Déclarations de M. Bernard Pons, ministre de l'équipement du logement des transports et du tourisme, sur le développement de la communauté portuaire de Nantes Saint-Nazaire, la réforme portuaire, la recherche maritime et la formation des travailleurs de la marine marchande, Nantes le 18 novembre 1996.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Bernard Pons - Ministre de l'équipement du logement, des transports et du tourisme

Circonstance : Réunion de travail avec la communauté portuaire de Nantes Saint-Nazaire et baptême du navire de recherche Thalassa, à Nantes le 18 novembre 1996

Texte intégral

Réunion de travail avec la communauté portuaire de Nantes – Saint-Nazaire – Lundi 18 novembre 1996

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs,

J’apprécie de rencontrer sur place, aujourd’hui quelques-uns des intervenants majeurs de la place portuaire de Nantes – Saint-Nazaire. Votre communauté portuaire est le fruit de l’union historique des deux ports de la Loire de Nantes et de Saint-Nazaire.

Votre port bénéficie d’une position centrale sur la façade Atlantique de l’Europe. Il tire sa vitalité d’une puissante métropole au cœur d’une région industrielle, agricole et touristique parmi les plus dynamiques de notre pays, le grand Ouest qui fait vivre douze millions d’habitants et 240 000 entreprises.

La zone industrielle et portuaire de Nantes – Saint-Nazaire concentre des activités de hautes technologies où se remarquent notre industrie aéronautique, notre industrie de la construction navale, notre industrie agro-alimentaire, notre industrie des hydrocarbures, notre industrie électronique, notre industrie du bois, et bien d’autres encore… C’est sur les spécialités et sur leur diversité que se sont alimentés au fil du temps les trafics de votre port et les résultats financiers tout à fait honorables de l’établissement public et des entreprises portuaires.

Quatrième port français, avec un trafic global de 24 millions de tonnes, le port de Nantes – Saint-Nazaire est le premier port de notre façade atlantique.

Son activité a connu, au cours des vingt dernières années, un développement significatif. Le port et sa zone industrielle génèrent 10 milliards de francs de valeur ajoutée et environ 20 000 emplois : 2 000 dans les activités portuaires et je ne savais trop le faire remarquer 18 000 induits directement par les opérations commerciales et manufacturées sur la marchandise en transit.

Le premier trafic spécialisé est celui de l’énergie. 17 millions de tonnes de charbon de pétrole et de gaz liquide, transitent par ce port soit 11 % de l’approvisionnement national. Le pétrole brut est valorisé à l’intérieur de l’enceinte portuaire dans la raffinerie d’ELF de Donges qui représente la moitié de la capacité de raffinage du groupe en France. Le charbon alimente la centrale thermique de Cordemais l’une des plus importantes d’Europe où 600 personnes travaillent. L’unité de vaporisation de Montoir, transforme le gaz liquide en provenance d’Algérie en vue de sa commercialisation sur le réseau de Gaz de France.

Le second trafic spécialisé est celui des produits agro-alimentaires et forestiers avec 4 millions de tonnes. Le parc à bois de Cheviré, est la première place française de négoce du bois, sa réussite montre que l’importation d’un produit brut qui subit une première transformation dans une zone portuaire puis alimente des entreprises de seconde transformation dans toute une région génère une valeur ajoutée très supérieure à celle du simple transit des marchandises que l’on baptise riches.

Je citerai également le trafic d’agrumes, qui prend un essor remarquable et pour lequel la valeur ajoutée portuaire est élevée.

Le troisième trafic spécialisé concerne les véhicules. Les passerelles de routage du port aval, dont une seconde vient d’être inaugurée le 8 novembre dernier, permettent au groupe PSA d’assurer une interconnexion de ses productions et de ses échanges entre ses usines ibériques et bretonnes.

En complément de ces activités spécialisées, le port poursuit la diversification de ses trafics, notamment vers les marchandises diverses.

