Interview de Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, avec Europe 1 le 15 février 2019, sur les relations entre l’Etat et les collectivités locales.

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  • Jacqueline Gourault - Ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

Média : Europe 1

Texte intégral

AUDREY CRESPO-MARA
Depuis que Sébastien LECORNU accompagne le président dans tous les débats, on a l'impression que c'est lui le ministre des territoires et pourtant normalement il n'est que le ministre numéro deux et c'est vous le ministre numéro un, vous vous êtes mises volontairement en retrait ?

JACQUELINE GOURAULT
Sébastien LECORNU est ministre des Relations avec les Collectivités territoriales, certes il est auprès de moi mais vous savez il y a aussi Julien De NORMANDIE, mais vous savez il y a beaucoup de travail dans ce domaine et on n'est pas trop de trois et chacun prend, comment dire, ses responsabilités et sa mission à l'intérieur du ministère.

AUDREY CRESPO-MARA
En fonction de sa nature.

JACQUELINE GOURAULT
Absolument.

AUDREY CRESPO-MARA
Alors ça fait plus d'un an et demi que vous êtes au gouvernement et vous vous mettez rarement en avant c'est par timidité, par modestie peut être ?

JACQUELINE GOURAULT
C'est ma nature profonde, je fais le travail parce qu'il y a beaucoup de travail, je ne cherche pas forcément à être sous les feux de la rampe.

AUDREY CRESPO-MARA
C'est ça c'est donc la différence.

JACQUELINE GOURAULT
Ah mais je n'ai pas dit ça.

AUDREY CRESPO-MARA
A force de discrétion Jacqueline GOURAULT, certains vous confondent avec Jacqueline MOURAUD, figure des gilets jaunes.

EXTRAIT DE LA VIDEO DE JACQUELINE MOURAUD
Mais qu'est-ce que vous faîtes du pognon ?

AUDREY CRESPO-MARA
On vous confond souvent avec elle ?

JACQUELINE GOURAULT
C'est-à-dire qu'au début quand elle est apparue sur la scène médiatique, si je puis dire, Jacqueline MOURAUD, Jacqueline GOURAULT, il y avait une consonance de proximité qui était assez grande ça a été assez drôle parce que un certain nombre de gens au départ ont cru vraiment que c'était moi qui m'exprimais sur les ondes et ça a surpris un peu évidemment étant donné que l'expression et la connotation qu'elle avait mais bon évidemment tout ça est rentré dans l'ordre si je puis dire.

AUDREY CRESPO-MARA
Jacqueline GOURAULT donc ministre des territoires. Selon une étude du CEVIPOF, 80% des maires sont mécontents de la nouvelle organisation territoriale décidée en 2015 sous François Hollande. Cette loi, qu'on appelle la loi NOTRe a largement renforcé les pouvoirs des intercommunalités ce qui fait que certains maires, les maires se sentent dépossédés de leurs compétences, comptez-vous rendre le pouvoir aux petites communes ?

JACQUELINE GOURAULT
Alors, il est vrai que la loi NOTRe a participé à l'agrandissement des intercommunalités et que cela a provoqué sur certains territoires, je dis bien sûr certains, je dirais un certain, comment dire, sentiment d'être délaissés de ne plus avoir de capacité à agir. Mais je crois que dans tout cela, il faut garder raison, c'est-à-dire que l'intercommunalité s'est construite au fil du temps, la 1ère loi importante a été celle du ministre de l'Intérieur, voilà…en 99 et tout ça s'est construit, je dirais, sur la volonté des élus mais quand on force les élus au fond à agrandir les intercommunalités, qu'on oublie de les laisser, de les consulter, de faire ce qu'ils ont envie de faire, ça provoque ces mécontentements.

AUDREY CRESPO-MARA
Alors est-ce que vous comptez abroger cette loi ou la modifier simplement.

JACQUELINE GOURAULT
On ne va pas abroger cette loi mais on peut amener de la souplesse dans les relations entre les communes et leurs intercommunalités je voulais parler bien sûr de Jean-Pierre CHEVENEMENT il y a quelques instants.

