Texte intégral
Madame la Présidente,
Mesdames, Messieurs,
Cette séance de clôture du Congrès du CNJA est chaque année un événement pour la profession qui y vient nombreuse aux côtés des responsables du syndicalisme jeune.
Elle l'est aussi pour le ministre en charge de l'Agriculture qui a ainsi l'occasion de rencontrer les plus jeunes militants du syndicalisme agricole.
C'est pourquoi Je suis très heureux, madame la Présidente, d'être parmi vous, cet après-midi, avec ceux qui, en ayant raison trop tôt, préparent dès à présent l'agriculture de demain.
Votre ambition est grande et vous venez de l'exprimer. La mienne l'est aussi. Nous devrions, j'en suis convaincu, pouvoir faire converger nos énergies afin de redonner la légitime confiance qui permettra aux jeunes agriculteurs d'aborder leur avenir avec optimisme.
C'est en tout cas le message que le Premier ministre a voulu vous adresser dans son discours de politique générale en présentant notre agriculture comme une des grandes richesses de notre Pays et comme un atout fondamental dont il nous faut jouer avec audace, sans l'ombre d'un doute.
Je crois, madame la Présidente, que les engagements du Chef du Gouvernement devant les Parlementaires sont un signe clair et fort de notre volonté sans faille.
Volonté sans faille pour engager maintenant les réformes de fond, les réformes structurelles indispensables au regard du nouvel ordre économique dans lequel nous sommes entrés : mondialisation des marchés et de la concurrence, mutation des systèmes de distribution, et des modes de consommation, évolution des technologies, réforme de la PAC, accords du GATT, et élargissement de l'Union.
Vous le voyez, ce sont autant de défis mais aussi autant d'horizon nouveaux que votre génération doit transformer en opportunités.
Pour vous y aider il est nécessaire, et nous le ferons :
– de faire évoluer le statut des entreprises et des personnes qui y travaillent dans un souci de plus grande équité et de clarté ;
– de réformer et de moderniser la fiscalité, là aussi dans une perspective de cohérence économique.
Notre volonté sera sans faille aussi pour adopter au plan international et communautaire une attitude à la fois vigilante lors de toutes les négociations et offensive pour exploiter chaque opportunité nouvelle.
Cette place de premier exportateur mondial de produits transformés, de second exportateur mondial de produits agricoles, que la génération qui vous a précédé a su conquérir, et bien cette place, j'entends dans chacun de mes actes la consolider et la renforcer car j'en connais l'importance et l'impact l'emploi comme sur l'équilibre de notre pays tout entier.
Donc, vigilance, persévérance et esprit de conquête.
Mais, madame la Présidente, pour relever avec un optimisme raisonné ces défis, Il fallait aussi, oserais-je dire, que nous remettions au goût du jour et des enjeux notre propre organisation ministérielle.
Je veux, bien sûr, en quelques mots évoquer l'extension des compétences du ministère, à l'alimentation.
Au cours des trente dernières années la chaîne alimentaire a connu des changements sans pareil, 4 exemples suffiront à vous en convaincre :
1. Les marchés sont passé d'une dimension locale et nationale à une dimension Internationale : c'est la mondialisation des échanges.
2. Aujourd'hui près de 70 % des produits bruts font l'objet d'une transformation : c'est une tendance durable qui n'ira qu'en s'accroissant avec les technologies nouvelles et les exigences en perpétuel mouvement du consommateur.
3. Les règles non tarifaires régissant les échanges et plus généralement l'accès aux marchés telles que les normes techniques, les normes sanitaires, ne cesseront de prendre de l'importance, et ne nous leurrons pas : Elles sont et seront parfois utilisées pour freiner les échanges commerciaux.
4. Enfin, l'émergence de la grande distribution, la concentration relative de certains maillons de la chaîne alimentaire et la concurrence exacerbée entre distributeurs ont eu pour effet une tension permanente sur les prix pour ne pas dire un laminage des marges pour l'amont de cette chaîne dont vous faites partie : situation d'autant plus préoccupante que cela signifie incapacité à investir donc Incapacité à innover et, par la même, risque majeur, à terme, pour une filière toute entière et les emplois qu'elle génère : le rééquilibrage s'imposait.