Je sais que vous vous exercez à veiller à ce que la diversification de vos activités ne s’effectue pas au détriment des trafics spécialisés. Chacun est conscient de ne pas pénaliser le transit des marchandises qui apportent le maximum d’emplois à l’industrie de transformation de la région.

Votre port dispose, incontestablement, d’installations modernes et performantes, aptes à traiter une gamme diversifiée de produits et réparties sur plusieurs sites, entre Nantes et Saint-Nazaire.

Je crois devoir préciser que l’État y consacre d’importants moyens et qu’il continuera de le faire.

Pour assurer durablement son développement, un port de l’importance de Nantes – Saint-Nazaire doit pouvoir disposer d’une réserve d’espaces disponibles.

Comme vous le savez, afin de clarifier les perspectives et les zones d’extension de votre place portuaire, dans le respect des exigences attaches à la protection de l’environnement, j’ai souhaité, en accord avec les collectivités locales regroupées au sein de l’Association communautaire de l’estuaire de La Loire, qu’il soit procédé à une double expertise. Celle-ci a été conduite par Monsieur Essig et par Monsieur Valls.

Au terme d’une analyse détaillée des différents sites possibles d’extension portuaire, les rapports qu’ils ont établis ont clairement convergé en faveur de Donges Est. J’en ai approuvé les conclusions au mois de juillet dernier et le conseil d’administration du port s’est prononcé en ce sens. Ce choix ménage, ainsi, au port une réserve d’espaces. Il doit lui permettre d’assurer un équilibre satisfaisant entre les nécessités de son développement à long terme et la protection du milieu naturel riche que constitue l’estuaire de La Loire.

Une adaptation de l’actuel contrat de plan entre l’État et la région devra traduire la valorisation du site de Montoir. J’y suis favorable, à trois conditions : établir sur le site, dans le respect du service public, une tarification faisant payer à son juste prix le coût du passage portuaire à l’ensemble des marchandises, subordonner toute extension de capacité du terminal à conteneurs à des garanties de rentabilité économique, et ne pas entraîner, pour le budget de l’État, ne charge supplémentaire d’entretien.

Je rappelle qu’en 1990, des opérateurs régionaux réunis en groupement d’intérêt économique avaient proposé que la gestion du terminal conteneur leur soit concédée, sous réserve de respecter les obligations de service public. Pourquoi ne pas relancer ce projet qui à l’époque échoua, les circonstances ne s’y prêtant pas ?

C’est par la diversification de ses trafics et l’établissement de nouveaux pôles d’attraction pour les marchandises spécialisées que le port de Nantes – Saint-Nazaire peut poursuivre son expansion avec succès.

Le développement du port implique qu’une grande attention soit portée à d’autres aspects essentiels.

Vous le savez, l’impérative maîtrise de nos finances publiques nous impose, plus que jamais, de réduire les coûts et de limiter l’effort demandé, d’une manière générale, au contribuable.

L’entretien des chenaux maritimes d’accès au port de Nantes – Saint-Nazaire est, vous ne l’ignorez pas, coûteux pour le budget de l’État. Pour remédier à la détérioration des fonds sur le chenal de Donges, j’ai veillé à ce que soit réalisé, cette année, un effort exceptionnel. Il doit être complété par un effort équivalent du port pour accroître de manière significative la productivité de ses dragages, abaisser l’ensemble des coûts attachés à l’approche des navires, y compris ceux du pilotage et du remorquage, et rechercher des solutions alternatives moins onéreuses.

Je profite de l’occasion qui m’est donnée ici pour mettre l’accent sur l’obligation de la filière portuaire d’être au service de la marchandise. Par filière portuaire j’entends à la fois le port comme entreprise et l’ensemble des professions qui concourent au transit des marchandises. L’ouverture des frontières, la libéralisation des échanges, la mobilité des capitaux et la disparition des monopoles coloniaux ont signé, je vous le rappelle, la fin des trafics captifs et de ses facilités. Tout comportement qui nierait ce constat, n’aurait qu’une conséquence, la désindustrialisation du littoral et la perte des emplois induits par l’activité portuaire dont je répète qu’ils sont beaucoup plus importants en nombre que ceux qui sont directement impliqués dans le transit des marchandises.

