Interviews de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement des transports et du logement, à France 2 le 5 janvier 1999, dans "L'Humanité" du 7, et à France-Inter le 8, sur la lutte contre l'insécurité routière.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : France 2 - France Inter - L'Humanité - Télévision

Texte intégral

5 janvier 99 : France 2

C. Gaessler : Avant de revenir sur les mesures que vous avez annoncées, une première question : comment expliquer cette recrudescence des morts sur les routes françaises après une diminution ces dernières années ?

J.C. Gayssot : « Il y a deux choses importantes qu’il faut bien que tout le monde sache : lors des week-ends, il y a toujours plus d’accidents et vous avez dit les choses, dans le reportage, tout à fait justes : vitesse, alcool, fatigue sont les trois éléments qui expliquent cette recrudescence des accidents et en particulier un week-end comme celui du premier de l’an. Mais il n’y a pas que cela. Nous assistons depuis maintenant plusieurs mois, ces dernières années, à une espèce de fatalité, d’esprit de fatalisme comme quoi on ne pourrait plus enrayer la chute du nombre d’accidents, alors que pendant près d’un quart de siècle, les accidents mortels ont été réduits de moitié. On a divisé par deux, alors que le nombre de véhicules augmentait, était multiplié par deux. Aujourd’hui, tout semble se passer comme si on ne pouvait pas aller plus bas. Eh bien, je dis : non. Il n’y a pas de fatalité. Nous pouvons en faire la démonstration, non seulement par ce qui se passe ailleurs, mais y compris dans les départements… »

R. Arhab : On va continuer à en parler…

J.-C. Gayssot : « Permettez-moi juste de dire cela, parce que c’est important : vous avez cité dans votre reportage les départements. Mais sachez qu’il y a un tiers des départements de France où le nombre d’accidents mortels a diminué l’an dernier, mais dans deux tiers, il a augmenté. Donc, si cela a pu diminuer dans un tiers des départements, je ne vois pas pourquoi on n’arriverait pas à le faire diminuer sur les autres. »

R. Arhab : Vous avez en face de vous P. Lavile que vous connaissez bien. M. Lavile, d’après vous, est-ce que les pouvoirs publics ne se sont pas un peu, eux-mêmes, relâchés ces dernières années ?

P. Lavile : « Eh bien, moi j’ai le sentiment que les contrôles en particulier se sont relâchés. Je suis automobiliste, bien sûr, comme tout le monde, et je m’étonne de constater que cela fait très très longtemps que je n’ai pas subi de contrôle, alors que j’en voyais assez périodiquement autour de moi dans les années passées. Alors, il me semble que ce côté-là, il y aurait un effort à faire. J’ai le sentiment également que les forces de police ne consacrent finalement qu’assez peu de temps aux contrôles, alors que 8 000 morts par an et plus, c’est une cause qui vaut la peine, me semble-t-il, que les forces de police y consacrent beaucoup de temps. »

R. Arhab : Ce qui est frappant tout de même dans ces spots, et surtout par rapport aux spots anglais, c’est que les spots français, on entend plus faire appel à l’humour. Est-ce que ce n’est pas cela aussi une des raisons du certain fatalisme français ?

J.-C. Gayssot : « Non, je ne crois pas. Je crois premièrement que les médias ont un grand rôle à jouer. Il est vrai que les campagnes à la télévision ou à la radio coûtent cher et que peut-être faut-il réfléchir et mettre plus de moyens sur ces campagnes-là. Mais nous avons dans la dernière période voulue privilégier l’information et les campagnes disons en situation réelle – c’est-à-dire sur la radio – pour que les automobilistes, en même temps qu’ils roulent, entendent les messages. Peut-être faut-il réfléchir pour élargir. Moi je crois que la télévision, notamment par les images qu’elle montre peutêtre un facteur de responsabilisation en tout cas… »

