bien évidemment, et c'est ma mission, dans le domaine de la lutte contre la violence, la délinquance et les cambriolages.
NICOLAS ESCOULAN
Merci Manuel VALLS d'être venu ce matin sur EUROPE 1, bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 janvier 2014