Conférence de presse de MM. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, et Hervé Gaymard, secrétaire d’État chargé de la santé et de la sécurité sociale, sur l'orientation des actions arrêtées contre les risques liés à l'amiante et les mesures prises par le gouvernement, Paris le 3 juillet 1996.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Jacques Barrot - ministre du travail et des affaires sociales ;
  • Hervé Gaymard - secrétaire d’État chargé de la santé et de la sécurité sociale

Texte intégral

1) Dès juillet 1995, le Gouvernement, soucieux de la protection de la santé publique, a décidé de confier à l’INSERM une mission d’étude approfondie sur les pathologies liées à l’amiante, en fonction de l’ensemble des recherches disponibles sur le plan international.

Dans l’attente des conclusions de ce rapport, le Gouvernement a arrêté un programme global d’action contre les risques liés à l’amiante, qui a fait l’objet d’une communication que j’ai présentée au conseil des ministres du 20 décembre 1995. Ce programme a fait l’objet de deux décrets en date du 7 février 1996, suivis de diverses mesures d’application intervenues au cours du premier semestre.

Pour l’essentiel, les mesures prises s’articulent autour des dispositions suivantes :
    – obligation pour les propriétaires de bâtiments collectifs de repérer les flocages et calorifugeages avant fin 1999, d’évaluer l’état de conservation et d’entreprendre des travaux de confinement ou de retrait si le niveau d’empoussièrement dépasse 25 fibres par litre d’air (décret n° 96-97 du 7 février 1996) ;
    – abaissement à 100 fibres par litre du nombre de fibres d’amiante dans l’air pour les activités professionnelles au contact de l’amiante, contre 600 antérieurement (décret n° 96-98 du 7 février 1996). Cette valeur a été fixée jusqu’au 1er février 1998 à 300 fibres par litre, dans les activités où l’on n’utiliser que de la chrysolite. Des règles de prévention spécifiques ont été conçues pour le personnel d’entretien et de maintenance. En outre, la possibilité d’arrêter les chantiers de retrait d’amiante a été donnée aux inspecteurs du travail en cas d’insuffisance des mesures de protection (loi du 26 mai 1996) ;
    – amélioration des conditions de réparation au titre des maladies professionnelles pour les victimes de l’amiante ;
    – mobilisation des services de contrôle de l’État, des organismes de sécurité sociale et des médecins du travail.

2) Le rapport de l’INSERM confirme la nécessité des mesures prises. Il apporte également des éléments de connaissance complémentaires sur la base desquels le Gouvernement a immédiatement engagé un examen approfondi des mesures nouvelles à prendre.

3) Le Premier ministre a réuni hier après-midi les principaux ministres concernés pour examiner les propositions que nous lui avons faites. À la suite de cette réunion, les mesures suivantes ont été prises.

1. La fabrication, l’importation et la mise en vente de produits contenant de l’amiante et notamment l’amiante-ciment, sont interdits.

Cette interdiction prendra effet au 1er janvier 1997.

Elle sera assortie de dérogations pour certains produits à base d’amiante, tels que les garnitures de freins des poids lourds ou les vêtements ignifugés (utilisé par les pompiers), dès lors qu’il n’existe pas de produits de substitution moins dangereux. La liste de ces dérogations sera arrêtée après consultation du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels.

Le seuil d’exposition autorisé applicable à la fabrication de ces produits, qui contiennent de la chrysolite, sera ramené à 100 fibres par litre contre 300 actuellement comme pour tous les produits contenant de la chrysolite.

2. Les mesures de surveillance applicables aux flocages et aux calorifugeages s’étendront aussi aux matériaux semi durs tels que faux-plafonds, cloisons mobiles ou cartons amiantés…

Le calendrier de cette mesure sera établi après consultation du Conseil supérieur de l’hygiène publique.

3. Les inquiétudes manifestées dans le rapport de l’INSERM sur les conditions réelles dans lesquelles s’effectueront les opérations de retrait des matériaux à base d’amiante imposent une grande vigilance sur la qualité de ces opérations.

En effet, des opérations de retrait qui ne seraient pas effectuées selon les règles de l’art engendreraient un surcroît de risques tant pour les travailleurs que pour les publics.

Au-delà des mesures réglementaires déjà prises, notamment par un arrêté du 14 mai 1996, un système d’habilitation des entreprises doit être créé.

Une procédure d’accréditation sera donc mise en place dès le débord de l’année 1997 afin de garantir la capacité des entreprises intervenantes de respecter l’ensemble des règles de sécurité.

4. La veille technologique et scientifique sera renforcée. Il a été décidé de mettre en place :
    – une surveillance épidémiologique des cancers du poumon et des mésothéliomes, avec le concours de l’INSERM, afin de préciser les conditions de survenue de ces tumeurs et de mesurer les risques réels d’exposition ;
    – une étude approfondie sur les risques liés aux substituts de l’amiante, dont le risque cancérigène pourrait aussi être important.