Interview de M. Marc Vilbenoit, président de la CGC, à France 2 et conférence de presse de la CFE CGC sur la rentrée sociale, notamment la réforme fiscale, le logement, la protection sociale, l'emploi, l'enseignement et l'insertion professionnelle des jeunes, Paris le 24 septembre 1996.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Conférence de presse de rentrée de la CFE CGC le 24 septembre 1996

Média : France 2 - Télévision

Texte intégral

Date : 24 septembre 1996


conférence de presse de la CFE CGC

Une conjoncture de rentrée maussade

La CFE-CGC se félicite que le gouvernement ait, à la suite de son intervention, accepté de revenir sur la suppression envisagée de l’abattement de 20 % pour les salariés. Elle note également avec satisfaction que la demande qu’elle a formulée à maintes reprises, à savoir la baisse immédiate du premier tiers prévisionnel, a été entendue. C’est à son sens, le seul moyen d’accroître le pouvoir d’achat et de relancer ainsi la consommation et donc la croissance.

La réforme fiscale engagée par le gouvernement a le mérite d’ouvrir la voie à un allègement de la taxation qui pèse sur les revenus du travail, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Cependant, l’effort consenti en termes de recettes ne bénéficie pas particulièrement aux familles à revenus moyens, et aux professions de l’encadrement, mais est ciblé d’une manière particulièrement favorable sur les catégories à hauts revenus (tranche marginale supprimée) et à bas revenus (suppression de la décote). De nombreuses professions de l’encadrement se voient également retirer une partie de leurs revenus liés aux abattements forfaitaires.

 En outre, si la suppression de la décote crée une tranche à taux zéro qui profite à tous les revenus, elle exonère du paiement de l’impôt environ 1,5 million de familles supplémentaires, ce qui ne va certes pas dans le sens d’une correction de l’anomalie française, c’est-à-dire la faiblesse du nombre de contribuables. L’impôt sur le revenu risque au contraire de devenir « l’impôt de l’encadrement », ce qui en verrouillera toute réforme ultérieure.

Enfin, l’effort consenti est atténuée par l’augmentation des prélèvements indirects d’une part, et par la suppression d’incitations fiscales qui profitaient essentiellement à l’encadrement (réduction d’impôt pour intérêts d’emprunt pour l’acquisition de logement par exemple) d’autre part. La CFE-CGC rappelle qu’elle a fait des propositions pour rendre l’impôt sur le revenu plus équitable : améliorer l’aide à la famille en déplafonnant le quotient familial et en le modulant suivant l’âge de l’enfant pour tenir compte de son coût réel pour la famille, favoriser la propriété d’une résidence familiale, entre autres. La mise en place de ce type de mesures permettrait de corriger les principaux points qui posent problème dans la réforme fiscale.

La réforme fiscale

La CFE-CGC se félicite que le gouvernement ait, à la suite de son intervention, accepté de revenir sur la suppression envisagée de l’abattement de 20 % pour les salariés. Elle note également avec satisfaction que la demande qu’elle a formulée à maintes reprises, à savoir la baisse immédiate du premier tiers prévisionnel, a été entendue. C’est à son sens, le seul moyen d’accroître le pouvoir d’achat et de relancer ainsi la consommation et donc la croissance.

La réforme fiscale engagée par le gouvernement a le mérite d’ouvrir la voie à un allègement de la taxation qui pèse sur les revenus du travail, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Cependant, l’effort consenti en termes de recettes ne bénéficie pas particulièrement aux familles à revenus moyens, et aux professions de l’encadrement, mais est ciblé d’une manière particulièrement favorable sur les catégories à hauts revenus (tranche marginale supprimée) et à bas revenus (suppression de la décote). De nombreuses professions de l’encadrement se voient également retirer une partie de leurs revenus liés aux abattements forfaitaires.

En outre, si la suppression de la décote crée une tranche à taux zéro qui profite à tous les revenus, elle exonère du paiement de l’impôt environ 1,5 million de familles supplémentaires, ce qui ne va certes pas dans le sens d’une correction de l’anomalie française, c’est-à-dire la faiblesse du nombre de contribuables. L’impôt sur le revenu risque au contraire de devenir « l’impôt de l’encadrement », ce qui en verrouillera toute réforme ultérieure.