Il fallait donc, pour préparer le futur, cette relève et cette politique innovante, se donner les moyens effectifs d'une cohérence d'ensemble. Il fallait donc encore pouvoir inscrire toute politique agricole dans une perspective de chaine de valeur intégrant producteurs, transformateurs, négociants et distributeurs finaux.
C'est aujourd'hui chose faite : là aussi, vous nous aviez un peu précédé : preuve en est la convention signée par les grandes organisations agricoles, dont le CNJA et la Distribution qui finalement symbolise la démarche partenariale et contractuelle qui m'est chère, mais aussi la reconnaissance de la qualité face à la seule logique des prix bas. Je vous félicite de cette initiative.
Ministre de l'Alimentation, mes trois priorités seront donc :
1. L'amélioration de notre système de contrôle sur la garantie des produits et sur la sécurité des processus de production et de transformation : gage indispensable pour affirmer notre vocation exportatrice et anticiper sur les attentes des marchés.
2. Second axe : une plus forte implication des producteurs dans leurs entreprises d'aval : cela est essentiel pour le renforcement de nos filières.
Nous étudions dans ce cadre l'idée d'un plan d'épargne agricole qui inciterait les agriculteurs à investir dans leur partenaire d'aval.
Je ferai des propositions très prochainement en ce sens.
3. Enfin, j'envisage de modifier l'ordonnance de 1986 sur la concurrence pour rééquilibrer les contraintes entre acheteurs et vendeurs : sujet vaste, qui vous concerne très directement.
Il s'agit de mettre un terme à ces pratiques abusives, voire dangereuses que je dénonçais précédemment : je serai intraitable sur cette question, tout en sachant la difficulté qu'il y a à réglementer sur ce sujet. Mais nous y arriverons.
Voici les enjeux, voici le décor campé.
Mais, me direz-vous, la réalité d'une volonté au-delà des mots, c'est d'abord l'action.
J'en viens donc, madame la Présidente, à votre, ou plutôt à notre préoccupation centrale qu'est la politique d'installation.
Pour qu'elle ne soit pas qu'un discours, pour qu'elle ait un réel contenu, à la hauteur des enjeux, et pour qu'elle procure cet effet de levier tant attendu sur le nombre effectif de nouveaux installés, il est impératif que cette politique s'appuie sur un environnement porteur d'horizons nouveaux, sur un environnement stable permettant à chaque agriculteur, à chaque futur agriculteur, d'avoir la durée et la perspective requises qui seules nourrissent le projet et sa réussite.
Pour cela, en amont même de l'installation, nous devons mener un combat permanent à deux niveaux dont la seule finalité est justement de redonner ce souffle et ces perspectives.
Tout d'abord le combat au plan communautaire et International.
Un seul objectif : maintenir, réaffirmer et développer une vocation exportatrice.
Nous sommes un des tout premier exportateurs mondiaux : cela représente 400 000 emplois directs.
La France continuera d'occuper une place de premier ordre. Je m'y emploierai avec une détermination totale, ce qui signifie en particulier :
– aucune remise en cause en quelque circonstance que ce soit des acquis fondamentaux de la PAC,
– aucun compromis sur la préférence communautaire, un des grands principes de la PAC.
S'agissant de la PAC, cela signifie concrètement qu'elle doit, une fois consolidée sur la base de ses acquis, constituer le moyen privilégié pour assumer son rôle essentiel : c'est-à-dire renforcer la compétitivité des exploitations européennes et la place de leurs productions sur les marchés.
Qu'il s'agisse d'exportations, de surfaces ou d'accès aux nouveaux marchés des Pays Tiers, la performance de notre agriculture passe par une utilisation exhaustive de toutes les marges de manœuvre disponibles : je saurai le rappeler aussi souvent qu'il le faudra.
Cela suppose de s'en tenir au strict respect de la réforme et de nos engagements Internationaux sans aller au-delà.
Cela suppose aussi, et c'est un des défis majeurs pour votre génération, que pour se faire sans heurts et sans bouleversements, l'élargissement à l'Est nécessitera une longue période de transition.
En un mot, aucune contrainte supplémentaire.
Je serai l'avocat obstiné d'une gestion simple, adaptée, pragmatique et surtout allégée en contraintes et carcants administratifs de la PAC.
