Texte intégral
ORIANE MANCINI
Notre invitée politique ce matin, c'est Annick GIRARDIN, bonjour.
ANNICK GIRARDIN
Bonjour.
ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être avec nous. Vous êtes la ministre de la Mer. On est ensemble pendant 20 minutes pour une interview en partenariat avec la presse quotidienne régionale, représentée par Stéphane VERNAY, qui dirige le bureau parisien du journal Ouest France. Bonjour Stéphane.
STEPHANE VERNAY
Bonjour Oriane.
ORIANE MANCINI
On commence, Annick GIRARDIN, avec la crise sanitaire évidemment et ces nouvelles mesures annoncées hier par Sébastien LECORNU, le ministre des outre-mer, et cette septaine qui sera désormais mise en place pour les liaisons de l'hexagone vers les outre-mer. Est-ce que c'est une précaution qu'on prend pour les outre-mer, ou est-ce qu'il y a une réelle inquiétude sur place des variants qui émergent, et est-ce qu'il y a un danger pour les outre-mer aujourd'hui avec ces variants ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, vous savez, dans les territoires ultra-marins, il y a une difficulté, qui est la prise en charge sanitaire, qui est toujours plus complexe, d'abord, parce que l'éloignement, et ensuite, les capacités d'accueil dans les territoires. Donc il y a une vigilance particulière du gouvernement depuis le début de la présence du Covid dans ces territoires ultra-marins, avec une spécificité, c'est-à-dire, justement, la prise en compte de la spécificité, si, comme partout ailleurs, au début du Covid, on a effectivement confiné, très vite, les techniques de lutte contre le Covid ont été différentes selon les territoires et se sont adaptées. C'est ce que moi, j'ai toujours appelé le réflexe ultra-marin. Et donc ça, c'est très bien qu'on puisse effectivement conserver cette palette d'outils qui va… alors, à l'époque, c'était des quatorzaines, aujourd'hui, des septaines, en passant par le test, toujours obligatoire dans les territoires ultra-marins, en allant vers des motifs impérieux pour se rendre dans les territoires d'outre-mer, certains territoires d'outre-mer se sont extrêmement fermés, jamais ré-ouverts d'ailleurs, et d'autres ont ré-ouvert selon effectivement les résultats de leur lutte. Alors, ce sont des îles, donc c'est plus facile à contrôler, sauf la Guyane, bien entendu, rappelons-nous de la difficulté de la Guyane quand l'épidémie est montée du Brésil, c'est plus compliqué, c'est plus difficile, je crois qu'il faut rester très vigilant, et il ne faut jamais laisser le Covid, à aucun moment, se développer dans des territoires plus fragiles qu'ailleurs.
ORIANE MANCINI
Est-ce qu'on a des chiffres aujourd'hui de la présence de ces variants dans les outre-mer ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, moi, je ne suis pas en détail chaque territoire, je n'ai plus le tableau de bord, ça n'a échappé à personne, je ne suis plus la ministre des outre-mer, Sébastien LECORNU…
ORIANE MANCINI
Non, vous l'avez été, vous êtes toujours élue des outre-mer, en l'occurrence…
ANNICK GIRARDIN
Toujours. Mais on n'a que les chiffres… moi, je n'ai que le chiffre global aujourd'hui, mais territoire par territoire, effectivement, les choses sont suivies, et sur les territoires, il y a, avec les élus, avec les socioprofessionnels, un travail d'animation qui est fait à la fois par les préfets et les ARS. Il y a une vraie prise de conscience du virus et de responsabilité de chacun.
STEPHANE VERNAY
Est-ce qu'il y a un danger pour l'économie des îles, je pense notamment aux Antilles, Guadeloupe, Martinique, ou la Polynésie française, cette septaine, elle va avoir un impact terrible sur la saison touristique ?
ANNICK GIRARDIN
Comme d'ailleurs, la première vague, ça a été terrible pour les territoires ultra-marins…
STEPHANE VERNAY
Mais en décembre, la saison touristique a été bonne dans les Caraïbes…
ANNICK GIRARDIN
Oui, mais qui vivent essentiellement du tourisme, à partir du moment où on se dit ça, on sait pertinemment que dès qu'on met des contraintes et qu'il y a moins de touristes dans les territoires, obligatoirement, ils souffrent, et c'est pour ça que l'accompagnement du gouvernement dans les territoires ultra-marins, comme sur l'ensemble de l'hexagone est un impératif…
STEPHANE VERNAY
Ce sera compensé…
ANNICK GIRARDIN
Et je peux dire que le gouvernement est à la hauteur des besoins des territoires, et dans les territoires ultra-marins, il y a souvent eu d'ailleurs des compléments de prise en charge ou des aménagements, et ça aussi, c'est bien qu'on l'ait laissé à la main des préfets de manière à ce que ce soit adapté à chaque besoin.
