Texte intégral
Les Échos : 13 avril 1997
Les Échos : Êtes-vous favorable au « Grenelle de la santé » réclamé par les internes et certains médecins ?
Jacques Barrot : Si, sous ce vocable, les manifestants ont voulu réclamer une remise à plat, pour ne pas dire une remise en cause de la réforme de l’assurance-maladie, je leur réponds que cette réforme a été engagée solennellement à partir d’une révision de la Constitution… Tout le monde sait ce que signifierait son abandon : une assurance-maladie condamnée, à brève échéance, à retomber dans des déficits qui mettraient en péril la médecine à la française. Mais, s’il s’agit de dialogue, alors je renvoie médecins et soignants à tous ces nouveaux lieux de dialogue que la réforme a créés, pour leur permettre de cogérer la réforme. Qu’il s’agisse de la Conférence nationale de santé, des conseils de surveillance des caisses, des instances de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé, etc. Qu’il s’agisse, pour ce qui concerne les internes eux-mêmes, de leur participation aux commissions clés du nouveau système. Chaque jour qui passe, malheureusement, retarde leur participation active au perfectionnement des outils nécessaires à la réussite de la maîtrise médicalisée et aptes à assurer une régulation économique proprement dite acceptable par tous. On regrettera un jour ces combats à retardement.
Les Échos : Comment expliquez-vous qu’après avoir eu satisfaction sur leur revendication initiale, les internes prolongent leur conflit ?
Jacques Barrot : Derrière la prolongation de ce conflit, il y a un ultime refus, qui n’est pas avoué, celui d’admettre le principe d’une régulation continue des dépenses de santé, via la fixation, d’un objectif annuel à ne pas dépasser. Ce que nous voulons, à travers cet objectif, c’est nous contraindre, tous ensemble, à ne pas retomber dans le cercle vicieux des déficits, fatalement suivis d’augmentations de cotisations, voire de moindres remboursements aux assurés sociaux.
Les Échos : Quelles sont les conséquences, à court terme, de ce conflit ?
Jacques Barrot : Plus il s’éternise, plus il risque de retarder la mise au point d’éléments essentiels de la réforme de la médecine libérale, comme l’informatisation des cabinets, le codage des actes, l’évaluation des pratiques médicales. Cela, c’est l’avenir, c’est ce qui doit constituer l’essentiel des discussions à venir, notamment avec les internes. Ils ont obtenu une grande avancée avec l’assurance de pouvoir participer au suivi de l’application des conventions. La Caisse nationale d’assurance-maladie et les syndicats médicaux signataires des conventions ont, aussi, montré un réel esprit d’ouverture. Certaines modalités d’application prévues par les conventions ne sont pas leur dernier mot. Il faudra, dans le cadre d’une vie conventionnelle normale, voir, notamment, comment affiner, progressivement, les modalités d’individualisation des reversements éventuels.
Les Échos : La négociation avec les internes a été menée avec le ministère, pas avec l’assurance-maladie. Où est la nouvelle répartition des rôles dans la protection sociale ?
Jacques Barrot : Nous ne sommes pas encore au stade où le partage des nouvelles responsabilités est clairement perçu par tout le monde. Le gouvernement a essayé de jouer les « bons offices », le trait d’union. Il n’y a pas eu de divergence avec la Caisse nationale d’assurance-maladie. Le contrat d’objectifs entre l’État et l’assurance-maladie sera signé très prochainement. S’il le faut, on bousculera un peu les administrations. Dans la logique de la réforme, il ne faut plus que l’État veuille superviser en permanence. Mais, il faut aussi que les caisses acceptent de s’engager sur des objectifs, des calendriers et des moyens, afin de pouvoir ensuite évaluer les résultats.
Les Échos : Avez-vous le sentiment que les internes ont été manœuvrés ?
Jacques Barrot : Ils ont manifesté une peur de l’avenir qui ne me paraît pas justifiée, même si elle est excusable. Cette peur a été attisée par les partisans du statu quo, pour mieux justifier les positions les plus conservatrices.
Les Échos : À quand la mise en place du régime d’assurance-maladie universelle ?