S'agissant la préférence communautaire : aucun compromis possible, mais une vigilance de tous les instants.
Soyez assurée que je partage cette volonté avec le Premier ministre.
Avec son appui je m'emploierai à ce qu'aucune faille ne vienne fragiliser cette base essentielle de nos principales organisations de marchés, notamment celles qui sont encore à réformer, telles que les fruits et légumes et la viticulture.
Pour conclure sur ce volet, quelques mots sur le Conseil des ministres que j'ai présidé au cours de ces trois derniers jours.
J'ai été à la fois rassuré et satisfait de constater la quasi unanimité de mes collègues à refuser que seule la logique budgétaire anime les débats difficiles sur le paquet-prix que nous venons de boucler. Elle aurait bridé nos productions au-delà des contraintes programmées par la réforme !
J'ai également réussi à faire reconnaître formellement par le Commissaire Fischler que le taux de gel soit avant tout une variable d'ajustement du marché bien plus qu'une variable budgétaire. Cette année, au vu du bilan, le taux de gel doit à nouveau baisser. La Commission a donc reçu mandat de préparer cette révision.
C'est un pas important vers la pleine valorisation de vos capacités.
Bien sûr, ce qui précède n'a de sens que dans un environnement concurrentiel stable et équitable.
Vous le savez mieux que quiconque car vous le vivez chaque jour depuis plusieurs mois. Les désordres monétaires font peser sur l'agriculture plus que sur tout autre secteur, la menace de graves distorsions de concurrence.
Les secteurs sévèrement touchés sont nombreux : les fruits et légumes, les animaux vivants, le secteur de la viande et notamment l'aviculture ainsi que le secteur viticole.
J'ai reçu les responsables professionnels des secteurs concernés, en présence du syndicalisme à vocation générale ces derniers jours, afin d'étudier des solutions permettant de compenser ces baisses de prix.
J'ai souhaité rencontrer aussi ce matin, à la demande des organisations agricoles et du Président de la FNSEA, M. Guyau, une délégation conduite par M. CHARDON comprenant les responsables du secteur fruits et légumes de la région car je crois qu'un dialogue même animé est nécessaire à la recherche de solutions adaptées.
Nous avons pleinement conscience de la nature et du niveau des difficultés posés en agriculture du fait des distorsions de concurrence créées par les dévaluations compétitives.
Pour y faire face j'ai obtenu du Premier ministre, dans le cadre du plan PME, que le dispositif d'allègement des charges patronales couvre aussi l'ensemble du secteur agricole et donc, bien entendu, les producteurs de fruits et légumes et les éleveurs.
Cette mesure consiste concrètement en une ristourne dont le montant aujourd'hui est de 770 F par salarié pour les salaires au niveau du SMIC, ristourne dégressive au-delà, jusqu'à 1,2 SMIC.
Elle prend effet dès cet été.
Cette mesure répond aux besoins exprimés par le secteur agricole quelque soit les filières dès l'instant où il y a emploi de main d'œuvre. C'est donc une réponse forte et nette que nous apportons ainsi au soutien de l'emploi dans en faveur de l'ensemble du secteur agricole et de la filière agricole et alimentaire car cette disposition concerne aussi l'aval de la production, ce qui me paraît fondamental.
Ainsi les agriculteurs, et en particulier ceux directement touchés par les conséquences des distorsions, monétaires sont replacés dans une position concurrentielle meilleure.
J'ajoute enfin, et cela rassurera certains d'entre vous, que ce dispositif nouveau ne remet pas en cause les exonérations partielles concernant la main d'œuvre occasionnelle.
J'insiste enfin sur l'aspect très horizontal de la mesure qui dépasse donc les demandes sectorielles. Ainsi, le secteur de l'élevage est lui aussi directement concerné.
Pour ce secteur, des dispositions particulières sont à l'étude : je m'en suis entretenu avec les responsables professionnels. Et j'ai donné instructions aux services à ce qu'une conclusion puisse être apportée dans les prochains jours.
Vous le voyez, le combat au niveau communautaire et international est difficile, mais sachez que dans ce combat je serai constamment à vos côtés.
Les mesures que nous avons réussi à obtenir vous en apportent une preuve tangible.