R. Arhab : De choses plus réelles…

J.-C. Gayssot : « Oui de faire évoluer des comportements. Parce que vous savez, la personne X n’est pas un criminel en puissance mais quand elle est fatiguée, elle conduit trop vite, ou elle a un petit peu trop bu, eh bien, elle peut avoir une attitude qui non seulement met sa vie en danger mais met la vie des autres. Donc, cela il faut alerter en permanence et changer les comportements. L’éducation, l’information, et les comportements sont disons les trois mots sur lesquels il faut le plus travailler sur la durée. »

C. Gaessler : L’éducation qui doit commencer jeune. Puisque 50 % des victimes de ce dernier réveillon sont des jeunes de moins de 25 ans. Alors là est-ce que les mesures préconisées par le Gouvernement sont suffisantes ? Est-ce qu’elles répondent aujourd’hui ?

P. Lavile : « Je crois que les contrôles à faire très vite, après l’obtention du permis de conduire, les contrôles de connaissance et de comportement aussi – parce qu’il faudrait faire non seulement des contrôles de connaissance du code de la route, pas mal de dispositions du code de la route sont assez vite oubliées – mais également les contrôles du comportement des gens. C’est-à-dire qu’il faut les faire conduire en situation réelle avec un moniteur à côté, qui n’a pas pour but de les sanctionner mais essentiellement de relever leurs mauvais comportements en face de tel ou tel incident qui peut survenir dans la conduite. »

R. Arhab : En matière de répression, quelles sont les mesures prioritaires pour vous ? On a beaucoup entendu parler de la loi sur la récidive. La loi également sur les grandes vitesses. Qu’est-ce qui est le plus important pour vous à mettre en route vraiment, et à appliquer réellement ?

J.-C. Gayssot : « Je crois qu’il faut alerter tout le monde sur l’idée qu’il faut circuler en sécurité. C’est-à-dire pour circuler en sécurité, il faut avoir une aptitude et un comportement qui respectent les autres. Non seulement ceux qui sont avec soi dans la voiture mais le gosse qui va peut-être traverser la chaussée dans le village ou dans la ville, l’autre véhicule ou le motard qui veut passer, etc. Il faut respecter les autres. Donc, éducation, formation et sanction, lorsqu’on ne respecte pas les règles du jeu. Alors, dans la loi qui est actuellement en discussion, qui a été adoptée en première lecture au Sénat à l’Assemblée nationale, il y a trois mesures qui visent à renforcer les sanctions : le délit de récidive d’excès de grande vitesse - plus de 50 km à l’heure au-dessus de la vitesse prescrite  eh bien sera considérée, si on est pris deux fois dans l’année, comme un délit, c’est-à-dire passible, éventuellement, si le juge l’estime nécessaire, de prison pouvant aller jusqu’à trois mois. Et puis il y a la responsabilité du propriétaire qui va être engagée pour des infractions graves. »

C. Gaessler : P. Lavile, est-ce que ce sont des mesures efficaces ?

P. Lavile : « Oui. Tout particulièrement la responsabilisation du propriétaire du véhicule me parait important, parce que ce qu’on peut en attendre, c’est que le propriétaire qui prêtera son véhicule à quelqu’un, eh bien il lui dira de faire attention, parce qu’il y a une sanction pécuniaire, quoi qu’il arrive, au bout du compte. »

R. Arhab : Une route dernière question : quand on lit, comme ce matin, qu’un automobiliste a été pris à 220 km à l’heure et qu’il a pu repartir en voiture tranquillement, qu’est-ce que vous dites ?

