Texte intégral
En accueillant 67 millions de touristes étrangers par an, la France est devenue la première destination touristique à travers le monde. Ses monuments et ses musées, la variété de son patrimoine, les nombreux festivals de la saison estivale constituent de puissants atouts, même s'ils sont concurrencés par l'émergence de nouvelles formes de loisirs.
Les Français aussi portent un intérêt certain au patrimoine national, le redécouvrant dans sa richesse et sa diversité : la visite des musées et des monuments est maintenant, avec le cinéma, leur première pratique culturelle.
Pour conserver à la connaissance et à la visite des musées, des monuments et des villes une place de premier rang, la politique patrimoniale ne peut évidemment pas être assumée par l'Etat au travers de la seule protection et conservation des monuments historiques, même si cela constitue une charge à laquelle il faut faire face année après année.
L’Etat doit aussi considérer que le patrimoine, au-delà des enjeux de mémoire et de transmission culturelle qu'il porte, constitue un atout touristique et économique pour la France. Il est un important secteur créateur d'emplois.
Dans ce contexte, la signature de la convention culture-tourisme entre le ministère de la Culture et de la Communication et le secrétariat d’Etat au Tourisme consacre l'élaboration d'une politique du tourisme culturel. Grâce à une collaboration étroite entre les services de l’Etat, les collectivités territoriales, les responsables culturels et les professionnels du tourisme, grâce à une exploitation concertée des ressources, cette politique donnera au patrimoine, véritable outil de l'aménagement du territoire, la place qu'il mérite dans le développement touristique et économique.
La fréquentation du patrimoine, son appropriation par tous, répondent à des besoins essentiels de la société actuelle : quête d'identité, désir de se resituer dans l'espace et dans le temps au moment où la perception que l'on peut en avoir se trouble et se recompose, recherche de nouveaux liens sociaux. En valorisant ce terrain de découvertes, ce lieu d'échanges, l’Etat assure, avec les collectivités locales, une importante mission de service public.
Les directions régionales constatent d'ailleurs sur le terrain un désintérêt croissant des publics pour l'offre standardisée de loisirs culturels. Mais les pratiques de consommations stéréotypées ne céderont véritablement le pas que si l'offre culturelle invite à des formes de découverte accessibles et respectueuses de l'identité des cultures et des publics.
Aider les acteurs de terrain à rendre les monuments et les témoignages du passé ouverts au plus grand nombre, en développer l'attrait, sans les appauvrir ni les banaliser, en faire le lieu légitime d'une offre culturelle ouverte à toutes les formes de création, mêlant approche patrimoniale et approche contemporaine : tels sont les objectifs que je me donne.
Le ministère de la culture veillera d'abord à ce que les monuments dont il a la responsabilité soient accessibles à tous, dans de bonnes conditions.
Comme tous les étés, de grandes manifestations seront coordonnées par la Caisse nationale des monuments historiques et des sites, montrant ceux-ci sous un nouvel angle, suscitant une émotion différente : des animations telles que « monuments en musique », « la nuit du cinéma », « le monument et ses artisans », et des créations théâtrales animeront de leurs thématiques différents
monuments.
Parallèlement à ces animations, la Caisse lance cette année une opération intitulée « La clé des temps » qui offrira à chacun la possibilité de visiter dix monuments d'un parcours pour une somme forfaitaire. Véritable invitation au voyage, cette initiative mêlera dans un même itinéraire plusieurs monuments nationaux d'une même région en Val-de-Loire, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, ou encore dans le Grand-Sud, où la clé des temps mènera les visiteurs d'Aigues-Mortes à Carcassonne en passant par le château de Tarascon.
Mais une politique de développement du tourisme culturel et patrimonial ne saurait se cantonner aux sites, musées et monuments, dont l’Etat a la charge.
C'est l'ensemble des 38 000 monuments français protégés au titre des monuments historiques qui doit participer de cette politique, dont les Journées du Patrimoine sont la meilleure illustration, avec dix millions de visiteurs en 1997. Leur succès grandissant témoigne de l'envie de mieux connaître les monuments les plus prestigieux de l'histoire de France et les bâtiments représentatifs de nos institutions républicaines mais aussi les traces plus humbles des traditions rurales, de l'ère industrielle ou de notre environnement quotidien.
Pour être connu, pour être reconstitué, pour être transmis, ce patrimoine où de façon ténue se mêlent traces matérielles fortes et traces immatérielles doit être soutenu par une action politique inscrite dans la durée. Pour cela, il faut conjuguer l'énergie, la passion des acteurs locaux, avec d'indispensables relais nationaux qui leur donnent la force d'un réseau.
