Texte intégral
M. Poivre d'Arvor : Nous nous retrouvons dans le cadre de notre émission « Face à la Une » que vous avez beaucoup vue pendant la dernière campagne électorale. Monsieur Juppé sera interrogé par nos spécialistes économique et politique : Jean-Marc Sylvestre et François Bachy.
Il s'agit en effet, en ce début d'été, d'essayer de mieux comprendre, d'abord, ce qui nous attend à la rentrée et puis aussi de tracer une perspective d'une première année passée à Matignon ; traversée d'espoirs et de coups de chien.
Nous allons tout de suite commencer par les dossiers chauds du moment et de la journée : la Corse, par exemple. Puisque tout à l'heure un commando du FLNC a tiré trois salves en l'air au moment des obsèques du dirigeant nationaliste, Pierre-Louis Lorenzi. Ils sont partis d'ailleurs, ils se sont enfuis. Ils n'ont pas été inquiétés. C'est une sorte de pied de nez aux autorités. Pensez-vous que, finalement, on est bien là-bas dans un État de droit ?
M. Juppé : Il y a vingt ans, depuis les événements d'Aleria, on s'en souvient, qu'il y a de la violence en Corse. Il y a vingt ans que les gouvernements successifs hésitent sur les politiques à mener. Il y a eu des allers et des retours dans ces politiques. Le gouvernement que je conduis a choisi une politique depuis maintenant à peu près un an : c'est· d'abord la fermeté, je dirais même à l'intransigeance vis-à-vis de ceux qui violent la loi et qui commettent des actes terroristes. Et c'est, dans le même temps, l'imagination et même l'audace pour le développement économique de la Corse.
Sur le premier point, depuis quelques mois, nous avons fait plus d'arrestations et lancé plus de procédures que jamais auparavant. Et nous allons continuer. Nous avons renforcé les moyens des forces de sécurité de la police et de la gendarmerie. Notre détermination est totale.
M. Poivre d'Arvor : Votre gouvernement dialogue-t-il avec les nationalistes, comme l'a laissé entendre votre ministre de l'Intérieur ?
M. Juppé : Le ministre de l'intérieur n’a rien laissé entendre de ce type. Le ministre de l'intérieur a dit ce que j'ai dit, c'est-à-dire que nous dialoguons avec tous ceux qui acceptent le jeu de la démocratie, c'est-à-dire les élections.
Cette politique, je l'ai expliquée aux élus corses, aux parlementaires corses, qu'ils soient de droite ou de gauche. Ils m'ont donné leur accord. Et j'observe que beaucoup de responsables nationalistes sont en train de constater que la violence les conduit dans une impasse et qu'ils envisagent maintenant d'accepter le cariai démocratique, celui des élections. Il y a des élus à l'Assemblée de Corse et c'est avec eux que nous dialoguons, avec personne d'autre. Nous allons poursuivre cette politique.
Ce que je voudrais dire, parce que j'entends beaucoup de conseils, beaucoup de leçons dans ce domaine, c'est qu'il faudrait être prodigieusement nait et en fait un peu de mauvaise foi, pour s'imaginer que c'est en l'espace de quelques mois que l'on va éradiquer la violence en Corse. Il faut du temps, il faut de la persévérance, il faut de la continuité. Et c'est cette politique-là que nous allons mener avec persévérance et continuité. De même que nous la mènerons en ce qui concerne le développement économique car la zone franche, que j'ai annoncé il y a quelques mois, est en cours de discussion avec Bruxelles, ça avance bien et j'irai, moi-même, comme je l'ai dit, cet été, annoncer cela aux Corses et parler avec eux. Et j'ai confiance en eux parce que je sais que l'immense majorité...
M. Poivre d'Arvor : … Quand allez-vous en Corse ?
M. Juppé : Cet été, c'est-à-dire en juillet. Cet été, c'est maintenant. Et j'ai confiance parce que, comme ils l'ont prouvé à maintes reprises dans l'Histoire et puis surtout au moment des dernières élections, l'immense majorité des Corses ne veut pas de cette aventure terroriste et est prête à soutenir les efforts que nous faisons.
Alors, je le répète : il faut du temps. Il ne faut pas déstabiliser à la première difficulté venue.
M. Poivre d'Arvor : Vous avez peut-être entendu Laurent Fabius tout à l'heure. Il disait : « Dialogue et fermeté, disent-ils, à propos de vous, en fait, c'est cagoules et attentats ». Vous pensez qu'on peut y arriver d'une certaine façon sans laisser les choses perdurer ?
M. Juppé : Je forme le vœu très sincèrement et très profondément qu'on y arrive un petit peu mieux qu'avant, notamment quand Monsieur Fabius était aux affaires.
M. Poivre d'Arvor : Le climat politique, vous le savez, est actuellement perturbé par l'affaire des HLM de Paris, c'est un dossier que vous connaissez bien, puisque vous avez été, vous-même, adjoint aux finances du prédécesseur de Jean Tibéri, Jacques Chirac. Vous paraît-il normal, alors que tant et tant de gens demandent un logement, qu'il y ait des logements qui soient réservés, au fond, à des privilégiés ?
M. Juppé : Sur les procédures en cours, je ne ferai aucun commentaire.
M. Poivre d'Arvor : C'est la raison pour laquelle j'ai posé la question de manière plus large.
M. Juppé : Oui, mais je vois bien l'objectif. Je ne ferai pas de commentaire sur les procédures en cours pour une bonne raison : Il y a, dans le code de procédure pénale, un article 11 qui dit que « la procédure d'enquête et d'instruction est couverte par le secret » et je ne violerai pas la loi, même si elle est violée quotidiennement, ici ou là. Et on le voit dans beaucoup d'organes de presse.
En revanche, je suis prêt à vous donner mon sentiment, de manière très approfondie et de manière très circonstanciée, sur le fonctionnement de la justice, sur ce qui va et sur ce qui ne va pas parce que nous avons besoin d'une bonne justice en France et une bonne justice implique un certain nombre de conditions...
M. Poivre d'Arvor : ... Je vais vous reposer la question de manière différente. Selon un sondage CSA-Le Parisien à paraître demain, les trois quarts des Parisiens interrogés estiment que le président de l'Office des HLM n'avait pas à attribuer un logement à son fils qui était, par ailleurs, propriétaire d'un autre logement. Partagez-vous ce jugement ?
M. Juppé : Je vous ai déjà répondu sur cette question. Je ne ferai pas de commentaire sur telle ou telle procédure en cours...
M. Bachy : ... Et sur le fonctionnement de la justice ?
M. Juppé : Sur le fonctionnement de la Justice, je suis prêt à donner mon avis, bien sûr.
M. Bachy : Est-ce que vous ne trouvez pas justement que le dossier a été classé un petit peu vite ? Simone Veil, dans la Majorité, a dit qu'il aurait été préférable de ne pas prendre une décision aussi rapide. C'est vrai que trois jours c'est apparu un petit peu court aux yeux de certains. Est-ce votre avis ou pas ?
M. Juppé : Qui a classé le dossier ?
M. Bachy : Le procureur.
M. Juppé : Un procureur, c'est quoi ? C'est qui ? C'est un magistrat. C'est un magistrat qui a des garanties statutaires, qui a la plus totale liberté de parole à l'audience - c'est un des principes fondamentaux de notre justice - et qui tient un certain nombre de responsabilités de la loi. Il applique la loi...