J.-C. Gayssot : « Je vais vous dire : demain, il y a un Conseil des ministres et je vais faire une communication, et dans le premier trimestre, il y aura un comité interministériel sur la sécurité. »

R. Arbab : Et sur ce cas précis ?

J.-C. Gayssot : « Eh bien, sur ce cas précis, je pense que les préfets doivent non seulement encourager les contrôles - vous en avez parlé, M. Lavile - notamment préventifs, en période de week-end, à la sortie de bottes de nuit, etc. Mais il faut aussi que les préfets fassent de la rétention, si je puis dire, pour empêcher de type de comportement de se poursuivre. Quelqu’un qui fait cela, moi je suis pour lui enlever immédiatement le permis. »

P. Lavile : « Et peut-être confisquer le véhicule. »

J.-C. Gayssot : « Ça peut se faire. Et peut-être confisquer le véhicule. »

P. Lavile : « Un sous-préfet, à Brest, l’a fait il y a quelques années. »


7 JANVIER : L’HUMANITE

Question
Vous venez de présenter une communication au Conseil des ministres à la suite du bilan catastrophique des accidents du premier de l’an. Avez-vous été surpris par cette hécatombe qui soulève beaucoup d’émotion dans le pays ?

J.-C. Gayssot
En effet, cette communication en Conseil des ministres n’était pas prévue. Dès l’annonce de ce bilan dramatique, je l’ai proposé au Premier ministre, qui l’a immédiatement acceptée et le président de la République en a été d’accord. J’ai été surpris, oui, parce qu’il s’agit de chiffres considérables. Nous avons affaire à un phénomène qui cumule les trois sources habituelles d’accident : la vitesse, l’alcool et la fatigue. Un peu moins surpris, aussi, parce que nous assistons malheureusement depuis quelque temps à un relâchement des comportements.

Question
Le nombre des accidents mortels a augmenté en 1998. Est-ce qu’il vous semble réaliste de vouloir réduire de moitié le nombre d’accidents sur les routes en cinq ans ?

J.-C. Gayssot
Encore plus après ce qui vient de se passer. J’estime que non seulement il ne faut pas croiser les bras, mais sortir de l’idée qu’il y aurait une sorte de fatalité de la mort sur la route. Je constate que, pendant près d’un quart de siècle, le trafic a doublé tandis que les accidents graves étaient réduits de moitié : il n’y a donc pas d’effet direct entre l’augmentation du trafic et les accidents. Ensuite, je note que, dans d’autres pays européens, pas moins civilisés que le nôtre, la Suède ou le Royaume-Uni, le nombre de morts par habitants est plus de deux fois inférieur. Enfin, je remarque que, dans un tiers des départements français, le nombre d’accidents graves a été réduit de manière sensible : pourquoi ne pourrionsnous pas suivre le même chemin dans les autres départements ?
C’est un travail de longue haleine qui suppose de jouer à la fois sur l’éducation, la formation, les changements de comportement. Il s’agit d’abord d’agir pour la prévention, mais il faut, aussi, user de la sanction lorsqu’on sort des règles du jeu. J’entends veiller à ce que ces dispositions soient effectivement mises en œuvre. S’il faut faire bouger les choses, nous le ferons, d’ailleurs un comité interministériel de sécurité routière se tiendra d’ici à la fin du trimestre. Et j’ajoute que j’ai proposé à mes collègues ministres Marie-Georges Buffet et Ségolène Royal de tenir une table ronde à laquelle participeront en particulier, le 18 janvier prochain, des responsables d’associations de jeunes. Ainsi, nous associerons les premiers concernés par les accidents à la mobilisation pour changer les comportements.

Question
Votre projet de loi sur la sécurité routière, qui est en cours de discussion au Parlement, a été critiqué, par la droite notamment, du moins en ce qui concerne les sanctions pour excès de vitesse et la responsabilisation des propriétaires de véhicules non identifiés. Vous gardez votre position ?

J.-C. Gayssot
Quand vous dites la droite, c’est un peu rapide, car le Sénat a voté le projet à l’unanimité. Il est vrai que, lors de la discussion du projet au Parlement, une majorité de médias avait une tonalité critique à l’égard du volet répressif. Depuis les accidents du premier de l’an, j’entends et je lis le contraire. Eh bien, moi, je n’ai pas envie d’être balloté. Je crois qu’il faut tenir la ligne de l’effort sur le comportement, la formation, l’information, la responsabilisation, la citoyenneté. Mais je ne céderai pas non plus sur la sanction, lorsqu’on passe les bornes et qu’on ne respecte ni soi-même ni les autres. Des incivilités peuvent se transformer en drames ou en catastrophes. Des milliers de blessés resteront handicapés toute leur vie. Et des milliers d’automobilistes sont morts pour gagner quelques minutes de trajet.