Enfin, l’effort consenti est atténué par l’augmentation des prélèvements indirects d’une part, et par la suppression d’incitations fiscales qui profitaient essentiellement à l’encadrement (réduction d’impôt pour intérêts d’emprunt pour l’acquisition de logement par exemple) d’autre part. LA CFE-CGC rappelle qu’elle a fait des propositions pour rendre l’impôt sur le revenu plus équitable : améliorer l’aide à la famille en déplafonnant le quotient familial et en le modulant suivant l’âge de l’enfant pour tenir compte de son coût réel pour la famille, favoriser la propriété d’une résidence familiale, entre autres. La mise en place de ce type de mesures permettrait de corriger les principaux points qui posent problème dans la réforme fiscale.

Évolution des salaires : le personnel d’encadrement de nouveau durement touché

La politique salariale actuelle n’est ni incitative pour les salariés, ni dynamique pour l’activité. En dépit de la reprise économique amorcée en 1994 et poursuivie en 1995, les salaires n’ont que peu augmenté en 1995. Pour preuve, en 1995, le salaire annuel net de prélèvement à la source (cotisations sociales et CSG) des salariés du secteur privé et semi-public n’a augmenté que de 0,4 % en termes réels. Mais le personnel d’encadrement est une nouvelle fois plus durement touché : le pouvoir d’achat des techniciens et agents de maîtrise a stagné tandis que celui des cadres a baissé de 0,7 point ! Cette baisse fait suite à une perte de pouvoir d’achat du personnel d’encadrement de 1,5 % en 1994 !

Quant à l’évolution des revenus dans la fonction publique, l’indice de traitement mensuel brut de base des fonctionnaires titulaire de l’Etat n’augmente plus. Or, la déflation menaçante depuis quelques mois est devenue réalité : les prix, la production et les revenus ont baissé au deuxième trimestre 1996.

Alors que le chômage atteint des niveaux plus préoccupants que jamais, on voit mal comment il pourrait refluer en l’absence de croissance. Faut il rappeler que le revenu demeure le principale déterminant du niveau de la consommation qui représente lui-même 60 % du total de l’activité économique ? Doit-on répéter que le niveau de la rémunération détermine les débouchés pour les entreprises, elles-mêmes créatrices d’emploi ? Il est grand temps que ceux qui mettent en œuvre les politiques salariales tiennent compte de ces enchaînements si on ne veut pas que la situation sur le marché de l’emploi, déjà dramatique se dégrade, encore.

C’est pourquoi, la CFE-CGC demande la mise en œuvre d’une nouvelle politique salariale dynamique et motivante. Une telle politique qui passe par la réouverture immédiate des négociations salariales dans le secteur public comme dans le secteur privé, est seule susceptibles d’inverser la tendance déflationniste.

La CFE-CGC souhaite également que les politiques salariales mises en place ne soient pas de plus en plus confiscatoires pour le personnel d’encadrement. Alors qu’elle devrait se féliciter de l’accroissement des primes distribuées au personnel d’encadrement au titre des périphériques du salaire, elle redoute que cet accroissement se substitue aux augmentations de salaire proprement dit. Or, l’encadrement est déjà sollicité de façon de plus en plus pesante au nom de la solidarité et parce que les besoins sociaux sont importants. N’oublions donc pas que la rémunération est directement liée aux compétences et aux qualifications, et donc que les différences sont non seulement équitables mais facteurs de progrès global.

Redéfinir une politique en faveur du logement

La construction de logements neufs a reculé de 8 % au premier semestre 96 par rapport aux six premiers mois de l’année 1995.

Dans ce contexte, la barre fatidique de 300 000 logements construits par an permettant de maintenir l’activité du bâtiment ne sera sans doute pas franchie en 1996, où les chiffres sur les douze derniers mois, donc en rythme annuel, révèlent que seulement 273 000 logements ont été mis en chantier, soit un recul de 8,9 % par rapport à la même période de l’année dernière. Et une fois de plus, le bâtiment créateur d’emplois va devoir diminuer ses effectifs pour 1996.

Face à cette situation, plusieurs mesures ont été prises depuis 1995. Elles devaient s’attacher avant tout à relancer la construction de logements par des investissements privés et par des incitations fiscales significatives.

Pourtant, selon la CFE-CGC, toutes ces dispositions ne semblent pas suffisantes pour relancer la construction et ne s’inscrivent pas dans une politique globale du secteur du logement, mais dans une succession de mini-plans de relance. Or, toute politique dans le secteur du logement doit se concevoir dans le long terme.