M. Poivre d'Arvor : ... Et c'est quelqu'un qu'on peut déplacer au gré des goûts.
M. Juppé : Pas au gré des goûts, pas du tout. Je disais que, pour avoir une bonne justice, il faut d'abord avoir une justice égale pour tous. Et je sais que les Français ne croient pas que la justice est égale pour tous. Cela a pu être vrai dans le passé, c'est de moins en moins vrai. Beaucoup de progrès ont été faits, notamment grâce aux réformes qui ont été accomplies en 1993, par exemple, et la justice passe.
Je pourrais citer, mais vous les connaissez tous, beaucoup de noms d'anciens ministres - enfin, beaucoup - un certain nombre de noms d'anciens ministres ou de parlementaires sur qui la justice est passée. Donc, il est faux de dire que la justice ne passe pas dans ce genre de circonstance. Et s'il faut améliorer encore les choses, je suis prêt à y réfléchir.
Deuxième chose, pour avoir une bonne justice, il faut une justice sereine. Et une justice sereine, ce n'est pas la justice qui se déroule sur la place publique, sous les caméras de télévision. Je suis profondément choqué quand je vois que certains actes de procédure se déroulent alors que les caméras de télévision, les photographes et les journalistes sont prévenus avant même la police judiciaire. Il y a quelque chose qui ne va pas...
M. Poivre d'Arvor : ... Qu'est-ce qui vous choque le plus dans cette affaire ? Des policiers qui partent au moment où le juge leur demande d'entrer chez Jean Tibéri ou les journalistes qui arrivent au moment où le juge sort de chez Jean Tibéri ?
M. Juppé : Cela me choque, en tout cas. Pour le reste, si l'on veut une bonne justice, il faut des relations de confiance et de transparence entre ceux qui concourent à la justice, les magistrats, bien sûr, et les officiers de Police judiciaire. Je dois dire que cette confiance et cette transparence existent dans l'immense majorité des cas. Lorsqu'il y a un problème, il y a des procédures de surveillance et de contrôle.
Je lisais tout à l'heure dans une dépêche que le procureur général près de la Cour d'Appel de Paris avait décidé de demander des explications. Et donc la procédure se déroule et je n'ai pas, là non plus, de commentaire à faire.
M. Poivre d'Arvor : Cela vous paraît normal que des policiers agissant sur ordre décident de ne pas assister un juge d'instruction qui leur demande...
M. Juppé : ... Des explications ont été demandées et c'est aux gens compétents, pour répondre à la question que vous posez, d'y répondre. Je ne suis pas là pour juger. Je ne suis pas juge. Et je n'ai pas l'intention de sortir de ma fonction.
Je voudrais dire une troisième chose sur les principes d'une bonne justice : il faut qu'elle soit égale pour tous, il faut qu'elle soit sereine, il faut ensuite qu'elle respecte un certain nombre de principes fondamentaux de la République et de la démocratie. Et, parmi ces principes, il y en a un qui est aujourd'hui bafoué, c'est la présomption d'innocence. Cela veut dire quoi ? Cela veut dire que tant qu'on n'a pas été condamné par un tribunal, on est réputé innocent. Et pour assurer cette présomption d'innocence, il y a une règle qui est le secret de l'instruction. Ce secret de l'instruction a un double but : d'abord, permettre que les enquêtes se déroulent bien et que telle ou telle personne, éventuellement impliquée, ne tire pas argument de la divulgation d'un certain nombre d'éléments de l'enquête.
Et, deuxièmement, assurer le respect de la personne humaine qui veut, je le répète, que tant qu'on n'a pas été condamné, on est réputé innocent. Eh bien, ce principe est aujourd'hui violé quotidiennement. Il n'y a pratiquement qu'en France que ça se passe comme ça.
M. Poivre d'Arvor : Vous savez qu'il y a des députés de votre Majorité qui proposent d'ailleurs qu'on lève finalement ce secret d'instruction. C'est le cas de Patrick Devedjian, parce qu'il dit…
M. Juppé : ... Moi, je propose le contraire. Je propose que nous réfléchissions...
M. Poivre d'Arvor : ... Qu'on le renforce.
M. Juppé : Et je vais saisir le gouvernement et le Parlement de cette question pour qu'ensemble nous réfléchissions à la manière de voir comment on peut garantir les droits fondamentaux de la personne humaine, en assurant le secret de l'instruction et la présomption d'innocence, comme on le fait pour les mineurs, par exemple. On y est bien arrivé pour les mineurs.
À l'heure actuelle, on est dans une situation invraisemblable où vous êtes désigné comme coupable par la vox populi, si je puis dire, ou par les médias, avant même que vous ne soyez mis en examen et a fortiori avant que vous ne soyez jugé. C'est une perversion de la justice et je crois qu'il faut vraiment réfléchir sereinement, tous ensemble, à la manière de faire en sorte que la justice retrouve les fondements de la République et de la démocratie.
M. Poivre d'Arvor : Quand, dans l'affaire URBA, l'inspecteur Gaudinot a été révoqué et le juge Jean-Pierre dessaisi, vous, vous avez été un des premiers à protester. J'ai retrouvé vos propos, c'était d'ailleurs sur TF1. Vous disiez : « Dessaisir un juge d'instruction qui avait des choses à faire est une affaire grave et scandaleuse ». Dit-on des choses quand on est dans l'Opposition et des choses différentes quand on est au pouvoir ?
M. Juppé : Vous êtes un lecteur attentif de tous mes propos. Je l'ai observé déjà en plusieurs circonstances, Monsieur Poivre d'Arvor. Il n'y a pas eu de dessaisissement dans ce cas précis...
M. Poivre d'Arvor : ... Il y a une partie du dossier qui n'appartient plus au juge Halphen.
M. Juppé : Il n'y a pas eu dessaisissement, il y a eu une demande supplémentaire. Et un magistrat qui est un procureur a estimé, en application de la loi, que cette demande devrait être instruite par un autre magistrat instructeur. Voilà ce qui s'est passé.
Il y a une grande novation par rapport à l'époque que vous évoquez, c'est que le garde des sceaux actuel n'a jamais donné instruction de dessaisissement ou de classement d'une affaire. Jamais, depuis qu'il est garde des sceaux. Il l'avait annoncé quand il a pris ses fonctions et il ne l'a pas fait.
M. Poivre d'Arvor : Et s'il le fait, il est obligé de le faire par écrit désormais.
M. Juppé : Il ne l'a pas fait. Il n'a pas l'intention de le faire puisqu'il a dit qu'il ne le ferait pas. J'ajoute d'ailleurs que le code de procédure pénale actuelle ne lui permet pas de le faire. Le garde des sceaux peut donner des instructions de poursuivre, il ne peut pas donner des instructions de ne pas poursuivre. C'est une différence très sensible et très notable.
M. Sylvestre : Dans une autre affaire qui préoccupe la classe politique et le monde des affaires et qui concerne le PDG de la SNCF, considérez-vous, d'une façon générale, que le président d'une grande entreprise publique devrait démissionner s'il était mis en examen ?