Je ne prendrais qu’un exemple mais il est valable pour toutes les industries celui du pétrole. À Bordeaux, il y avait encore, il y a quelques années, trois raffineries, celles de SHELL, d’ESSO et d’ELF. En 1996, il n’y a plus de trafics pétroliers dans ce port. La péréquation des tarifs entre les marchandises diverses et le trafic captif a joué un rôle essentiel pour pénaliser le raffinage français qui s’est vu contraint de quitter la Gironde, face à la concurrence européenne.

Aussi, je tiens à saluer l’effort que votre port vient de faire pour diminuer le coût de passage portuaire du pétrole à Donges. EN 1997, le coût d’escale sera de 10,70 F la tonne de pétrole, inférieur aux 11,50 F constatés au Havre mais supérieur aux 8,40 F facturés à Fos. Voici pour les comparaison franco-française. Avec nos concurrents européens, nous observons un différentiel profond. Rotterdam accueille une tonne de pétrole brut pour 6,50 F et Milford Haven, autre grand port de la façade atlantique de l’Europe pour 3,60 F.

J’invite en conséquence les opérateurs portuaires et les changeurs à entreprendre une réflexion approfondie pour que des mesures adéquates soient prises afin que le service public du transit de la marchandise s’opère dans les conditions commerciales les plus favorables à l’industrie et à l’emploi en France. L’État pour sa part est prêt à jouer un rôle de catalyseur. La réforme portuaire est l’occasion d’aller de l’avant.

Le développement de Nantes – Saint-Nazaire s’inscrira, en effet, comme celui des autres ports, dans la réforme portuaire que le Gouvernement a engagée autour d’une ambition d’excellence. Cette réforme doit mobiliser l’ensemble des acteurs portuaires ; les établissements publics et les professions mais aussi l’État, lui-même, qui se doit d’exercer pleinement ses responsabilités en la matière.

J’en rappellerai, brièvement, les grands axes, tels qu’ils ont été définis par le comité interministériel de la Mer le 4 juillet dernier :
    - mettre l’ensemble des entreprises portuaires en situation de faire face à leur obligation de compétitivité ;
    - développer l’esprit d’entreprise de la filière, dans le respect des missions de service public des ports ;
    - dynamiser et élargir les interventions économiques des ports ;
    - mieux intégrer les ports dans les chaînes logistiques et de transport terrestre ;
    - imposer aux services de l’État qui contribuent au passage portuaire la même démarche d’excellence.
    - enfin, renforcer le tissu économique des zones portuaires.

1. – L’obligation de compétitivité s’impose à l’ensemble des entreprises et professions portuaires pour réduire les coûts de leurs prestations, mettre en place des tarifs vertueux et améliorer en permanence la qualité de service. Sont concernés tout aussi bien le pilotage que le remorquage, le lamanage ou la manutention mais également les prestataires de services associés à la chaîne de transports.

Pour la manutention, tout doit être entrepris pour accélérer le retour au droit commun du travail sur les quais, mettre un terme aux situations anormales et améliorer la transparence des opérations.

L’État favorisera le recours à l’utilisation de l’ensemble des procédures existantes. Le nécessaire recrutement de jeunes dockers implique qu’une solution soit trouvée au problème de l’inaptitude physique d’un nombre élevé de salariés en activité et que se généralisent des dispositifs de formation appropriés, comme il en existe un à Saint-Nazaire.

Outre la réanimation des comités de suivi, mis en place, en 1992, au niveau de chaque port, sera créé, au niveau national, un « observatoire des coûts de passage portuaire ». Je tiens à saluer à ce titre les efforts du port autonome en matière de comptabilité analytique.

2. – Il faut aussi développer l’esprit d’entreprise de la filière portuaire, dans le souci du service public.