Les récentes mesures proposées dans la réforme fiscale ne renforcent pas la volonté d’une politique globale du secteur du logement.

Ainsi, la suppression de la déduction des intérêts d’emprunt pour les accédants à la propriété ne concoure pas à la relance du secteur et pénalise fortement l’encadrement.

D’autre part, le prêt à taux zéro ne pourra agir sur la relance de l’activité du bâtiment et ne résoudra le problème de la crise du logement que si les populations intermédiaires peuvent avoir accès à cette mesure incitatrice, notamment en corrigeant à la hausse les plafonds de revenus impartis et les délais de remboursement.

Dans ces conditions, l’accession à la propriété sera facilitée. N’oublions pas qu’elle constitue avant tout un enjeu de société plutôt qu’un enjeu économique et social. La CFE-CGC pèsera en ce sens dans les mois à venir.

L’essentiel reste à faire

Les nouveaux déficits du régime général de la sécurité sociale annoncés pour 1996 et 1997 (plus de 80 milliards cumulés) renforcent l’urgence des réformes. Beaucoup a déjà été fait dans le domaine de la gestion des risques (nouvelles répartitions des responsabilités entre les acteurs du système) et de la maîtrise des dépenses de santé.

C’est pourquoi la CFE-CGC n’acceptera pas que de nouveaux sacrifices soient demandés aux assurés sociaux aussi bien sous la forme de déremboursements que de prélèvements nouveaux. Nous sommes prêts à accepter que les déficits 96-97 soient absorbés par la CADES dont l’existence serait prolongée. Mais encore faut-il que le gouvernement s’engage vers une véritable réforme du financement de la sécurité sociale portant aussi bien sur la SCG que la participation des entreprises.

Vers une CSG élargie et déductible

L’instauration progressive d’un régime universel d’assurance maladie entraînant l’affiliation de la totalité de la population selon un seul critère de résidence doit s’accompagner d’une réforme du financement de la branche maladie.

Pour la CFE-CGC, cette réforme doit reposer sur le transfert progressif d’une partie des cotisations sociales vers une CSG élargie et s’accompagner d’une déductibilité fiscale. En effet, la contribution pour le remboursement de la dette sociale (RDS) comme la CSG ont la même philosophie que les cotisations : elles servent à financer des dépenses de protection sociale.

La CFE-CGC souhaite, en outre, que l’on retienne une assiette plus large pour la CSG : il faut à terme harmoniser les champs d’application des cotisations et des différents prélèvements (tels que le RDS ou la CSG). Une seule référence simplifierait l’ensemble du dispositif, le rendrait plus lisible et plus acceptable.

En ce qui concerne le transfert des cotisations, et dans la mesure où la cotisation maladie sur les revenus de remplacement a été rajustée, la CFE-CGC souhaite que ce transfert s’applique également aux revenus de remplacement. On ne peut pas dire aux retraités et aux chômeurs « vous allez payer plus de cotisations maladie et vous allez en plus payer un alourdissement de la CSG pour réduire les cotisations des actifs ».

La CFE-CGC souhaite un calendrier clair et précis sur ce transfert et n’acceptera pas que, même sur une courte période, se superposent une augmentation de la CSG avec un maintien en l’état des cotisations maladie.

Réforme des cotisations patronales

En ce qui concerne la part patronale des cotisations, bien que le discours sur les coûts salariaux et les comparaisons internationales soit pour le moins sujet à caution, la CFE-CGC prône le transfert vers des éléments du style valeur ajoutée ou excédent brut d’exploitation, transfert qui aura au moins le mérite de mettre le patronat devant ses responsabilités en matière d’emploi et de rétablir un équilibre entre entreprises de main d’œuvre et entreprises capitalistiques pour le financement de la protection sociale.

Là aussi nous attendons que le gouvernement tienne ses engagements lui qui avait parlé « de la nécessité d’une réforme des cotisations patronales dont l’assiette devra être diversifiée en intégrant par exemple la notion de valeur ajoutée de l’entreprise ».

Bien sûr, il convient d’être conscient des difficultés que cela implique dans la détermination des bases et des taux mais aussi compte tenu du caractère variable de ces éléments qui n’est pas forcément compatible avec la régularité des dépenses.