M. Juppé : Vous voulez absolument que je fasse le travail des juges. Je ne le ferai pas et je ne commenterai pas les procédures, je le répète. Cela dit, sur la question de principe que vous posez, pour être cohérent avec moi-même, je le dis après y avoir bien réfléchi, je considère que tant que quelqu'un n'a pas été condamné selon les procédures normales, par un tribunal ou une cour de justice, il est présumé innocent. Cette règle-là est un principe fondamental. On s'est battus en 1789 pour cela. Cela fait partie des Droits de l'Homme et du citoyen. C'est inscrit dans chacune de nos Constitutions depuis des décennies. Il faut que ce principe soit respecté. C'est ma façon de répondre à votre question.
M. Poivre d'Arvor : C'est-à-dire que vous n'allez pas lui demander de démissionner ?
M. Juppé : Tant qu'on n'est pas condamné, on est présumé innocent.
M. Bachy : Je vais vous demander de faire le travail du politique...
M. Juppé : ... Ah ! Ça, je veux bien.
M. Bachy : Parce que ce climat des affaires, finalement, a une répercussion sur le politique, c'est-à-dire que les élections partielles, notamment, ne sont pas bonnes. Elles ont été très mauvaises. Elles s'améliorent un petit peu, mais il y a tout de même 8 sièges de députés qui ont été perdus depuis septembre 1995. Comment redonnez-vous votre confiance à votre Majorité ? Faut-il changer le cap, comme certains députés le demandent ?
M. Juppé : Je n'ai pas entendu des députés demander de changer le cap...
M. Bachy : ... Pierre Mazeaud a dit qu'il fallait infléchir.
M. Juppé : Non, je n'ai pas entendu cela. Je le rencontre souvent, c'est un bon ami.
Vous disiez que les élections ont été mauvaises, puis qu'elles se sont améliorées. Dans la période récente, les élections partielles ont donné des résultats très encourageants pour le gouvernement. Je pourrais citer des exemples de circonscriptions ou de cantons difficiles qui n'étaient pas gagné d'avance et que nous avons gagnés.
Il est vrai que, l'année, dernière, il y a eu quelques résultats négatifs dans des circonscriptions qui avaient bénéficié de la grande vague de 1993. Mais rien ne permet de dire aujourd'hui qu'il y a un bouleversement de l'équilibre politique ou même un déplacement de cet équilibre politique. Et je suis convaincu que la Majorité est plus soudée que jamais. Cela a été difficile au début, c'est vrai, parce qu'il y a eu les élections présidentielles qui ont laissé quelques traces, mais aujourd'hui, petit à petit, grâce aux efforts que nous avons faits les uns et les autres, grâce à la meilleure compréhension et au bon travail qui se sont instaurés entre le gouvernement et sa Majorité - j'ai pu encore en juger à la fin de la session lorsque j'ai rencontré l'ensemble des parlementaires - cette Majorité est unie. Elle est soudée, elle soutient la politique que fait le gouvernement et elle va le faire avec détermination et confiance.
M. Poivre d'Arvor : Et vous vous voyez gagner en 1998 ?
M. Juppé : Bien sûr.
M. Poivre d'Arvor : Vous serez le chef de cette Majorité, à ce moment-là ?
M. Juppé : Ce qui me préoccupe le plus, puisqu'il faut faire de la politique, c'est de voir ce que devient aujourd'hui le programme du parti socialiste. C'est d'abord, si je puis dire, Jurassic Park en ce qui concerne l'économie. On en revient aux vieilles lunes de 1981 nationalisations, interdiction de licenciement et ainsi de suite. Le conservatisme le plus total. Et puis certains sujets dits de société, la démagogie. Alors, je suis persuadé, parce que j'ai une confiance inébranlable dans le bon sens des Français, que le moment venu, et le moment n'est pas venu, nous ne sommes pas en campagne électorale, eh bien, ils ouvriront les yeux sur cette réalité - et sur ce choix fondamental, entre la réforme et le conservatisme.
M. Poivre d'Arvor : Et vous serez encore à Matignon en 1998 ? Vous l'espérez ?
M. Juppé : Comment voulez-vous que je réponde à cette question. Ce n'est pas moi qui décide...
M. Poivre d'Arvor : Vous le souhaitez ?
M. Juppé : Ce n'est pas que je le souhaite, c'est que je crois à ce que je fais. Je ne suis pas là pour passer le temps ou pour jouir d'un poste. D'ailleurs, la jouissance de ce poste, vous le savez bien, est un peu difficile, un peu chahutée. Je fais ce que je fais parce que j'y crois.
Je suis très heureux de pouvoir d'ailleurs aujourd'hui, grâce à vous et je vous en remercie, m'exprimer devant les Françaises et les Français parce qu'il y a un grand besoin de concertation et de dialogue, et j'ai l'intention de le faire de manière aussi régulière que possible. La situation est difficile. Nous avons, depuis quelques semaines, des mauvaises nouvelles et je comprends que les Français aient du mal à y voir clair. Je sais aussi que, pour beaucoup d'entre eux, la vie quotidienne est difficile.
Pourquoi est-ce difficile ? Il faut tout de même y revenir un peu pour ne pas avoir exclusivement le nez sur l'actualité des dernières 24 heures. C'est difficile, d'abord, parce que, depuis 10 ou 15 ans - et je le dis sans esprit de polémique - nous avons fait beaucoup d'erreurs. Nous avons retardé des réformes que nous aurions dû faire...
M. Poivre d'Arvor : ... Tous gouvernements confondus ?
M. Juppé : Oui, plutôt certains que d'autres, mais enfin ! ... Nous avons différé des décisions que nous aurions dû prendre.
Puis, la deuxième raison pour laquelle c'est difficile, c'est parce que la France ne vit pas une crise, comme on le dit souvent - une crise, ça ne dure pas, c'est aigu et puis on s'en sort, bien ou mal - la France vit une mutation en profondeur, comme tous les pays qui l’entourent, et c'est cette mutation que nous préparons par des réformes.
Faut-il céder au pessimisme ? Eh bien, je suis venu vous dire ce soir : « non, il ne faut pas céder au pessimisme. D'abord, parce qu'il n'y a pas que des mauvaises nouvelles, et je pourrais en donner un certain nombre qui vont dans le bon sens : On fait confiance à la France sur la scène internationale, y compris sur le plan de sa gestion économique. Le chômage de longue durée a baissé. Le premier trimestre a été bon. Le deuxième ne l'a pas été. Ensuite, parce que nous avons des atouts considérables ».
Vous évoquiez Jean-Jacques Favier tout à l'heure, c'est vrai que j'ai parlé avec lui dans sa navette spatiale. Quels sont les pays, aujourd'hui, au Monde, qui sont capables de participer à une telle aventure ? Vous allez me dire : « C'est très loin ». Oui, c'est très loin, mais ça concerne la vie des Français parce que ce sont les emplois de demain, la technologie de demain, la science de demain.
Et puis enfin nous avons une politique qui, j'en suis sûr, portera ses fruits. Et je ne suis pas homme, à la première difficulté, à reculer devant l'obstacle ou à broncher devant l'obstacle. Il faut de la ténacité, de la patience, de la persévérance.
M. Poivre d'Arvor : Il n'y a peut-être pas crise, mais il y a crise de confiance. Cela, vous le sentez bien. Confiance dans le politique globalement. Vous l'incarnez parce que vous êtes au Pouvoir...