Les établissements portuaires doivent se comporter, non pas comme des administrations, mais comme des entreprises au service de leurs clients. Ils doivent agir comme des entreprises à part entière de la chaîne de transport au même titre que toutes les entreprises de la filière portuaire.

Les ports doivent en conséquence disposer d’un outil de gestion d’entreprise adapté. La comptabilité qui leur est applicable, qui est celle des établissements publics, devra être complétée par une comptabilité bilancielle d’entreprise.

3. – Pour dynamiser et élargir les interventions des ports, il convient de renforcer leur intégration dans l’économie nationale. Ils pourront désormais s’associer plus facilement à d’autres entreprises, même en dehors de leur circonscription géographique, pour nouer des partenariats bénéfiques à leur développement.

Il est également souhaitable d’améliorer l’insertion de l’établissement portuaire dans le tissu urbain qui les accueille. C’est l’objet des chartes de place portuaire en cours d’élaboration à Nantes – Saint-Nazaire comme dans les autres ports.

Les synergies entre places portuaires sont aussi à promouvoir. Elles sont préférables à des concurrences de proximité souvent stériles ce qu’ont compris depuis 1966 les Nantais et les Nazairiens et je les en félicite.

4. – L’État, pour sa part, est conscient de ses responsabilités dans la filière portuaire. Il entend, lui aussi, s’engager dans une démarche d’amélioration de l’environnement économique et concurrentiel de nos ports.

Cela passe, d’abord, par une meilleure intégration des ports dans les chaînes logistiques et de transport.

La desserte terrestre de nos ports souffre, malheureusement, d’insuffisances.

Le développement du port de Nantes – Saint-Nazaire exige d’améliorer ses relations avec la région, mais aussi ses jonctions avec les grands réseaux européens.

Dans le domaine routier, la double priorité repose sur la solidarité de la façade maritime par l’autoroute des estuaires et l’accès au cœur de l’Europe, par la liaison autoroutière transversale Nantes – Dijon.

En matière ferroviaire, la modernisation du service sur l’axe Nantes – Tours sera étudiée. Elle facilitera les liaisons entre la place portuaire et les grandes régions économiques de l’Europe et raccorderait la région nantaise à l’axe Bordeaux – Bayonne, vers l’Espagne.

D’une façon générale, je veille à ce que, dans les travaux en cours sur les futurs schémas sectoriels de transport, qui intègrent celui des ports maritimes, les intérêts de nos ports, en matière de desserte terrestre, soient mieux pris en compte que par le passé.

L’engagement de l’État passe, ensuite, par la mobilisation de ses administrations. Les procédures administratives doivent permettre un écoulement fluide des marchandises. L’harmonisation des pratiques et réglementations françaises avec celles des autres ports de l’Union européenne sont en cause. Ceci implique une détermination sans faille dans les négociations communautaires, mais aussi des remises en ordre, ponctuelles, au niveau national.

L’harmonisation et la modernisation des pratiques douanières, telles qu’elles ont été décidées il y a un an, sont bien engagées. D’ores et déjà, plusieurs communautés portuaires ont développé avec les services des douanes des partenariats axés sur la qualité. Six conventions ont été signées entre les douanes et les ports dont une, le 8 octobre dernier, avec le Port de Nantes – Saint-Nazaire. Je m’en félicite.

Bon nombre des propositions destinées à favoriser l’implantation, dans les zones portuaires, d’activités associées au négoce et à la logistique se sont concrétisées : l’élargissement du bénéfice de l’entrepôt franc aux opérateurs privés, la création de nouvelles catégories d’entrepôts fiscaux, la simplification du statut de représentant fiscal.

Je viens de lancer la même démarche avec le ministre de l’agriculture, de la pêche et de l’alimentation pour harmoniser les conditions d’exercice des contrôles vétérinaires et phytosanitaires et réduire les délais de restitution des compensations monétaires à l’exportation.

