Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais vous présenter les principales dispositions du budget du ministère de l’équipement, des transports et du logement.
Je ne vous assenerai que peu de chiffres. Depuis une semaine, vous avez d’ailleurs déjà eu l’occasion de trouver les principaux dans la presse.
Un dossier de presse très précis est à votre disposition.
C’est essentiellement sur mes priorités que j’orienterai mon propos.
Le budget que je vais vous présenter n’a évidemment pas la prétention de répondre à tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés.
Pour partie, il reste – pour des raisons qui tiennent notamment aux conditions dans lesquelles s’est fait le changement de gouvernement – marqué par la politique antérieure.
Il comporte néanmoins, par rapport aux projets que j’ai trouvés à mon arrivée, des avancées et de premières inflexions qui concrétisent les priorités que je souhaite faire avancer au cours de cette législature.
Le constat que nous sommes amenés à faire quant à la situation que nous avons trouvée début juin n’a en effet rien de très réjouissant. Il y a les problèmes économiques et le chômage dont chacun connaît l’ampleur. Il y a aussi des problèmes structurels, des problèmes de société qui se sont aggravés.
Ainsi, le secteur du BTP – plus particulièrement le « bâtiment » – a beaucoup souffert de la baisse d’activité.
Le secteur des transports, en dépit du maintien de l’activité lié à l’augmentation des flux de déplacements, est lui-même confronté à d’importantes difficultés pour accroître convenablement l’offre de transport.
Dans les secteurs d’activité qui sont de ma responsabilité, l’absence d’un aménagement du territoire qui préserve et reconnaît aussi le fait urbain, reste à construire. Je compte beaucoup sur ma collègue, Dominique Voynet pour mener ensemble la réflexion et la concertation, pour avancer ensemble.
Les sujets ne manquent pas :
- l’éloignement des lieux de travail et des lieux de vie et d’habitation, source de gâchis, de perte de temps et d’asphyxie urbaine ;
- les politiques d’urbanisme et la spéculation foncière, qui ont chassé une partie de la population des centres villes vers les périphéries ;
- l’allongement des distances parcourues par les citadins, qui se traduit trop souvent par la construction d’autoroutes urbaines, qui intensifient le recours à l’automobile pour les déplacements quotidiens ;
- l’insuffisance des transports collectifs en confort et en fréquence engendre une désaffection pour ce mode de transport et entraîne un recul du nombre de voyageurs transportés par les entreprises de transports publics, aggravant encore leurs difficultés financières ;
- le développement, sans frein, des réseaux à grande vitesse, et des autoroutes, qui prive de crédits le réseau ferré classique et les routes nationales.
Je pourrais encore allonger la liste des problèmes qui se posent dans mon champ de compétence, et qui constituent de véritables enjeux de société. Il convient de les affronter, avec rigueur, fermeté en sachant qu’on ne peut pas tout faire tout de suite.
Le budget de cette année pose les premiers jalons pour apporter – sur le moyen terme nécessairement – des éléments de réponse. Éléments encore une fois insuffisants, mais une première avancée.
L’ensemble des crédits dont je dispose dans le projet de loi de finances pour 1998 s’élève à un peu plus de 146 MMF.
Ils augmentent de 4,2 % par rapport à 1997, soit trois fois plus que le budget civil de l’État.
Il s’agit donc bien là de l’affirmation d’une priorité du Gouvernement : le secteur des transports, de l’équipement et du logement est déterminant pour l’investissement public, porteur de croissance et d’emplois.
L’ensemble des crédits est constitué :
- par les crédits budgétaires proprement dits ;
- mais aussi par le budget annexe de l’aviation civile et quatre comptes d’affectation spéciale (les CAS) :
- le FITTVN (Fonds d’investissement des transports terrestres et de voies navigables ;
- le FARIF (Fonds pour l’aménagement de l’Île-de-France) ;
- le FPTA (Fonds de péréquation des transports aériens) ;
- le FFAP (Fonds pour le financement de l’accession à la propriété).
Ces quatre fonds représentent 12,5 milliards de francs (soit 9 % des crédits disponibles).
Première priorité, premières inflexions : le budget du logement et de l’aménagement urbain.
La conférence de presse de Louis Besson la semaine dernière vous a déjà permis de connaître nos orientations. Je n’y reviendrai que brièvement.
Le développement du logement social est un impératif majeur de la politique du ministère. 47,7 milliards de francs y seront consacrés. C’est le premier budget du ministère.
Cette priorité se décline en 4 mesures :
* un programme de constructions neuves adapté aux besoins :
- en premier lieu, des logements sociaux. Un programme de 80 000 PLA sera mis en œuvre. Parmi ceux-ci, 30 000 prêts locatifs aidés très sociaux (PLATS) ;
- la construction neuve sera également soutenue par le maintien des prêts à taux 0 ;
* Une actualisation des aides à la personne, qui interviendra au 1er juillet 1998 après celle du 1er juillet dernier.
Le Gouvernement renoue ainsi avec une politique de revalorisation régulière des aides à la personne après plusieurs années d’interruption.