Assurance maladie : transformer les discours en méthode

Conférence de la santé, nomination des directeurs des Agences régionales de l’hospitalisation, publication de décrets notamment sur le contrôle médical et les filières de soins, signature d’un contrat d’objectifs et de moyens à la CNAM : la réforme du système de santé entre dans sa phase concrète.

Mais pour la CFE-CGC, la résorption du déficit de l’assurance maladie, évalué à 32 milliards en 1996, par la Commission des comptes de la sécurité sociale, ne saurait se faire en quelques mois.

Un meilleur partage des gains de productivité en faveur de l’emploi et des salaires, une meilleure rentrée des recettes associés à la maîtrise des dépenses sont un passage obligé vers un système de sécurité sociale consolidé.

Passer du court terme à une méthode axée sur le long terme

La CFE-CGC refuse d’entrer dans une logique de maîtrise purement comptable qui viserait à abaisser le niveau des prestations en espèces. C’est pourquoi nous nous sommes opposés à la mise sous condition de ressources du capital décès.

Par contre, certaines dispositions contenues dans le plan d’économies voté par la CNAM en septembre dernier contiennent les prémices d’une action de plus longue haleine : la réforme de la nomenclature et le recours plus fréquent aux médicaments génériques. Ces deux mesures complétées par la généralisation et l’amélioration du codage des actes mais aussi par une diffusion large des systèmes d’information (carte SESAME pour les assurés sociaux et la carte des professionnels de santé) sont, pour la CFE-CGC, les instruments d’une meilleure connaissance de la consommation médicale.

La CFE-CGC souhaite en effet, que l’assurance maladie ne se comporte plus comme un payeur aveugle mais comme un acheteur avisé des soins.

Relancer la politique conventionnelle

Les négociations avec les représentants des professions de santé et notamment des médecins doivent reprendre au plus vite. Il est en effet urgent de discuter des principes conduisant la maîtrise des dépenses et ce sans céder sur certaines revendications purement matérielles revendiquées par les médecins en contrepartie de leur effort de maîtrise.

Négocier entre partenaires et gestionnaires de la santé ne signifie pas laisser de côté le volet comptable de la maîtrise, à savoir les sanctions liées au non-respect des objectifs de dépenses.

Laisser traîner la publication du décret sur l’opposabilité aux médecins du taux d’évolution des dépenses, c’est laisser s’enliser un peu plus encore les déficits et la responsabilisation des professions de santé.

L’urgence de la réforme hospitalière

En complémentarité avec la réforme de la médecine ambulatoire, l’hôpital doit intégrer de nouveaux réflexes de maîtrise, définir une méthode, une philosophie de responsabilisation de chacun des acteurs du système de soins.

Les nouvelles structures créées par le Plan Juppé devront s’atteler à définir les priorités concernant l’hôpital et à rapidement concrétiser les principes de contractualisation et d’évaluation des établissements hospitaliers.

Pour la CFE-CGC, l’assurance maladie a là aussi un rôle primordial à jouer pour que seule l’activité réelle des hôpitaux soit financée et que des passerelles soient instaurées entre le secteur ambulatoire et les secteurs hospitaliers privés et public.

A ces réformes, il est indispensable d’associer les acteurs de terrain, équipes soignantes, personnel médical ou non.

Chacun doit avoir sa place dans le monde de l’emploi

Pour l’emploi, l’été a été à l’image du premier semestre : la situation ne s’améliore pas. La logique implacable des plans sociaux a perduré durant les mois de juin et juillet en portant le nombre de salariés licenciés pour motif économique à 29.000 par mois contre 28.000 mensuels en moyenne depuis le début de l’année. En outre, la part des jeunes dans le chômage continue de croître malgré tous les dispositifs mis en place.

Il faut arrêter le gâchis des compétences !

La CFE-CGC entend bien réaffirmer sa détermination à combattre cette fuite en avant qui hypothèque l’avenir de l’économie française et donc les emplois d’aujourd’hui et de demain. Il y a des possibilités pour sauvegarder et promouvoir l’emploi.

En ce qui concerne l’insertion des jeunes et au-delà des dispositifs spécifiques de l’alternance, le contrat de générations que propose la CFE-CGC est une solution à court terme d’embauches de jeunes en contrepartie de la cessation anticipée d’activités de salariés qui ont fortement participé à la solidarité professionnelle de par une carrière bien remplie. Cette solution suppose évidemment la reconduction de l’accord du 6 septembre 1995 ainsi que son extension à des classes d’âge plus jeunes (55 ans au moins). L’impact en matière de contrepartie d’embauches réservées à des jeunes se montrerait à 180 000.