À l’État, il revient également de tout entreprendre pour renforcer le tissu économique des zones portuaires. C’est l’objet de l’étude que je mène avec le ministre de l’économie et des finances et le ministre chargé de l’aménagement du territoire, pour proposer au prochain comité interministériel de la mer des mesures d’harmonisation des régimes fiscaux de notre filière portuaire avec ceux de la concurrence européenne. C’est aussi l’objet des améliorations du droit domanial des ports que je compte proposer au législateur, en complément de la loi de 1994 visant à conférer des droits réels aux entreprises occupant le domaine public maritime, et dont le second décret d’application est en cours de publication.

Tels sont les axes de la politique portuaire que je souhaite mener, pour redonner à nos ports la place qui leur revient dans la vie économique de la France, et en Europe, au XXIe siècle. La réforme qu’elle appelle repose sur tout un ensemble de mesures : réglementaires et administratives, pour la plupart, ou relevant d’actions pratiques ; un nombre limité d’entre elles sont à caractère législatif.

Cette réforme exige une mobilisation de tous les acteurs et je compte sur l’énergie et la détermination de votre place portuaire pour la mettre en œuvre et entraîner, ainsi, l’essor économique du grand Ouest.

Soyez assurés que, dans cette perspective, je ne ménagerai pas mes efforts pour favoriser le développement de ce grand port qu’est Nantes – Saint-Nazaire.

 

Baptême du Thalassa à Nantes – Saint-Nazaire (lundi 18 novembre 1996)

Madame le commissaire,
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs,

C’est la première fois aujourd’hui depuis que je suis responsable de ce ministère que j’ai l’opportunité et le plaisir de rencontrer sur le terrain les chercheurs de la mer et un des navires que la France arme pour la recherche océanographique. Ce navire permet non seulement d’avancer dans la recherche halieutique mais il démontre la capacité des nations européennes notamment la France et l’Espagne à coopérer dans un domaine où il n’y a pas si longtemps encore seul le bruit des rivalités se faisait entendre. Je tiens à féliciter le chantier Leroux et Lotz qui a réalisé cette unité, sur les spécifications d’Ifremer, pour la qualité de son travail et de sa technologie. Le Thalassa témoigne de la compétence de nos chantiers et de nos ingénieurs. Je suis intimement convaincu qu’il va être un instrument majeur du progrès de notre recherche maritime et à l’origine de nombreuses découvertes.

Je souhaite profiter de cette manifestation pour projeter quelques lignes d’orientation sur la recherche scientifique française dans le domaine maritime à l’aube du XXIe siècle.

La politique des transports ne peut se passer d’une perspective éclairée par les travaux de la recherche scientifique. Je citerai quelques domaines sur lesquels devront s’orienter les efforts de recherche.

En mer, quatre points me paraissent prioritaires. En premier lieu, celui de la sécurité de la navigation et des navires. Tous les efforts visant à assurer une prévention plus efficace des accidents maritimes sont à rechercher. Le concours que doit apporter les organismes de recherche français et en premier lieu l’Ifremer aux travaux de la France mène au sein de l’Organisation maritime internationale et également dans les instances communautaires est à promouvoir.

Le deuxième point est celui de la météorologie maritime. À la fois tuteur de Météo France et d’Ifremer, j’aspire à ce que les études communes entre ces deux établissements se développent et se complètent. La meilleure prévision météorologique ne peut naître que d’une intime conjonction entre les sciences atmosphériques et les sciences océanographiques. Il s’agit de toujours mieux répondre à la demande de prévisions météorologiques dont les activités humaines ont tant besoin.