M. Juppé : ... Oui, il y a peut-être crise de confiance parce qu'on leur répète ça matin, midi et soir...
M. Poivre d'Arvor : ... Ils sont moroses.
M. Juppé : C'est vrai. Et mon travail, ma responsabilité, c'est de montrer les perspectives. Qu'est-ce que nous essayons de faire depuis un an ? Vous l'avez évoqué tout à l'heure.
Premièrement, réformer, réformer en profondeur. Il y a la réforme de la sécurité sociale, je serais heureux qu'on en dise - un mot, il y a la réforme de la défense nationale, il y a la réforme de l'éducation nationale, il y a la réforme de FRANCE TELECOM, la réforme d'EDF. Tout cela, on ne l'avait pas fait et nous le faisons. Evidemment, cela ne va pas se faire en un jour...
M. Poivre d'Arvor : ... On va les lister.
M. Juppé : C'est le premier aspect de cette politique. Nous ne gouvernons pas à la petite semaine, nous gouvernons pour les cinq ans ou les dix ans qui viennent. Je fais des réformes pour les cinq ans ou les dix ans qui viennent. Il faut qu'on se donne le temps de les réussir.
Et puis, dans le même temps, nous avons une stratégie sur l'emploi tous azimuts, que je suis prêt à développer devant vous.
M. Sylvestre : Justement, Alain Juppé, quand on regarde les résultats actuels ou les perspectives économiques dans les six prochains mois et qu'on les compare à vos prévisions ou à vos ambitions, on s'aperçoit quand même que la situation est assez dégradée, notamment en termes d'emploi, en dépit de la petite embellie qu'il a pu y avoir au début de l'année. Alors, qu'est-ce qui s'est passé ? Ce sont les experts qui se sent trompés au cours des 8 derniers mois ? Ou est-ce qu'il y a quelque chose dans l'équation de la politique gouvernementale qui n'a pas marché ?
M. Juppé : D'abord, il s'agit de savoir ce qu'est notre politique sur l'emploi avant de savoir s'il faut en changer ou pas. Vous l'avez dit, vous-même, il y a eu un bon premier trimestre, un mauvais deuxième trimestre, mais sur l'ensemble des six premiers mois de l'année l'économie française est en croissance de 1,5 %...
M. Sylvestre : ... Légèrement inférieure aux prévisions...
M. Juppé : ... Oui, c'est légèrement inférieur aux prévisions, mais ce n'est pas négatif. Et donc quand je dis aux Françaises et aux Français qu'il ne faut pas céder à ce pessimisme et considérer que nous sommes dans une situation catastrophique, je crois que j'ai des arguments pour le démontrer.
Quelle est la politique que nous menons ? Parce que, avant de savoir s'il faut changer, encore faut-il bien la définir ? Cette politique repose sur deux ou trois idées :
D'abord, changer radicalement par rapport à ce qu'on a fait depuis 10 ou 15 ans sur le plan de la politique budgétaire et monétaire. Depuis 10 ou 15 ans, que fait-on ? L'État dépense de plus en plus et de plus en plus mal, avec de plus en plus de gaspillages et de dépenses improductives. Résultat : les déficits, donc les dettes, augmentent et donc on augmente les impôts. Eh bien, j'essaie de renverser cette vapeur-là, et ce n'est pas facile. Ce n'est pas facile parce que, quand les habitudes sont prises, pour les changer, il faut de la ténacité. C'est ce que nous allons faire avec la loi de finances de l'année prochaine. Nous avons déjà commencé cette année : maîtriser les dépenses, réduire les déficits et rembourser les dettes et baisser les impôts. Il y aura des baisses d'impôts en 1997, votées à partir du mois de septembre.
M. Sylvestre : On va en parler, Monsieur le Premier ministre, mais restons sur le terrain de l'emploi. Lorsqu'on regarde les chiffres...
M. Juppé : Mais je parle de l'emploi.
M. Sylvestre : … Lorsqu'on regarde la rafale de plans sociaux publiés depuis une dizaine de jours : Moulinex, Crédit Lyonnais, les arsenaux, les Français ont quelques raisons d'être inquiets sur la finalité de cette politique.
M. Juppé : Je comprends que les Français soient inquiets, et je ne le nie pas. Je dis simplement que la politique que nous menons donnera des résultats, parce que l'alternative à cette politique consiste à retomber dans les errements du passé. Vous parlez des licenciements économiques mois après mois. Il y en a eu 28 000 au mois de mai 1996, il y en avait 45 000 au mois de mai 93. Je cite ce chiffre, il n'est pas satisfaisant, je préfèrerais qu'il y en ait moins, et mon objectif est qu'il y en ait moins, mais laissez croira aux Français que cela se dégrade par rapport à ce que nous avons vécu, ce n'est pas exact.
Je voudrais ajouter un second point sur ma politique en ce qui concerne l'emploi. Je vous ai dit : 1. Le cercle vertueux : dépenser mieux et moins, baisser les impôts, c'est cela qui redonnera confiance.
2. Se battre sur tous les fronts pour que la croissance, que nous attendons, que nous espérons, soit plus riche en emplois. Et cela sur quatre fronts :
1) Aider les PME-PMI, en allégeant les charges, et cela commence à marcher ;
2) Réduire le temps de travail et nous avons fait des choses très importantes dans ce domaine, je n'ai pas le temps de les rappeler, que ce soit les partenaires sociaux ou le Parlement ;
3) Développer les emplois de proximité, et là aussi j'aurais bien des exemples à donner ;
4) Enfin améliorer l'insertion professionnelle des jeunes.
Voilà ce qu'est notre stratégie pour l'emploi et voilà pourquoi Je pense qu'à condition de ne pas changer, parce que les résultats aujourd'hui ne sont pas bons, et à condition de se cramponner à cette politique qui est cohérente et qui sera efficace, nous obtiendrons des résultats.
M. Poivre d'Arvor : J'ai deux questions brèves à vous poser. D'abord, est-ce que vous envisagez de supprimer des aides à l'emploi ?
M. Juppé : J'envisage de supprimer les aides qui sont mauvaises et de garder celles qui sont bonnes. C'est cela la seule réponse.
M. Poivre d'Arvor : Et là vous pouvez nous donner des détails ?
M. Juppé : Non, parce que c'est mon travail du mois de juin. Je vais recevoir demain un rapport du Parlement sur cette question ; je ne l'ai pas encore, il me sera rendu demain. Plusieurs autres rapports sont en cours de fabrication et donc, tout au long du mois de juillet, je vais travailler avec mes ministres, pour en tirer les conséquences et je présenterai le 15 septembre ou le 20 septembre, selon le calendrier traditionnel, un projet de loi de finances pour l'année prochaine qui fixait très clairement les objectifs.
Il ne s'agit pas de faire la chasse aux dépenses publiques pour le plaisir de faire la chasse aux dépenses publiques. Il faut lutter contre les gaspillages, les doubles emplois, les dépenses inefficaces, et avec une préoccupation qui doit être constante : c'est non seulement de ne pas pénaliser, mais même de protéger les plus modestes, parce que très souvent la dépense publique est protectrice des plus modestes, et cela, nous devons le garder en tête en permanence dans nos arbitrages.