À défaut de cet engagement, vous seriez fondé à me dire : monsieur le ministre, avant que de parler d'installation ouvrez nous de nouveaux débouchés, aidez-nous à tracer de nouvelles perspectives. En somme, traiter les causes de ce déficit d'installation plutôt que ces effets, c'est-à-dire leurs insuffisances. Vous auriez raison, il y a en effet une interdépendance forte entre ces phénomènes : plus l'environnement International sera sécurisé, plus le contexte national sera porteur, et plus nous réussirons.
L'amélioration du contexte national c'est notre second combat que je résumerai ainsi :
– que se multiplie l'envie de créer et de s'installer ;
– que chaque projet devienne une Installation durablement réussie.
Cet objectif ambitieux, j'en fais la première de mes priorités :
– pour préserver une agriculture performante, il faut qu'elle puisse compter sur un renouvellement régulier de ces chefs d'exploitation,
– pour occuper harmonieusement le territoire, Il faut que partout des conditions de l'installation soient réunies,
– enfin, pour assurer la solidarité entre les générations, l'équilibre de notre pays, Il faut que chaque génération puisse s'enrichir de l'expérience de ses aînés dans une suite sans fin.
Et puis, comment ne pas le dire, c'est l'emploi priorité nationale dont-il s'agit.
Là encore, au-delà des volontés fièrement exprimées, il faut la preuve par l'action et je veux vous l'apporter à deux niveaux :
– tout d'abord favoriser l'installation en améliorant le contexte Juridique, fiscal et social agricole,
– renforcer notre politique en faveur de l'installation par un certain nombre de mesures concrètes et attendues.
1. Favoriser l'installation an améliorant le contexte juridique, fiscal et social agricole
L'instabilité, l'incertitude doivent être évacuées autant que faire se peut, de l'horizon du jeune candidat à l'installation. Il doit pouvoir compter sur un minimum de repères stables, sur une gamme élargie de choix juridiques et sur un accompagnement de qualité.
Dans le domaine des orientations économiques, nous allons devoir approfondir ensemble la voie tracée par la loi de modernisation adoptée l'hiver dernier.
La profession a souhaité que le CSO soit un lieu de concertation sur la cohérence des politiques de filière. Son rôle a été accru dans ce sens. Ainsi, le dispositif CSO et Offices sera plus efficace et pourra mieux répondre aux objectifs de performance qui sont les nôtres.
Je suis aussi particulièrement attaché aux actions de promotion et de valorisation des produits sans lesquelles il serait vain de produire aujourd'hui. Nous avons là encore des progrès à réaliser même si de nombreuses actions intéressantes sont déjà initiées dans ce sens.
Dans les départements, je compte aussi beaucoup sur les Commissions départementales d'orientation pour redonner une ligne de force aux politiques départementales agricoles.
À travers des fonctions liées à la modernisation des structures de production, ces Commissions qui se mettent en place actuellement dans tous les départements seront le véritable instrument opérationnel dans lequel la profession est largement impliquée et aura à faire des choix localement.
Ainsi je suis convaincu que pourront être ouvertes de nouvelles perspectives que je tiens pour ma part à accompagner et à renforcer de deux façons :
– en allégeant les charges des entreprises,
– en engageant rapidement une réflexion qui devra déboucher au cours des deux prochaines années sur une réforme du cadre juridique et fiscal dans lequel s'exerce l'activité agricole.
L'allégement des charges des entreprises.
Au cours de ces dernières années, à la suite de la réforme de la PAC de nombreuses mesures ont été mises en œuvre dans le domaine fiscal, social et du financement (bonification en particulier) pour alléger les charges des entreprises agricoles. Je n'en dresserai pas la liste. Vous la connaissez. Elles ont beaucoup contribué à faire face aux conséquences de la réforme de la PAC.
Notre volonté est aussi d'aller plus loin maintenant en engageant des réformes qui placent l'entreprise agricole, de façon plus structurelle, en position plus concurrentielle face à ce nouveau contexte économique international.
Dans ce sens, la loi de modernisation nous engage dans un travail difficile et Intéressant de réflexion et de proposition sur la nature civile ou commerciale de l'activité agricole avec de nombreuses conséquences possibles qu'il convient de bien appréhender.