* une mesure importante d’allégement fiscal. Les travaux de réhabilitation, de rénovation et de transformation, ainsi que les grosses réparations, réalisé par les bailleurs sociaux seront dorénavant soumis au taux réduit de TVA de 5,5 % au lieu de 20,6 %.
* un programme très ambitieux de réhabilitation, tant dans le secteur social que dans le secteur privé :
- un programme de 120 000 PALULOS sera mis en place ;
- les crédits pour la prime à l’amélioration de l’habitat (PAH) seront portés à 800 MF, en augmentation d’un tiers par rapport à 1997, et ceux de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH) augmenteront.
Ces mesures devraient permettre de répondre à l’objectif élémentaire, trop souvent perdu de vue, de justice sociale.
Les mesures en faveur du logement ne peuvent avoir un sens que si elles sont intégrées à une véritable politique d’aménagement urbain. Ses crédits seront préservés :
- les moyens budgétaires de 1998 permettront de poursuivre l’examen des six directives territoriales d’aménagement et la mise en œuvre des contrats de développement urbains ;
- les crédits destinés aux agences d’urbanisme seront augmentés de 6 %. Ce signe était très attendu des collectivités locales.
Deuxième priorité, deuxième inflexion au travers d’une politique volontariste des transports.
Le budget 1998 traduit la volonté du Gouvernement de développer une politique des transports résolument plurimodale au service du cadre de vie, et d’un aménagement équilibré du territoire national.
Cette politique des transports s’appuie sur l’idée que chaque mode de transport a des atouts, qui doivent être mis en valeur, et sur leur complémentarité.
Elle sera mise en œuvre de manière concertée avec les acteurs économiques et les collectivités territoriales concernées au travers des choix d’infrastructures. Elle devra être financée.
À cet égard, le redéploiement des financements prévus pour le canal Rhin-Rhône – investissement inadapté auquel le Gouvernement a décidé de renoncer – permettra d’accélérer le financement d’autres équipements, plus efficaces socialement et économiquement.
L’accroissement de 26 % des crédits du Fonds d’investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN), qui seront portés à 3,9 milliards de francs en 1998, permettra d’avancer dans cette direction et d’accélérer la construction ou les études – selon le cas – de grands équipements.
Il s’agira notamment de continuer le maillage des grandes infrastructures, en tenant compte des impératifs de désenclavement de certaines régions et d’accessibilité des grandes installations portuaires.
Mais en même temps, de premières et significatives inflexions seront apportées par rapport à la politique antérieure, basée sur des réseaux ferré et routier « à deux vitesses ».
S’agissant des transports collectifs, il s’agit d’offrir aux usagers une véritable alternative à l’automobile, en milieux urbain et périurbain et pour les déplacements à moyenne distance.
Avec 646 MF de moyens d’engagement, l’aide aux transports collectifs de province bénéficie d’une dotation en hausse de plus de 10 % par rapport à 1997. Ces crédits permettront notamment de soutenir la réalisation d’opérations engagées ou techniquement prêtes dans les grandes villes (tramways, sites propres...).
En Île-de-France, l’aide de l’État atteindra au total près de 600 MF (dont 310 MF inscrits au fonds pour l’aménagement de l’Île-de-France FARIF). Rapidement, la priorité devra être donnée aux liaisons interbanlieues.
Par ailleurs, la contribution de l’État au fonctionnement des transports de la région parisienne est fixée à 5 570 MF, soit + 5 % par rapport à 1997.
Je souhaite un effort particulier en faveur des transports ferroviaires pour équilibrer le développement des différents modes.
La décision d’alléger de 20 milliards de francs supplémentaires la dette de la SNCF, au-delà de l’allègement initial de 134,2 milliards de francs, a montré la volonté du Gouvernement de créer les conditions d’un rétablissement durable de la situation financière du secteur ferroviaire.
Par ailleurs, les dotations en capital de l’État à RFF s’élèveront à 8 milliards en 1997 puis à 10 milliards en 1998, soit au total 18 milliards de francs.
L’engagement était pris, dans le même temps, de créer 1 000 emplois au titre du plan « emplois-jeunes » et 1 000 emplois statutaires pour améliorer les services rendus aux usagers.
Le développement des transports ferroviaires se traduira, sur le plan budgétaire, par la poursuite de l’effort de l’État au profit de ce secteur, 46,8 milliards de francs y seront affectés, en tenant compte des crédits du FITTVN.
Parallèlement à la poursuite des travaux et des études sur le réseau à grande vitesse, je tiens à ce que des crédits importants soient réaffectés à la modernisation et au développement du réseau classique.
S’agissant des crédits routiers, et de la politique autoroutière, un réexamen s’impose.
Nous mesurons l’insatisfaction de beaucoup d’usagers qui empruntent des voies rapides, encombrées, à l’éclairage défectueux, qui circulent sur des routes connaissant de forts taux d’accidents, ou contribuant de manière excessive à des nuisances sonores.