Jacques Barrot : Un projet de loi sera prochainement examiné par le Conseil des ministres. La mise en place de l’assurance-maladie universelle se fera en plusieurs étapes. Dès 1998, toute personne, dès lors qu’elle justifie d’une résidence stable et régulière en France, sera affiliée. Si elle ne peut pas être rattachée à un régime du fait de son travail ou de sa condition familiale, elle sera accueillie par le régime général et il ne sera plus fait recours à l’assurance personnelle… Cette universalisation se concrétisera en l’an 2000 par la détention par chaque affilié à l’assurance-maladie universelle d’une carte personnelle d’assuré social Vitale.
Les Échos : Après le rejet par Bruxelles du plan textile français, vous voulez continuer à verser les aides en attendant le nouveau système. Vous faites peu de cas des décisions de Bruxelles !
Jacques Barrot : Le commissaire Van Miert a reconnu le bien-fondé de notre démarche et notre bonne volonté. Je ne vois pas pourquoi la Commission ferait preuve d’intransigeance. Certaines dévaluations compétitives ont généré de graves distorsions de concurrence, et on peut se demander si encore aujourd’hui les aides à l’investissement accordées dans certains pays dans le secteur du tissage ne défavorisent pas nos productions.
Les Échos : Qu’allez-vous faire maintenant ?
Jacques Barrot : Je rencontrerai à nouveau le commissaire Karel Van Miert dans les dix jours. La Commission donne son accord sur notre démarche d’élargissement du dispositif d’abaissement des charges pour les emplois moins qualifiés. Mais elle voudrait que cela se fasse entreprise par entreprise et non par branche. Je crois sincèrement que la méthode que nous proposons, fondée sur des critères objectifs, est plus simple et tout aussi incontestable. Aussi, un accord ne me semble pas inaccessible.
Les Échos : Comment allez-vous financer cette extension des allégements de charges à d’autres secteurs ?
Jacques Barrot : Il y a quelques marges de redéploiement, mais elles sont très étroites. On l’oublie souvent : le budget du travail est obligé (sur 80 % au moins de son montant) de faire face aux engagements pris au cours des années précédentes (préretraites, allocation de solidarité, contrats d’alternance...). Aussi, il doit être entendu que les allégements de charges sociales, directement utiles à l’emploi, doivent être privilégiés sur d’autres baisses d’impôts, dans le cadre de la baisse souhaitée des prélèvements obligatoires. Et, il ne faut pas l’oublier : les emplois créés génèrent à leur tour des recettes pour les régimes sociaux de l’État.
Les Échos : La discussion sur le projet de loi de cohésion sociale débute aujourd’hui à l’Assemblée nationale. Le débat ne risque-t-il pas d’être difficile ?
Jacques Barrot : Ce projet de loi innove en profondeur en matière d’insertion, car il vise à modifier les comportements. On nous reproche un financement insuffisant. C’est oublier que, à chaque fois que l’on remet un RMIste au travail, on peut recycler son allocation dans le financement des emplois. Et nous avons obtenu une contribution de 500 millions de francs par an du Fonds social européen pendant trois ans ! De plus, la loi est faite pour prendre toute sa dimension à la faveur du renouveau économique. Nous allons passer une sorte de pacte national de solidarité : dans la mesure où les finances de l’État s’amélioreront avec la croissance, nous en ferons bénéficier en priorité les personnes en voie d’exclusion.
Les Échos : Les associations multiplient les propositions pour insérer les personnes en difficulté...
Jacques Barrot : Tant mieux, mais attention de ne pas aboutir à un concours d’idées toutes plus savantes les unes que les autres, alors que le dispositif pour l’emploi que nous proposons a l’avantage d’être simple et très vite opérationnel. Les contrats d’initiative locale, les CIL, d’une durée de cinq ans, assortis d’une formation très adaptée, seront la première étape de la réinsertion des personnes le plus en difficulté. Nous en prévoyons 50 000 par an. À cela s’ajoutent les 20 000 itinéraires personnalisés d’insertion par an et pendant cinq ans : une formule très adaptée à des jeunes qui doivent souvent tenter plusieurs expériences avant de trouver leur voie.