Les professionnels l'ont souhaité et il me parait très opportun si l'on veut pouvoir mieux prendre en compte :
– les activités de diversification,
– ou certaines approches plus économiques que patrimoniales de l'entreprise.
De même, vous connaissez mon souci de réformer la fiscalité agricole, en un mot de la moderniser.
Il faut mieux distinguer l'imposition de l'entreprise de celle du ménage de mime qu'il faut pourvoir traiter différemment aussi les revenus réinvestis des revenus distribués.
Sur cette nécessaire réforme de la fiscalité agricole, je sais, madame la Présidente, pouvoir compter sur l'appui des jeunes et sur leurs travaux récents.
Autre dossier à forte implication fiscale que nous allons traiter très concrètement au cours des prochains mois, c'est celui de la transmission puisque là encore, la loi de modernisation nous fixe un calendrier de travail qui sera scrupuleusement respecté.
Pour le début de l'année prochaine le Gouvernement doit déposer au Parlement un rapport, sur l'allègement du coût fiscal de la transmission des entreprises agricoles.
Qu'il s'agisse de transmission à titre gratuit ou onéreux, qu'il s'agisse des exploitations ou des sociétés.
Ce rapport examinera précisément le problème posé depuis plusieurs années par le CNJA, et cette année encore dans votre rapport d'orientation, de l'utilisation d'une valeur économique de transmission plut6t qu'une valeur patrimoniale.
Il y a l'entreprise mais il y a aussi, et peut-être d'abord, les personnes qui y travaillent, j'aborde ici un dossier sur lequel, encore plus rapidement, le Premier ministre a souhaité que nous progressions en respectant le calendrier prévu sur ce point par la loi de modernisation.
Cette loi a prévu l'élaboration d'un rapport que nous remettrons à la rentrée sur l'évolution du statut juridique et économique des personnes présentes sur l'exploitation en souhaitant arriver le plus vite possible à l'égalité des droits de l'exploitant et de sa conjointe ou de l'exploitante et de son conjoint car maintenant il nous faut envisager les deux hypothèses.
J'ai donc demandé à l'Inspection Générale de l'Agriculture de préparer un document de travail qui me permettra :
– de soumettre des propositions au Premier ministre,
– de préparer ainsi le rapport du Gouvernement qui, après concertation avec la Profession permettra un débat parlementaire pour préciser les mesures législatives ou parlementaires qui seront jugées nécessaires.
Voyez comme l'amélioration du contexte national de la politique d'installation s'intègre dans toute une série de réformes de fond auxquelles il faut ajouter quelques autres éléments importants tels que la mise en place du Fonds de gestion de l'espace rural, la réforme du développement agricole et le programme de mise aux normes environnementales.
Sur le Fonds de Gestion de l'Espace Rural, je veux tout d'abord vous rendre hommage pour une idée que vous avez initié en 1993 lors du Congrès de Biarritz et que vous avez su conduire jusqu'au bout ; preuve que la concertation est constructive.
Ce Fonds est un nouvel outil destiné à apporter une réponse concrète et souple aux projets d'intérêt collectif concourant à l'entretien ou à la réhabilitation de l'espace rural. La fonction de valorisation de l'espace exercée par l'agriculture se trouve ainsi explicitement reconnue et donc rémunérée.
Les textes d'application publiés récemment offrent un cadre de travail souple adaptable à la diversité des situations départementales.
Les opérations de gestion de l'espace rural, agricole et forestier financées par le Fonds devraient ainsi pleinement favoriser le savoir faire et le potentiel de travail des agriculteurs.
À vous de jouer maintenant. Je suis sûr que les projets ne manquent pas.
En ce qui concerne le développement agricole, dont les actions permettent d'accompagner et d'aider à la réussite des installations, il nous faut maintenant activer la réforme du financement.
J'irai dans ce sens le plus vite possible, comme vous le souhaitez et ainsi que le président de la FNSEA me l'a demandé au nom des organisations agricoles.
Il y a effectivement urgence maintenant à préserver un financement équilibré du FNDA en maintenant une solidarité entre les filières.
Il y a plus de deux ans que le dossier est ouvert Je conduirai donc à bon port la mise en œuvre des 19 décrets du nouveau système.