Troisième point, la productivité du navire reste un objectif permanent pour que le transport maritime soit toujours plus performant tant au plan économique qu’écologique. Il est indispensable que l’entreprise française, l’armateur comme le chantier naval, soit à même de se placer au plus haut niveau avant nos concurrents. Les navires à grande vitesse tels que ceux produits par le chantier constructeur du Thalassa ou les navires méthanier à haute performance que les Chantiers de l’Atlantique lancent à Saint-Nazaire montrent la voie. Mais l’effort de recherche français reste insuffisant dans de nombreux domaines comme ceux de la propulsion, des dispositifs de contrôle des navires et de ceux relatifs au traitement de la marchandise. Notre pays doit prendre exemple sur les Nations asiatiques et s’assurer d’une veille technologique aujourd’hui encore peu organisée.

Quatrième point, l’ergonomie du travail dans la conduite des navires est un domaine de recherche particulièrement inexploré. Les principaux travaux entrepris en la matière en France relèvent de l’organisation du travail dans les sous-marins nucléaires. Il s’agit aujourd’hui d’étendre les études aux conditions de travail dans l’armement au commerce ou dans l’armement à la pêche. Pour ces derniers, il en va notamment de la diminution des accidents du travail. Le Thalassa, j’en suis convaincu saura développer de nouvelles méthodes donnant aux métiers de la pêche un plus grand confort et surtout une plus grande sécurité.

La recherche maritime concerne également le littoral. Deux points sont à approfondir. Le premier est de développer une approche intégrée du milieu côtier et de son exploitation. J’invite l’Ifremer à éclairer le Gouvernement sur les conditions du meilleur équilibre entre les objectifs d’aménagement et les impératifs de protection du littoral.

Second point, les techniques off-shore développées dans le secteur parapétrolier et par les instituts de recherche nationaux Ifremer et l’Institut français des pétroles ont montré leurs qualités à l’épreuve. Transférer ces technologies notamment en matière de matériaux et de structures vers des applications littorales tels que le balisage ou l’ingénierie portuaire sont de nature à donner une seconde dimension à l’industrie française spécialisée.

De la recherche à l’enseignement, il n’y a qu’un pas. Je tiens à saluer les représentants et élèves de l’enseignement maritime ici présents. Espérons que certains de ces derniers aient l’occasion d’embarquer sur ce navire.

Notre marine marchande va connaître un renouveau grâce à la politique de soutien fiscal que le Gouvernement lui apporte. Quatorze dossiers d’acquisition de navires quirataires ont d’ores et déjà été déposés et sont en instruction. Nos navires ont besoin en nombre suffisant de gens de mer hautement qualifiés, de navigants compétents sur qui reposent la sécurité de la navigation maritime.

L’évolution des besoins, les mutations technologiques, l’internationalisation du marché du travail maritime, m’ont conduit à engager une vaste réflexion appelée à déboucher très bientôt, sur une modernisation de la formation maritime.

Cette approche volontaire concerne toutes les branches des activités maritimes : commerce, pêches maritimes et cultures marines.

Cette adaptation touche toutes les filières de formation qu’il s’agisse des officiers ou des équipages.

Cette démarche a pour objectif de répondre aux nécessités d l’économie maritime en offrant aux gens de mer un niveau de qualification à même de leur donner les meilleures chances de trouver un emploi à l’intérieur comme à l’extérieur de nos frontières.

Les navigants s’interrogent non sans raison sur l’avenir des brevets français afin qu’ils soient reconnus sans contestation possible dans tous les ports du monde et par tous les employeurs.

La convention internationale de 1978 relative « aux normes de formation des gens de mer et à la délivrance de brevets et de veille » a été notablement révisée en 1995. Elle concerne les marins du commerce. Elle entrera en vigueur le 1er février 1997. Parallèlement une convention similaire portant sur les normes de formation à la conduite du navire et à la délivrance des brevets pêches a vu le jour. Elle entrera en vigueur peu après.

Nous devons intégrer ces deux conventions dans notre droit avec le souci, je le répète : que la qualification des brevets français soit incontestablement reconnue.

Je sais combien les officiers de la marine marchande sont attachés à la polyvalence. Je demande en conséquence que l’on examine un dispositif de transcription du système international dans notre filière de formation maritime des officiers qui confirme la polyvalence des diplômes. Cette polyvalence devrait s’accompagner à la fois du maintien des sources de recrutement actuel qui ont fait leurs preuves et de la délivrance de l’ensemble des brevets reconnus par l’Organisation maritime internationale.