M. Poivre d'Arvor : Et faut-il rétablir l'autorisation administrative de licenciement que vous aviez supprimée il y a 10 ans ?
M. Juppé : Je disais que j'étais stupéfait de voir combien les vieilles lunes revenaient… Quand nous avons non pas supprimé complètement, mais beaucoup assoupli cette autorisation administrative de licenciement, on nous avait dit qu'il y aurait des vagues de licenciements extraordinaires. Dans la période qui a suivi, grâce à la politique que Jacques Chirac, Premier ministre à l'époque, avait menée, nous avons eu le plus grand nombre de créations d'emplois des 15 dernières années - 88, 89, 90.
Bien sûr, il faut des règles et il y a des plans sociaux, des contrôles. Mais revenir à une rigidité supplémentaire, poser en principe que le licenciement est interdit, c'est dissuader tout ce qu'il y a de petites et moyennes entreprises dans notre pays d'embaucher, et ce sera le résultat exactement inverse de ce qu'on promet aux Français. On l'a vu d'ailleurs dans le passé, on en a fait l'expérience, on sait comment cela fonctionne, on a pu en juger : le chômage a doublé entre 1981 et 1986.
M. Sylvestre : Il y a un conflit très grave actuellement sur Air Inter - Air France. Considérez-vous que la solution envisagée pour en sortir, à savoir une fusion entre les deux compagnies, est une solution raisonnable, souhaitable ? Au jour d'aujourd'hui, vous le savez, la situation est socialement bloquée, et techniquement également bloquée, puisque demain il y a grève avec annulation des vols.
M. Juppé : Là aussi, il faut en revenir au fond du problème. Qu'est-ce qui se passe ? Il faut expliquer pourquoi on veut fusionner, parce que sans cela les Françaises et les Français qui nous écoutent ne comprennent pas...
M. Sylvestre : Vous voulez fusionner ?
M. Juppé : ... Pourquoi le président de l'entreprise veut fusionner et pourquoi je pense que c'est vraisemblablement, comme d'ailleurs le syndicat des pilotes d'Air France vient de le dire, une bonne solution.
Pourquoi ? En 1992, sous un gouvernement socialiste, la France a accepté l'ouverture de son ciel à la concurrence, c'est-à-dire qu'il n'y aura plus, en 1997, de monopole de nos compagnies nationales et que d'autres compagnies, françaises d'ailleurs ou étrangères, pourront offrir leurs services aux usagers. Cela a déjà commencé. Je vais souvent à Bordeaux par les lignes aériennes et je vois qu'il y a plusieurs compagnies françaises qui proposent leurs services. Cela a été décidé en 1992, par un gouvernement socialiste.
Quel est le résultat ? Ces nouvelles compagnies ont cassé les prix, et c'est très bon pour les usagers qui désormais peuvent prendre l'avion beaucoup moins cher. Il faut donc que nos compagnies nationales, publiques, puissent s'adapter. Elles ont commencé à baisser leurs prix. Mais si elles baissent leurs prix sans baisser leurs coûts, elles sont en faillite. Et c'est ce qui est en train de se passer, mois après mois, dans certaines d'entre elles, avec des résultats négatifs.
D'où la question que pose Monsieur Blanc, le patron de cette entreprise comment adapter Air Inter, Air France Europe, Air Inter Europe, à la concurrence ? Et il propose quoi ? Là aussi, il faut en revenir à des choses très précises. Il propose notamment que les rémunérations des pilotes d'Air Inter soient alignées sur celles des pilotes d'Air France, que ce soit les mêmes. À l'heure actuelle, les pilotes d'Air Inter sont payés je crois 15 % plus cher. Pour sauvegarder l'entreprise, pour sauvegarder notre pavillon français non seulement en France, mais en Europe et dans le monde, voilà ce qui est proposé, voilà l'objet du conflit.
Alors je demande aux Françaises et aux Français de réfléchir à cela. Face à cette situation, qui ne comporte pas que des inconvénients, qui comporte de gros avantages pour l'usager, pour tous les Françaises et les Français qui prennent l'avion, est-ce que cela ne vaut pas la peine qu'on se mette autour de la table plutôt que de faire des grèves et qu'on cherche des solutions constructives ?
M. Bachy : Monsieur le Premier ministre, vous parliez tout à l'heure de la réforme de la sécurité sociale qui a effectivement marqué votre première année à Matignon. Vous me direz que j'ai tendance à ne retenir que les aspects négatifs, mais c'est vrai que les déficits ont explosé par rapport à ce qui était prévu. Il était prévu 17 milliards, on va dépasser les 50. Comment expliquez-vous cela ? Est-ce que Philippe Séguin, dans le Nouvel Observateur de cette semaine, a raison de dire : « Ramener les déficits publics et sociaux à moins de 3 % du PIB quand on n'a moins de 3 % de croissance, c'est du masochisme » ?
M. Juppé : D'abord, juste quelques précisions pour être tout à fait exact. Vous dites que les déficits explosent. En 1995, le déficit de la sécurité sociale, je parle de mémoire, a été de 67 milliards. La prévision pour 1996 n'est pas de plus de 50 comme vous venez de le dire, la prévision est de 48.
M. Bachy : Par rapport à ce qui était prévu.
M. Juppé : Oui, ce n'est pas exactement une explosion des déficits, c'est une diminution par rapport à l'année dernière de 25 à 30 %. Mais je suis d'accord avec vous : ce n'est pas ce que nous avions prévu et ce n'est pas satisfaisant. Cette prévision est une prévision, faite au mois d'avril pour l'année 96, qui est loin d'être terminée, et donc nous allons faire en sorte que cette prévision ne se réalise pas.
Mais voilà un exemple très précis de ce que je disais tout à l'heure quand je demandais qu'on juge les réformes sur la durée. La réforme de la sécurité sociale, comment cela s'est-il passé ? D'abord, il a fallu la préparer : entre le mois de juin et le mois de novembre, j'ai beaucoup travaillé, pas tout seul, avec les ministres compétents, avec Jacques Barrot et d'autres encore. Nous avons beaucoup consulté. Le 15 novembre, j'ai proposé les lignes générales de cette réforme. Ensuite, il a fallu prendre les textes nécessaires et cela a demandé au moins six mois. Ce n'est pas encore d'ailleurs tout à fait terminé, parce que nous sommes dans une démocratie et que les textes, il faut les soumettre à des tas d'organismes ; quand ce sont des lois, il faut les faire voter par le Parlement.
Donc les outils de la réforme de la sécurité sociale, nous ne les avons pas tous encore, ils ne sont pas tous opérationnels, et on veut juger une réforme avant qu'en réalité elle soit entrée dans la vie quotidienne, je vais prendre un seul exemple : dans cette réforme, il y a un élément très important qui est le carnet de suivi médical, qui va permettre à la fois à votre médecin et à vous-même de voir un peu comment cela se passe pour vous, quels sont les médicaments qu'on vous prescrit, si vous en avez besoin, etc…
M. Poivre d'Arvor : On ne l'a toujours pas, ce carnet de santé.
M. Juppé : Vous ne l'avez pas, 1. Parce que les textes qui l'instituent sont sortis il y a quelques semaines ; 2. Parce qu'il faut en fabriquer 30 millions ; 3. Parce qu'il va falloir en distribuer 30 millions.
