Texte intégral
Q - Sur l'affaire R. Dumas, P. Devedjian a dit que la présomption d'innocence devait jouer, mais qu'elle ne concerne que la personne. R. Dumas représente une institution, en tant que président du Conseil constitutionnel, et au point où en sont les choses, pour préserver cette institution, il souhaite la démission de R. Dumas.
- « Que Monsieur Devedjian s'exprime, en son nom personnel, ou au nom du parti dont il est responsable, c'est son problème. Vous savez que le gouvernement a décidé de ne pas commander les affaires qui sont en cours auprès de la justice. Donc, je ne le ferais pas plus, ce matin, concernant ce sujet ou tout autre sujet. Ce que je constate aussi, c'est que la droite est favorable - elle s'est exprimée - à améliorer les dispositions judiciaires en matière de présomption d'innocence. Et vous savez que le gouvernement à cinq projets de loi concernant la justice, pour qu'elle soit rendue avec plus de célérité et de justice au quotidien pour nos concitoyens. Je fais remarquer que le président du Conseil constitutionnel est nommé par le Président de la République ; et que, par ailleurs, le gouvernement n'intervient pas sur le fonctionnement du Conseil constitutionnel. »
Q - L'institution n'est pas menacée ?
- « C'est du Conseil constitutionnel lui-même que dépend la suite des choses, et du président lui-même. Ce n'est pas, aujourd'hui, au ministre que je suis, au gouvernement auquel j'appartiens de dire son mot sur ce sujet. »
Q - Vous lui demander de s'interroger, quand même ?
- « Je n'ai pas à lui demander de s'interroger. Il est assez grand pour le faire lui-même, de la même manière que les membres du Conseil constitutionnel. J'ai l'impression que le Conseil constitutionnel fonctionne, et il répond quand il est saisi. »
Q - Le PACS deuxième round, c'est pour demain. L'opposition a gagné le premier, elle veut gagner le second : Elle vous promet des interventions interminables et 1 000 amendements.
- « Ça fait partie du jeu parlementaire classique, même si je conseille - pour une fois - à l'opposition de penser que l'opinion regarde aussi. Je pense que les Françaises et les Français veulent que les parlementaires légifèrent, contrôlent le gouvernement - et pas nécessairement que toutes les motions de procédure soient là pour entraver le vrai débat devant l'Assemblée nationale -, et faire progresser notre législation, réforme après réforme. Parce que c'est l'objet de ce gouvernement : réformer jour après jour pour que notre société soit plus cohérente et plus juste. »
Q - Vous avez la sensation que le projet est bien ficelé ? Sur les fratries, par exemple.
- « Vous savez que c'était une proposition de loi. Ce n'est pas un projet gouvernemental. Mais c'est une proposition que le gouvernement soutient ; c'est E. Guigou qui représente le gouvernement dans ce type de discussion. Je constate que la motion dont vous parliez… qui a été une victoire à la Pyrrhus pour la droite ! Parce qu'il ne suffit pas d'être majoritaire à un moment, un vendredi après-midi, pour être majoritaire à l'Assemblée nationale ou dans l'opinion. La gauche reste bien majoritaire à l'Assemblée nationale, et on le démontrera dans les jours qui viennent avec, notamment, la nouvelle lecture du PACS. Sur les fratries, la disposition qui a été adoptée, qui vise à avoir un article supplémentaire pour dire que deux frères et soeurs, ou un frère et une soeur, pourront bénéficier d'un certain nombre de dispositions sociales contenues dans le PACS, sans avoir à signer un PACS, répond à l'interrogation de Monsieur Devedjian. »
Q - Mais, s'il y a trois frères et soeurs, par exemple ?
- « Je comprends bien la difficulté que vous esquissez, mais le débat va se dérouler. Pour l'instant, il s'agit d'un frère est d'une soeur, ou deux frères ou deux soeurs. »
Q - L'enregistrement doit se faire à la préfecture ou au tribunal d'instance ?
- « Le débat, là encore, a fait progresser les choses. Et je pense que le tribunal d'instance est un lieu adéquat pour aller signer un PACS. »
Q - P. Devedjian vous promet, devant le Conseil constitutionnel, que vous allez être retoqué.
