Texte intégral
Le Parisien : Si on additionne la hausse de l’impôt sur le revenu, le relèvement de la taxe sur les carburants, les nouveaux prélèvements sur l’épargne, la suppression de certains avantages fiscaux et familiaux, l’addition paraît très lourde. Où est le gain de pouvoir d’achat de 2 % promis par le Gouvernement ?
Christian Sautter, secrétaire d’État au budget : La différence entre notre budget et ceux des années antérieures, c’est qu’il n’y a pas de prélèvements massifs. Grâce à la prochaine baisse de 4,7 points des cotisations d’assurance maladie et à son remplacement par une future CSG de 4,1 points, il y a une différence positive qui donne du pouvoir d’achat aux salariés. Contrairement aux gouvernements antérieurs, nous n’augmenterons pas la TVA. Au contraire, il y aura des baisses sur l’entretien des logements sociaux. Sur les travaux d’amélioration dans la maison, les gens pourront réduire l’équivalent de la TVA sur leurs feuilles d’impôt.
Le Parisien : Mais au total, la ponction sur les ménages sera bien accrue de 5 milliards l’an prochain !
Christian Sautter : Ces 5 milliards représentent une taxe de 2 milliards sur les carburants et 3 milliards d’avantages en moins de l’impôt sur le revenu. J’ajoute que ce qui est pris l’est sur une couche très aisée de la population française.
Le Parisien : Précisément, si l’on voit bien les perdants, on distingue mal en revanche les gagnants. Y a-t-il vraiment une redistribution sociale ?
Christian Sautter : Prenez les jeunes : en renforçant le budget de l’éducation, celui pour l’emploi - 8 milliards pour les emplois-jeunes -, en quadruplant l’allocation de rentrée scolaire, nous avons fait un budget pour eux. Le transfert aura lieu des ménages très aisés vers les jeunes.
Le Parisien : Concernant les Français les plus aisés, vous n’avez pas touché à l’impôt sur la fortune, pourquoi ?
Christian Sautter : Nous avons décidé de ne pas reformer tous les impôts à la fois. Par conséquent, il n’y pas de mesures sur la fiscalité du patrimoine, sur les impôts locaux ou sur la fiscalité écologique – dont on parlera en 1998 – dans ce projet de budget.
Le Parisien : Le Gouvernement parle de gel des effectifs de fonctionnaires, mais il annonce une probable titularisation des emplois-jeunes dans l’éducation ou la police. N’est-ce pas contradictoire ?
Christian Sautter : Les jeunes qui vont prendre de l’expérience auront, à terme, une bonne aptitude pour passer les concours de recrutement de la fonction publique. Ceux qui le voudront entreront par la porte normale et remplaceront des policiers ou instituteurs qui partent à la retraite. Mais au total, s’il y a création d’emplois dans certains secteurs, il y aura réduction de postes ailleurs. Nous l’avons fait pour 1998 et nous continuerons.
Le Parisien : Revenons à l’épargne. Il semble surprenant que vous ayez renoncé à réduire les avantages de l’assurance vie liés à la succession, mesure qui profite aux plus riches, alors que vous taxez sensiblement les revenus de ce produit d’épargne cher à des millions de Français…
Christian Sautter : D’abord, notre mesure n’est pas rétroactive. Ceux qui ont un plan d’assurance vie en cours ne seront pas taxés à son échéance. Elle vaut uniquement pour les nouveaux contrats souscrits à partir du 15 septembre 1997 ou pour les contrats anciens qui auraient été révisés (versement inattendu, rachat partiel…). Une famille qui exécute strictement les clauses de son contrat n’est pas concernée. De plus, grâce à l’abattement à la base (30 000 F pour un célibataire, 60 000 pour un couple), le prélèvement libératoire de 7,5 % n’aura pas d’effet pour la majorité des Français concernés. Le contrat d’assurance vie gardera un rendement intéressant et, je le pense, restera attractif.
Le Parisien : Pendant la campagne, vous annoncez une baisse de la TVA dont on ne parle plus. Est-elle définitivement abandonnée ?
Christian Sautter : Lorsqu’il aura un peu de marge, je pense que nous la consacrerons en priorité à la TVA plutôt qu’à l’impôt sur le revenu.
Le Parisien : Craignez-vous une évasion de l’épargne chez nos voisins européens où la fiscalité est plus accueillante ?
Christian Sautter : Malgré les mesures prises, qui sont très marginales, je pense que la sécurité pour l’épargne de Monsieur Tout-le-Monde, c’est en France qu’elle se trouve. À l’étranger, peut-être qu’en cherchant bien, on trouvera plus de rendement, mais il y a certainement moins de sécurité.
Le Parisien : Les fonctionnaires qui payeront la nouvelle CSG sur leurs primes auront-ils une compensation ?
Christian Sautter : Aucun fonctionnaire n’aura un impact négatif sur son traitement. Les agents de catégorie C gagneront car leurs primes sont faibles. Pour les cadres B, la mesure sera neutre. Ceux qui seraient perdants dans les catégories B et A auront une compensation comme cela avait été fait par Alain Juppé.
Le Parisien : Il y a eu débat au sein du gouvernement sur la mise sous conditions de ressources des allocations familiales. Certains souhaiteraient mettre d’autres allocations, comme la maladie par exemple, sous conditions de ressources. Quelle est votre position sur ce sujet ?
Christian Sautter : Cela a été fait pour la famille, afin d’organiser une redistribution des familles modestes. Il s’agit de demander un peu plus à ceux qui ont un revenu supérieur à 25 000 F par mois pour payer l’allocation de rentrée scolaire. Cela a été fait sur la famille, je ne pense pas qu’il soit question, ni à court, ni à long terme, de mettre sous conditions de ressources d’autres prestations sociales.