Texte intégral
Je suis tout particulièrement heureux d’être parmi vous aujourd’hui pour signer la convention créant l’Agence régionale de l’hospitalisation de Midi-Pyrénées.
Je tiens à saluer l’ensemble des responsables de Toulouse et de sa région dont l’histoire montre l’excellence de la tradition médicale et hospitalière et l’attachement au service public.
Cette signature nous permet tout d’abord de montrer que la réforme de l’hospitalisation fait l’objet d’une mise en œuvre cohérente et rapide.
L’ordonnance prévoyait en effet que les agences régionales devraient exercer leurs nouvelles compétences avant le mois de juin 1997 : la plupart seront opérationnelles bien avant cette date. Le transfert des compétences pourra avoir lieu en Midi-Pyrénées dès le 1er mars 1997.
La deuxième chose que je souhaiterais souligner en introduction est que l’impulsion est donnée de manière décentralisée et qu’après les conférences régionales de santé, la mise en place des agences régionales confirme cette dynamique : c’est un atout indispensable pour mieux gérer ensemble notre système de santé.
Je souhaiterais insister sur quatre points :
1. La mise en place des agences est l’occasion de réaffirmer les grands objectifs de l’hospitalisation à la française ;
2. Elle permet de clarifier les responsabilités ;
3. Elle privilégie une démarche contractuelle ;
4. Elle favorise l’ouverture des établissements sur leur environnement territorial.
I. Des objectifs réaffirmés
C’est aujourd’hui, je crois l’occasion donnée au ministre de la Santé de rendre hommage, hommage solennel, à la grande tradition hospitalière française, ici, à Toulouse.
Les hasards de la langue latine et de la langue française ont fait de « hospes », l’hôte. L’hôpital, c’est d’abord le lieu des hôtes. Hospitalier renvoie aussi bien à l’accueil chez soi qu’a la fonction hospitalière. Il est bon, à mon sens, de le rappeler à nos concitoyens. Longue serait l’histoire - et vous la connaissez mieux que moi - des maladreries, des hospices, des hôpitaux, où l’on a progressivement accueilli puis soigné, et des entreprises d’aujourd’hui où l’on pourrait parfois risquer de faire de la haute technicité en oubliant l’hôte.
De la charité à l’enfermement, de la compassion au soin, l’histoire de l’hôpital, parfois contradictoire, est encore à écrire. Les travaux certes ne manquent pas. Mais, au-delà de l’institution, de son évolution, du statut du soignant et de celui du souffrant, il faut témoigner de cette histoire du regard de l’homme debout sur l’homme couché.
Il y a sans doute là pour nous, civilisations d’aujourd’hui, beaucoup à méditer.
Mes fonctions me donnent souvent l’occasion de rendre l’hommage qui lui est dû à ce que vous me permettrez d’appeler la communauté hospitalière. Elle est pour moi très vaste et surtout à la fois diverse et solidaire.
J’y comprends ses acteurs, ses financeurs, ses concepteurs. J’y comprends bien sûr avant tout le malade. Cette chaîne qui unit l’ensemble des professions de santé et les multiples aspects de la maladie, la souffrance et le soin est sans aucun doute ce qui donne à l’humanité son sens le plus universel et le plus intime.
C’est d’abord pour moi l’occasion de réaffirmer les principes de l’hospitalisation. C’est-à-dire, l’accès de tous à l’hôpital, la possibilité offerte aux patients de choisir leur mode d’hospitalisation entre établissement public de santé et clinique privée. C’est l’unité et l’autonomie des établissements, c’est enfin leur spécificité.
C’est aussi l’occasion de rappeler les réalités concrètes de l’hôpital. Ces réalités proviennent d’abord d’un héritage qui fait que les hospices de la France d’ancien régime sont progressivement devenus des lieux où l’on soigne, dans un maillage territorial qu’aucun pays ne connaît, mais avec tous les problèmes que cela pose. Ces réalités proviennent enfin d’une construction juridique tout à fait originale et unique dans notre droit qui fait que l’hôpital est à la fois un établissement public local dont les personnels sont soumis au rattachement territorial mais sous statut national, dont les médecins font l’objet d’une nomination centralisée et dont le financement provient en majeure partie de l’assurance maladie.
On le voit, la situation hospitalière française est complexe et diverse. Mais, ses objectifs sont clairs. Il est indispensable que nous ne perdions pas de vue l’essentiel. Notre volonté tient en deux mots, l’excellence du soin et l’accès de tous, et ce de façon durable. Privilégier l’une au détriment de l’autre est, à mon sens, manquer aujourd’hui à la mission hospitalière, et sans doute perdre demain et l’une et l’autre. Le juste soin n’est pas un vain mot, il est le moyen de concilier ses différents objectifs, mais il ne s’impose pas. Il se définit dans un contrat librement consenti.