Une telle politique s'incarne particulièrement bien dans le réseau des Villes d'art et des Villes et Pays d'art et d'histoire dans lequel j'aurai le plaisir cet après-midi d'accueillir Montauban, nouvelle venue dans le réseau de votre région. Ces labels sont aujourd'hui attribués à près de 120 communes ou groupements de communes. En collaboration avec les collectivités locales, les services d'animation du patrimoine valorisent le patrimoine local dans sa définition la plus large, des vestiges antiques à la création contemporaine, grâce à des visites générales et thématiques conduites par un personnel formé et compétent. C'est l'occasion pour un public français et étranger de plus en plus nombreux de s'initier à la lecture d'une ville ou d'un paysage, de comprendre la morphologie d'un quartier, de mettre en relation un bâtiment avec son histoire, de découvrir des lieux habituellement fermés au public, de nouer un échange avec des guides-conférenciers qualifiés, de rencontrer les habitants et ainsi de se familiariser avec un lieu dans ses multiples composantes historiques et topographiques. Ce sont au total plus de deux millions de personnes qui ont été accueillies l'année dernière par le réseau, animé par 1100 guides-conférenciers.
Le réseau des Villes et pays d'art et d'histoire encourage ainsi une multiplicité d'initiatives de terrain, portées par les acteurs de proximité, publics et privés, qui ont la connaissance intime du lieu, de son histoire, et qu'ils sont soucieux de faire connaître et partager. En les rassemblant sous la coordination nationale de la direction de l’Architecture et du Patrimoine, le réseau leur donne des points d'appui indispensables pour relayer plus largement leurs efforts.
La saison 98 des Villes et Pays d'art et d'histoire que j'ai le plaisir de lancer aujourd'hui verra le développement des visites thématiques. Thèmes littéraires, savoir-faire, actualités du patrimoine ou commémorations comme celles de l’Edit de Nantes favorisent autant d'approches différentes d'un même lieu. L'organisation de promenades nocturnes dans Figeac ou dans le pays d'art et d'histoire du Rouergue permet de renouveler l'approche du patrimoine. Des visites animées nourries par la passion des conseillers des DRAC et d'universitaires, ont été également été créées, pour conjuguer patrimoine et gastronomie, ou encore patrimoine et théâtre, comme à Parthenay.
Cette année voit aussi la mise à disposition des professionnels d'un thesaurus et la création d'un site Internet. Il n'existait jusqu'alors aucun guide pratique rassemblant les offres du réseau des Villes et Pays d'art et d'histoire à l'attention des opérateurs de voyage : désormais le thesaurus présente, région par région et de villes d'Art en pays d'Art, 3000 visites, circuits et ateliers proposées aux groupes. Les opérateurs de voyage pourront choisir pour leur clientèle entre diverses formes d'approche du patrimoine, qui favorisent de leur côté une meilleure intégration du tourisme au milieu local et participent en retour au développement économique local. Les professionnels du tourisme y trouveront tous les renseignements pratiques nécessaires à l'élaboration d'un voyage, capacités hôtelières, accueil de congrès, etc...
Ce thesaurus a reçu le soutien du Syndicat national des agences de voyage, du Syndicat national des entreprises de tourisme et de la Fédération nationale des offices de tourisme et des Syndicats d'initiative. Leurs représentants sont aujourd'hui avec nous, et je tiens personnellement à les remercier de leur appui et de la collaboration de qualité qui s'est développée avec nos services. La concertation entre opérateurs publics et privés est indispensable au développement d'un tourisme culturel de qualité et attractif.
Le ministère de la culture a également élaboré un outil de notre temps pour connaître les Villes et Pays d'Art et d'Histoire, comptant bien sur l'envie déclenchée par une visite virtuelle d'un nouveau site Internet pour aller voir « pour de vrai ». Ce site, qui vous sera présenté dans quelques minutes, reprend l'identité visuelle des Villes et pays d'art et d'histoire forgée par les brochures mises à la disposition des touristes, et dont le prochain numéro présentera les villes et pays d'art et d'histoire de Midi-Pyrénées.
Toutes les actions que je viens d'évoquer sont magnifiquement illustrées ici, à Figeac.
Figeac, labellisée ville d'art et d'histoire depuis 1991, a mené une politique exemplaire de valorisation de son patrimoine dans son secteur sauvegardé et développé des actions résolues pour la diffusion et la connaissance par tous les publics de son histoire. Elle constitue l'un des exemples les plus aboutis de cette nouvelle manière de faire du tourisme que j'appelle de mes vœux.
L'espace que j'aurai le plaisir d'inaugurer en fin de matinée avec Martin Malvy donne de belles clefs de lecture du patrimoine figeacois et développe des outils d’appropriation par chacun, par chaque enfant, de l'histoire et de la mémoire actualisée de son lieu de vie. Chaque habitant peut devenir l'hôte fier et accueillant de sa ville, de son territoire, pour peu qu'il retrouve les chemins de leur histoire.
Mais je laisse le soin à Martin Malvy de vous présenter sa ville et les activités qu'il y a développées, avec un dynamisme auquel je rends hommage. Vos engagements, cher Martin, à l'assemblée nationale, votre participation au Conseil national des Villes et pays d'art et d'histoire, témoignent de la place que vous assignez à notre culture et au patrimoine dans une fonction sociale plus que jamais actuelle : forger une identité, retisser des liens entre les habitants, les générations, les cultures du monde, appréhender le patrimoine dans toute la plénitude de sa valeur esthétique, ouvert à la création contemporaine comme cette superbe place des Ecritures que nous verrons tout à l'heure.