Texte intégral
Le Parisien - 26 août 1996
Le Parisien : Et vous, êtes-vous optimiste ?
Jean Arthuis : Moi, je vois la rentrée avec confiance. Pendant de longues années, nous avons vécu à crédit. Il était urgent de rompre avec ces pratiques irresponsables. Aujourd'hui, l'économie s'est assainie, les dépenses publiques sont maîtrisées. Toutes les conditions sont réunies pour aller de l'avant, pour créer de l'emploi. Ne soyons pas les derniers à croire en nous-mêmes !
Mon espérance prioritaire est la même que celle de tous les Français : la baisse du chômage. C'est aussi la préoccupation essentielle du gouvernement. Toutes les réformes structurelles déjà mises en œuvre doivent y contribuer. En réduisant les déficits, en maîtrisant les dépenses, afin d'alléger l'impôt, nous créons les conditions d'une croissance plus soutenue. Cette croissance, c'est aussi l'addition des initiatives, des efforts de tout un chacun.
Quant à savoir pour quelle catégorie la rentrée sera plus facile ou plus difficile, je ne veux pas y répondre. Nous devons apaiser les mauvaises querelles qui opposent parfois les Français. Il importe de rassembler nos forces.
France Inter - vendredi 6 septembre 1996
France Inter : Nous allons essayer d'être très concret pour cette réforme des impôts, mais d'abord la question qui fâche : pourquoi avoir choisi une baisse de l'impôt sur le revenu et non une baisse de la TVA qui aurait touché tout le monde, tous les consommateurs qui hésitent à consommer précisément ?
J. Arthuis : Parce que nous voulions donner un avantage à ceux qui travaillent, à ceux qui entreprennent, qu'il s'agisse des salariés, qu'il s'agisse des travailleurs indépendants, des agriculteurs, des commerçants, des industriels, des professions libérales, il y avait manifestement un excès d'imposition. C'est donc pour corriger ce défaut de notre fiscalité que nous avons engagé cette réforme. L'impact est considérable puisque dès l'année 1997, le poids de l'impôt sur le revenu va être allégé de 25 milliards. Mais vous avez vu aussi que si en effet on donne un encouragement à ceux qui travaillent, à ceux qui entreprennent, parce qu'on ne fait pas de croissance sans donner des motivations, une mobilisation à tous ceux qui prennent des risques et qui vont de l'avant, il y a un barème qui privilégie les familles nombreuses et les contribuables modestes. Il y avait une sorte de piège à chômage à l'entrée quand on était dans une situation de demande d'emploi et que l'on se voyait offrir un SMIC, du fait de l'impôt il pouvait y avoir plus qu'une hésitation. Tout cela disparaît.
France Inter : En attendant, ceux qui sont réellement chômeurs et qui le sont toujours, les plus pauvres, risquent de se sentir un peu frustrés quand même ?
J. Arthuis : Oui, mais comprenez bien que ce qui s'accomplit ici a pour objet de donner un déclic, que l'on puisse entreprendre, aller de l'avant et ne pas se dire que plus on travaille, plus on se voit confisquer le fruit de ce revenu du travail.
France Inter : Et quid des retraités ?
J. Arthuis : Les retraités ne vont pas subir de préjudices puisque le barème s'applique à tout le monde. Il y aura simplement un des avantages qui est concédé aux pensions les plus élevées. Vous savez qu'il y a un abattement de 20 % qui est maintenu pour tout le monde, il y a également un abattement de 10 %. S'agissant de cet abattement de 10 % sur les pensions, il est maintenu mais il sera plafonné progressivement à 10 000 francs alors qu'il est actuellement autour de 31 000 francs.
France Inter : Le Premier ministre a dit « baisse sensible dès le premier tiers provisionnel », est-ce que ça sera une baisse plus importante sur le premier tiers pour accélérer l'effet psychologique ou est-ce que ça sera à concurrence d'un tiers, c'est-à-dire étalé sur l'ensemble de l'année ?
J. Arthuis : Ma proposition, puisque l'impôt se trouvera en moyenne allégé en 1997 par rapport à 1996 de 8 à 9 %, est que l'on puisse sur chaque tiers provisionnel déduire dans cette proportion le montant qui devait être acquitté. Ceci sera vrai pour les tiers provisionnels mais également pour les paiements mensualisés.