Les Échos : Les départements risquent de faire la fine bouche, car ils devront prendre en charge 50 % du financement de ces contrats...
Jacques Barrot : Le but n’est pas de créer des emplois « occupationnels », sans véritable utilité. Dès lors qu’une contribution réelle leur est demandée, les départements vont devoir faire preuve de beaucoup d’imagination sociale pour proposer de vraies tâches, qui ne viennent pas en concurrence avec le secteur marchand et ne soient pas des annexes de la fonction publique.
Les Échos : Accepterez-vous l’amendement rétablissant la taxe de 1 % sur les factures EDF au profit de l’insertion ?
Jacques Barrot : Non. Le gouvernement estime que cette finalité serait trop étrangère à la nature du prélèvement. Mais, puisque EDF n’a plus à indemniser ses actionnaires de 1946 – ce à quoi servait cette taxe –, il pourrait utiliser une partie de l’économie réalisée pour éviter les coupures d’électricité aux foyers les plus pauvres.
Les Échos : Le débat sur la flexibilité est retombé. Attendrez-vous les conclusions de la commission Soubie pour modifier la législation Aubry sur les plans sociaux ?
Jacques Barrot : Faut-il faire un ajustement ponctuel ou réfléchir plus à fond sur l’ensemble de la législation pour la rendre plus lisible et éviter les incertitudes juridiques en matière de licenciement qui seraient très dangereuses pour les entreprises et préjudiciables aux investissements étrangers en France ? La commission Soubie donnera un éclairage, mais je pense, d’ores et déjà, qu’il faudra aborder le problème dans son ensemble.
Les Échos : Quand allez-vous « arrêter les compteurs » du financement de la loi Robien ?
Jacques Barrot : Ce dispositif d’aménagement-réduction du temps de travail a donné l’envie ou l’occasion à beaucoup d’entreprises de réfléchir sur de nouveaux modes d’organisation du travail. Cela est déjà bénéfique en soi. Notre souci majeur est de veiller à une bonne utilisation des baisses de charges qui doivent faciliter un véritable réaménagement du travail dans l’entreprise pour gagner des emplois durables par-delà l’avantage momentané de l’allégement de cotisations. Une évaluation est prévue d’ici à l’automne.
Les Échos : Mais les 800 millions prévus cette année s’épuisent !
Jacques Barrot : Nous sommes encore dans les clous, le coût pour 1997 ne devrait pas trop s’éloigner des prévisions, qui approchent 1 milliard. Nous allons faire une projection pour 1998 et, à la lumière de l’évaluation prévue pour l’automne, voir s’il y a des ajustements à apporter. Ce qui compte, c’est que les avantages consentis soient vraiment proportionnels à l’objectif d’emplois durables.
Les Échos : Comptez-vous toujours proposer une loi sur la formation avant la fin de l’année, sachant que les partenaires sociaux ne sont guère pressés de discuter en année d’élections prud’homales ?
Jacques Barrot : Le président du CNPF, Jean Gandois, a accepté d’inviter les syndicats à traiter de quatre sujets au sein d’un groupe de travail paritaire : la validation des compétences, l’organisation de la formation tout au long de la vie, le développement de l’alternance et, enfin, le suivi de l’offre de formation. Ce groupe devrait commencer à travailler rapidement. De notre côté, nous examinons comment ces dispositifs peuvent voir le jour. En tout cas, l’engagement présidentiel sera tenu : un projet de loi sera préparé avant la fin de l’année.
Jacques Barrot : Vous venez de passer en force dans les banques avec un décret sur le temps de travail, pourquoi ?
Jacques Barrot : Contrairement aux apparences, c’est un assez bon exemple d’une adaptation précédée d’un dialogue social approfondi. Certes, il n’y a pas eu d’accord entre le patronat et les syndicats de la branche, mais ceux-ci ont préalablement négocié. Le décret propose un équilibre entre les nouvelles contraintes demandées aux salariés et la réduction du temps de travail. C’est une approche qui doit être systématisée. Toute adaptation impliquant un effort de leur part doit comporter pour les salariés des contreparties.
France Inter : mardi 15 avril 1997
France Inter : Vous avez reçu impromptu les internes hier soir.
