Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, notamment la santé, l'hôpital, la politique du médicament, les dépenses d'assurance maladie, la CMU, les handicapés, la protection sociale et la politique familiale, Paris le 23 octobre 2001.

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Circonstance : Présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 en première lecture à l'Assemblée nationale le 23 octobre 2001

Texte intégral


Monsieur le Président,
Madame et Messieurs les rapporteurs,
Mesdames et Messieurs les Députés,
La sécurité sociale concerne la vie quotidienne de tous nos concitoyens. Elle commande la confiance, la justice et la cohésion de notre société.
Notre débat d'aujourd'hui et des prochains jours est d'autant plus important que nous sommes entrés depuis quelques mois dans une période où les incertitudes économiques sont plus fortes. De surcroît, depuis quelques semaines, les tensions internationales nées des attentats horribles du 11 septembre ajoutent aux inquiétudes des Français. Je n'oublie pas non plus la tragique explosion de l'usine AZF à TOULOUSE et les besoins de solidarité qu'elle a mis en évidence.
Dans un tel contexte, les Français doivent plus que jamais pouvoir compter sur la sécurité sociale pour garder confiance en l'avenir. Les mesures nouvelles présentées dans ce projet de loi conjuguées aux autres dispositions actuellement en discussion dans le cadre du projet de loi de finances visent précisément à maintenir la confiance de nos concitoyens.
Les dispositions de ce projet de loi ne doivent pas par conséquent être regardées seulement pour elles-mêmes, mais dans la continuité de l'ensemble des mesures prises au cours des quatre projets de loi de financements précédents.
Depuis près de 5 ans, nous avons enrichi le contenu de la croissance en emplois, grâce à la réduction du temps de travail, aux emplois jeunes et aux dispositifs spécifiques d'insertion. Nous avons, je crois, créé une dynamique de progrès social, avec un objectif prioritaire : la lutte contre le chômage. Nous avons démontré qu'il était possible de mettre en uvre une politique conciliant croissance, compétitivité, emploi, solidarité et qualité de vie.
Je crois que les résultats que nous avons obtenus sont sans précédent et nous pouvons en être fiers, même s'il reste beaucoup à faire :
- 1,5 millions de créations nettes d'emploi entre 1997 et 2001, dont 540 000 pour l'année 2000, ce qui constitue un record historique ;
- une diminution de plus d'un million du nombre des demandeurs d'emploi entre juin 1997 et août 2001.
Je souligne enfin que depuis 5 ans, nous avons amélioré en termes de croissance et d'emplois notre situation par rapport à nos voisins européens.
Les résultats obtenus en matière de lutte contre le chômage -qui bien entendu bénéficient à la sécurité sociale- doivent aussi beaucoup à des choix de financement de la sécurité sociale plus favorable à l'emploi :
nous avons procédé en 1998 à une réforme très importante des prélèvements sociaux supportés par les assurés au titre de la maladie. Nous avons ainsi fait bénéficier les personnes actives d'un gain de pouvoir d'achat, et surtout nous avons rééquilibré le financement de l'assurance maladie, afin qu'il pèse moins fortement sur les revenus du travail ;
nous avons aussi porté jusqu'à 1,8 SMIC les allégements de charges sur les bas salaires, et nous les avons modulés en fonction de la durée du travail afin de favoriser l'embauche de travailleurs peu qualifiés, sans inciter à la création d'emplois précaires ;
dans le même esprit, nous avons progressivement supprimé les allégements de charges sociales consentis aux entreprises qui embauchent des salariés à temps partiel, afin de limiter les emplois à temps partiel subi ;
nous avons enfin prévu un financement des allégements de charges consentis en faveur des entreprises qui embauchent des salariés faiblement qualifiés ou qui mettent en place les 35 heures. Pour les 35 heures, je veux souligner que le financement des allégements de charges reste minoritaire dans l'ensemble des allégements. Que ces allégements s'ajoutent à ceux prévus par les précédents gouvernements. Ils sont financés dans le cadre du FOREC selon des modalités qui préservent les ressources de la sécurité sociale -seulement des ressources de nature fiscale.
Nos résultats en matière d'emploi ont permis à la Sécurité sociale de bénéficier d'un financement stable et durable. Le dynamisme des recettes de la sécurité sociale au cours de la présente législature a permis de financer les avancées essentielles de la protection sociale des Français, et de dégager au cours des dernières années des excédents significatifs.
En effet, le régime général de la sécurité sociale a renoué avec les excédents à partir de 1999. En " encaissements - décaissements ", nous avons enregistré des excédents importants en 2000 et l'année 2001 se présente sous les meilleurs auspices. Même en prenant en compte l'année 1998 qui était encore marquée par un déficit, nous serons en mesure d'atteindre un quasi-équilibre du régime général sur les quatre exercices 1998 à 2001. Comment ne pas mettre ce résultat au regard des lourds déficits enregistrés entre 1993 et 1997, dont le total se monte à 265 milliards de francs ? !
Parallèlement à ce redressement financier, le Gouvernement a procédé à une importante modernisation de la comptabilité des organismes sociaux. Vous le constaterez lorsque nous examinerons dans le détail le projet de loi, les agrégats qui vous sont présentés ainsi que les comptes fournis en annexe sont évalués pour la première fois, en 2002, en comptabilité de droits constatés, mode de présentation des comptes plus conforme à la réalité économique des résultats de chaque exercice.
À cet égard, le Haut conseil de la comptabilité des organismes de sécurité sociale, dont la création est officielle depuis le mois dernier, permettra par ses recommandations d'améliorer encore la présentation des comptes des organismes de sécurité sociale, et ainsi de faciliter le contrôle du Parlement.
Le rétablissement des comptes est assuré.
Il permet :
De poursuivre la construction de nouveaux droits.
D'ouvrir l'avenir.
La discussion qui s'ouvre aujourd'hui est en effet l'occasion de rappeler ce qui a été fait depuis bientôt 5 ans, mais également d'annoncer de nouveaux progrès qui sont inscrits dans le projet de loi qui vous est soumis et qui touchent à des aspects très quotidiens et même très intimes de la vie des Français, puisqu'il est question de leur santé, de l'aide aux handicapés, du niveau des pensions de retraites ou de la prise en charge de la petite enfance (I).
Mais je tiens aussi à saisir ce rendez-vous annuel dédié à la protection sociale pour débattre avec vous de ce que sont, du point de vue du Gouvernement, les grands chantiers à venir et pour lesquels nous avons déjà quelques propositions à vous exposer. Je pense en particulier à nos programmes pluriannuels de santé publique, aux nouvelles relations à construire entre les professionnels des soins de ville et les pouvoirs publics, à l'évolution nécessaire de notre système de réparation des accidents du travail, ou encore à l'avenir de nos régimes de retraite. (II)
I Dans de nombreux volets de nos politiques sociales, nous avons depuis 1997 conforté et ouvert de nouveaux droits et le projet qui vous est soumis vous propose de continuer sur cette voie en 2002.