La sauvegarde de l’emploi exige également une opposition forte contre les plans sociaux à répétition dans des entreprises dont la situation n’est pas gravement menacée. La CFE-CGC sollicite un contrôle accru sur les plans sociaux, y compris par voie administrative voire judiciaire car l’interdiction de l’exclusion est aussi importante que le devoir d’insertion. Afin que les représentants des salariés aient une plus grande implication dans le domaine économique de l’entreprise et puissent ainsi anticiper au plus tôt les difficultés d’emploi des salariés, la CFE-CGC demande que le seuil d’obligation de former une commission économique au sein du comité d’entreprise soit remanié de 1 000 salariés à 200.

Enfin, pour l’avenir du niveau de compétences des salariés, une politique offensive en matière de gestion prévisionnelle de l’emploi doit être menée. Aujourd’hui et sur la base des nombreuses analyses des plans sociaux, les entreprises sont plus habituées à faire de la gestion prévisionnelle des licenciements ! Il est impossible de continuer. Il faut se décider à enfin mettre en œuvre les moyens qui existent mais qui ne sont pas utilisés pour prévenir tout ce gâchis !

Fonds de pension : trop d’interrogations sans réponses

En cette rentrée 1996, le gouvernement a remis au goût du jour le dossier sur les fonds de pension, dossier qui prend d’ailleurs la tournure d’une véritable série à épisodes.

La confusion et la précipitation qui ont entouré la sortie d’un projet sur les fonds de pension sont regrettables car cela fausse toute concertation avec les partenaires sociaux et contribue à brouiller plus encore le débat sur la retraite surcomplémentaire ou par capitalisation.

La CFE-CGC s’est exprimée à de multiples reprises sur ce dossier « brûlant » des fonds de pension en refusant que l’approche financière prime sur les intérêts des salariés.

La CFE-CGC s’opposera à tout projet de fonds de pension qui reviendrait à :

Priver les salariés de toute défense et représentation via les partenaires sociaux.

Donner à cette épargne retraite des déductions fiscales et sociales assimilant les fonds de pension à nos régimes de retraite complémentaire.

En effet, de tels avantages risques de priver de ressources supplémentaires les régimes sociaux qui connaissent des difficultés financières. A ce propos, M. BARROT, alors président de la Commission des finances de l’Assemblée nationale, avait souhaité que « les sommes versées au bénéfice de plans soient assujetties aux cotisations sociales dues au titre des régimes de retraite obligatoire ». Cela permettrait « d’éviter toute concurrence ». Ne pas retenir cette approche reviendrait à renforcer les pratiques des entreprises qui préfèrent accorder des avantages de toutes natures non imposables, plutôt que des augmentations de salaire.

Remettre en cause les principes de la prévoyance collectif.

Seuls les contrats de prévoyances à adhésion collective (l’ensemble des salariés ou l’ensemble d’une catégorie de salariés) et avec la participation de l’employeur, bénéficient d’exonérations sociale et fiscale.

A contrario, l’adhésion facultative ou volontaire implique la non-déductibilité. Permettre de se constituer une retraite par capitalisation de façon individuelle et facultative tout en accordant des avantages fiscaux et sociaux, aura pour conséquence de bouleverser les principes de la prévoyance collective, voire de la réduire à néant. En effet, mis sur un pied d’égalité avec la prévoyance individuelle, les contrats collectifs n’auraient plus aucun attrait ni pour les salariés, ni pour les entreprises.

Nier la nécessité de faire le plein de la répartition à savoir de cotiser au taux maximum obligatoire de l’ARRCO (6 % sur TA et 16 % sur TB) et de l’AGIRC (16 % sur TB).

Limiter ou rendre facultative la participation financière des employeurs, laissant ainsi aux seuls salariés la possibilité d’abonder les fonds de pension.

On voit mal par ailleurs, les salariés cotiser pour une retraite surcomplémentaire alors que leurs salaires sont réduits, leurs emplois précaires et leur capacité d’épargne toujours plus fragilisée.

La CFE-CGC ne donnera pas son aval à des fonds de pension visant à déstabiliser plus encore les régimes de protection sociale, à remettre en cause le rôle de la négociation collective et des partenaires sociaux, et à faire supporter par les seuls salariés le financement de fonds dont seules les entreprises tireraient profit.

