Déclaration de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, sur le rôle des conseils économiques, sociaux et environnementaux de régions (CESER) dans le cadre de la réforme territoriale, à Paris le 12 février 2015.

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Circonstance : Assemblée plénière avec les présidents des conseils économiques, sociaux et environnementaux de région (CESER), au palais d'Iéna, à Paris le 12 février 2015

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Merci de m'accueillir aujourd'hui à l'occasion de cette plénière, afin que nous puissions échanger, débattre et consolider nos réflexions communes sur la nouvelle organisation territoriale de la République. Pour que nous puissions également avancer – je l'espère – sur la question de l'avenir des CESER dans la réforme territoriale. Cette réforme territoriale a – depuis notre dernière rencontre, lors de votre colloque annuel à Châlons-en-Champagne – fait des avancées considérables.
La nouvelle carte des régions a été votée par le Parlement et validée par le Conseil Constitutionnel. Le projet de loi NOTRe – que je porte au nom du gouvernement – a été examiné en première lecture par le Sénat puis par la Commission des lois à l'Assemblée. Il y sera débattu en séance publique, à partir de mardi prochain.
Cette nouvelle organisation territoriale que nous mettons en place, vous interroge.
Elle vous interroge d'abord, en tant que représentants de la société civile organisée, en tant que représentants de ceux qui sont concernés en premier lieu par cette réforme.
Cette réforme en effet, ce n'est pas – malgr les débats techniques que nous avons souvent – un enjeu institutionnel qui se traite entre élus locaux, entre ministères, entre administrations.
C'est une réforme d'abord, pour améliorer la vie des gens : pour améliorer le quotidien des salariés, des entreprises, des associations, de celles et ceux que vous représentez au sein de nos CESER.
C'est une réforme pour faire en sorte que la puissance publique soit chaque jour à leurs côtés – qu'ils soient usagers des transports ou de la formation, patrons de PME ou employés, créateurs d'entreprises ou citoyens engagés.
Ainsi, dès l'annonce des fusions de région, vous vous êtes fortement impliqués dans les diverses réflexions à mener : perspectives de coopération, politiques contractuelles, stratégies en matière de transport ou d'industrie, rapprochements des services publics, ce sont toutes ces questions auxquelles vous avez tenté déjà, d'apporter des éléments de réponses.
J'ai pu le constater lors des déplacements que j'ai effectués dans le cadre de mon tour NOTRe France, consacré à la réforme territoriale. Ce fut le cas notamment, dans la future région de Bourgogne / Franche-Comté où les CESER comme les régions ont été à l'avant-garde.
Dans cette période de transformation pour les collectivités, vous êtes un maillon essentiel. Les élus eux-mêmes ont souhaité pouvoir recueillir votre avis. Car ils savent la qualité et l'importance de vos travaux. Ainsi, la quasi-totalité des Présidents de Région vous ont, dès l'annonce de la réforme, saisis sur la question de la nouvelle carte régionale. Et les parlementaires ont souhaité ajouter dans le projet de loi porté par mon collègue Bernard Cazeneuve, sur le nouveau découpage régional, une consultation obligatoire des CESER, sur le choix des futurs chefs-lieux de région.
Vos assemblées, seront également des partenaires indispensables lorsqu'il s'agira d'élaborer les premiers budgets exécutifs ou les nouveaux schémas stratégiques.
Si cette réforme vous interroge, c'est qu'elle questionne aussi votre propre organisation. Elle la questionne même parfois violemment.
Vous avez j'imagine, suivi le débat au Sénat sur le projet de loi NOTRe. A cette occasion, des amendements ont été déposés pour demander que les CESER soient supprimés. Je reviendrai un peu plus tard sur cette question. Car si le gouvernement s'est fortement opposé à une telle suppression - je pense que vous l'avez bien vu - certains points soulevés alors, méritent probablement que soit ouverte une réflexion. Afin, comme nous le faisons pour notre organisation territoriale, de nous adapter aux évolutions de notre société.
Ce questionnement, il concerne d'abord votre propre organisation territoriale, puisque vos périmètres correspondent aujourd'hui à celui des régions actuelles. Il vous faudra – avec votre Ministère de tutelle – dégager un consensus sur le sujet, comme l'ont fait les CCI et les chambres consulaires. Cela ne vous empêche pas cependant, d'anticiper et d'avancer d'ores et déjà. Certains CESER, comme ceux de la Basse et de la Haute Normandie ont travaillé par exemple, à un projet détaillé de rapprochement.