Le Gouvernement a accompli une tâche considérable de modernisation de la protection sociale des Français. Nous allons encore de l'avant cette année et nous engageons des projets porteurs dans la durée de nouveaux progrès sociaux.
1. Notre première priorité :
la santé des français, des soins de qualité pour tous
Depuis la réforme des ordonnances de 1996, le Parlement est amené à se prononcer sur l'objectif objectif des dépenses d'assurance maladie pour l'année suivante. Il est en effet normal que le Parlement débatte des moyens que la collectivité entend consacrer à la santé. Notre système de santé est fondé sur la solidarité nationale ; il est financé par des prélèvements obligatoires, donc par chacun d'entre nous. Nos concitoyens sont en droit de nous demander de garantir l'utilisation optimale de ces financements.
Le Parlement s'est plaint, à juste titre, des difficultés à lier ce vote sur les objectifs avec les grandes orientations de la politique de santé que je vais rappeler dans quelques instants. C'est la raison pour laquelle, nous avons prévu dans le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé, que Bernard Kouchner a défendu devant vous -que nous appelons tous la loi Kouchner puisqu'il la porte depuis 10 ans, ce texte important que vous avez voté en première lecture- un débat, chaque année, en amont du PLFSS, sur les grandes priorités de santé. Le Haut conseil de la santé, dont la création a été introduite en première lecture de cette loi, permettra de nous fournir une expertise renforcée pour préparer ces débats.
Mais nous devrons également réfléchir sur les évolutions souhaitables du PLFSS en liaison avec ces priorités de santé pluri-annuelles. Je pense que l'ONDAM devra progressivement évoluer afin de prendre en compte, dans une logique de programmes, cette même approche pluriannuelle.
1.1 A l'hôpital tout d'abord, nous poursuivons une politique qui prend en compte les innovations thérapeutiques, qui assure une meilleure adaptation du service public aux besoins des malades et qui contribue à l'amélioration des conditions de travail
Notre engagement en faveur de l'hôpital public s'appuie sur des choix budgétaires nécessaires pour assurer sa modernisation : les dépenses hospitalières ont ainsi progressé de plus de 4,1 milliards d'Euros (27 Mds de F) depuis 1997, et leur taux de croissance annuel est trois fois supérieur à ce qu'il était en 1997 : 3,3 % en 2001 contre 1,15% en 1997. En 2002, l'augmentation sera de 3,6% hors RTT, et de 4,8% y compris la RTT.
Nous souhaitons d'abord et toujours des soins hospitalier de meilleure qualité
À ce titre et en 2002, nous poursuivrons la mise en uvre des trois priorités que sont :
- l'adaptation de l'offre de soins aux besoins de la population ;
- la promotion de la qualité et de la sécurité des soins ;
- la réduction des inégalités dans l'accès aux soins.
* Sur le premier point, les schémas régionaux d'organisation sanitaires (SROS) de seconde génération continueront à se mettre en place. Ils entraînent des réorganisations importantes : 111 communautés d'établissements sont constituées ou en cours de constitution dans les 150 secteurs sanitaires et 120 réseaux sont agréés ou en cours d'agrément par les agences régionales de l'hospitalisation. D'ores et déjà, je peux vous indiquer que plus de 10,6 millions d'Euros (70 MF) seront consacrés en 2002 au développement de ces réseaux.
* En matière de qualité et de sécurité des soins, les crédits inscrits dans la loi de financement 2001 ont permis la mise aux normes des stérilisations, en 2002 cet effort sera poursuivi.
Je voudrais également souligner l'effort considérable que nous avons fait en matière de prise en charge des dépenses à l'hôpital liées à l'arrivée de nouvelles molécules pour lutter contre le cancer ou la polyarthrite rhumatoïde : la dotation 2001 d'un milliard de franc sera abondée de 200 MF dans les prochains jours. En outre, pour 2002, nous avons prévu une enveloppe supplémentaire de 1,5 MdF pour l'innovation thérapeutique : au total, ce sont donc 2,7 MdF qui financeront en 2002 la prise en charge de ces traitements.
* Enfin troisième objectif : la réduction des inégalités d'accès aux soins. Nous avons d'abord décidé le développement de certains équipements lourds. A titre d'illustrations, je rappelle que nous avons permis l'installation de 97 nouvelles IRM en 2001, ainsi que 28 Tomographes à émission de positons, alors que nous ne disposions que de 9 équipements de ce type en 2000. J'ajoute que nous allons simplifier notre politique d'autorisations, en la déconcentrant davantage. Les décisions seront prises au niveau régional, afin de répondre plus rapidement, sur le terrain, aux besoins de la population.

La réalisation de ces priorités s'est accompagnée dans les hôpitaux d'une politique sociale soutenue dont une des prochaines étapes est la mise en place de la réduction du temps de travail à l'hôpital public.
* Je rappelle que Martine Aubry a signé deux protocoles les 13 et 14 mars 2000, qui ont amélioré les conditions de travail, relancé les formations professionnelles ainsi que le dialogue social dans les établissements et revaloriser la situation des praticiens hospitaliers des hôpitaux publics. C'est plus de 1,5 milliards d'Euros (10 Mds F) sur trois ans qui auront été ainsi mobilisés et qui ont également permis d'aider les établissements à assurer le remplacement des personnels absents, à améliorer leurs services d'urgence ou à conduire des opérations d'investissement liées à leurs restructurations.
* J'ai moi-même signé le protocole du 14 mars 2001 sur les filières professionnelles dans la fonction publique hospitalière, qui apporte une revalorisation des cursus professionnels et des rémunérations de tous les agents de l'hôpital public : les personnels paramédicaux, dont naturellement les infirmiers, mais aussi les aides soignants ou encore toutes les catégories de personnels administratifs. Il ouvre des possibilités de promotion interne et apporte des solutions au blocage des carrières lié à la démographie. Ce protocole représente un effort de plus de 33,5 millions d'Euros (2,2 Mds F) par an après une montée en charge des mesures programmées sur trois ans.
* Enfin nous avons engagé la réduction du temps de travail à l'hôpital. Le gouvernement a décidé d'accompagner la réduction du temps de travail par la création de 45 000 emplois dans les hôpitaux et les établissements médico-sociaux. Ces emplois devront être pourvus dans les trois années qui viennent (2002-2004).