Les projets gouvernements ou parlementaires qui nous sont proposé, soulèvent trop d’interrogations, et d’ambiguïtés pour convaincre les salariés du bien fondé de l’épargne retraite par capitalisation.

Enseignement : orientations positives mais quid des moyens ?

La C.F.E-CGC approuve certaines des orientations annoncées par M. BAYROU lors de cette rentrée scolaire. Les premiers pas vers la mise en place d’un véritable parcours d’orientation individualisé à partir du collège et une meilleure collaboration entre lycée et enseignement supérieur vont ainsi dans le sens des propositions inscrites dans le Dossier de l’Avenir n° 58 publié en avril de cette année. De même l’acquisition de méthodes de travail grâce aux études dirigés nous apparaît fondamentale.

Toutefois, cette approbation sur les principes est fortement teintée de scepticisme sur les moyens. L’exemple de la loi de programmation faisant suite au nouveau contrat pour l’Ecole ne peut, malheureusement, que nous conforter dans cette position. La suppression de milliers de postes dans le primaire et au collège démontre, même si l’explication démographique peut être entendue, que la gestion quantitative reste privilégiée au sein de l’Education Nationale. Si la Fédération de l’Enseignement et de la Recherche/C.F.E-CGC ne s’associe pas au mouvement de grève prévu le 30 septembre, jugé plus politique que réellement syndical, elle s’inquiète des conséquences de cette décision.

Concernant cette rentrée, il convient également de noter la naissance de l’Union Syndicale Indépendante réunissant outre la F.E.R./C.F.E.-CGC, le SCENRAC-CFTC, la C.S.E.N. et la F.P.F.R.E. Les objectifs de ce pôle syndical réformateur sont triples : Promouvoir une réforme du système éducatif recentré sur la formation des jeunes, restaurer les conditions de travail des personnels en assurant la sécurité des personnes et des biens et améliorer le statut des personnels en assurant la sécurité des personnes et des biens et améliorer le statut des personnels. Concernant le supérieur, la C.F.E.-CGC souscrit à l’annonce de la construction de la filière technologique faite par M. BAYROU lors des Etats généraux de l’Université. Cette réforme nécessaire fait partie des dix propositions de la C.F.E.-CGC inscrites dans le Dossier de l’Avenir cité plus haut.

Pour être crédible, la filière technologique de l’enseignement supérieur suppose une amélioration des rapports entre universités et entreprises. Notamment il y a peut-être lieu de rendre plus perméables les échanges de personnels entre les deux systèmes.

Au niveau pratique, cela suppose, en autre, que les enseignants-chercheurs universitaires accueillent les professionnels de la technologie et de la recherche technologique comme des pairs. Cela suppose aussi que les enseignants-chercheurs technologues puissent s’immerger régulièrement dans le tissu industriel. La C.F.E.-CGC attend la réponse du Ministre sur ce point.

L’insertion professionnelle des jeunes

Le problème de l’insertion professionnelle des jeunes restes l’un des sujets les plus importants dans le domaine de la formation professionnelle. Outre l’élargissement de l’accord du 6 septembre, la C.F.E.-CGC prône un véritable éclaircissement de l’Alternance sous contrat de travail, notamment des contrats d’apprentissage et de qualification. Le rôle et les objectifs de chacun d’eux doivent être identifiés, ainsi que leur place vis-à-vis de la formation professionnelle sous statut scolaire.

Cette clarification opérée, une fusion du financement de ces deux contrats pourraient être envisagée. Selon la spécificité et les besoins propres à chaque secteur économique, l’accent pourrait être mis tel ou tel contrat. Cette proposition nécessite également qu’à l’instar de ce qui a été fait pour la formation professionnelle continue, la séparation des missions de collecte et de formation soit opérée dans le domaine de l’apprentissage.

L’une des pistes de réflexion de la Commission présidée par M. de VIRVILLE toucherait le système de Congé Individuel de Formation. La prise en charge des salaires serait remplacée par celle des coûts de formation. Pour la C.F.E.-CGC, cette éventualité est inacceptable car elle remettrait en cause le principe même de ce droit qui reste l’une des dernières possibilités de promotion sociale ouvertes aux salariés.