Donc oui, il y a la voie législative, qui parfois est nécessaire. Mais celle-ci ne fait pas tout. Et ce n'est pas à vous, représentants de la société civile que je l'apprends. Votre rôle c'est cela justement : proposer, prendre des initiatives, participer à l'élaboration des politiques publiques, contribuer à leur enrichissement ou à leur amélioration.
Le gouvernement prendra si nécessaire, des dispositions. Mais, c'est à vous aussi d'écrire la place qui doit être celle de la société civile organisée dans, pour et après la réforme. C'est à vous qu'il revient de garantir que la société civile constitue une véritable force au sein de nos futures régions.
Ce questionnement – il devra concerner sans doute – le mode de désignation de vos membres. Car si cela ne justifiait pas la suppression demandée par certains sénateurs, des évolutions peuvent probablement être envisagées. La question posée par les Sénateurs concernait en particulier, le choix des personnalités qualifiées.
Lorsque je parle d'évolutions, il ne s'agit pas de faire table rase de tout ce qui existe ou de transformer entièrement la composition actuelle de nos CESER. Je fais partie – vous le savez sans doute - de celles et ceux qui pensent que la démocratie ne peut vivre sans les corps intermédiaires ; que ces corps intermédiaires sont indispensables à la vivacité de notre société civile, à sa participation effective dans les débats qui animent notre pays.
Organisations syndicales, patronales ou salariales et grandes associations ont un rôle fondamental à jouer. Leur présence dans les CESER, c'est un moyen efficace pour que soient entendues leurs voix et relayés des avis qui nous sont – je parle en tant qu'ancienne élue locale – bien souvent plus que nécessaires.
Une fois ceci acté – rien n'empêche néanmoins que des évolutions soient impulsées. Et là aussi – une fois encore – je vous encourage à être des initiateurs. Car c'est la meilleure garantie pour une société civile présente, écoutée et entendue au sein de notre nouvelle organisation territoriale.
Ce questionnement, il porte enfin sur les missions des CESER, et les voies qui sont à leur disposition pour pouvoir les exercer. Le débat sur la reconnaissance et, dans une certaine mesure, l'élargissement des missions qui sont les vôtres, est en cours au Parlement. Il ne s'agit pas évidemment, de faire des CESER des contre conseils régionaux. Il s'agit en revanche de faire en sorte qu'ils apportent véritablement leur contribution aux débats, à l'exercice des compétences et leur évolution, à l'évaluation des politiques publiques, au lien avec l'ensemble des corps intermédiaires et si possible, des citoyens.
Je pense que vous en conviendrez, l'enjeu de lisibilité pour l'action publique locale, c'est bien celui-là : que derrière les 1% d'élus au sein de la population – élus qui sont une grande richesse – et, au-delà des 1% de « participants professionnels » dont parle Pierre Rosanvallon dans la Contre-Démocratie , il y ait bien 98% de la population qui s'y retrouve, voire qui s'y reconnaisse.
Mesdames et Messieurs, je sais – pour le vivre actuellement – que l'examen du projet de loi NOTre, nous pousse à aborder le débat sous l'angle des amendements, des sous amendements, des avis du gouvernement et de la commission des lois.
Et bien sûr nos débats sont amenés à se poursuivre : le projet de loi continuera quant à lui d'évoluer. Mais je crois aussi, qu'il ne faut pas que nous perdions de vue l'essentiel. L'essentiel, c'est ce que je vous avais présenté, au mois de septembre dernier : travailler ensemble, refaire de la coopération une valeur fondamentale, au coeur de toutes nos politiques publiques.
L'enjeu est bien là. Pour relever les défis qui restent devant nous, lutter contre les inégalités et renouer les solidarités ; pour améliorer les services publics du quotidien, les rendre plus accessibles, les diffuser dans tous les territoires, nous aurons besoin de toutes et de tous. Nous aurons besoin de méthodes nouvelles, de nouvelles règles, de nouveaux espaces de dialogue, de concertation et de débat. Nous devrons pouvoir nous appuyer sur l'intelligence des territoires, leur créativité et leurs innovations.
Nous aurons donc besoin des CESER car ils font le lien entre puissance publique et société civile. C'est pour vous - je crois - l'occasion de réaffirmer la place qui doit être la vôtre.
Mais nous aurons besoin aussi de CESER qui montrent la voie, de CESER qui s'adaptent et initient des changements ; de CESER qui font de la nouvelle organisation territoriale une force, pour replacer la société civile au centre de notre action publique.
Je vous remercie.
Source http://www.ceser-guyane.fr, le 28 avril 2015