La réduction du temps de travail doit, de notre point de vue, répondre aux attentes des personnels en matière de conditions de vie au travail et de vie personnelle également. Les conséquences doivent en être directes sur l'amélioration de la qualité de la prise en charge des usagers. A cet effet, une phase de concertation qui associera au niveau de chaque établissement signataires et non-signataires du protocole du 27 septembre, précédera l'attribution des nouveaux emplois par l'ARH et permettra de déterminer une nouvelle organisation du travail dans les services.
Naturellement, pourvoir 45 000 postes en 3 ans suppose un effort particulier en direction de notre dispositif de formation des professions paramédicales en particulier. De ce point de vue, je veux rappeler ici que le Gouvernement a opéré une vraie rupture avec la politique suivie antérieurement en interrompant le processus de fermetures de places dans les Instituts de formation infirmiers (IFSI). En effet, ce nombre de places a été augmenté de 1000 unités dès 1998, puis encore 1200 places supplémentaires en 1999 et surtout 8000 nouvelles places en 2000 et 2001. Cet effort sera poursuivi en 2002. De la même façon, j'ai décidé d'accroître les capacités du dispositif de formation des aides soignants de 7 000 élèves supplémentaires dès 2002.
Enfin, vous savez que nous sommes parvenus hier à un accord relatif à la réduction du temps de travail avec toutes les organisations syndicales représentant les médecins de l'hôpital public. Je saisi l'occasion pour saluer l'engagement personnel de Bernard KOUCHNER dans cette négociation qui a fait preuve à la fois de détermination et d'une grande capacité d'écoute, pour aboutir à cet excellent résultat.
2000 créations d'emplois sur deux ans sont prévues, emplois qui pourront être plus facilement pourvus grâce aux mesures inscrites dans l'accord pour renforcer l'attractivité des carrières médecins des hôpitaux publics.
Les 2 accords sur la RTT témoignent une fois de plus de toute l'attention que nous accordons aux établissements publics de santé et à leur personnel depuis cinq ans. Nous avons donc fait beaucoup depuis cinq ans. Mais il est vrai aussi que le retard était important et que nous ne cessons d'augmenter nos exigences vis à vis de l'hôpital. C'est pourquoi je souhaite faire un effort supplémentaire pour l'hôpital car je constate comme vous que la situation dans certains établissements est tendue, que les personnels sont soumis à des contraintes fortes pour être toujours plus présents auprès des malades, parce que, collectivement, nous demandons toujours plus à l'hôpital.
Le gouvernement est prêt à augmenter significativement les moyens de l'hôpital, de l'ordre de 1 mdF pour le fonctionnement. Ces dotations supplémentaires pourraient être allouées pour développer la promotion professionnelle et la formation, ce qui faciliterait la montée en charge du plan de recrutement que nous avons prévu pour accompagner les 35 heures.
Mais j'ai entendu aussi celles et ceux d'entre vous qui souhaitent que l'on dégage davantage de crédits pour les investissements. Car je vois comme vous les besoins de certains hôpitaux vétustes ou bien encore la nécessité de réaliser des investissements précis, par exemple de sécurité. Je vous ferai donc des propositions plus précises dans le courant du débat. Mais vous avez compris le sens de mes propos.
1.2 En ce qui concerne ensuite les cliniques privées
S'agissant des cliniques privées, je souhaite vous dire tout d'abord que nous avons conscience du rôle essentiel assumé par cette catégorie d'établissements dans notre système de santé publique. A l'occasion notamment des événements de TOULOUSE, nous avons tous pu constater très concrètement l'efficacité et le dévouement des professionnels des cliniques privées. Je sais également que certains établissements connaissent des difficultés, je m'en entretiens régulièrement avec les représentants des cliniques privées.
A cet égard, je tiens à souligner que, parallèlement aux mesures engagées en faveur du service public hospitalier, nous avons également conduit un effort significatif pour les cliniques privées.
L'accord que j'ai signé le 4 avril 2001 a marqué notre volonté de prendre pleinement en compte la situation sociale et économique des cliniques privées. Déjà l'année dernière, une augmentation de l'Objectif quantifié national (OQN) analogue à celle de l'hôpital a été apportée aux cliniques (+3.3%). En 2002, nous prendrons en compte, grâce à l'accord du 4 avril 2001 :
la poursuite de la mise en uvre des mesures de sécurité sanitaire ;
le renforcement de l'effort de remise à niveau des tarifs des maternités dans la continuité des décisions prises en 2000 et 2001.Nous avons ainsi consacré 80 MF en 2000, puis 100 MF en 2001, soit une augmentation moyenne des tarifs de 8% en 2001 ;
le plan pluriannuel de convergence des rémunérations des salariés des secteurs privé et public. Conformément aux engagements pris cette année, cet effort sera poursuivi et amplifié en 2002, afin de faciliter le recrutement d'infirmières dans ces établissements.
1.3 En matière de soins de ville.
Nous avons conduit depuis 1997 une politique qui a permis des améliorations importantes en matière d'optique, de prothèses externes et de dispositifs médicaux. Il me paraît nécessaire d'amplifier ce mouvement, notamment pour les lunettes et en matière de prothèse auditive.
En matière de prévention dentaire, nous allons généraliser un examen de prévention pour deux classes d'âges (6 et 12 ans), soit 1.400.000 enfants concernés. Ils auront tous droit à un examen dentaire de prévention gratuit.
1.4 Notre politique du médicament
S'agissant de la politique du médicament, notre politique repose sur une idée simple : permettre l'accès de tous les Français à l'innovation - comme d'ailleurs nous le faisons pour l'hôpital - et concentrer l'effort financier sur les médicaments les plus utiles. La progression des dépenses de médicament reste rapide : + 7,7 % en 2001. Ce rythme s'est toutefois ralenti par rapport à l'année 2000, et ceci grâce aux premiers effets des mesures annoncées en juin 2001 en termes de baisses de prix. Je souligne que ces baisses ont toutes été négociées avec tous les représentants des laboratoires.
En second lieu, le développement du générique, initié par Martine AUBRY et Bernard Kouchner, doit être renforcé. Pour la première fois, nous prévoyons la possibilité pour les médecins de prescrire en dénomination commune internationale (DCI), c'est à dire en nom de molécule et non plus uniquement en nom de marque.
L'efficacité de la régulation des dépenses liés aux médicaments a également été renforcée. Nous nous sommes fixés un objectif de baisse de prix pour un montant de 2,4 Mds en visant principalement les spécialités dont le service médical rendu a été jugé insuffisant et les médicaments déjà amortis dont le volume et la croissance sont élevés.