Mais je vous demande aussi en tant que responsables professionnels demandeurs de cette réforme, de vous engager fortement pour que soient apportées toutes les informations et toutes les explications qu'attendent les exploitants.
Parallèlement à est engagement sur les ressources du développement agricole, je souhaite aussi qu'il évolue dans son organisation et dans les services apportés en fonction des besoins et des contraintes des entreprises : Faire mieux, faire différemment, mime plus à cotit équivalent.
C'est pourquoi j'ai l'intention de confier à une personnalité cette mission qui devra être accomplie avant la mise en œuvre effective de la réforme, c'est à dire d'ici au 1er trimestre 1996.
Je suis convaincu qu'ainsi le développement agricole pourra sortir des incertitudes actuelles.
Damier élément enfin de ce contexte sur lequel je souhaite vous dire quelques mots, c'est celui de l'environnement et en particulier du programme de maîtrise des pollutions des élevages.
Cette difficile question a fait l'objet d'une longue et utile concertation. Le niveau des aides publiques est élevé pour pouvoir atteindre les objectifs définis.
L'État et les agences de l'eau financent en totalité les études préalables. L'État et les collectivités assurent 30 % de la subvention en capital.
Par ailleurs, les éleveurs peuvent bénéficier de prêts bonifiés d'une subvention équivalente de 5 % en plaine mais sans limite en zone de montagne ou défavorisée ou pour les jeunes agriculteurs, dans le cadre d'un PAM (Plan d'Amélioration Matérielle).
À la demande du CNJA, la situation particulière des jeunes sur lesquels pèsent le plus de contraintes a été prise en compte et a abouti à des mesures particulières dont vous m'avez fait savoir qu'il serait opportun de les compléter par une mesure de souplesse fiscale : la révocabilité de l'option à la TVA au régime trimestriel afin de bien prendre en compte les rythmes d'investissement et de ne pas alourdir inutilement les charges de gestion en pouvant revenu à un régime annuel une fois les gros investissements réalisés.
Cette requête me parait légitime. J'ai donc demandé à mes services, en liaison avec le ministère de l'Économie et des Finances, d'en étudier la faisabilité technique tout comme la forme que pourrait prendre un tel assouplissement.
Dans un contexte national que nous nous employons à rendre plus favorable à l'installation, je veux citer aussi la préretraite dont tout le dispositif a été réorienté en faveur de l'installation et qui peut être mise en œuvre effectivement au niveau départemental depuis la semaine passée, puisque la circulaire d'application est maintenant arrivée dans les départements.
Est-ce un signe précurseur de l'amélioration globale de ce contexte auquel j'ai fait allusion : toujours est-il, et je m'en félicite, que l'année 1995 est marquée par une reprise de l'investissement agricole… !
2. Mais madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, chacun d'entre vous attend maintenant que j'aborde la série des demandes que vous m'avez présenté pour renforcer et accentuer la politique d'installation.
Elles s'intègrent toutes dans la démarche que nous avons engagé pour établir la charte de l'installation prévue par la loi de modernisation.
Les objectifs, nous les partageons.
Ils sont à la fois quantitatifs pour assurer un renouvellement suffisant des agriculteurs, et qualitatifs pour assurer la réussite des installations. Vous résumez cela en disant qu'il faut transmettre le métier. C'est une bonne façon de poser le problème pour mobiliser autour de ce projet.
La charte de l'installation doit fixer les orientations en matière de renouvellement des exploitations et d'accroissement du nombre des installations. Elle doit en conséquence aussi définir les actions à mettre en œuvre pour concourir à la réalisations de ces orientations.
Cette Charte doit constituer une référence durable d'un cadre national cohérent tout en offrant des possibilités d'adaptation aux réalités régionales ou départementales.
Nous devrons l'avoir élaboré pour le mois d'octobre. Les mois qui nous restent vont nous permettre de finaliser ce travail.
Nous avons déjà eu, madame la Présidente, quelques rencontres pour la préparer.
Nous sommes d'accord sur la méthode et sur un aspect qui me paraît aussi très Important :
Cette charte engagera les pouvoirs publics mais aussi l'ensemble des partenaires locaux et professionnels qui peuvent apporter leur contribution à ce projet.
Elle doit permettre de jouer un effet de levier qui n'existe pas suffisamment aujourd'hui.