France Inter : C'est-à-dire que ça sera la mensualité qui sera déduite d'autant ?
J. Arthuis : Voilà.
France Inter : Et cela dès le 1er janvier ?
J. Arthuis : Voilà.
France Inter : Il y a des déductions spécifiques, supprimées pour certaines professions, une centaine – je me sens un tout petit peu concernée –, comment est-ce que ça va se passer, est-ce que ça sera une baisse progressive du plafond ? Jusqu'à présent ces déductions se faisaient sur 50 000 francs du salaire ? Est-ce que l'on passera à 40 000, 30 000, etc. ?
J. Arthuis : Le plafond va progressivement disparaître sur la période de cinq ans. Je précise que certains pourront faire valoir que s'ils avaient su que cet avantage disparaissait, ils auraient gardé la justification de leurs frais professionnels. Ce dispositif ne s'appliquera pas sur les revenus 1996, c'est-à-dire sur l'impôt qui sera payé en 1997. C'est à partir de l'impôt à payer en 1998 sur les frais professionnels de 1997 que s'appliquera ce dispositif. C'est à ce moment-là que s'enclenchera le processus de disparition de ces avantages particuliers.
France Inter : Parlons maintenant de la CSG. Le Premier ministre a annoncé une baisse des cotisations salariales d'assurance-maladie de 1,3 %, compensée par 1 % de CSG supplémentaire, mais « une CSG dont la base sera élargie » a-t-il dit. Alors élargie à quoi, élargie à qui ?
J. Arthuis : À des revenus qui jusqu'à maintenant échappaient à cette CSG. Jusqu'à maintenant, pour l'essentiel, il s'agissait des revenus du travail, la CSG, les 2,4, le socle non déductible s'appliquera à un certain nombre de revenus de placements, de revenus du capital.
France Inter : Vous pouvez être plus concret, plus précis, nous donner quelques exemples ?
J. Arthuis : Il y avait par exemple, sur des intérêts faisant l'objet de prélèvements libératoires, il y avait d'autres éléments sur les dividendes qui échappaient à ce prélèvement. Il y aura cette fois-ci extension.
France Inter : Et l'assurance-vie, le placement chouchou des Français sera-t-il épargné ?
J. Arthuis : Franchement, il y a très peu de modifications sur l'assurance-vie. La seule chose que l'on va faire disparaître est la déduction à l'entrée, cette réduction qui pouvait être de 1 000 francs pour un couple marié et ceci progressait en fonction du nombre d'enfants. Mais ça ne s'appliquera qu'aux contrats qui seront conclus postérieurement au 5 septembre 1996. Autrement dit, sur la situation antérieure, pas de modification, l'État tient ses engagements mais à compter de maintenant pour les contrats nouveaux, cet avantage disparaît.
France Inter : Les avantages acquis restent acquis ?
J. Arthuis : Ils restent acquis à ceux qui en sont bénéficiaires !
France Inter : Parlons des fonds d'épargne retraite. Le Premier ministre a dit qu'il consulterait les organismes de retraite mais est-ce que les banques vont être dans le coup, autrement dit est-ce que l'on va vers ces fameux fonds de pension que réclament les banques, les compagnies d'assurance ?
J. Arthuis : D'abord je voudrais bien souligner que le socle restera la retraite par répartition. Mais j'ai ouvert une concertation, il y a maintenant une semaine, avec l'ensemble des partenaires sociaux pour parvenir à un accord sur la constitution de fonds d'épargne retraite. Il s'agit de permettre aux salariés qui le souhaitent dans les entreprises qui en font l'option de participer par des versements annuels à la constitution d'une épargne. L'effort qui sera fait par chaque salarié sera déductible de son revenu et lorsque viendra l'âge de la retraite, ce salarié bénéficiera d'un supplément de pension qui, lui, entrera dans ses revenus. Mais tous les acteurs, tous ceux qui sont spécialisés dans le domaine de l'épargne, de la retraite, pourront gérer de tels fonds, dédiés aux organismes mutualistes, comme aux compagnies d'assurance, comme aux banques.
France Inter : L'augmentation de la taxe sur l'essence, vous avez déjà une idée de son montant ?
J. Arthuis : Dans la proportion de l'inflation.
France Inter : Pas plus ?