Je pense donc que les Français comprennent qu'avant de mettre cela dans la vie quotidienne et avant que cela ne donne des résultats réels, il faut du temps. C'est pour cela que ces réformes, celle-là comme les autres, comme la réforme de la défense nationale ou la réforme de l'État, ne se font pas en claquant des doigts. Cela demande de la persévérance.
M. Sylvestre : Et sur le masochisme qu'évoquait Philippe Séguin ?
M. Juppé : Ne comptez pas sur moi pour dire quoi que ce soit, surtout pas avec les amis.
M. Sylvestre : Est-ce que l'administration ne pourrait pas essayer de travailler un peu plus vite ?
M. Juppé : Elle travaille beaucoup, l'administration, elle travaille beaucoup, mais c'est difficile, cela prend du temps. Quand il faut faire voter des textes, je le répète, il y des procédures parlementaires... Nous la poussons, pour qu'elle travaille plus vite.
M. Poivre d'Arvor : Nous Lions parler d'une autre réforme qui tient au cœur de beaucoup de Français : trop d'impôt tue l'impôt, cette douce formule a sonné assez mélodieusement à l'oreille de chaque contribuable pendant la campagne présidentielle. Vous n'avez pas peur d'être épinglé, comme l'a été aujourd'hui un conseiller général de Meurthe-et-Moselle, pour fausses promesses électorales ?
M. Juppé : On peut jouer, mais moi je ne joue pas ; c'est sérieux, tout cela. Il y a deux ·façons de faire la baisse des impôts : une façon démagogique, c'est-à-dire en baissant précipitamment les impôts pour faire plaisir, à un moment où l'on n'est pas sûr d'en avoir les moyens. C'est ce que je n'ai pas fait l'année dernière. Quand je suis arrivé, la première chose que j'ai été obligé de faire, c'est de colmater les brèches.
M. Poivre d'Arvor : Donc vous les avez augmentés.
M. Juppé : Oui, j'en ai baissé certains, qu'on a beaucoup oubliés. On a baissé 40 milliards d'impôts sur les petites et moyennes entreprises quand elles embauchent des personnes peu qualifiées.
M. Sylvestre : Le total des prélèvements représentait près de 100 milliards, quand même.
M. Juppé : Sur deux ans. Je ne nie pas qu'on les ait augmentés, mais pourquoi ? Je vais vous donner un seul exemple de la situation que nous avons trouvée : la Recherche. C'est important, la Recherche, cela engage l'avenir. Entre 91 et 93, on a fait des autorisations de commandes, de dépenses de Recherche, très généreuses. On avait oublié une seule chose : c'est de mettre les crédits pour payer les commandes. Et le décalage entre les autorisations de commander et les crédits pour payer était de 9 milliards, sur la Recherche... On n'avait pas le droit de faire l'impasse. Et il a fallu 94, 95, 96, pour boucher les trous.
Dans un premier temps, j'ai colmaté. Et je pense qu'aujourd'hui, grâce aux efforts que nous avons demandés à tous, à toutes les Françaises, à tous les Français, nous sommes en mesure, à partir de 97, d'engager sérieusement, c'est-à-dire sans compromettre l'équilibre budgétaire, une vraie baisse des impôts pluriannuelle. Et je présenterai, dans la loi de finances de 97, je le répète, c'est-à-dire le 15 ou le 20 septembre, un barème de l'impôt sur le revenu qui comportera une première baisse de l'impôt sur le revenu dès 1997, avec des phases 98, 99 et sur 5 ans.
M. Sylvestre : Très concrètement, quelle est votre marge de liberté et de combien peut être la baisse de l'impôt sur le revenu ?
M. Juppé : Je vous le dirai volontiers, monsieur Sylvestre, lorsque j'aurai terminé mon travail du mois de juillet, c'est-à-dire le bouclage des dépenses. Je me suis fixé un objectif : c'est que l'État ne dépense pas plus en 1997 qu'en 1996. C'est un objectif très ambitieux, parce que la dérive naturelle depuis 10 ou 15 ans nous mène très au-delà. Si j'arrive à tenir cet objectif, nous aurons à ce moment-là les chiffres précis qui nous permettront au mois de septembre d'annoncer très clairement la couleur en ce qui concerne la baisse de l'impôt sur le revenu.
M. Poivre d'Arvor : Et la baisse de la TVA que préconise par exemple le président de l'UDF, François Léotard, vous n'y croyez pas ?
M. Juppé : Baisser la TVA d'un demi-point, c'est le type même de mesure qui coûte cher, 20 milliards, et qui n'a aucune espèce d'incidence, parce que personne ne s'en rendra compte.
Quand la croissance sera suffisamment soutenue, année après année, et je le prévoirai dans mon plan à 5 ans, nous ferons ce que j'avais dit, c'est-à-dire que nous supprimerons les majorations exceptionnelles d'impôt. Mais la priorité ne me semble pas là. La priorité, telle que je l'ai exprimée il y a quelques semaines, en recevant le Rapport La Martinière, c'est de réaliser cette baisse de l'impôt sur le revenu et la réforme des cotisations salariales qui financent actuellement notre système d'assurance maladie.
M. Poivre d'Arvor : Pour s'en tenir justement à ce Rapport La Martinière, est-ce que vous allez vous en prendre aux avantages dont bénéficient les titulaires d'assurance-vie, comme il le préconise ?
M. Juppé : L'année dernière, dans les mesures fiscales que nous avions proposées, à la mi 95, il y a eu la remise en cause de certains avantages de l'assurance-vie. C'est un système qui les trustent, pardon qui les cumulent : à l'entrée, pendant, à la sortie. C'est vraiment une niche fiscale, comme on dit, extraordinaire. Et on m'avait dit à l'époque : « Catastrophe ! Vous allez tuer l'assurance-vie ». Résultat : au cours des premiers mois de l'année 1996, tous ceux qui placent de l'assurance-vie m'ont dit que ça a explosé : 25 à 30 % de contrats de plus...
M. Poivre d'Arvor : Donc c'est une bonne niche pour vous.
M. Juppé : Ce qui prouve d'ailleurs qu'il y a de l'épargne en France. Je crois qu'il faudra corriger un certain nombre d'inégalités, d'injustices ou de privilèges, de façon qu'on ne pénalise pas ceux qui ont besoin de recevoir un peu d'allègement fiscal.
M. Sylvestre : Cela veut dire que vous avez commencé à nettoyer notre système fiscal qui est très compliqué en termes d'exonération. Une mesure que vous aviez prise, qu'on avait surnommée, pardonnez-moi, la « juppette », qui était cette prime à l'achat d'automobiles...
M. Juppé : Ce n'est pas méchant.
M. Sylvestre : ... Et qui vient à expiration à la fin de l'été, au mois d'août : les constructeurs automobiles s'en inquiètent et réclament ou une confirmation ou un prolongement.
M. Juppé : Je voudrais d'abord dire qu'on a beaucoup dit qu'il y avait un effondrement des immatriculations d'automobiles au mois de juin. Vous avez regardé les chiffres, je sais que vous êtes un bon spécialiste. Quand on compare juin 95 à juin 96, en fait on compare avec un mois où la « balladurette » avait provoqué une explosion des immatriculations. En fait, sur le premier semestre 96, on est en croissance d'un peu plus de 2,5 % par rapport au premier semestre 95. Donc cela ne se passe pas si mal...