Question
Vous venez de mettre en cause tout récemment les indulgences abusives dont bénéficient certains automobilistes en matière de PV. Les Français sont certainement sensibles à votre souci d’une loi égale pour tous, mais ce n’est pas cela qui va améliorer la sécurité sur la route ?

J.-C. Gayssot
Bien évidemment ! Ce n’est pas parce que des PV ont sauté qu’il y a eu ces drames de fin d’année. Je suis réaliste. Mais, dans la mesure où se manifeste une sorte de situation d’immunité au bénéfice de certaines catégories d’automobilistes, elle ne participe pas à la responsabilisation de tous, qui me paraît nécessaire. S’agissant du travail de la police et de la gendarmerie, j’ai demandé en Conseil des ministres que les contrôles préventifs, notamment la nuit et les week-end, soient renforcés et que les procédures d’urgence de suspension du permis soient utilisées. Peut-être faut-il faire plus en matière de communication : je ne veux négliger aucune piste pour favoriser les changements de comportement.

Question
Vous proposerez d’améliorer sensiblement la formation initiale des jeunes conducteurs. Qu’avez-vous en vue ?

J.-C. Gayssot
Déjà des formations existent en classe de cinquième et de troisième, dont certains élèves peuvent passer l’attestation scolaire de sécurité routière. On est en train de travailler pour qu’il puisse être intégré à l’examen du futur Code de la route. Nous voulons par ailleurs encourager les jeunes conducteurs à suivre des stages de vérification au bout d’un an de pratique. On est en train d’expérimenter dans certains départements d’autres stages de remise à niveau qui pourraient se dérouler au terme de dix années de conduite. Evidemment, tout cela demande du temps et c’est contre lui que nous nous battons, parce que chaque jour il y a 23 ou 24 morts, et cela est insupportable.


France Inter : 8 janvier 1999

Français, payerez-vous vos P.V. ? Après la publication du sinistre bilan des morts sur la route de l’An, le ministre des Transports s’était exclamé que faire sauter les P.V., c’était fini. L’an passé, 21 millions de procès-verbaux ont été établis par les policiers. Mais les trois-quarts de ces contraventions concernent le stationnement, lequel ne constitue pas le facteur principal de mortalité sur la route. Il me semble même que, faire sauter un P.V. de stationnement dépassé, fasse partie des activités quotidienne d’un homme politique qui entretiendrait ainsi avec son électorat, une bienveillante complicité, autre appellation de l’électoralisme. Le député-maire de Pau, A. Labarrère, affirme même que jamais un homme politique ne renoncera à essayer de faire sauter les P.V., les petits, ceux de la vie quotidienne. Et voici le témoignage d’un gendarme, dont la voix est maquillée : « La gendarmerie entretient des relations avec les citoyens qui sont eux-mêmes amenés à renseigner les gendarmes sur des actes délictueux, donc parfois, en contrepartie, on est amené à accorder ce que j’appellerais des indulgences. »
Il faudra vous battre contre l’indulgence ?

J.-C. Gayssot
"Il faut surtout se battre pour l’égalité. Il n’est pas normal que certains payent et que d’autres ne payent pas. C’est aussi simple que ça. Si l’idée d’immunité est dans l’air, comment voulez-vous qu’on demande un appel au civisme pour une conduite plus apaisée, mais plus généralement qu’on demande à nos concitoyens de se comporter dans le respect des règles et des lois."

Question
Mais, vous mesurez la révolution culturelle ? Quand les hommes politiques eux-mêmes concèdent qu’ils font des petits cadeaux comme ça tous les jours

J.-C. Gayssot
– "J’étais député-maire avant d’être ministre, je sais ce que c’est."