Le cursus international doit s’appliquer également aux élèves des Écoles maritimes et aquacoles.

Je tiens à rappeler que le Comité interministériel de la mer du 4 juillet dernier a décidé d’intégrer l’enseignement maritime secondaire dans le grand service public de l’éducation maritime nécessaire à la France.

Les travaux entrepris devraient permettre de déboucher sur une nouvelle organisation pour la rentrée scolaire 1997.

L’occasion est donc là de redonner au réseau de formation son unité, de valoriser ses potentialités et de renforcer son efficacité.

Je constate le bon déroulement de la dernière rentrée scolaire. Les Écoles nationales ont accueilli 20 % d’élèves supplémentaires en première année de capitaine de 1re classe. Les effectifs des Écoles maritimes et aquacoles se sont accrus passant de 1 350 l’an dernier et à 1 500 cette année.

De nouvelles formations ont été ouvertes pour répondre aux besoins de la profession. Une réflexion permanente s’attache à adapter cet enseignement maritime secondaire à la réalité de l’emploi. Le dialogue fécond État-région a permis de définir des orientations conformes aux spécificités locales.

Notre réseau maritime est dense : 4 Écoles nationales de la marine marchande, 12 Écoles maritimes et aquacoles.

Nantes peut s’enorgueillir de compter l’une de ces écoles nationales et l’une de ces écoles maritimes et aquacoles.

Enfin, Madame le commissaire, je ne voudrais pas ne pas évoquer en votre présence la question de la surveillance des pêches dans la zone économique européenne.

La France est le pays de l’Union européenne qui avec 1 million de km2 d’eaux communautaires à contrôler, a à faire sous sa responsabilité l’effort de surveillance le plus important au sein de l’Union alors que notre pays ne prélève que 10 à 12 % des ressources européennes.

Mon ministère est en charge de la responsabilité de la surveillance des pêches. Il met en œuvre une flotte de 28 vedettes et d’une cinquantaine d’embarcations armées par le personnel des affaires maritimes.

L’union européenne participe financièrement aux dépenses d’investissement et de formation engagées par la France à ce titre. Au cours des dernières années, cette participation a accompagné notre effort national.

Je viens de décider et j’ai le plaisir de vous l’annoncer, Madame le commissaire, d’acquérir et d’armer un patrouilleur de 46mètres. Il viendra renforcer la couverture à longue distance du golfe de Gascogne, permettant à la France d’apporter une réponse adaptée aux obligations générés par l’entrée en vigueur des nouvelles règles communautaires de contrôle des pêches. Il permettra également, je tiens à le rappeler, à compléter par un navire de haute mer les moyens dont dispose mon ministère pour assurer les missions essentielles de sauvetage en mer et d’assistance à la pêche. Ce navire disposera en effet d’une unité de soin, pourra embarquer à la demande un médecin et permettra des opérations héliportées d’évacuation sanitaire.

Cette acquisition s’inscrit dans la logique de la modernisation que j’engage pour accroître l’efficacité de mes services qui a conduit à la création des unités littorales des affaires maritimes, et qui va doter de nouveaux moyens plus performants les CROSS.

Pour ces raisons, Madame, j’appelle votre attention sur l’importance du soutien financier de la commission qui est la juste contrepartie de l’effort réalisé par la France. Il y va de la bonne application d’une politique de contrôle des pêches, devenue au fil du temps un élément majeur d’une saine gestion de la ressource halieutique, elle-même garante de la préservation de l’emploi de nos marins-pêcheurs.

Avant que le Thalassa ne prenne la mer pour entreprendre le programme de recherche qui lui a été assigné, je tiens à saluer l’équipage, les chercheurs qui vont embarquer et son commandant à qui je souhaite bonne mer et bonne recherche.