M. Poivre d'Arvor : Qui profite aux voitures étrangères.
M. Juppé : J'ajoute que malheureusement ce ne sont pas les constructeurs français qui en profitent le plus, et là il y a préoccupation.
Est-ce qu'il faut prolonger une aide sous cette forme-là ou sous autre forme ? Je ne suis pas en mesure de vous le dire aujourd'hui. Nous en discuterons avec les professionnels et avec ceux que cela concerne.
M. Sylvestre : Certains réclament une baisse de la TVA sur l'automobile.
M. Juppé : Il y a une première chose que je voudrais dire : quand on est sérieux, si on veut éviter de faire plonger les immatriculations, on n'annonce pas une baisse de la TVA, parce que c'est la meilleure manière de signifier aux gens qu'ils ont intérêt à ne pas acheter aujourd'hui et à attendre des jours meilleurs. Quand nous avons fait cela, vous vous en souvenez parce que vous suivez cela très attentivement, en septembre 1987, j'étais ministre du budget à l'époque, nous ne l'avons pas annoncé à grands sons de trompe. Alors, un peu de sens des responsabilités dans ce domaine ! J'ajoute qu'il faut tenir compte de la réglementation communautaire dans ce domaine et qu'on ne peut pas faire n'importe quoi.
M. Poivre d'Arvor : Dans les mesures que vous pourriez proroger à titre exceptionnel, il y avait le doublement de l'allocation de rentrée scolaire. C'est ce que vous envisagez de refaire pour l'automne prochain ?
M. Juppé : Il y aura à la rentrée une mesure permettant d'aider les familles modestes. Je ne peux pas vous dire exactement encore sous quelle forme ; nous sommes en train d'y travailler.
Je voudrais à ce propos d'ailleurs, parce qu'on a beaucoup parlé du pouvoir d'achat, de la consommation, souligner que le SMIC a été augmenté de 4,5 % l'année dernière. Cette année, on a dit 0,5, mais on a oublié l'augmentation du mois d'avril : 2,5, ce qui est déjà très significativement au-dessus de la hausse des prix. Donc nous avons soutenu le pouvoir d'achat des plus modestes, dans la mesure de ce qui était possible, compte-tenu de la situation économique.
M. Poivre d'Arvor : C'est-à-dire qu'on n'est plus dans le domaine du coup de pouce, mais du coup d'ongle, parce que vous ne pouvez pas plus.
M. Juppé : Non, non, 2,5 % ce n'est pas un ongle, ce n'est pas du tout un ongle. Et 4,5, c'est presque un doigt...
M. Poivre d'Arvor : Vous ne le dites pas précisément, mais vous dites quand même un peu aux gens qu'il va falloir se serrer la ceinture, parce que c'est dur...
M. Juppé : Non, je ne dis pas ça.
M. Poivre d'Arvor : Non, mais on sent bien que le tableau que vous décrivez de ce que vous avez découvert quand vous êtes arrivé à Matignon est un tableau relativement sombre. Est-ce que vous demandez la même chose à l'État ? Je sais que vous le demandez, parce que vous le répétez assez souvent. Est-ce que vous êtes content des résultats de l'État, et par exemple de l'aide que vous apporte le Parlement là-dessus ? Est-ce qu'ils ont bien fait leur travail pour vous aider à trouver justement des économies budgétaires ?
M. Juppé : Je voudrais vous dire que je ne dresse pas un tableau sombre. J'essaie de dresser un tableau vrai et dans ce tableau, il y a des choses qui marchent et il y a des choses qui ne marchent pas. Je réfute totalement la thèse de ceux qui veulent faire croire que la France est au 36e dessous. Ce n'est pas vrai, il y a des choses qui marchent bien.
On n'a pas parlé d'un élément qui est un grand succès pour la politique gouvernementale, on me dit que cela n'intéresse pas les gens mais ce n'est pas vrai, qui est la baisse des taux d'intérêt. C'est parce que nous avons restauré la confiance que les marchés portent sur l'économie française que nous avons obtenu ce résultat sans précédent. Et cela concerne tous ceux qui ont besoin de crédit : cela concerne ceux qui veulent changer de voiture, acheter un équipement ménager pour la maison. Cela concerne ceux qui veulent acheter un appartement : jamais les mensualités de remboursement n'ont été aussi basses qu'aujourd'hui.
Cela concerne toutes les entreprises qui ont envie d'investir. Voilà un résultat positif qui fait que le tableau n'est pas sombre.
Par ailleurs, une meilleure gestion des dépenses publiques, dépenser mieux pour dépenser moins, ce n'est pas la rigueur, ce n'est pas l'austérité, ou alors cela voudrait dire qu'il ne faut pas lutter contre les gaspillages. Je ne comprendrais pas cela. Cela veut dire qu'il faut au contraire introduire davantage d'efficacité en préservant la situation des plus modestes et pour donner de l'oxygène à l'économie.
M. Sylvestre : Mais justement, certains craignent que ces restrictions budgétaires, ce plan d'économies, asphyxient l'activité, asphyxient l'économie.
M. Juppé : Ce sont les mêmes qui souvent, l'année dernière, me critiquaient parce que je n'avais pas baissé suffisamment les dépenses. Je crois que là-dessus il faut regarder les choses en toute simplicité et en toute objectivité.
On a fait pendant 10 à 15 ans une politique, et vous le savez bien, Monsieur Sylvestre, et les Français le savent bien, qui a consisté à augmenter indéfiniment les dépenses publiques. Est-ce que cela a permis d'améliorer la situation de la France ? Aujourd'hui, tout le monde le demande - tout le monde... dans la Majorité, et beaucoup d'observateurs. Nous essayons de changer la logique et de dire que ce n'est pas en dépensant toujours plus qu'on réglera les problèmes de la France. C'est en dépensant mieux, en faisant des économies, en réduisant les déficits et en baissant les impôts. Et c'est cela qui va permettre de rétablir la confiance et de redonner un élan à l'économie française.
Je le répète simplement, comme je le disais tout à l'heure sur d'autres sujets, et j'espère que vous ne m'en voudrez pas de me répéter : cela demande du temps. Une telle politique, ce n'est pas en un an qu'on la juge, naturellement. Cela demande du temps, mais je crois qu'avec la persévérance, et les Français le comprendront, c'est la bonne voie. Alors que l'autre voie, parce qu'il existe une autre politique... On a souvent dit, j'ai peut-être dit moi-même qu'il n'y en avait pas d'autre...
M. Poivre d'Arvor : Oui, qu'il n'y en avait pas, notamment en parlant de celle de Philippe Séguin.
M. Juppé : Peut-être, peut-être, mais je crois aujourd'hui qu'il en existe une autre ; c'est le retour à ce qu'on a fait en 81, 82, 83 et également en 88, 89 et 90 : augmentation forte des dépenses publiques, création de très nombreux postes de fonctionnaires, augmentation des déficits, et on sait où cela mène... On le sait, on l'a vu : la récession la plus grave que notre pays ait connue en 1993. Voilà l'autre politique, elle existe.