1.5 L'ONDAM
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le Gouvernement a retenu un objectif national des dépenses d'assurance maladie pour 2002 de 112,62 milliards d'euros en droits constatés (738,7 MdF) soit une progression de 3,8 % par rapport aux dépenses de 2001. Cet objectif correspond aux priorités de santé publique et aux actions de modernisation du système de soins que je viens de rappeler. Il se compose de quatre éléments principaux :
- pour les hôpitaux, l'objectif est de 4,8 %, intégrant 1,2 point pour la RTT. L'enveloppe hospitalière hors RTT augmente de 3,6 % c'est-à-dire plus que l'augmentation que vous avez voté l'an passé : 3,3%;
- les établissements médico-sociaux demeurent un secteur prioritaire avec une croissance de 4,8 % ;
- pour les cliniques privées, un objectif de 3,5 %, supérieur de 0,2 point à celui de 2001, a été retenu. Je rappelle qu'il est près de trois fois supérieur à ce qu'il était en 1997 (1,3 %) ;
- l'objectif des dépenses de soins de ville a été fixé à 3 % comme l'an passé.
Voilà pour nos objectifs de santé publique.
2. CMU : l'accès aux soins pour les plus démunis
Je souhaite à ce stade dire quelques mots sur la situation du dispositif CMU. Dès notre arrivée au pouvoir, nous avons pris la mesure de la situation de beaucoup de Français quant à l'accès aux soins : 25 % de nos concitoyens renonçaient à des soins pour des raisons financières.
C'est parce qu'il ne pouvait se résigner à cette situation que ce Gouvernement a créé la CMU (couverture maladie universelle). Nous avons d'abord décidé que toute personne résidant sur le territoire national devait bénéficier d'une couverture maladie de base : c'est pourquoi la couverture maladie universelle " de résidence " a été créée, qui couvre 1,2 millions de personnes, dont 150 000 environ ne bénéficiaient auparavant d'aucune couverture maladie.
Mais pour beaucoup de personnes à faibles ressources, c'est l'absence de couverture complémentaire maladie qui constitue le principal obstacle à l'accès aux soins. Nous avons donc créé la CMU complémentaire qui assure la prise en charge du ticket modérateur et du forfait journalier hospitalier, ainsi que le remboursement intégral de certaines dépenses dépassant le tarif de responsabilité de la sécurité sociale (en matière d'optique et de prothèses auditives et dentaires). Au 31 juillet 2001, près de 5 millions de personnes bénéficiaient de la CMU complémentaire. C'est un million de plus que le nombre de bénéficiaires de l'ancienne aide médicale gratuite des départements. De plus, le " panier de soins " garanti par la CMU est d'une façon générale plus large que celui que prenaient en charge les dispositifs d'aide médicale gratuite ; qui de surcroît étaient inégalement généreux sur l'ensemble du territoire national.
La CMU est un dispositif encore jeune, qu'il nous faut améliorer. La discussion sera utile à cet égard. Je vous présenterai des propositions au cours du débat, qui je l'espère répondront à vos préoccupations exprimées cette année.
3. Les handicapés
S'agissant de la politique menée en faveur des handicapés, le bilan que nous pouvons tirer de la période 1997-2001 s'articule autour de la mise en uvre d'un programme gouvernemental pluriannuel et de la mise en uvre de plans spécifiques favorisant à la fois l'intégration sociale, l'autonomie des personnes handicapées et la création de structures pour celles qui sont les plus lourdement handicapées.
Je rappelle que le programme gouvernemental pluriannuel annoncé par le Premier ministre le 25 janvier 2000 comporte trois volets :
le développement des capacités d'accueil des établissements spécialisés ;
la prise en charge renforcée et précoce et l'intégration scolaire des jeunes handicapés ;
l'amélioration de l'accès des personnes handicapées dans la vie ordinaire et de leur participation à la vie de la société.
Au total, les pouvoirs publics mobiliseront plus de 231 millions d'Euros (1,52 MdF) supplémentaires (crédits d'Etat et d'assurance maladie) en faveur des personnes handicapées sur la période 2001-2003. Avec la réalisation sur la même période, à hauteur de 1 milliard de francs, de la suite du plan quinquennal 1999-2003 portant sur les établissements pour adultes handicapés, c'est un effort global de 2,52 milliards de francs supplémentaires qui sera réalisé au titre de la solidarité nationale en faveur des personnes handicapées.
S'agissant en particulier des mesures prévues pour l'année 2002, je tiens à citer :
d'abord la création de 25 nouveaux sites, après avoir créé 15 sites pour la vie autonome en 2000 et 25 en 2001, nous financerons en 2002 (je rappelle que ces sites sont des lieux uniques de traitement des demandes des personnes handicapées qui sollicitent une aide technique, une aide humaine et un aménagement de logements ou du lieu ordinaire de vie).
La poursuite du plan triennal et du plan quinquennal avec un total de 485 MF de mesures nouvelles, en faveur des personnes handicapées. Je souhaite que viennent s'ajouter à ces mesures, 20 millions d'Euros en plus, spécialement dédiés à la prise en charge des autistes et des polyhandicapés.
la réforme de l'allocation d'éducation spéciale (AES) : cette réforme vise à moduler le montant du complément accordé aux familles, en tenant mieux compte des situations rencontrées pour l'obtention des services d'une tierce personne ou le financement de dépenses liées au handicap de l'enfant. Elle permettra également de favoriser une harmonisation des décisions d'attribution des compléments. Enfin, les montants proposés en cas de perte de salaire seront alignés sur les autres allocations existantes ou en cours de création : allocation parentale d'éducation (APE) et allocation de présence parentale (APP). En 2002, 250 MF seront consacrés à la mise en uvre de cette réforme.
4. Les familles
J'en viens à présent aux familles et à la politique familiale. Depuis la première conférence de la famille que nous avons tenue en juin 1998, le gouvernement a profondément rénové la politique familiale. On sait que les conférences de la famille avaient été interrompues : il n'y en a pas eu en 1995 et en 1996.
Il a tout d'abord restauré les marges de manuvre permettant de mener une politique familiale globale au service d'une vision moderne de ce que sont les familles aujourd'hui. La branche famille est redevenue excédentaire, alors qu'elle accumulait les déficits depuis 1994 et elle dégagera cette année un excédent de plus de 5 Mds de F. Comment répartissons-nous ces excédents ? La question de la répartition se pose que parce qu'il y a des excédents. Quand il n'y avait que des déficits, la question ne se posait pas (pour mémoire le déficit de 1997 était 14 Mds de F).
Je tiens à rappeler plusieurs éléments :
Ce gouvernement a réalisé une promesse jamais tenue par les gouvernements précédents en portant l'âge limite de versement des allocations familiales à 20 ans ;
Ce gouvernement a aidé les parents à mieux concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale, en réalisant un effort sans précédent en faveur de l'accueil de la petite enfance : je rappellerai simplement que près de 20 000 places nouvelles pourront être financées grâce au 229 millions d'Euros (1,5 MdF) du Fonds d'investissement pour la petite enfance créé l'an dernier. Il vous est proposé d'abonder ce fonds d'une somme identique en 2002 et de permettre ainsi la création de 20 000 autres places supplémentaires.