J. Arthuis : Pas plus.
France Inter : Cet ensemble de dispositions présentées hier constitue-t-il la grande réforme fiscale annoncée par le gouvernement ou est-ce simplement un petit morceau de réforme applicable dès maintenant pour relancer la consommation ?
J. Arthuis : Oui, c'est la grande réforme. On a beaucoup dit, et à raison, que notre impôt sur le revenu était compliqué, illisible, qu'il pénalisait ceux qui travaillaient. Je crois vraiment que c'est la grande réforme. Les contribuables vont s'en rendre compte. Je prends par exemple la situation d'un couple marié avec trois enfants, un couple qui gagnerait entre 16 et 17 000 francs par mois, dès 1997 – sur les revenus 1996 – l'allégement d'impôt sera de 30 %. Et au bout de cinq ans, ce couple, en raison de ses charges familiales, ne paiera plus d'impôt. Voilà une politique qui se met tout à fait au service de la famille, ce sont des allégements momentanés. Pendant qu'une famille a en charge ses enfants, elle échappe ainsi substantiellement au paiement de cet impôt.
RTL - lundi 9 septembre 1996
G. Leclerc : Un sondage paru dans « La Tribune » montre que huit Français sur dix assurent qu'ils ne consommeront pas davantage et que selon eux la réforme fiscale n'aura pas d'effet sur la croissance et le chômage. Ce n'est pas très encourageant tout ça ?
J. Arthuis : Je crois que c'est un sondage à chaud. Moi, ce que je sais, c'est qu'en 1997, le produit de l'impôt sur le revenu va être allégé de 25 milliards de francs, c'est-à-dire à peu près 9 % du produit de l'impôt sur le revenu qui est autour de 300 milliards. C'est une réforme sur 5 ans. C'est 75 milliards d'allégement, c'est-à-dire 25 % du produit de l'impôt sur le revenu. Et ce qui doit être souligné, c'est que l'ensemble des contribuables, de ceux qui paient l'impôt sur le revenu, en paiera moins à partir de 1997, en particulier les familles modestes, les familles nombreuses et puis tous ceux qui travaillent, ceux qui sont salariés, ceux qui entreprennent, ceux qui prennent des risques. Qu'ils soient commerçants, artisans, qu'ils soient chefs d'entreprise, professions libérales, ils paieront moins d'impôt, c'est-à-dire qu'on va libérer leur énergie, on va mettre en mouvement, on va mobiliser, c'est sans précédent. C'est la grande réforme. J'ajoute que c'est une simplification de cet impôt qui, au fil des ans, était devenu complexe et illisible.
G. Leclerc : Mais les gens sont toujours prudents. Ils disent : certes, il va y avoir une baisse mais est-ce qu'on ne va pas la récupérer d'un autre côté ? Il y a un certain nombre d'abattements qui vont être supprimés, sur l'assurance-vie, sur les déductions d'intérêts d'emprunt, les abattements sur certaines professions. Plus les hausses de l'essence, du tabac, etc. Est-ce que finalement tout ne va pas se compenser ?
J. Arthuis : Non, non. Les 25 milliards de 1997, les 75 milliards de la période 1997-2001, c'est le net c'est-à-dire la différence entre ce que coûte cette réforme. Elle coûte près de 100 milliards. Alors, on récupère une vingtaine de milliards par la suppression d'un certain nombre d'avantages, que vous venez d'évoquer. Ça c'est la mesure simplification, et c'est je crois la mesure justice également. Mais c'est bien un allégement global de 75 milliards, dont 25 dès 1997. Donc, qu'on n'ait pas ce doute, car il n'est pas fondé.
G. Leclerc : Il y a aussi des dissonances dans la majorité. « La route choisie n'est pas la bonne », a dit hier Charles Pasqua. Et puis Alain Madelin a dit que « le choix fiscal n'allait pas provoquer la relance économique », il dit : « Nous sommes en déflation, il faudrait des mesures plus fortes que celles-là ».
J. Arthuis : Nous ne sommes pas en déflation. Pour qu'il y ait déflation, il faut qu'il y ait baisse des prix, baisse des revenus et baisse de la valeur du patrimoine, baisse de la production intérieure également. Ça n'est pas la situation.