Face à cette situation, la croissance des crédits disponibles sera affectée de manière significative à la réhabilitation et à l’entretien du réseau national.
Ainsi, l’ensemble des crédits de réhabilitation et d’entretien (renforcement des chaussées, ouvrages d’art…) s’élèvera à 3,3 milliards de francs, en augmentation de 4,2 % par rapport à 1997.
Pour le développement du réseau, l’effort entrepris porte sur le rattrapage des moyens de paiement : 6,3 milliards de francs, en augmentation de 1,9 % par rapport à 1997.
Ces inflexions sont encore trop modestes. C’est pour cela qu’avec mes collègues de l’économie et des finances et du budget, j’ai engagé une réflexion – dont vous avez déjà vu des échos dans la presse :
- pour rompre avec la fuite en avant qui consiste à faire toujours plus de tronçons autoroutiers pendant que le patrimoine routier national se dégrade ;
- sur les moyens d’optimiser l’affectation des ressources financières entre les routes et les autoroutes.
Je souhaite que ces réflexions puissent déboucher rapidement.
En même temps, je suis soucieux de mieux tenir compte des préoccupations environnementales de la société. Aussi ai-je engagé, avec ma collègue Dominique Voynet, un réexamen qualitatif de la politique autoroutière, sans bien entendu bloquer les travaux engagés dès lors que ceux-ci avaient fait l’objet de concertation et de débats de fonds.
En ce qui concerne les voies navigables, l’investissement portera essentiellement sur les travaux de restauration et de modernisation du réseau. L’essentiel des moyens viendra du FITTVN, dont la part consacrée à la voie navigable augmentera de 23 % pour atteindre 430 MF.
Ces moyens supplémentaires vont permettre à l’établissement public – « Voies navigables de France » de lancer un important programme de remise à niveau du réseau existant – et de poursuivre certaines études, comme le canal Seine-Nord et la liaison Seine-Est.
Troisième priorité, la sécurité.
La question de la sécurité est au premier rang de mes préoccupations, à la fois comme objectif majeur du service public, et comme facteur de progrès social, notamment dans le transport routier.
En matière de sécurité routière, les moyens budgétaires (440 MF) retrouvent en 1998 une progression qu’ils n’avaient pas connue depuis 1993.
J’ai souhaité que des crédits importants permettent également des efforts en matière de sécurité aérienne et de sécurité maritime.
Enfin, je suis particulièrement préoccupé des dangers occasionnés par les passages à niveaux, qui exigeront un effort significatif de financement.
Comme vous le constatez, les crédits du ministère constituent un appui décisif à l’activité économique et à l’emploi dans de nombreux domaines
Les transports en commun par l’accroissement de l’offre de transport.
Les travaux publics et le bâtiment.
Le parti que j’ai pris pour l’entretien et la réhabilitation a un fort contenu en emplois : ces opérations engendrent davantage d’emplois pour le même montant d’investissements que pour les travaux neufs.
La construction aéronautique.
Les autorisations de programme sont en augmentation de 23,7 % par rapport à 1997 et atteignent 1,8 milliard de francs. Elles permettront une croissance très importante des avances remboursables pour le nouvel Airbus A330.
Le tourisme.
Je n’évoque pas longtemps cette activité très importante, qui est le premier secteur d’emplois tertiaires en France, parce que Michelle Demessine vous en parlera plus longuement dans une prochaine conférence de presse.
Voici les quelques éléments d’informations que je voulais vous donner.
Pour conclure, et pour remettre en perspective ces informations, je voudrais rappeler que l’action que nous venons d’engager vise à s’inscrire dans la durée d’une législature.
Nous avons, je crois, avancé de manière notable dans le domaine du logement. Dans le domaine des transports, des premières dispositions positives ont été prises et les orientations, le cadre, commencent à être tracés.
Nous serons amenés à les poursuivre et à les approfondir prochainement dans le cadre d’un projet de loi. Des chantiers sont ouverts sur les questions touchant à la prise en compte plus attentive des problèmes d’environnement ou sur l’importante question de la sécurité dans les transports. Les annonces que j’ai faites concernant Roissy et l’autorité indépendante doivent prendre forme juridiquement. Dans le secteur des transports, encore, je l’ai déjà évoqué, les moyens et des modalités de financement des transports collectifs et des programmes d’infrastructures, du réseau routier national en particulier, doivent être réexaminés.
Je n’ai pas voulu revenir aujourd’hui – autrement qu’en évoquant les mesures budgétaires les concernant – sur les dossiers des entreprises publiques. Simplement, je redirai mon attachement à une démarche pragmatique refusant tout dogmatisme, pour rechercher concrètement, dans une perspective d’efficacité économique et de progrès social, des réponses originales aux nouveaux défis que nous devons relever.
Je souhaite inscrire cette démarche – à laquelle je le répète, je suis personnellement attaché – dans une conception rénovée du service public, soucieuse des usagers et des personnels.
Voilà, Mesdames et Messieurs, les quelques informations que je voulais vous donner avant de répondre à vos questions.