Mais, nous devons aussi aller plus loin en décidant de mesures nouvelles ou en ajustant des mesures existantes.
Déjà au cours de ces derniers mois de nombreux ajustements voire des réformes plus importantes ont été réalisés notamment dans la loi de Modernisation. Ils ne doivent pas être sous-estimés. Mais il nous faut poursuivre encore, j'en suis d'accord.
Vous m'avez présenté de nombreuses demandes d'amélioration du dispositif actuel d'aides à l'installation.
Toutes ces demandes nous les avons examinées en détail en regardant ce que nous étions en mesure de décider rapidement et ce qui nécessite encore des choix : des choix de nature budgétaire, mais aussi des choix de politique agricole car Il nous faut bien apprécier toutes les Incidences économiques et sociales de mesures qui doivent dépasser le court terme.
Ainsi madame la Présidente, je vous propose que nous abordions successivement :
– la préparation de l'installation,
– le financement de l'installation,
– l'accès aux aides,
– et la recherche d'une meilleure cohérence et d'une plus grande synergie entre actions locales et politique nationale.
La préparation de l'installation repose sur une exigence de formation qui ne me paraît pas devoir être remise en cause même si nous devons veiller à ce que le processus mis en place soit un véritable processus d'inclusion, d'intégration et non pas d'exclusion.
Dans ce sens, des progrès ont été réalisés. Il nous faut les poursuivre pour pouvoir accueillir d'avantage de jeunes non successeurs.
Dans ce processus, et depuis plusieurs années vous avez souligné les difficultés posées par l'insuffisance de rémunération du stagiaire 6 mois.
Ces difficultés peuvent effectivement créer un obstacle majeur, notamment pour les jeunes en charge de famille et pour ceux qui, venant d'un autre secteur d'activité, souhaiteraient s'installer en agriculture.
L'utilité de ce stage ne doit pas être remise en cause. À l'usage il a fait ses preuves. Nous devons remédier maintenant à cette difficulté de rémunération.
Ainsi je peux vous annoncer qu'à partir du 1er août, le dispositif des bourses à l'installation sera opérationnel et correspondra à une égalité de traitement avec les stagiaires de la formation professionnelle. Plus qu'une annonce, qui a déjà été faite, c'est la mise en place effective du dispositif dans 5 semaines que je vous propose car maintenant il faut agir.
Sur le financement, je comprends bien que dans le contexte financier actuel de taux réels élevés dans une activité fortement capitalistique, il est nécessaire d'apporter quelques aménagements.
Ces aménagements doivent bien entendu s'inscrire dans l'objectif que nous nous fixons d'accroître le nombre d'installations.
Je n'ai pas de réponse définitive à vous apporter aujourd'hui dans ce domaine, mais il y a deux sujets sur lesquels je peux vous m'indiquer que nous progressons pour prendre en compte vos demandes : le prêt global et le dispositif de garanties.
L'amélioration du prêt global est probablement nécessaire, au vu d'un certain nombre d'installations qui nécessitent la mobilisation de capitaux importants. C'est pourquoi le principe doit pouvoir en être étudié et j'ai demandé à mes services de travailler sur un mécanisme plus automatique et plus régulier d'ajustement de ce plafond au fil du temps et sur la base d'éléments objectifs d'appréciation.
Sur la question difficile des garanties que le CNJA soulève depuis 5 ans maintenant, il y a de vraies difficultés à mettre en place un système national de garantie des prêts à l'installation. La principale de ces difficultés est le risque, à l'image de ce qu'à connu le secteur de l'artisanat par exemple, de voir la bonification se réduire au fur et à mesure que ce mettraient en place des fonds de garanties.
Or, je crois que vous serez d'accord avec moi et avec le Premier ministre pour maintenir un niveau élevé de prêts bonifiés.
Pour autant, nous devons étudier d'autres voies qui peuvent aussi contribuer à moderniser le système traditionnel des garanties en agriculture pour faciliter les installations.
Je sais que les dirigeants du crédit agricole ont engagé une réflexion sur ce sujet à laquelle le CNJA est associé. Il s'agit de définir un nouveau dispositif, complémentaire à ceux qui existent mais qui ne ferait courir de risques à notre système actuel de bonification. À ce stade, je ne peux pas vous en dire d'avantage mais J'ai bon espoir que dans la charte de l'installation une réponse sera donnée.