Depuis de nombreuses années, la C.F.F.E.-CGC milite pour un véritable droit à la formation tout au long de la vie. Cela ne pourra se faire qu’en améliorant l’existant, non en le détruisant. Demain, c’est 20 % du temps de travail qui devra être dégagé des contraintes de la production. Enfin, dernier point, la C.F.E.-CGC se félicite de la sortie du décret relatif à la gestion paritaire de la Formation Professionnelle Continue qui clarifie le financement des missions remplies par les partenaires sociaux. Elle met en garde, toutefois, contre certaines interprétations qui seraient contraires à la lettre paritaire du 10 mai 1995.

Audiovisuel : les feuilletons de l’été

Après les soi-disant « révélations » sur les cachets des stars du petit écran, qui ont conduit au départ de M. Jean-Pierre ELKABBACH et son remplacement par M. Xavier GOUYOU BEAUCHAMPS, l’audiovisuel public continue d’être l’objet de la sollicitude des pouvoirs publics. Ainsi, le ministre en charge de la Communication se dit persuader que la privatisation de la Société Française de Production constitue « l’unique option propre à assurer son avenir ».

Coût de cette privatisation : 1,2 milliard de francs supportés par l’Etat, près de 700 suppressions de postes sur un effectif global d’un millier de personnes et … 50 millions payés par le repreneur. Face à cette proposition, qui pourrait prêter à sourire si elle n’était pas sérieusement envisagée pour les pouvoirs publics, la C.F.E.-CGC apporte son soutien à son Syndicat National de l’Encadrement Audiovisuel dans sa lutte contre ce projet.

Aux dernières nouvelles, il semblerait que M. Philippe DOUSTE-BLAZY s’interroge sur les chances de « plan de reprise ». La C.F.E.-CGC espère que cette interrogation portera ses fruits et qu’une solution plus réaliste, tenant compte du personnel de la S.F.P., sera étudiée. L’exception culturelle ne doit pas seulement être défendue sur le plan international mais aussi préservée au niveau national.

L’autre feuilleton de l’été concerne un éventuel rapprochement entre Arte et la Cinq. Outre les engagements de la France vis-à-vis de nos partenaires d’outre-Rhin, on semble également oublier dans ce dossier que ces deux chaînes n’ont pas la même finalité.

Le Savoir et la Culture ne méritent-ils pas mieux que des tractations de couloir ? Si la C.F.E.-CGC n’est pas opposée à la recherche de synergies, elle souhaite qu’un débat public s’instaure avant toute redéfinition des missions de ces deux chaînes et que dans ce dossier comme dans celui de la S.F.P. l’avenir du personnel soit préservé.


Date : mardi 24 septembre 1996
Source : France 2/Édition du matin

G. Leclerc : Encore et toujours le trou de la Sécurité sociale – 51 milliards cette année, 47 milliards l’an prochain si l’on ne fait rien. Le Gouvernement a présenté hier des mesures : 17 milliards avec notamment un élargissement de la CSG, des hausses des taxes sur les tabacs et alcools. Est-ce que ce sont les bonnes mesures ? Est-ce que le déficit est vraiment une fatalité à la Sécurité sociale ?

M. Vilbenoît : Une fatalité, sans doute pas. Je crois que les mesures prises par le plan Juppé porteront, dans l’avenir, effet. On a pris cinq ou six ans de retard, on aurait dû faire ça sous Rocard, pratiquement. Mais aujourd’hui le problème, c’est celui des recettes et des cotisations, c’est le problème des salaires. Le Gouvernement avait prévu 5,8 ou 5,7 %, au départ, de croissance pour la masse salariale, on arrive avec 2,3. Il ne faut pas chercher ailleurs les causes du déficit. Et je crois que ce n’est pas un échec du plan Juppé, c’est un déficit de ressources. Et tant que l’on n’aura pas compris, dans ce pays, que l’on ne peut pas assurer le développement pérenne, interne sans relancer les salaires, sans relancer les revenus du travail, je crois que l’on n’aura résolu ni le problème de la confiance, ni le problème de la consommation, ni celui du financement des régimes sociaux. C’est ça, la vérité.

G. Leclerc : Alors justement, plus généralement, est-ce que la rentrée sociale vous préoccupe ? Etes-vous du côté de M. Blondel qui dit que tout risque d’exploser ? Ou êtes-vous du côté qui dit que cela va s’améliorer, que la reprise arrive ?