- « Monsieur Devedjian - c'est pourtant un parlementaire expérimenté - aurait dû constater que la motion d'irrecevabilité constitutionnelle défendue par M. Mattéi, à l'époque, n'avait rien à voir avec le sujet, puisque le sujet n'est pas anticonstitutionnel. Je pense qu'on le verra quand il aura été adopté. À savoir le 10 novembre prochain. »
Q - Vous n'avez pas la sensation que l'opposition reprend du nerf en ce moment. Il y a le PACS ; la semaine dernière, il y a eu le Sénat qui a dit non au projet de non-cumul des mandats.
- « Ce ne fut pas une grande surprise. La droite existe dans ce pays, et c'est bien légitime qu'elle défende son point de vue quand elle en a un. Je constate qu'elle a plus souvent tendance à s'opposer à tout. Tout ce qui bouge, on est contre. C'est le seul lien qu'elle trouve : s'opposer, toujours s'opposer. »
Q - Ils disent : il faut garder le lien entre l'élu national et le terrain.
- « La droite, dans son discours d'opposition systématique aujourd'hui, je ne crois pas qu'elle progresse dans l'opinion. Ce n'est pas comme cela que l'on prépare l'alternance dans une démocratie. »
Q - Vous lui donnez beaucoup de conseils, mais vous avez envie qu'elle remonte la droite ?!
- « Je n'ai pas envie qu'elle remonte ! J'ai envie que le gouvernement réussisse, avec sa majorité, à tenir ses engagements et à redresser le pays. Ce qui est plutôt en cours, si je constate les derniers chiffres du chômage. Monsieur Devedjian, là-dessus, il est un peu sec, parce que nous réussissons là où ils échouaient. Mais regardez sur le PACS, qui est une avancée sociale et une adaptation à la vie en société, c'est grâce à la gauche, à l'époque, que Madame S. Veil a pu faire passer l'IVG. Mais le discours de la droite d'aujourd'hui, cela aurait été toujours de voter contre. »
Q - C'est tout de même la droite qui était au pouvoir à l'époque de Madame S. Veil.
- « Certes, mais c'est grâce à la gauche que le projet est passé. »
Q - Après le refus du Sénat, le projet sur le cumul des mandats est-il enterré ?
- « Le Sénat a refusé le projet du gouvernement. Il n'a pas tout refusé. Aujourd'hui, l'Assemblée nationale va reprendre cette discussion. C'est un débat parlementaire, il va donc prendre le temps du débat parlementaire. Ce sera nécessairement long. J'espère que, par la conviction, par les bons arguments, par la pression de l'opinion, le Sénat sera un peu moins conservateur. Le Sénat, et la droite à l'Assemblée ! Parce que Monsieur Séguin et bien seul à dire qu'il est pour encore moins de cumul. Tous ces amis de droite, les députés, ils votent contre le gouvernement. »
Q - Le Premier ministre avait traité le Sénat d'« anomalies ». Il y a urgence à réformer le mode d'élection des sénateurs ?
- « Je ne crois pas que le Premier ministre a dit que le Sénat était une « anomalie ». Il a dit que le mode de recrutement des sénateurs était, effectivement, une anomalie. Eh bien, nous allons corriger cette anomalie en faisant en sorte que le mode de scrutin soit plus juste, en fonction de la démographie - de là où les gens vivent -, et en instaurant plus d'élections à la proportionnelle pour les sénateurs que ça n'est le cas aujourd'hui. »
Q - Pinochet : le procureur de Paris a ouvert une information. Mais le gouvernement a-t-il envie que Pinochet soit jugé en France ?
- « E. Guigou a été très claire : à partir du moment où la justice de notre pays - indépendante ! - demanderait l'extradition de Monsieur Pinochet, et E. Guigou et le gouvernement seront favorables. Pour l'instant, nous n'en sommes pas là. C'est la justice espagnole qui demande à juger Pinochet au nom des crimes qu'il a commis ou qu'il a commandité. C'est la cour de justice anglaise, la Chambre des Lords, qui va prendre la décision. »
Q - Au-delà du respect des procédures, vous souhaitez que Pinochet soit jugé en France ?
- « Ça ne me déplairait pas du tout qu'il soit jugé en France. Mais, dans la mesure où il y a une procédure vis-à-vis de l'Espagne, je fais aussi confiance à la justice espagnole pour le juger. »