Troisième aspect sur lequel, madame la Présidente, vous avez souhaité que nous progressions ; c'est celui de l'accès aux aides en prenant mieux en compte l'installation de pluriactifs et en élargissant les fourchettes de revenu.
Mieux prendre en compte l'installation des pluriactifs est techniquement possible cela relève de la transposition dans la réglementation française d'un règlement communautaire qui assouplit ces règles. Ma réponse sur ce point est donc favorable.
Ainsi, pourront bénéficier des aides, les jeunes qui s'installent comme agriculteurs à titre secondaire en tirant au moins 50 % de leur revenu global des activités agricoles, forestières, touristiques, artisanales ou d'entretien de l'espace la part du revenu provenant directement de l'activité de production agricole devant être supérieure à 25 % et le temps de travail à l'extérieur de l'exploitation ne devant pas dépasser 50 %.
Ainsi toute notre réglementation sera harmonisée et l'accès aux aides à l'installation sera plus facile pour les pluriactifs, ainsi que vous le souhaitez : autre sujet concernant l'accès aux aides, celui de la fourchette de revenu qui est aujourd'hui de 60 % et 120 % et que vous m'avez proposé d'élargir à 40 % et 140 %.
En raison de la prise en compte des activités de diversification dans le calcul du revenu pour tenir compte de la mesure précédente, il ne me parait pas souhaitable de réduire de 60 % à 40 % le plancher car nous serions, je crois au seuil de la paupérisation et cela ne peut fonder une politique.
En revanche, et parce que je souhaite notamment une meilleure prise en compte des cultures spécialisées et parce qu'il ne faut pas brider la réussite, sans pour autant aider ceux qui n'en auraient pas le plus besoin, nous allons modifier la réglementation pour porter le plafond de 120 % à 140 %
Il y a encore d'autres sujets que vous m'avez soumis madame la Présidente qui méritent examen.
C'est l'idée de mettre en place un dispositif de développement des initiatives locales pour accompagner l'installation sur des actions Identifiées comme prioritaires et mobilisant avec des moyens nationaux, des ressources et des concours techniques locaux.
Ainsi pourraient être abordée de façon souple et adaptée aux réalités locales différentes mesures, de soutien aux actions Innovantes, de mise en place des répertoires à l'installation par exemple. Je crois qu'un tel dispositif permettrait d'améliorer la cohérence entre la politique nationale et les politiques locales d'installation.
Il aurait aussi l'avantage de valoriser des synergies nouvelles. Enfin, il devrait permettre de décliner la charte nationale dans chaque département.
Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, je vous soumets cette idée qui est susceptible aussi de renouveler notre manière d'aborder de façon parfois trop monolithique la politique d'installation.
Tels sont madame la Présidente les éléments que je suis en mesure de vous annoncer aujourd'hui et qui concrétisent de façon nette la contribution des pouvoirs publics à l'élaboration de la Charte de l'installation.
Il y a ce qui peut être annoncé dès aujourd'hui.
Il y a ce qui nécessite encore un travail de mise au point ou d'arbitrage.
Nous progressons et nous progresserons encore jusqu'à conclure cette charte qui doit déboucher sur un accroissement significatif du nombre des Installations.
Il faut que ce soit clair. L'effort que nous faisons, doit avoir une traduction concrète au cours des prochaines années notamment par un accroissement des installations hors cadre familial sans lesquelles la contribution de la politique de l'installation à la relance de l'emploi serait limitée.
Et si nous le faisons, c'est parce que nous partageons une vision commune de l'agriculture : performante, à dimension familiale, présente sur l'ensemble du territoire, diversifiée et véritable poumon du monde rural.
Et si pour ma part je m'engage aussi fermement en faveur de la politique d'installation c'est parce qu'elle peut concrétiser, pour une large part, la contribution de l'agriculture à la relance de l'emploi.
Nous nous lançons ainsi, madame la Présidente, un redoutable défi commun.
Je compte le gagner avec vous et l'ensemble de la profession.
C'est un grand défi, c'est le défi que votre génération se doit de relever en faveur de la génération amenée à vous suivre.
Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, merci de votre attention.