II. Les agences sont dans ce contexte le moyen de clarifier les responsabilités de chacun
L’agence régionale d’hospitalisation, c’est d’abord le moyen de constituer une autorité de décision unique et cohérente, compétente tant pour l’hospitalisation publique que pour l’hospitalisation privée. Il s’agit ainsi de remédier à la dispersion des responsabilités que nous connaissions entre les différentes compétences dévolues à l’État et à l’assurance maladie.
Cette cohésion s’affirme dans la composition même de l’agence, puisque cette autorité exercée par un directeur nommé en Conseil des ministres associe les services de l’État et ceux de l’assurance maladie.
La agences sont constituées sous la forme de groupements d’intérêt public entre l’État et l’assurance maladie : la direction de l’agence est assurée par une commission exécutive, dont le président est le directeur de l’agence et les vice-présidents sont le directeur régional des affaires sanitaires et sociales et le directeur de la caisse régionale d’assurance maladie.
Je tiens à cet égard à souligner le parti qui a été choisi en Midi-Pyrénées. L’organisation de l’agence repose en effet sur une équipe pluridisciplinaire, puisqu’elle comprendra des cadres de l’assurance maladie, un fonctionnaire de DDASS, un sous-préfet, un médecin, un administrateur de l’INSEE et un directeur d’hôpital.
Ce regroupement de compétences diverses permettra, sans aucun doute, d’avoir un œil neuf mais autorisé sur une structure et des mécanismes complexes. Par ailleurs cette complémentarité permet le respect de l’organisation de chacune des parties avec une réelle capacité de dialogue et d’impulsion. Ces deux qualités sont à mes yeux essentielles pour le bon fonctionnement des agences. Il s’agit en effet de mettre en place une répartition plus équitable des ressources entre établissement de santé en privilégiant les démarches contractuelles.
L’agence, c’est un interlocuteur disponible, qui apporte à chacun la garantie que toute décision prise, le sera sur des critères homogènes et cohérents.
Par ailleurs, le directeur régional des affaires sanitaires et sociales, qui, comme le directeur de la caisse régionale d’assurance maladie, sera vice-président de l’agence, veillera à faire prendre en compte par celle-ci les orientations de la conférence régionale de santé.
Cette conférence, institutionnalisée par l’ordonnance relative à la maitrise médicalisée des dépenses de soins, et qui concerne pleinement le monde hospitalier, se prononce en effet sur les priorités sanitaires de la région et est organisée par la DRASS. L’agence régionale de l’hospitalisation doit lui faire rapport chaque année sur la prise en compte de ces priorités dans son action.
Dotée d’une capacité d’expertise résultant de compétences et de moyens jusqu’alors dispersés, elle sera compétente tant pour l’hospitalisation publique que privée, et s’attachera à promouvoir une approche régionale des problèmes de santé ; car, si ses préoccupations doivent être financières, elle ne doit pas pour autant négliger les priorités de santé publique.
Il faut que les agences régionales disposent d’une véritable boite à outils pour piloter les nécessaires restructurations du tissu hospitalier, parmi lesquels l’outil contractuel.
III. Une méthode nouvelle
Cette notion de contrat est essentielle. Elle recouvre une double réalité, les contrats d’objectifs et le contrat interne à l’établissement.
Les contrats d’objectifs seront élaborés et négociés par référence au SROSS. Ils s’appuieront également sur les projets des établissements : projet médical et projet de soins infirmiers. Ils obligeront chaque établissement à afficher des priorités, à les expliciter et à définir les modalités de leur mise en œuvre dans un cadre pluriannuel.
Le contrat ne se contentera pas de déterminer les orientations stratégiques des établissements. Il devra s’intéresser aux objectifs d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, et prévoir les modalités de mise en œuvre des orientations de santé publique.
Il précisera les différentes transformations internes auxquelles l’établissement s’engage pour la mise en œuvre de ses choix stratégiques, car la capacité d’un établissement à prendre des engagements sur des objectifs à moyen terme est subordonnée non seulement au niveau des moyens dont il dispose, mais aussi et surtout à son aptitude à les redéployer.
Le contrat devra à ce titre mieux répartir les ressources en fonction de l’activité constatée. Il s’appuiera sur les travaux du PMSI pour prévoir les moyens sur une base pluriannuelle.
La contractualisation, c’est aussi un esprit, un mode de relations. C’est pourquoi, le contrat doit faire une large place à la concertation et au dialogue interne ; il doit être à l’origine d’une nouvelle dynamique au sein des établissements qui conduira à mobiliser l’ensemble de la communauté hospitalière autour d’objectifs partagés car négociés.
Cette implication de l’ensemble des forces vives de l’hôpital, administration, corps médical, soignants, est indispensable à la réussite de cette politique contractuelle, car, aucun des échelons dans l’organisation interne ne peut rester à l’écart des changements.
C’est pourquoi, il y aura également des contrats internes.