Question
Vous aussi, vous avez fait sauter ?

J.-C. Gayssot
– "Mais j’ai demandé, sûrement, comme d’autres. Mais, je crois que, quand on a tous ces éléments sous les yeux, d’abord ces situations dramatiques des accidents de la route, et du nombre de gens qui ne payent pas – en général, ce sont ceux qui sont les mieux placés, ce n’est pas ceux qui ont le plus de difficultés qui ne payent pas – donc je pense qu’il est normal et simple… Je ne dis pas que c’est grâce à cela qu’on va améliorer fondamentalement la sécurité sur nos routes, ce n’est pas ça la question. Mon propos est un propos de civisme. Et je considère qu’il est anormal que – y compris des élus – nous soyons amenés à trier, dans le fond, les P.V. qui seraient légitimes et d’autres qui ne le seraient pas. J’ai entendu le député-maire dont vous parlez. Il dit : moi, les stationnements gênants, je ne les fais pas sauter. Donc, il décide, lui, qu’une partie de la règle du jeu doit être appliquée, une autre partie ne doit pas être appliquée. Non ! Il y a, dans ce pays, besoin plutôt de responsabilité que de laxisme dans ce domaine-là."

Question
Aux Pays-Bas ou dans les pays scandinaves, on a mis en œuvre une application très stricte de la législation. On considère, là-bas, que la loi c’est la loi, et qu’il n’y a pas à tergiverser avec ça ?

J.-C. Gayssot
– "Oui, et ce sont des pays où, justement, le nombre de tués sur les routes est inférieur à celui que nous connaissons chez nous. En France, il y a, pour un million d’habitants, plus de 160 morts chaque année. En Suède ou au Royaume-Uni, le chiffre est divisé par plus de deux, 63-62, je n’ai pas en mémoire le chiffre exact. Donc, on est arrivé dans des pays, disons développés, comme le Royaume-Uni, comme la Suède à un résultat tout à fait probant. Et en France, nous assistons à une situation où il semblerait qu’une sorte d’idée de fatalité soit en train de l’emporter. Il faut combattre l’idée de la fatalité. Depuis un quart de siècle, le trafic automobile a été multiplié par plus de deux et le nombre de morts a été réduit de moitié. Depuis quelques années, on assiste à une sorte de stagnation, un peu comme si maintenant, étant donné la circulation, étant donné le comportement des Français, on ne pouvait plus rien faire.  Eh bien non, le Gouvernement s’attaque à cette mortalité !"

Question
Mais comment ? Au début de la semaine, vous dites : les P.V., c’est fini. Et pendant la semaine, tout le monde sourit avec un air sympathique en disant : on connaît la musique.

J.-C. Gayssot
– "J’ai entendu le gendarme. Il était obligé de masquer sa voix. Ce n’est pas tellement brillant."

Question
Mais vous faites quoi ?

J.-C. Gayssot
– "Je donne des éléments pour montrer qu’en ce qui concerne la sécurité routière, on ne peut pas laisser les choses en l’état. Et quand on me pose la question : oui, mais il y a des passe-droit, etc., est-ce que ça va continuer comme ça ? Bien sûr que je réponds que non ! Bien sûr, aucun autre homme responsable n’aurait dit autre chose. Mais la question des questions, c’est de s’attaquer, je le répète, au fond du problème. D’une part, il faut une politique de prévention, de formation, d’éducation pour changer les comportements. On a des comportements, de quelques-uns – c’est une minorité souvent – qui sont totalement anormaux au point de vue de la circulation sur les routes de France."

Question
L’alcool : on a beaucoup parlé de l’alcool et du tabac. On les considère comme une toxicomanie. L’alcool chez les jeunes : le bilan du jour de l’An sur les routes, c’est malheureusement beaucoup de jeunes qui en sont victimes.