G. Leclerc : Nous n'en sommes pas loin, il y a eu baisse de la production au deuxième trimestre ?
J. Arthuis : Non, attention. Le deuxième trimestre est un trimestre qui est plein de trous : il y avait le 1er mai, le 8 mai qui sont tombés en milieu de semaine alors que le premier trimestre avait été excellent. Le premier trimestre avait bénéficié du 29 février. Donc, sur le premier semestre 1996, nous sommes en croissance de 0,7 %. Nous voudrions que ce soit supérieur, mais c'est positif, en dépit du fait que dans certains secteurs il y a baisse des prix. Mais c'est vrai depuis très longtemps, la baisse des prix dans certains secteurs du fait du progrès, du fait de la concurrence.
G. Leclerc : Donc, nous ne sommes pas en déflation.
J. Arthuis : Nous ne sommes pas en déflation !
G. Leclerc : Vous pensez que la croissance est en train de revenir ?
J. Arthuis : Absolument.
G. Leclerc : Que la fin de l'année sera meilleure et que 1997 sera meilleure encore ?
J. Arthuis : Absolument. Et l'hypothèse que je retiens pour construire le budget 1997, c'est une croissance de 2,3 %. Les Allemands seront pratiquement au même niveau. C'est une croissance qui pourrait bien être supérieure. Je retiens 2,3 %. Je rejoins ainsi les prévisions faites par l'OCDE, par le FMI et, je le crois, un certain nombre de prévisionnistes.
G. Leclerc : Donc pas de déflation mais en revanche des inquiétudes sur la Sécurité sociale. Votre collègue Alain Lamassoure a dit hier qu'il n'y aurait pas d'équilibre en 97, et peut-être même pas en 98. Ça veut dire de nouveaux prélèvements en vue ?
J. Arthuis : Ce qu'il s'est passé, c'est que tous ces instruments nouveaux, résultant des ordonnances, résultant de la réforme du financement de la protection sociale, ont été mis en place progressivement Certains il y a quelques jours – la nomination des directeurs des agences régionales ! Donc, pour que le dispositif soit complétement efficace, il faut encore attendre quelques mois, mais je puis assurer que toutes les mesures sont prises et qu'en effet, à la fin de l'année 1997, nous tendrons vers l'équilibre.
G. Leclerc : Sans prélèvements nouveaux ?
J. Arthuis : Il y aura sur 1997 – je l'ai dit la semaine passée – un supplément sur le tabac, un supplément sur l'alcool, parce qu'il y a un lien direct entre la consommation d'alcool et de tabac et les problèmes de santé et le coût de la santé. Mais qu'on n'aille pas dire que c'est ceci qui va en quelque sorte neutraliser l'avantage que l'on consent au titre de l'impôt sur le revenu. Quant à l'essence, c'est juste l'ajustement à l'inflation. Par conséquent, ça n'est pas une augmentation.
G. Leclerc : Les économies budgétaires : combien d'emplois de fonctionnaires en moins ?
J. Arthuis : Ce sera de l'ordre de 6 500 emplois civils. Il ne s'agit pas de licenciements, il s'agit de départs en retraite qui ne font pas l'objet de remplacement. Mais c'est une fraction seulement du nombre des départs en retraite.
G. Leclerc : France Télécom : l'État va récupérer 37 milliards de francs qui servaient à payer les retraites, et cela dès 97. Il n'y a pas là un tour de passe-passe bizarre ?
J. Arthuis : Non, certainement pas. Pour France Télécom, l'État va être en quelque sorte la caisse de retraite pour ceux des agents de Télécom qui ont eu ou qui ont le statut de fonctionnaire qui sont en retraite ou qui seront demain en retraite. C'est-à-dire que chaque année, France Télécom versera au budget de l'État une cotisation de retraite comme le ferait tout employeur à l'égard d'une caisse de retraite. Donc l'État recevra cette cotisation annuelle et versera chaque année sur ses deniers les pensions aux retraités de France Télécom. Mais ça ne fera pas tout à fait l'équilibre. Il y aura un peu moins de ressources que de versements de pensions. Alors, aujourd'hui, France Télécom verse, outre 37 milliards, 500 millions.
G. Leclerc : Ce sera dans une cagnotte ?
J. Arthuis : On va le laisser dans une cagnotte. On va gérer ça en bon père de famille. Et le produit de ce placement contribuera à l'équilibre annuel des pensions de France Télécom.