Ce Gouvernement a profondément contribué à aider les familles les plus modestes en réformant le barème des aides au logement décidé en 2000 pour un coût de près d'un milliard d'Euros (6,5 Mds de F) et en augmentant de l'allocation de rentrée scolaire de 1 000 à 1600 F.
Nous avons également prévu avec la CNAF de doter son Fonds d'action sociale pour un montant de plus de 914 millions d'Euros (6 Mds de F), afin notamment de donner aux Caisses d'allocations familiales les moyens de développer des structures d'accueil pour la petite enfance et de favoriser l'accès aux loisirs des enfants et des adolescents ;
Enfin, parce que le rôle des parents est essentiel pour le bien-être des enfants, nous avons également renforcé la fonction parentale, notamment avec la modernisation du droit de la famille. Cette année, nous poursuivons avec la création du congé de paternité de deux semaines qui marque la volonté du gouvernement de valoriser le rôle des pères.
Toutes ces mesures ont été guidées par deux principes simples : respect des choix individuels et justice sociale. Nous ne croyons pas qu'il existe un modèle de famille idéal qu'il faudrait imposer à la société toute entière. En mettant fin aux dispositifs les plus injustes et en consacrant davantage de moyens au bénéfice de toutes les familles, nous avons marqué notre différence profonde avec la politique menée par l'ancienne majorité.

5. Sur les retraites et le vieillissement
Autre sujet au cur des préoccupations des français en matière de protection sociale : Les retraites et l'organisation de la prise en charge des personnes âgées en perte d'autonomie. Permettre à nos concitoyens de vieillir dans la dignité, c'est garantir à nos retraités le maintien de leur pouvoir d'achat et c'est prévoir, pour ceux qui sont en perte d'autonomie, un dispositif qui leur permette d'accéder à une prise en charge médico-sociale adaptée.
Je reviendrai tout à l'heure sur l'importante question de l'avenir de notre système de retraite mais je tiens dès à présent rappeler quelques éléments sur la question du niveau des pensions de retraites.
* Je veux rappeler tout d'abord que nous avions trouvé la branche vieillesse en déficit.
Celle-ci renoue dorénavant avec les excédents et devrait afficher environ un milliard d'euros d'excédents en 2002. Ces excédents permettent d'associer les retraités aux fruits de la croissance et le Gouvernement propose de revaloriser les pensions de 2,2 % alors que l'inflation prévisionnelle est de 1,5 % seulement. Ce coup de pouce supplémentaire portera à 1,4 % le gain de pouvoir d'achat des retraités depuis 1997. Je rappelle que grâce à la suppression de la CRDS en 2001 pour les retraités non imposables, la hausse de pouvoir d'achat pour ces derniers s'élèvera sur la même période 1997-2002 à 1,9 %.
* Autre politique qui singularise cette majorité à l'égard de la précédente : la prise en charge de la dépendance des personnes âgées.
Avec la loi du 20 juillet 2001 qui a créé l'allocation personnalisée d'autonomie, nous avons réalisé une réforme extrêmement importante -qui a d'ailleurs été salué comme tel par tous sur ces bancs- donne aux personnes âgées un nouveau droit, un droit universel et égal sur tout le territoire : le droit à l'autonomie. La nouvelle allocation APA, qui sera en vigueur dès le 1er janvier 2002, va permettre à près de 800 000 personnes âgées de bénéficier d'un plan d'aide lorsque leur état le nécessitera, au lieu de 135 000 avec la PSD. Plus encore, cette nouvelle allocation va permettre à ces personnes âgées mais aussi à leurs proches et leurs familles, de pouvoir choisir leur lieu de vie, lorsque survient une perte d'autonomie -je crois qu'il est important de donner ce choix-dont on sait qu'elle peut être cette contrepartie douloureuse d'une vie qui par ailleurs s'allonge et offre tant de nouvelles possibilités.
La création de ce nouveau droit s'accompagne d'un développement des aides au maintien à domicile et d'une rénovation de leur prise en charge en établissement . Nous vous apporterons des précisions dans le débat.

II. Préparer l'avenir
Je voudrais à présent aborder plusieurs chantiers de la protection sociale qui correspondent à de nouveaux besoins et pour lesquels il nous faut construire de nouvelles réponses. Je pense ici en particulier à l'évolution des relations avec les professionnels de santé, à la prise en charge des accidents du travail, et bien sûr à l'avenir de nos retraites.
Mais je souhaite commencer en disant quelques mots des programmes pluriannuels de santé publique engagés depuis plusieurs années et qui marque la volonté du Gouvernement de bien préparer l'avenir.
1. les programmes pluriannuels de santé publique
Bernard Kouchner y reviendra plus en détails dans un instant que je ne peux le faire.
Je tiens d'abord à souligner que pour la première fois ces plans propose une approche globale en alliant le traitement des pathologies à de nombreuses actions de prévention.
Je rappelle brièvement que ces programmes coordonnés concernent :
le plan national de lutte contre le cancer,
la lutte contre les maladies infectieuses
les hépatites, et notamment les hépatites C
les pratiques addictives,
les maladies de longues durées, comme les maladies cardio-vasculaires, le diabète, l'asthme, l'insuffisance rénale chronique, ou encore la mucoviscidose.
J'ajoute que nous poursuivons notre action en faveur de certaines les populations fragiles pour lesquelles les dispositifs spécifiques tels que les Programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins (PRAPS) et les Permanences d'accès aux soins (PASS) ont été et seront renforcés.
Je ne reviens pas enfin sur le plan de prise en charge des victimes de la maladie d' d'Alzheimer dont je vous ai déjà dit quelques mots. Plan que nous avons présenté avec Paulette Guinchard-Kunstler et Bernard Kouchner il y a quelques jours.
A ces grands plans vient s'ajouter un renforcement de la sécurité sanitaire qui commence, je vous le rappelle, par la mise en place des différentes agences de sécurité sanitaire dont les qualités sont l'indépendance, l'expertise et le devoir d'information. L'Institut de veille sanitaire (INVS), l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), l'agence française de sécurité sanitaire de l'alimentation (AFSSA) et l'établissement français du sang (EFS) ont été créés par la loi du 1er juillet 1998. Assurément, ces institutions nous aideront à mieux prévenir les risques sanitaires.
2. les nouvelles relations avec les professionnels de santé
J'en viens à présent à la question de nos relations avec les professionnels de santé. Le Gouvernement a bien conscience que la fixation des objectifs financiers doit s'accompagner d'une démarche de dialogue avec l'ensemble des partenaires du système de santé.
* Nous avons d'ailleurs pu dialoguer avec l'ensemble des professionnels au cours de ce qui a été appelé " les réunions du grenelle de la santé ".