J. Barrot : Oui, impromptu, mais après un dialogue sans relâche depuis des semaines, avec H. Gaymard et toutes nos équipes.
A. Ardisson : Vous leur avez remis un document final. C’est la fin de la négociation, il n’y a plus de discussion possible ?
J. Barrot : Il y a le compte rendu de ce à quoi nous sommes arrivés et il y a des propositions pour tous les internes de France pour leur permettre de participer au chantier de la réforme. C’est du concret ça. Et puis, sur le dispositif d’alerte, de solidarité en cas de recrudescence des déficits, le gouvernement a maintenu des principes qui inspirent la réforme.
A. Ardisson : Mais est-ce que, de leur côté, ils ont obtenu quelque chose qui soit de nature à les rassurer ou à les calmer ?
J. Barrot : L’essentiel c’est l’association à la mise en application au quotidien de la réforme. Qu’il s’agisse de santé, leur participation aux très prochaines conférences régionales et nationales de santé, leur participation à l’élaboration des bonnes pratiques médicales, du juste soin, et là nous avons vu combien ils étaient ouverts à cette culture nouvelle du juste soin et de la maîtrise médicalisée, leur participation aussi à la réflexion de la complémentarité des soins, des réseaux.
A. Ardisson : Mais comment allez-vous faire pour les associer quand on sait que l’un des problèmes auquel vous vous êtes heurté, c’est que ça part un peu dans tous les sens sur le plan syndical ?
J. Barrot : Je pense que le mouvement des internes trouvera sa cohérence dans la participation positive et active à la mise en forme de la réforme. Il y a eu trop longtemps pour eux une sorte d’obsession sur un slogan réducteur, un peu comme si l’arbre cachait la forêt. Et, à force de dialogue, je crois que tout doucement, on découvre que la réforme n’est pas uniquement un mécanisme de régulation économique nécessaire, mais qui n’est finalement qu’un mécanisme d’ultime recours. C’est tout un ensemble qui vise à donner à la médecine française un nouvel élan vers la qualité. Et là, nous avons besoin de la jeune génération.
A. Ardisson : Concernant la grève, vous considérez que vous avez sifflé la fin de partie ?
J. Barrot : Il est clair que le compte rendu de ce que nous avons couché sur le papier hier marque bien les positions claires du gouvernement, à la fois faites de proposition et faites aussi de la volonté ferme de ne pas mettre en cause les principes d’une réforme qui nous paraît la condition absolue si l’on ne veut pas, dans quelques années, se retrouver devant une Sécurité sociale et une assurance maladie en situation dangereuse. C’est l’intérêt du pays, c’est l’intérêt bien compris des médecins.
A. Ardisson : Pour les internes, on les interrogera ou on verra sur pièce.
J. Barrot : Oui, mais je suis confiant parce que je crois que c’est une génération qui a beaucoup de choses à faire et nous avons besoin d’elle pour cette maîtrise médicalisée.
A. Ardisson : Vous avez aussi beaucoup de choses à faire puisque, aujourd’hui, commence, à l’Assemblée nationale, la discussion sur la loi de cohésion sociale. Ce qu’on avait appelé au début la loi contre l’exclusion. C’est un texte ambitieux qui veut prendre en globalité le problème des exclus, donner les mêmes droits à tous. Mais vous êtes en butte à de nombreuses critiques.
J. Barrot : Mais je vous fais remarquer tout de même qu’il a fallu initier cette démarche. Certains prédécesseurs, notamment du côté des bancs socialistes, n’ont pas initié une telle démarche. Évidemment, quand on n’initie rien, on n’est pas passible de critiques. Quand on commence une démarche, qu’on l’engage, à ce moment-là, les critiques arrivent.
A. Ardisson : Les critiques ne viennent pas seulement des rangs socialistes mais aussi d’un certain nombre de milieux associatifs. L’une de ces critiques est de dire : au fond, cette loi organise un droit des exclus mais n’est pas une éradication de l’exclusion.