AUDREY CRESPO-MARA
Jacqueline GOURAULT dans les débats, les déserts médicaux font l'objet de nombreuses plaintes, pourra-t-on à régler ce problème sans obliger les jeunes médecins à venir s'installer dans les territoires où l'on a vraiment besoin d'eux ?

JACQUELINE GOURAULT
Alors je crois que c'est quand on va sur le terrain, le problème numéro un qu'expriment les maires, la désertification médicale, deuxièmement, le gouvernement n'a pas choisi de mettre en place des mesures coercitives mais toute une batterie, si je puis dire, de mesures qui vont faciliter l'installation des jeunes sur le territoire, notamment le gouvernement lance un projet de 400 médecins fonctionnaires pour les installer sur les territoires les plus en déprise. Et puis une chose qui me semble intéressant aussi qui est dans le projet de loi de madame BUZYN, c'est de faire en sorte que des étudiants puissent être payés, si je puis dire, pendant leurs études et à la fin de leurs études de donner 10 ans de leur vie, ça a déjà existé dans l'Education nationale sous d'autres périodes, pour aller justement s'installer là où on leur dira de s'installer c'est-à-dire dans des zones en déprise. Je crois que ce qui est le problème aujourd'hui numéro un c'est que nous avons paradoxalement une des médecines les meilleures du monde quand on a des choses très graves, on trouve toujours à se soigner mais pour le quotidien, je dirais, pour la médecine quotidienne quand vous avez la grippe, une angine etc, vous avez du mal à trouver un médecin et évidemment il y a aussi la disparition du numerus clausus, qui est dans la loi, qui portera ses effets mais évidemment pas immédiatement puisque chacun sait qu'il faut une dizaine d'années pour faire un médecin si je puis dire.

AUDREY CRESPO-MARA
Jacques GOURAULT, quand on parle de décentralisation est-ce que les élus locaux ne sont pas les mieux placés pour fixer eux-mêmes les limites de vitesse sur les routes de leur département ?

JACQUELINE GOURAULT
Vous savez que le gouvernement a ouvert cette possibilité c'était la revendication des départements. Alors pourquoi les départements ? Parce que les départements ont la compétence des routes et c'est vrai que si le gouvernement a dit qu'on pourrait discuter avec les départements…

AUDREY CRESPO-MARA
On aurait pu le faire dès le début.

JACQUELINE GOURAULT
Oui mais je dirais que vous savez la sécurité routière c'est du régalien et la sécurité routière ça n'est pas du législatif c'est du réglementaire et ça a toujours été comme cela. Quand un ancien président de la République a décidé que le port de la ceinture de sécurité serait obligatoire, il n'a pas consulté les collectivités territoriales. Je crois que ça serait effectivement du bon sens.

AUDREY CRESPO-MARA
Jacqueline GOURAULT, il semble acquis que le président proposera un référendum à l'issue du grand débat. Faut-il organiser ce référendum le même jour que les européennes ?

JACQUELINE GOURAULT
Pour ma part je n'y suis pas favorable à cette solution, je l'ai déjà exprimé, car je pense que le débat européen et très important, que ça contribue bien sûr au développement de notre pays et de l'ensemble de l'Europe et je pense qu'il ne faut pas, comment dire, dévier de ce sujet en mettant en parallèle un référendum qui pourrait être sur un autre sujet, sur les institutions peut-être. Je pense que le référendum est un outil utile que peut-être le président de la République décidera d'utiliser mais c'est à lui et à lui seul que revient cette initiative mais en tout cas je ne pense pas que ce soit une bonne idée que ce soit le jour des élections européennes.

AUDREY CRESPO-MARA
Ça ne permettrait pas de mobiliser davantage les électeurs qui sont assez peu mobilisés en général pour les européennes en associant ce référendum ?

JACQUELINE GOURAULT
Oui mais écoutez, moi je crois qu'il faut essayer de mobiliser pour les européennes et montrer l'importance que cela a.


source : Service d'information du Gouvernement, le 19 février 2019