Dans tous les pays, la maîtrise des dépenses de santé a placé au premier plan la modernisation des outils de la gestion hospitalière. Celle-ci passe par le développement d’une logique managériale, l’implication des médecins, et le rapprochement entre le niveau de la responsabilité clinique et celui de la responsabilité budgétaire.
La recherche d’une nouvelle organisation permettant l’implication de tous autour des objectifs contenus dans le contrat a conduit à promouvoir les centres de responsabilité à l’hôpital.
Ils sont à mes yeux le gage d’une gestion moderne et efficace. Ils impliquent en retour une véritable évaluation des résultats.
Ces centres pourront être créés à l’initiative des équipes médicales et paramédicales. L’esprit de l’ordonnance n’est pas celui d’un simple suivi budgétaire, il doit aller jusqu’à la reconnaissance dans l’organisation qu’un médecin peut être gestionnaire d’un certain nombre de moyens. C’est pourquoi de véritables délégations de signature pourront leur être consenties.
Il ne s’agit pas de renforcer les féodalités dont l’hôpital a tant de mal à se départir, ni de bouleverser les équilibres institutionnels existants, mais de créer les conditions d’une véritable responsabilisation économique des acteurs, jusqu’alors insuffisante.
C’est également dans le souci de permettre aux acteurs de terrain de s’organiser librement, sans pour autant accepter l’immobilisme, qu’ont été conçues les dispositions favorisant l’adaptation du tissu hospitalier local.
L’objectif est bien d’inciter les établissements à inscrire leur stratégie à moyen terme à l’intérieur des réseaux ou de communautés d’établissements.
Ces dispositions permettront aux professionnels, selon des modalités juridiques qu’ils arrêteront eux-mêmes, de choisir le mode de coopération qui leur semble le plus adapté pour répondre à leurs missions.
IV. Favoriser l’ouverture des établissements de santé sur leur environnement
La réforme permet enfin de favoriser l’ouverture des établissements de santé sur leur environnement. Il s’agit en effet de renforcer leur participation à une réponse globale du système de soins aux besoins de santé de la population.
Les coopérations entre établissements doivent tout d’abord se développer. Tous les établissements publics doivent dans les trois ans à venir inscrire leur développement dans une communauté d’établissements dans le cadre du secteur sanitaire.
Ce principe permet de développer toutes les coopérations possibles entre établissements, tout en préservant des dispositifs souples et adaptés aux particularités de chaque situation. Par ailleurs, une nouvelle modalité de coopération entre les établissements publics et privés est rendue possible : le groupement de coopération sanitaire permet aux hôpitaux et aux cliniques privées de réaliser des activités de soins dans les mêmes locaux et avec des moyens communs.
L’ouverture de l’hôpital, au-delà même des formules d’alternatives à l’hospitalisation qu’il faut promouvoir, doit également s’effectuer vers la médecine de ville.
Les établissements de santé sont donc incités à développer des réseaux de soins avec des praticiens libéraux. La coopération ville-hôpital doit également trouver une traduction au sein des structures de pilotage, afin que l’offre de soins soit considérée d’une manière globale : ainsi, les agences régionales de l’hospitalisation et les futures unions régionales de caisses d’assurance maladie, créées par l’ordonnance sur l’organisation de la sécurité sociale, verront institutionnaliser leur coopération.
Nous allons renforcer les formes de coopération entre les secteurs public et privé.
C’est dans cet esprit qu’a été précisée une nouvelle formule de coopération hospitalière : le groupement de coopération sanitaire, qui permettra aux établissements de santé publics et privés qui le souhaitent, de partager certains moyens médicotechniques, notamment des blocs opératoires, ou des services d’imagerie médicale.
De nombreux projets n’avaient pu aboutir à ce jour en l’absence de base légale.
Là encore, nous nous inspirerons des expériences de terrain pour garantir le maximum de souplesse et d’efficacité à ces nouvelles structures, dont il ne fait nul doute qu’elles seront de nature à rationaliser et à améliorer l’offre de soins.
Par ailleurs, compte-tenu de l’importance qu’ont pris les enjeux sociaux à l’hôpital, un lien fort doit être préservé et développé entre les établissements de santé et les établissements médico-sociaux, et, plus généralement encore, l’ensemble des dispositifs sociaux. La participation étroite au travail des agences régionales de l’hospitalisation des directeurs départementaux des affaires sanitaires et sociales permet d’assurer ce lien essentiel.
Grâce à l’ensemble de ces dispositifs, l’ambition de la présente ordonnance est de parvenir à concilier l’accès de tous à des soins de qualité et la maîtrise de la croissance des dépenses hospitalières.
En conclusion, il faut remercier Monsieur Alain Bidou, préfet de la région Midi-Pyrénées et le DRASS nouvellement nommé, Madame Darde. Il convient de remercier tout particulièrement, pour leur implication lors de cette phase préparatoire le directeur de la CRAM, Monsieur Lages et Monsieur Bécot, DRASS intérimaire. Et saluer Xavier Patier.