J'ai rendu publiques mes propositions au nombre de 13. Certaines sont reprises par amendements dans le présent projet de loi, d'autres ont été intégrées en première lecture dans le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Je souhaite évoquer dès à présent les mesures qui me semblent devoir entrer en vigueur rapidement :
la création de l'observatoire de la démographie et des métiers ;
la mise en place d'une aide à l'installation pour prendre en compte les difficultés rencontrées en matière de recrutement, de maintien et de remplacement de médecins et d'infirmiers dans certaines zones rurales et certains quartiers urbains désertifiés ;
l'amélioration du fonctionnement de la permanence des soins assurée en ville par les professionnels libéraux ; nous souhaitons donner une nouvelle dynamique aux initiatives en cours par la mise en place d'un dispositif de financement complémentaire ;
la mise en place de financements pérennes et d'une harmonisation des procédures au niveau régional pour soutenir le développement des réseaux ;
la création d'un haut conseil de santé chargé de constituer une ressource d'expertise et de proposition pour le gouvernement.
Aujourd'hui nous sentons que le malaise des professionnels de santé en ville n'est pas lié uniquement au mécanisme de régulation. C'est la raison pour laquelle nous avons travaillé sur une meilleure reconnaissance du rôle des professionnels libéraux dans le système de soins. La convention reste bien entendu l'instrument de cette reconnaissance.
A ce titre, je souhaite vous proposer un cadre pour un nouveau contrat. Je déposerai dans les prochaines heures un amendement d'orientation. Il me permettra de vous proposer ultérieurement un amendement plus précis lorsque j'aurai achevé la concertation avec les professionnels de santé, les caisses nationales, les partenaires sociaux, ainsi qu'avec vous mêmes les parlementaires.
L'orientation que je vous proposerai dans ce premier amendement consiste à lier le contrat et les mécanismes de régulation. Nous faisons le pari de la responsabilité, celui de l'engagement collectif et individuel des professionnels de santé dans le développement des bonnes pratiques, qui sont et pourront être sources d'économies. Le respect de ces engagements conventionnels constaté annuellement -dont nous décrirons le détail dans l'amendement en deuxième lecture après concertation- exonérerait les professionnels de l'application des lettres clés-flottantes.
* Je souhaite compléter mon propos sur les relations avec les professions de santé en évoquant la situation des professionnels paramédicaux.
Je voudrais en particulier souligner la qualité du travail que nous avons menée depuis 1997 avec les professions paramédicales.
nous avons d'abord mis fin au dispositif des ordonnances de 1996 qui prévoyait un reversement des médecins portant sur leurs prescriptions y compris d'actes paramédicaux : notre politique n'est pas fondée sur une opposition entre médecins et auxiliaires médicaux mais sur la volonté de renforcer la complémentarité de l'intervention des professionnels ;
l'évolution des conditions de la prescription médicale a également été lancée : la prescription d'une intervention paramédicale par le médecin porte dans ce cadre sur une indication donnée sans détailler la nature et le nombre d'actes à réaliser. La réforme du décret de compétences des masseurs-kinésithérapeutes et des orthoptistes a été réalisée ; celles des orthophonistes et des infirmiers aboutiront rapidement. Pour les infirmières, la mise en uvre du plan de soins infirmiers a nécessité c'est vrai une phase complémentaire d'explication, un test est en cours dans 19 départements afin de valider la coordination entre le Plan de Soins Infirmiers et la mise en uvre de l'APA au 1er janvier 2002. On voit bien en effet qu'il est très important que nous puissions garantir assez de personnels à domicile , en nombre et en qualité.
des évolutions importantes de nomenclature sont également intervenues : pour les infirmières en 1999, pour les masseurs-kinésithérapeutes en 2000. La réforme de la nomenclature des orthophonistes est également en cours ;
le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé, prévoit de nouvelles avancées : la création du conseil national des professions paramédicales, ainsi que la possibilité pour les masseurs-kinésithérapeutes de prescrire certains matériels.
enfin nous avons également ouvert les expérimentations en matière de réseau aux professionnels paramédicaux ;
Je voudrais vous dire pour conclure sur ce point que j'ai pu mesurer, à l'occasion des ces nombreuses réunions et de rencontres organisées sur le terrain, le grand professionnalisme et le dévouement dont font preuve nos médecins et nos personnels de santé en général. Je voudrais rendre hommage aux médecins de soins de ville. J'ai en particulier le souvenir d'un collectif de médecins de la ville d'Evry spécialement mobilisés en faveur de l'accès aux soins des plus démunis en zone urbaine. Ce type d'initiative doit être saluée au plus niveau et je crois que le débat qui s'ouvre aujourd'hui en est l'occasion.
3. les accidents du travail et les maladies professionnelles
Je souhaite a présent évoquer la question de la réforme de notre système de réparation et d'indemnisation pour les victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Il s'agit d'une question qui fait l'objet d'une réflexion approfondie engagée par le Gouvernement depuis plusieurs années.
Après avoir mis en place un dispositif sans précédent en faveur des victimes de l'amiante, le Gouvernement est décidé à engager une réforme complète du système de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.
Je voudrais d'abord rappeler l'ampleur de l'effort que ce gouvernement a consacré à la réparation des préjudices qu'ont subi les victimes de l'amiante, à un moment où l'on évoque la responsabilité de l'Etat dans le drame de l'amiante, où il y a des décisions des tribunaux à ce sujet.
en 1998, il a créé un mécanisme de levée de prescription pour la reconnaissance des droits à indemnisation des victimes de l'amiante jusqu'à cette date, qu'il vous est demandé de pérenniser dans ce PLFSS ;
en 1999 il a créé un mécanisme de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante ; d'ici à la fin de l'année, plus de 9 000 salariés en auront bénéficié ; je vous indique que je transmettrai dans les prochains jours pour avis à la commission des accidents du travail un arrêté ouvrant ce dispositif à tous les salariés atteints de plaques pleurales. Jean Le Garrec et Claude Evin ont particulièrement travaillé sur ce sujet.
enfin, vous avez voté l'année dernière la création d'un Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) ; j'ai signé le décret constitutif de du FIVA et il sera publié dans les prochains jours et ce Fonds sera mis en place dans les prochaines semaines ; ce projet de loi de financement prévoit qu'il sera doté par la branche accidents du travail et maladies professionnelles de 3,375 Mds de francs sur 2001 et 2002.
Au-delà de cet effort très important en faveur des victimes de l'amiante, à la hauteur de ce qu'a été ce drame pour notre pays, je crois que le temps est venu, aujourd'hui, de réfléchir sur les principes qui régissent depuis plus de cent ans maintenant la réparation des accidents du travail. Le système issu de la grande loi de 1898, parce qu'il n'a pas évolué comme le droit commun de l'indemnisation des préjudices, est aujourd'hui en décalage avec les aspirations de la société.
