Déclaration de M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, sur les enjeux pour les villes nouvelles du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains : élaboration d'un projet urbain et d'un projet de territoire à partir d'un schéma de cohérence territoriale, développement de la cohésion sociale et territoriale, Paris, le 22 février 2000.

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Circonstance : Dîner de l'Association française des villes nouvelles (AFVN) à Paris, le 22 février 2000

Texte intégral

Mesdames, messieurs,
Permettez moi d'exprimer à mon tour le plaisir de me retrouver ce soir parmi vous. Afin de laisser place au débat, je ne reviendrai pas sur l'ensemble du projet de loi que vient de présenter Jean-Claude Gayssot.
Je souhaiterais simplement évoquer quelques points qui me semblent pouvoir particulièrement intéresser les villes nouvelles, pour le présent mais aussi l'avenir, dans un contexte institutionnel qui a vocation à évoluer. Je les regrouperai autour de deux thèmes.
Le premier est celui des outils au service du projet urbain et du projet de territoire.
La force des villes nouvelles est justement d'avoir été conçue en fonction d'un projet urbain et de territoire, certes évolutif, mais qui a été pensé dans ses différentes dimensions : organisation spatiale et activités économiques, urbanisme, habitat et déplacements. C'est ce qui explique que les villes nouvelles offrent un cadre de vie de qualité, bien supérieur à celui d'autres villes dont le développement s'est fait de façon plus anarchique.
Cet atout doit évidemment être préservé et même développé pour les années à venir. Et un outil comme le schéma de cohérence territoriale, qui permet de traduire un projet d'agglomération, me semble parfaitement dans la ligne des acquis antérieurs et des besoins futurs.
L'enjeu sera probablement pour certaines villes nouvelles d'élaborer ces schémas sur un périmètre élargi par rapport à leur géographie actuelle afin de mieux prendre en compte la réalité des interdépendances territoriales en termes de planification, de déplacements, d'activités économiques ou d'habitat.
De ce point de vue, les villes nouvelles ne sont pas elles non plus à l'abri de phénomènes d'urbanisation périphérique et concurrente. Et leur dynamique de développement, notamment économique, dépend sûrement pour certaines, de cet élargissement. Je pense en particulier à Evry et aux réflexions engagées sur le centre Essonne.
Un élargissement de périmètre qui dans certains cas pourrait être pertinent aussi pour les contrats d'agglomération voire, à terme, même si c'est plus complexe, pour les communautés d'agglomération qui ont vocation à prendre le relais des SAN
Le plan local d'urbanisme me semble lui aussi bien refléter les pratiques et les besoins de vos villes. L'objectif est de dépasser la simple notion d'occupation des sols, et l'énumération abondante mais qui ne fait pas toujours sens, de règles en tous genres, pour exprimer de façon plus lisible et accessible pour nos concitoyens les grandes lignes du projet urbain de la ville : en termes d'aménagement et d'équipements, de recomposition urbaine, d'habitat, de déplacements.
Cette lisibilité du projet est déjà en soi un gage de meilleure maîtrise du développement comme du renouvellement urbain, deux notions qui concernent les agglomérations nouvelles comme les autres villes.
Mais il est vrai également que l'existence d'un projet urbain des villes nouvelles doit beaucoup à la présence des établissements publics d'aménagement (EPA) qui, avec les collectivités locales, ont conçu et porté dans la durée ce projet. Là encore, un champ commun de réflexion s'ouvre à nous pour les mois qui viennent, sur les outils susceptibles de prendre le relais des EPA.
Le second enjeu d'avenir est celui de la cohésion sociale et territoriale des villes nouvelles.
Vous en avez établi le diagnostic dans le rapport de Paul PAVY : les villes nouvelles n'ont pas été à l'abri des difficultés économiques et sociales que traversent nos villes et notre société, d'autant que nombre d'entre elles accueillent beaucoup de logements sociaux.
Certains choix d'urbanisme n'ont pas non plus passé l'épreuve du temps, notamment du fait des difficultés de la gestion urbaine au quotidien. Les disparités se sont parfois accrues entre les villes nouvelles et leur environnement et au sein des villes nouvelles, il ne faut pas le nier.
L'Etat doit aider les villes nouvelles à faire face à ces problèmes et aussi à organiser les solidarités nécessaires.
De premières réponses en matière de renouvellement urbain et de politique sociale notamment, vont pouvoir être apportées dans le cadre des prochains contrats de ville et des grands projets de ville. Leur conception sur une base intercommunale est un atout de plus.
Le projet de loi SRU comporte également des points d'appui. Jean-Claude Gayssot a évoqué la réforme de la loi d'orientation pour la ville (L.O.V). Il est clair que c'est en région parisienne que les problèmes de ségrégation urbaine, que le décalage majeur entre la production de logement social et la demande, sont les plus massifs. Par delà les difficultés objectives de la construction de logements sociaux, notamment du fait du foncier, c'est là aussi que les comportements de rejet s'expriment de façon particulièrement crue.
En matière de logement social, la loi comporte d'autres mesures susceptibles de faciliter la réponse à certains problèmes particulièrement aigus dans les villes nouvelles.
Je pense en particulier à la multiplicité des bailleurs HLM. Le projet va faciliter en particulier les mises en gérance entre organismes HLM, afin de favoriser sur un même quartier ou îlot, une gestion urbaine et patrimoniale plus cohérente.
Dans le prolongement de la loi "exclusions", nous sommes également ouverts à un enrichissement de notre texte sur les politiques d'attributions. Deux points me semblent mériter des progrès : une bonne correspondance entre les communautés d'agglomération et les conférences intercommunales du logement pour bien faire le lien entre politique d'offre et politique d'attribution ; le second point sur lequel il faudrait progresser est celui d'une gestion des attributions mieux coordonnée et plus transparente des dans les communes où sont implantés de nombreux bailleurs.
Autre sujet que je sais sensible dans les villes nouvelles, les copropriétés en difficulté. Nombre d'entre vous doivent faire face à la dérive de certains programmes d'accession sociale, occupés par des familles à très faibles ressources.
En s'inspirant d'ailleurs des actions menées dans certains sites de villes nouvelles, le projet de loi prévoit différentes mesures de nature à faciliter les interventions, toujours très complexes, dans les copropriétés en difficultés.
Ces dispositions portent en particulier sur les plans de sauvegarde, l'administration provisoire, et le portage temporaire par des organismes HLM. Elles sont à rapprocher de l'amélioration très substantielle apportée à la PAH dans le cadre des plans de sauvegarde qui va prochainement entrer en application.
Il est clair que la politique de l'habitat constitue un enjeu majeur pour les villes nouvelles, ne serait-ce que pour permettre d'y maintenir les conditions d'un développement harmonieux. Cet objectif suppose certainement de favoriser au sein même des villes nouvelles un meilleur équilibre de l'habitat à travers des politiques coordonnées et solidaires.
Au-delà de la nécessaire poursuite de la constitution d'une offre nouvelle de qualité, nos politiques auront de plus en plus à prendre en compte la gestion de l'existant. C'est vrai pour des villes dites "traditionnelles"; il s'agira aussi, sans aucun doute, d'un enjeu essentiel pour les structures d'agglomération en charge des villes nouvelles.
Je m'en arrêterai là dans mon propos, afin de laisser de la place aux échanges qui sont la raison d'être de la forme conviviale de la rencontre de ce soir.

(source http://www.equipement.gouv.fr, le 27 juin 2000)