M. Poivre d'Arvor : Vous parlez de confiance. On peut encore avoir confiance dans le politique, alors qu'on s'aperçoit que sa marge de manœuvre est de plus en plus petite et qu'au fond il ne peut pas changer fondamentalement la vie de ceux qui nous regardent ?
M. Juppé : Je n'ai jamais prétendu changer fondamentalement la vie des Françaises et des Français, parce que d'abord il faut être clair et sincère : cela dépend de chacune et de chacun d'entre nous. Aucun gouvernement ne peut changer la vie, mais on peut créer des conditions meilleures et la marge de manœuvre n'est pas si nulle que cela.
Je voudrais en prendre deux exemples, qui montrent que ce gouvernement, même s'il travaille dans la durée, est capable aussi de prendre des décisions rapides et importantes.
La vache folle : nous avons été le premier gouvernement à décréter l'embargo. J'ai dit que chaque fois que j'aurai un rapport scientifique qui fait progresser la connaissance, je le publierai tout de suite et j'en tirerai les conséquences.
M. Poivre d'Arvor : Mais pendant ce temps-là, Jacques Chirac était assez amical avec les Britanniques.
M. Juppé : Cela n'empêche pas.
M. Poivre d'Arvor : Oui, mais il laissait entendre qu'il fallait...
M. Juppé : Non, non, Monsieur Poivre d'Arvor, ne m'égarez pas par des petites remarques de ce type.
M. Poivre d'Arvor : C'est vrai.
M. Juppé : Est-ce que le gouvernement a pris, oui ou non, aussi rapidement que possible, les mesures que préconisaient les scientifiques ? La réponse est oui.
Deuxième exemple : l'amiante. Cela fait 10 ans qu'on ne parle, on n'a jamais rien fait. Quand je suis arrivé au mois de juin, j'ai demandé à l'institut scientifique qui s'appelle l'INSERM, un rapport. Il m'a été remis hier matin. Hier soir, j'ai réuni mes ministres compétents. Ce matin, le ministre compétent, Monsieur Barrot, a annoncé les mesures que nous avons prises, et notamment l'interdiction des produits qui incluent de l'amiante, y compris de l'amiante-ciment. Si ce n'est pas décider et prendre ses respc1msabilités, je ne sais plus ce que le mot veut dire.
M. Poivre d'Arvor : Vous agissez vite, mais est-ce que vous avez le sentiment d'agir avec chaleur, même si parfois, de temps en temps, vous devez un peu forcer votre nature...
M. Juppé : Vous êtes sûr qu'elle est si froide que ça ?
M. Poivre d'Arvor : Elle donne parfois l'impression...
M. Juppé : Vous avez l'air de la connaître très bien...
M. Poivre d'Arvor : Non, mais l'impression que vous donnez est celle...
M. Juppé : Méfiez-vous des apparences !
M. Poivre d'Arvor : ... De quelqu'un qui est sûr de ses chiffres, sûr de lui, très intelligent et qui parfois, en effet, ne se sent peut-être pas proche des gens qui le regardent.
M. Juppé : Oui, mais peut-être que...
M. Poivre d'Arvor : Ce n'est qu'une impression ?
M. Juppé : Peut-être que je donne cette impression. Si vous l'avez, c'est qu'elle est juste, de votre point de vue...
M. Poivre d'Arvor : Je vous posais cette question parce que je voudrais savoir si vous avez eu le sentiment, le plus objectivement possible, d'avoir réussi en un an à réduire, ne serait-ce qu'un tout petit peu, ce que vous appeliez la fracture sociale.
M. Juppé : Nous avons fait beaucoup de choses pour la réduire, oui. Je ne suis pas venu ici vous dire que tout va bien, je suis simplement venu vous dire qu'il n'est pas vrai que tout va mal - c'est sensiblement différent - et qu'il y a de bonnes raisons d'espérer. Et cela je le crois très profondément, très sincèrement, et je voudrais communiquer cette conviction aux Françaises et aux Français.
Quant à la fracture sociale, nous avons fait des choses. Cet hiver, nous avons mis en place dans un grand nombre de villes des SAMU sociaux. Je les ai vus fonctionner sur le terrain, à Paris, à Bordeaux, et nous avons même pérenniser ces SAMU sociaux pendant l'été. Cela a évité bien des difficultés antérieures.
De même, nous avons réquisitionné des logements vacants ; on ne l'avait jamais fait avant, personne n'avait réquisitionné 500 à 600 logements pendant l'hiver dernier pour loger des sans-abri.
La fracture sociale, elle est encore préoccupante, elle est encore grave.
C'est encore un souci constant pour le gouvernement. C'est dans cet esprit que nous préparons la loi de cohésion sociale que nous proposerons au Parlement à la rentrée, mais je crois que nous avons franchi quelques étapes dans la bonne direction.
M. Poivre d'Arvor : Une toute dernière question à vous poser, qui est cette fois-ci internationale, pendant que l'on diffuse des images que nous envoie notre bureau de Moscou, le vote de Boris Eltsine. Pour l'instant, nous disent les sondages, ils valent ce qu'ils valent, apparemment 57 % pour Eltsine d'après des résultats extrêmement partiels, et une relative participation de 60 à 63 %. Entre Boris Eltsine qui, semble-t-il, et ces images le prouvent, apparaît malade ou en tout cas en situation physique difficile, et le retour au communisme, quel est votre choix ?
M. Juppé : Je ne vote pas en Russie...
M. Poivre d'Arvor : Le choix de votre cœur.
M. Juppé : C'est quand même un élément important... Ce que je veux dire d'abord, c'est que la démocratie a progressé en Russie. Il y a eu des élections convenables, tout le monde l'a reconnu, au premier tour et, apparemment, d'après les chiffres que vous donnez, il y a également une bonne participation relative au deuxième tour. Donc mon parti en Russie, si je dois en choisir un, c'est tout simplement celui de la démocratie et des réformes. Ce que je souhaite au peuple russe, tout simplement, mais c'est à lui de choisir naturellement, c'est de ne pas retomber dans les errements qui, pendant tant d'années, l'ont mis là où il était il y a quelques années. Il exercera son choix librement, et cela aussi, c'est un progrès formidable.
M. Poivre d'Arvor : Notre correspondant nous fait savoir à l'instant que, selon l'estimation CNN sortie des urnes, 55 % des Russes ont voté pour Boris Eltsine.
M. Juppé : Attendons le résultat.
M. Poivre d'Arvor : On attend... Je vous remercie beaucoup d'avoir été notre invité et d'avoir montré les différentes facettes de votre personnage...
M. Juppé : Grâce à vos questions.
M. Poivre d'Arvor : Demain, dans la même configuration, nous recevrons Lionel Jospin, que vous considérez comme le chef de l'Opposition ou comme un chef de !'Opposition ?
M. Juppé : Je crois qu'il est Premier secrétaire du parti socialiste. Je ne le vois pas souvent à l'Assemblée nationale parce qu'il n'a pas peut-être la possibilité d'y siéger.
M. Poivre d'Arvor : On lui posera la question.
Dans un instant, la Météo, suivie d'lntervilles : c'est le retour d'lntervilles, animé par Jean-Pierre Foucaud et cela se passera dans un endroit que vous connaissez bien, à Provins ; ce sera Provins-Montereau. Et ensuite le Commissaire Moulin.
Je vous souhaite à tous une excellente soirée. Merci beaucoup.