Le principe en effet de la réparation forfaitaire sur lequel il repose est de plus en plus difficile à justifier. Comment admettre en effet que les préjudices économiques, moraux ou esthétiques soient moins bien indemnisés lorsqu'il s'agit d'un accident du travail que lorsqu'il s'agit, par exemple, d'un accident de la route ? Dans le rapport qu'il m'a remis en juin dernier sur cette question, le Professeur MASSE concluait que la réparation intégrale était aujourd'hui " inévitable ". Je partage ce constat.
Mais, le rapport montre bien que faire évoluer le système actuel vers la réparation intégrale suppose en réalité de le remettre entièrement à plat, car la Sécurité sociale ne sait pas comme les compagnies d'assurance évaluer les préjudices économiques, moraux ou esthétiques. Nous avons donc besoin de mener cette réforme en s'assurant que cela soit bien la sécurité sociale qui gère les accidents du travail, c'est pourquoi j'ai demandé à Michel YAHIEL, inspecteur général des affaires sociales, de présider un groupe de travail, réunissant l'ensemble des acteurs afin de me remettre d'ici mars prochain des propositions permettant d'avancer concrètement et dans un avenir proche vers la réparation intégrale.
Dès cette année, cependant, et pour marquer son engagement dans cette voie, le gouvernement commence à aménager le code de la sécurité sociale en ce sens. Il a ainsi prévu dans ce projet de loi de financement un mécanisme de revalorisation du barème des indemnités en capital, indemnités qui n'avaient jamais été revalorisées depuis 1986.
Nous serons attentifs aux propositions que fera le Parlement dans ce domaine. Alors que vient de se produire à Toulouse l'accident du travail le plus meurtrier depuis une quinzaine d'années, j'attacherai un intérêt particulier aux mesures en faveur des ayants-droit des victimes d'un accident mortel.
4. l'avenir des retraites
J'en viens enfin à l'importante question de l'avenir des retraites. On se souvient qu'en 1995, la précédente majorité, pour des raisons autoritaires, avait mis les Français dans la rue sur le sujet des retraites et, ce faisant, bloqué durablement le débat public.
Dès son arrivée aux responsabilités, le Premier Ministre a affirmé que sa priorité : garantir le système de retraite par répartition. Dès le printemps 1998, il a commandé le rapport Charpin qui lui a été remis en avril 1999. D'autres contributions ont été versées au débat tels que le rapport Taddei ou celui de René Teulade.
Lors de son intervention du 20 mars 2000, le Premier Ministre a posé les principes à respecter pour préserver le pacte entre les générations et assurer la pérennité du système par répartition. Les principes mis en avant par le Premier Ministre sont : concertation, respect de la diversité et de l'identité des régimes, recherche de l'équité et de la solidarité, introduction de plus de souplesse dans l'accès à la retraite, anticipation des évolutions démographiques. Ces principes ont guidé notre action. Je vais rappeler ce que nous avons fait pour préparer la réforme.
4.2 Nous avons créé en 1998- le Fonds de réserve des retraites - pour lisser le choc démographique auquel notre système de retraite sera confronté.
Ce Fonds, destiné à abonder les régimes par répartition à partir de 2020, sera pourvu d'un conseil de surveillance, composé notamment de parlementaires et de partenaires sociaux, garant de la bonne gestion du fonds.
Ses ressources présentes et futures sont les excédents des régimes de vieillesse, les prélèvements sociaux sur les revenus du capital et les revenus financiers générés par ses encours. A cela s'ajoutent les produits des licences UMTS et les produits de privatisation destinés à compenser la baisse du prix des licences UMTS. Ce fonds comptera 13 milliards d'euros fin 2002 [85,2 milliards de francs] disposera fin 2020 de plus de 1 000 milliards de francs. Nous respecterons dons et au-delà la montée en charge. Fin 2001, le Fonds sera doté de 43 milliards.
4.3 Nous avons installé en mai 2000 le Conseil d'Orientation des Retraites,
Ce Conseil est présidé par Mme Yannick Moreau et composé de Parlementaires, de partenaires sociaux, de personnalités qualifiées et de représentants de l'administration, pour organiser dans la durée la concertation sur l'avenir des retraites : nous attendons son premier rapport d'ici la fin de l'année. Sans préjuger de ses conclusions qui doivent encore faire l'objet de débats, nous pouvons déjà constater son premier acquis qui est d'avoir accentué les convergences sur les analyses et les perspectives démographiques et l'ampleur des besoins de financement à venir.
4.3 Nous avons mis en place le socle nécessaire à la réforme des retraites.
La question de l'emploi et notamment des deuxièmes parties de carrières est prioritaire pour les retraites. Pour dire les choses simplement, sans emploi, pas de cotisations pour les retraites.
Nous sommes d'ailleurs en France en retard par rapport à d'autres pays européens. L'objectif de remontée du taux d'emploi entre 15 et 64 ans fixé au niveau de 70 % par l'Europe intègre en effet une forte hausse du taux d'emploi des plus de 55 ans. Nous avons un retard important à rattraper en la matière.
Dans le cadre du dialogue social que je mène, à la demande du premier ministre, depuis juillet 2001 avec les partenaires sociaux, et particulièrement, celui du volet plein-emploi, je tiens à faire progresser le sujet âge et travail qui me paraît recueillir un large consensus. Nous avons déjà tenu des réunions avec les partenaires sociaux sur ce thème, et nous en aurons encore.
Déjà, le Conseil économique et social discute aujourd'hui et demain son avis sur le thème " dynamique de la population active et emploi : gestion prévisionnelle des âges à l'horizon 2010 ". De même, le Conseil d'orientation des retraites a axé une grande partie de ses travaux sur le sujet âge et travail et vient de publier les actes du colloque qu'il avait organisé sur ce sujet en mai dernier.
Je souhaite pour aller plus loin confier une mission à M. Bernard Quintreau, rapporteur du Conseil économique et social, pour qu'il organise de manière concrète les propositions en matière de communication, de conseil, de formation professionnelle, d'organisation du travail, afin de changer le travail des salariés âgés.
Je compte également valoriser les actions pilotes menées par des entreprises performantes dans la gestion des âges et développer les expérimentations des entreprises sur la base de ce qui s'est fait en Finlande ou aux Pays-Bas -des résultats très remarquables ont été obtenus- : ces pays, grâce à des démarches volontaristes ont réussi à renverser la tendance de l'inactivité en fin de carrière.
Il faut changer le regard de la société sur le travail des plus de 50 ans, qui doivent faire profiter la société entière de leur expérience. Car l'expérience est une richesse nationale, dont nous aurions bien tort de nous priver. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2002 poursuit et accentue le mouvement que le Gouvernement a engagé depuis 1997 de resserrement des conditions d'accès dans les dispositifs de préretraites financés par l'Etat.