G. Leclerc : Et la privatisation demandée par M. Bon pour le printemps 97 ?
J. Arthuis : C'est pour le printemps et je souhaite que ce soit très populaire.
L'Express - 12 septembre 1996
Corinne Lhaïk : Comment expliquez-vous la morosité actuelle ?
J. Arthuis : Les Français prennent conscience de deux phénomènes. Le premier, c'est la dégradation de la gestion publique. On a laissé s'installer des dysfonctionnements, on a parlé de rigueur sans l'appliquer. Aujourd'hui, l'État et le citoyen sont enfermés dans une relation difficile. Ou bien le citoyen demande beaucoup à l'État, ou bien il l'accuse de lui compliquer la vie et de l'écraser d'impôts.
Le second phénomène, c'est la mondialisation de l'économie. Nous en avons tiré profit, mais nous avons aussi importé des chômeurs, parce que nous n'avons pas procédé aux réformes structurelles nécessaires. Tout cela suscite du doute.
Corinne Lhaïk : Votre réforme fiscale va-t-elle vraiment permettre d'en sortir ?
J. Arthuis : C'est la grande réforme. Elle est orientée vers ceux qui travaillent et qui entreprennent. Pour eux, l'impôt devenait démotivant. Ce sont eux qui vont nous permettre de rouvrir les portes du travail et vont nous aider à amplifier la croissance. Actuellement, certains contribuables peuvent être tentés d'aller se faire imposer dans des pays où les taux sont moins élevés. Certains champions de football ne choisissent-ils pas des équipes étrangères, notamment pour des raisons fiscales ? Si nous laissons faire, nous renonçons à marquer des buts au niveau mondial. Nous devons rendre la France plus compétitive, plus attractive. Il faut observer les autres pays : nos barèmes sont sensiblement plus lourds que les leurs.
Corinne Lhaïk : Croyez-vous que les Cantona et les Djorkaeff vont revenir en France parce que le taux maximal tombe de 56,8 à 54 % ?
J. Arthuis : En politique, il y a ce qui est souhaitable et ce qui est possible. Nous engageons une réforme sur cinq ans. Nous faisons un effort substantiel avec une baisse de 25 milliards de l'impôt sur le revenu. Tous ceux qui le paient constateront l'allégement. En même temps, nous allons réduire nos déficits et respecter nos engagements européens. Et nous serons au rendez-vous de la monnaie unique.
Corinne Lhaïk : Comment réduire les déficits et les impôts en même temps ?
J. Arthuis : Nos déficits publics seront contenus dans la limite de 3 % du PIB en 1997. Il est vrai que la soulte versée par France Télécom et déposée dans un fonds dédié, hors du budget, viendra en diminution des besoins de financement des administrations publiques, conformément aux règles européennes. En 1998, nous ne bénéficierons plus de cette recette exceptionnelle, mais nous respecterons encore les 3 %. Au-delà, nous devrons continuer nos efforts de maîtrise des dépenses. Nous allons présenter une projection quinquennale des recettes et des dépenses, et, en 2001 nous prévoyons un déficit aux environs de 2 %.
Corinne Lhaïk : Mais les dérapages de la Sécurité sociale ne compromettent-ils pas vos objectifs ?
J. Arthuis : Non, car en 1996 nous allons bénéficier des excédents de l'Unedic (près de 15 milliards de francs) et de divers organismes. Pour 1997, la Sécurité sociale ne reviendra pas à l'équilibre, comme nous l'espérions. Mais son déficit ne sera pas tel qu'il nous empêche de nous conformer aux 3 %. L'équilibre sera obtenu en 1998.
Corinne Lhaïk : Il y a un an, vous confiez à « L'Express » votre souhait de transférer 10 points de cotisation maladie vers la CSG. Vous êtes toujours sur la même ligne ?
J. Arthuis : Un an de Bercy, ça vous change ! Une réforme est aujourd'hui engagée qui va permettre de rendre du salaire direct aux salariés. Au-delà, il faut être prudent et prendre garde à ne pas trop taxer les revenus d'un travail qui a déjà été imposé. L'épargne peut devenir aisément délocalisable. Aujourd'hui, nous amorçons le processus. Pour poursuivre, nous nous appuierons sur la croissance, mais nos plus grandes marges de manœuvre nous les dégagerons en réformant l'État et en allégeant le montant de la dépense publique. C'est ainsi que nous remettrons la France en mouvement.