J.-C. Gayssot
– "Il y a trois ingrédients qui ont fonctionné et qui se sont amalgamés pendant ces fêtes de fin d’année. Vous avez la vitesse, l’alcool et la fatigue. Ce sont les trois principales causes des accidents de la route tout au long de l’année. Et, pendant cette période, vous avez les trois éléments qui se passent en même temps. Lors de la communication que j’ai présentée en Conseil des ministres, nous avons demandé aux préfets de faire davantage de contrôles préventifs à la sortie de boîtes de nuit, notamment le week-end et la nuit. Il faut bien agir ! On ne va pas laisser des milliers et des milliers de vies. Il y a des jeunes et des moins jeunes, mais là il y a eu près de 50 % de jeunes de moins de 25 ans qui sont morts ou handicapés pour toute leur vie. Quand il y a 8 000 morts sur les routes de France, sachez qu’il y a plus de 30 000 personnes gravement handicapées. Ailleurs, on a réussi à faire baisser cela. Il y a un tiers des départements de France où le nombre d’accidents a été diminué depuis un an. Par contre, il y a deux autres tiers où cela a augmenté. Mais, si un tiers a diminué, c’est bien la preuve qu’il n’y a pas de fatalité à cette espèce de stabilisation d’un niveau élevé du nombre de victimes sur les routes."

Question
Votre objectif c’est, d’ici cinq ans, de diviser par deux le nombre des morts sur la route. Vous allez prendre des mesures autoritaires pour cela ?

J.-C. Gayssot
– "Il faut, à la fois, une politique de prévention, de formation, d’éducation. C’est un travail de longue haleine. Ce n’est pas d’un coup de cuillère à pot qu’on va régler ce problème. Il faut aussi, lorsque les règles du jeu ne sont pas respectées, il faut qu’il y ait la sanction. C’est pourquoi, dans les 25 mesures proposées par le Gouvernement lors du Comité interministériel sur la sécurité routière – je précise qu’il va y en avoir un autre dans les toutes prochaines semaines – nous avons pris des mesures de prévention, de formation, d’éducation pour les comportements pour une conduite plus apaisée. Et il y a aussi la loi. La loi, tout le monde en a parlé, elle a été adoptée en première lecture au Sénat, à l’unanimité, et à l’Assemblée nationale. Cette loi prévoit que, lorsqu’il y aura récidive d’excès de grande vitesse, cela entraînera un délit pouvant – si le juge l’estime nécessaire – être passible d’une peine d’emprisonnement. C’est évidemment la sanction, lourde, mais c’est une récidive. Mais, il faut changer les comportements et la responsabilité du propriétaire. Et, de ce point de vue, on rejoint le problème des P.V. : il y a, actuellement, 30, 40, 50 % de gens qui ne payent pas l’infraction parce qu’on n’a pas pu les identifier. Eh bien, le propriétaire du véhicule, lui, sera identifiable."

Question
Air France : il vient de se passer un élément intéressant. 79 % des pilotes ont accepté une baisse de salaire. Contre quoi, des actions ?

J.-C. Gayssot
– "En échange d’actions. C’est significatif, d’abord, que le dialogue social doive toujours l’emporter. Il y a eu ce conflit, chacun s’en souvient. Finalement, un accord a été trouvé. Je dois dire que c’est significatif, aussi, de l’appréciation des pilotes dans cette compagnie qui est publique avec une ouverture du capital qui va se réaliser prochainement."

Question
Le fait que près de 80 % acceptent de baisser leur salaire, cela fait une très grosse baisse de la masse salariale ?

J.-C. Gayssot
– "Au total, entre la limitation des salaires plus l’échange salaire-actions, cela va tourner entre 400 et 500 millions de francs d’économies de masse salariale par an."

Question
Cela met Air France à un niveau plus concurrentiel ?

J.-C. Gayssot
– "Air France est dans une position concurrentielle, dans une position de développement, tant en matière d’alliances internationales qu’en matière de politique économique et sociale. Ce qui est, y compris à l’ordre du jour, à Air France c’est l’embauche. Le président d’Air France, M. Spinetta a parlé de 4 000 créations d’emplois."