Ceci ne doit évidemment pas empêcher d'avoir recours, dans le cas d'entreprises en réelles difficultés, à ce type de dispositifs. C'est d'ailleurs ce que nous allons faire pour une partie des salariés dans le cas de Moulinex. Quand rien n'a été prévu, face à des sinistres sociaux, alors il fait des meures d'aides de préretraites. Mais les problèmes doivent pouvoir être pris à l'avenir plus en amont et les entreprises en bonne santé doivent apprendre à gérer les carrières des salariés de tous les âges.
Nous travaillons avec la Commission des affaires sociales pour répondre à la préoccupation relative à la situation des chômeurs âgés qui ont cotisé 40 ans et qui ne sont pas couverts par l'UNEDIC ; Il s'agit de leur assurer une garantie de ressources jusqu'à 60 ans. Alfred Recours, notre rapporteur a fait des propositions dans ce sens, nous y travaillons et je suis persuadée que nous allons trouvé des solutions dans ce sens.
En ce qui concerne l'avenir des retraites, la Commission des affaires sociales ont souhaité attirer l'attention du gouvernement par plusieurs amendements.
Concernant la situation des personnes de moins de 60 ans qui ont cotisé plus de 160 trimestres, j'ai bien entendu vos propositions ; le Gouvernement avait, déjà indiqué son souci à l'égard de la situation de ces salariés. Dans son discours sur l'avenir des retraites du 21 mars 2000,le premier ministre avait en effet parlé " d'améliorer la situation de ceux qui partent à la retraite en ayant cotisé plus de 160 trimestres parce qu'ils sont entrés tôt dans la vie active ". Il s'agissait bien (je cite les mots exacts du Premier ministre) " d'accorder plus de souplesse dans le choix du départ à la retraite des salariés, dès lors que ceci ne dégraderait pas la situation financière du régime général ", notamment en pénalisant moins ceux qui préfèrent partir à la retraite ou sont contraints de le faire sans avoir suffisamment de trimestres pour obtenir une retraite à taux plein ". L'amendement déposé par la Commission rencontre cette préoccupation, mais il ne peut être retenu par le Gouvernement, indépendamment d'une réforme générale. Il doit être replacé dans le cadre plus général de la nécessaire réforme des retraites (non seulement en raison de son coût).
Je souhaite que nous approfondissions dans les mois qui viennent la question des avantages familiaux en matière de retraite ou encore de la prise en compte pour la retraite du handicap ou de la pénibilité du travail. Le premier rapport du COR n'abordera pas ces sujets et je souhaite l'en saisir officiellement puisque sa mission est d'organiser la concertation dans la durée. Cette question, elle aussi, ne peut pas être traitée indépendant de la réforme globale des retraites et doit être concertée avec l'ensemble des partenaires sociaux concernés, de manière globale.
La France est un pays qui vieillit et c'est une formidable opportunité pour tous -à la condition que nous sachions le regarder comme une opportunité. L'espérance de vie à 60 ans augmente ainsi de plus d'un an et demi tous les 10 ans. Un homme qui a 60 ans aujourd'hui vivra en moyenne 20 ans alors qu'un homme de 21 ans aujourd'hui et qui donc aura 60 ans en 2040, vivra alors en moyenne 26 ans. La contrepartie de cet allongement de la durée de la vie, c'est que le poids des retraites augmente fortement et le Conseil d'Orientation des retraites évaluera en détail les perspectives financières dans son premier rapport.
Voilà pourquoi la réforme des retraites est absolument nécessaire et les Français en sont conscients. Sans vouloir anticiper sur les conclusions du Conseil d'orientation des retraites je crois qu'un élément du débat essentiel pour les Français est leur niveau de vie à la retraite, c'est-à-dire le niveau de leur retraite par rapport au niveau de leur dernière rémunération (éventuellement sur plusieurs années), ce qu'on appelle le taux de remplacement et donc ce que chacun a constaté ou pourra effectivement constater au moment de son départ à la retraite. Garantir les retraites implique de formaliser cette garantie. Une partie importante de la négociation à venir sur les retraites devra donc porter à mon sens sur un niveau général du taux de remplacement.
Seule une réforme d'ensemble prenant en compte l'ensemble des paramètres financiers et des politiques permet alors d'atteindre cet objectif de garantir les retraites et de définir alors comment le système pourrait être assoupli dans des conditions financières neutres pour laisser à chaque individu la liberté et le choix de plus ou moins de droits autour d'une garantie générale.
Nous allons donc poursuivre dans les semaines et mois qui viennent le chantier âge et travail, condition préalable d'une réforme des retraites. Le Conseil d'Orientation des retraites remettra son premier rapport en décembre qui devrait d'une part faire état d'une convergence des analyses et d'autre part avancer des propositions. Dans un deuxième temps rapproché, des travaux complémentaires tels que la concertation sur les avantages familiaux de retraite ou la manière de prendre en compte le handicap pourront être effectués. (Je souhaite que le COR nous fasse des propositions là-dessus).
Nous aurons alors en main tous les outils pour éclairer les choix à faire tout de suite après les échéances électorales et passer de la concertation à la négociation. Ainsi, dès le lendemain des élections législatives, une négociation tripartite pourra être organisée sur une réforme d'ensemble des retraites et déboucher sur des orientations à mettre en uvre par la loi.
Conclusion
Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2002 s'inscrit dans le prolongement des priorités du gouvernement : l'instauration de nouveaux droits pour une France toujours plus solidaire, et en cela fidèle aux idéaux des fondateurs de la sécurité sociale.
Il concilie de façon active les deux principes qui nous guident : l'efficacité économique et la solidarité. Ce PLFSS reflète bien notre engagement à la fois en faveur de la rigueur dans la gestion des comptes sociaux et notre souci d'agir toujours mieux en faveur des plus faibles, des plus fragiles.
Je crois vous avoir exposé à quel point, à travers ce dernier PLFSS de la législature, le Gouvernement exprime son intention non pas de clore une politique engagée depuis 5 ans, mais bien d'en assurer la continuité et surtout de déterminer le cadre des choix qui s'imposeront aux pouvoirs publics dans les années à venir en matière de protection sociale.
Assurer aux français une protection sociale de qualité, c'est permettre de prendre en charge les risques qui sont aujourd'hui bien identifiés, mais c'est aussi se donner les moyens prévenir ceux que l'on redoute. Je crois qu'avec le présent projet, nous disposons de réponses fortes à ce défi permanent. Je ne doute pas que nos débats permettront de les enrichir.

(Source http://www.social.gouv.fr, le 31 octobre 2001)