M. Vilbenoît : La météo sociale, c’est difficile. Ce que je suis obligé de constater, c’est la multiplication des points d’abcès, par secteurs entiers : l’industrie de l’armement, le GIAT, la construction navale, la finance, le Crédit lyonnais, le Crédit foncier, le GAN et d’autres. Partout, il y a des points de fixation. Je n’observe aujourd’hui aucun phénomène fédérateur, si ce n’est la lassitude, l’inquiétude et le manque de perspective dans l’avenir. Le chômage croit encore. Tous les instituts, y compris le Gouvernement, nous disent qu’il croîtra durant toute l’année 97, même avec une croissance légèrement améliorée. Je crois que c’est cela, la véritable inquiétude.

G. Leclerc : Le Gouvernement répond qu’il n’y a pas d’autre politique possible. C’est votre avis ?

M. Vilbenoît : Ce n’est pas notre avis. Il y a un effet « Ripolin » : je fais un plan social pour être compétitif et puis j’en refais un autre parce que j’ai provisionné un plan social donc mes résultats ne sont pas bons. C’est un effet répétitif dans un miroir sans fin. Et ça, personne ne le comprend plus, pas même l’encadrement. Ce qui est réclamé, c’est un peu plus de dirigisme social, face aux abus de la recherche de compétitivité, mais pas là où les secteurs ont des problèmes, là où les secteurs ont des problèmes, là où il n’y en a pas, où les sociétés sont saines. Là, il y a un refus et là, il y a un danger.

G. Leclerc : La situation est quand même difficile. On voit les syndicats de fonctionnaires annoncer une journée d’action de grève pour le 17 octobre sur le pouvoir d’achat et l’emploi. Est-ce bien opportun ?

M. Vilbenoît : Ma fédération s’associe à ce mouvement de fonctionnaires. Je crois que le combat pour le pouvoir d’achat est aujourd’hui un combat prioritaire. On n’assurera pas, dans ce pays, un développement. En Europe, 80 % de la production européenne est consommée sur place. Il faudrait peut-être que nos patrons fassent un peu de fordisme de temps en temps. S’ils veulent vendre leurs produits, il faut que les ouvriers et les cadres aient de quoi les acheter.

G. Leclerc : Le Gouvernement a annoncé une baisse de l’impôt sur le revenu. Normalement, cela devrait bénéficier aux cadres. Vous semblez faire la fine bouche.

M. Vilbenoît : Je trouve qu’il y a un effort dans le bon sens, c’est vrai : le Gouvernement baisse l’impôt sur le revenu, et ça c’est une bonne voie ; et il baisse en favorisant les revenus du travail, avec un début de déductibilité de la CSG.

G. Leclerc : Alors, qu’est-ce qui ne va pas ?

M. Vilbenoît : Ce qui ne va pas, c’est que l’on concentre l’effort aux deux bouts : les très hauts revenus avec la fameuse tranche supérieure et l’on sort du champ de l’impôt encore un million et demi de foyers – je vous rappelle qu’il n’y a qu’un Français sur deux qui paye l’impôt. C’est une situation unique en Europe et qui fait que l’impôt sur le revenu a un faible rendement, et que l’on sabre les déductions aux classes moyennes : les retraités, les 10 % qui vont être plafonnés, c’est l’encadrement ; les déductions d’impôt pour les intérêts d’emprunt et les travaux ; et puis les situations des journalistes et des VRP, je ne vous en parle pas : il y a là un ensemble qui fait qu’en réalité, on a largement gommé l’effet positif pour l’encadrement.

G. Leclerc : D’un mot : l’Unedic, l’assurance chômage. Selon des indiscrétions, vous allez présenter un candidat à la présidence, alors qu’il y avait déjà M. Blondel et N. Notat. C’est pour ajouter à la confusion ?

M. Vilbenoît : Non, c’est pour donner un choix supplémentaire sur des programmes. Moi, je ne cours pas pour une présidence de plus. Je cours pour 200 000 jeunes au chômage en moins. Nous voulons faire prévaloir notre orientation. Le fonds structurel doit servir à un contrat de génération pour mettre 200 000 jeunes au travail immédiatement.

G. Leclerc : Et ce candidat, c’est ?

M. Vilbenoît : Je l’annoncerai tout à l’heure. Nous l’avons décidé hier, c’est J.-L. Walter, un gestionnaire. Nous ne courons pas pour une présidence de plus.