J. Barrot : Cette loi a un triple avantage. Elle est préventive d’abord. Elle veut prévenir à l’avenir les exclusions et l’exclusion. Elle a le mérite d’aborder le problème à travers toutes ses dimensions : problème d’emploi mais aussi problème de santé, problème de logement, problème de droits civiques. Il y a là un ensemble. Et enfin, elle s’inscrit dans la durée. 300 000 contrats d’initiative locale en cinq ans, 100 000 itinéraires personnalisés en cinq ans, on va monter en régime. On fait ça solidement. Et, contrairement à ce que je lis ici ou là, il y a déjà 3 milliards à la clé, étant entendu que cela veut dire, je veux insister, que c’est un engagement que nous prenons vis-à-vis de nos compatriotes les plus en difficulté. Pendant les cinq ans qui viennent, dès qu’il y aura des éclaircies économiques, ils seront partie prenante de ces progrès économiques.
A. Ardisson : L’autre reproche que vous allez entendre, qui est l’argument du PS notamment, c’est que vous prenez aux pauvres pour donner aux plus pauvres, notamment par le plafonnement de l’allocation de solidarité spécifique.
J. Barrot : C’est faux. Dans les trois milliards, vous le savez bien, il y a 1,8 milliard pour loger les plus fragiles de la société française dans de meilleures conditions. Et le reste, il y a en effet une augmentation du budget. Nous avons ferraillé pour obtenir une participation de l’Europe, 500 millions chaque année, pendant trois ans, du fonds d’action sociale. Et puis, il y a en effet quelques dispositifs qui consistent à redéployer un peu des sommes en essayant d’harmoniser un peu mieux les règles d’attribution d’un certain nombre de minima. Mais, il n’y a rien dans cette affaire qui puisse légitimer cette accusation de prendre aux pauvres pour donner aux plus pauvres. Et ce que je veux dire, c’est que dans les cinq ans qui viennent, il y a des perspectives ouvertes qui feront que, chaque année, le budget de la France portera la marque de ce soin apporté aux plus démunis.
A. Ardisson : Mais vous avez dû vous brider en raison de la politique économique de la France ?
J. Barrot : Oui, mais ça n’aurait pas été sérieux si on avait fait de la lutte contre l’exclusion à crédit. Ça veut dire qu’à terme, on aurait à nouveau engagé des dettes supplémentaires. Et qui trinque dans ces cas-là ? C’est toujours, hélas, les plus faibles.
A. Ardisson : Il va y avoir un événement exceptionnel et rare puisque G. de Gaulle-Anthonioz va intervenir à l’Assemblée en tant que rapporteur pour avis au Conseil économique et social. Elle-même dit : « j’ai quand même envie que cette loi soit votée, parce que sinon il y aurait trop de déception, mais je ne pourrais pas passer sous silence les limites du texte ». Vous la comprenez ?
J. Barrot : D’abord je veux dire que cette loi porte très largement la marque du mouvement ATD Quart-Monde que Mme de Gaulle représente. Deuxièmement, je comprends que quand on est tous les jours au chevet des plus démunis et à leurs côtés, on a toujours envie d’aller plus vite dans cette lutte contre l’exclusion. Alors elle a raison, elle nous stimule. Mais, il ne faut pas qu’en nous stimulant, non plus, nous laissions penser qu’il n’y a pas là un grand mouvement engagé. Et, d’une certaine manière, nous ne devons pas donner aux Français le sentiment qu’ils vont pouvoir rester en marge du grand élan de générosité qui devrait trouver son point d’appui sur cette grande loi pour les années qui viennent.
A. Ardisson : Il va y avoir 400 amendements déposés. Ce n’est pas rien.
J. Barrot : Peut-être 600.
A. Ardisson : On n’est pas sortis de l’auberge. Sur le lot, y en a-t-il qui vous paraissent suffisamment sympathiques ou raisonnables pour que vous les acceptiez ?
J. Barrot : On va faire le tri. Il y a sûrement, ici et là, des améliorations à apporter. Mais il ne faut pas non plus que l’on fasse une course aux bonnes idées. Ce qu’il faut maintenant, c’est du concret. La lutte contre l’exclusion, ce n’est pas uniquement à partir de textes juridiques. C’est aussi apporter à tous ceux qui se battent sur le terrain quelques raisons de garder confiance dans ce qu’ils font.