ORIANE MANCINI
La campagne de vaccination pour les plus de 75 ans a débuté en métropole et dans les territoires ultramarins, c'est difficile d'acheminer les doses de vaccins dans ces territoires ?
ANNICK GIRARDIN
Eh bien, alors, les choses sont toujours plus compliqués dans les territoires ultramarins, d'abord, parce qu'il faut acheminer les doses, et ensuite, parce qu'il faut une organisation particulière, dans certains territoires, il n'y a pas obligatoirement les frigos nécessaires, je pense aux tout petits territoire, donc les organisations vont être différentes, mais Sébastien LECORNU sait très bien faire ça et suit les dossiers. Et là, encore la clé, c'est la spécificité, mais personne ne sera jamais oublié, ni dans l'accompagnement économique nécessaire, ni sur le volet santé, et ça, c'est important, si vous voulez que je vous parle de mon territoire, qui est Saint-Pierre-et-Miquelon, il sera décidé effectivement d'avoir une seule vaccination en une seule fois pour toute la population, et ça, c'est comme ça que c'est pensé, tout simplement parce que c'est plus facile et plus adapté.
STEPHANE VERNAY
Et dans les petits territoires, il y aura recours au vaccin MODERNA, qui est plus facile à stocker que le PFIZER…
ANNICK GIRARDIN
Tout à fait…
STEPHANE VERNAY
Donc, il y aura probablement du coup un petit décalage de fait…
ANNICK GIRARDIN
Oui, il y aura un décalage, et toute la population sera traitée ensemble, alors que dans l'hexagone effectivement, on a une règle, c'est d'abord effectivement les personnes âgées en EHPAD, fragiles, et ensuite, bien sûr, maintenant, il faut s'en féliciter, les plus de 75 ans, et je crois qu'on a un million de personnes qui se sont mobilisées aujourd'hui, je crois que c'est ça ce qu'il faut dire aujourd'hui, il y a eu beaucoup d'enquêtes qui ont dit que les Français ne souhaitaient pas se vacciner en grande partie, eh bien, ils sont là, et ils ont ce souhait, et ça se fera…
STEPHANE VERNAY
La tendance est en train de s'inverser.
ANNICK GIRARDIN
Eh bien, écoutez, si vous me le dites…
STEPHANE VERNAY
Manifestement…
ANNICK GIRARDIN
Donc je vous écoute, mais en même temps, voilà, les dernières informations que moi, j'avais, c'est qu'on peut se féliciter de l'engagement des gens.
ORIANE MANCINI
On revient en métropole cette fois, est-ce que – il y a une inquiétude, là aussi, sur les contrôles en métropole – est-ce qu'il y a des contrôles spécifiques dans les ports au départ et à l'arrivée ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, il y a des contrôles comme régulièrement il a pu y avoir dans des aéroports ou dans des ports. Ce qu'il faut se dire sur la question du Covid, c'est que les ports ont joué leur rôle dans toute la première vague et la deuxième sur : on est présent, on est là, pour l'avitaillement du territoire, pareil effectivement pour les armateurs, tous ceux qui transportent les biens de consommation dont nous avons besoin, et notamment tout ce qui est alimentaire, la difficulté qui est celle de la ministre de la Mer sur le sujet Covid, c'est beaucoup tout ce qui relève de marins, vous le savez, les navires qui sont sur l'ensemble de nos océans font des changements d'équipage, et ces changements d'équipage sont extrêmement compliqués en période de Covid, parce que fermeture de certains territoires, parce que, exigences particulières, et donc on a eu, notamment sur la première vague, à travailler sur le rapatriement ou les échanges à faire, et La Réunion a été une base de transit d'un certain nombre de marins, la France a aidé 15 000 marins à effectivement pouvoir rentrer chez eux ou reprendre leur embarquement. Sur cette deuxième vague, ma préoccupation reste toujours identique, elle l'est également d'ailleurs avec la question du vaccin qui, petit à petit, peut peut-être être réclamé dans certains pays et reposer un problème à nos marins.
STEPHANE VERNAY
Il va falloir renforcer les contrôles ou les gens de mer font preuve de beaucoup de responsabilité en la matière, notamment pour déclarer d'éventuels cas à bord, ou des choses comme ça, il y a…
ANNICK GIRARDIN
Alors, je crois qu'il faut savoir que côté français, nous avons – et vous y participez – énormément parlé du Covid, de ses risques et sensibilisé et responsabilisé l'ensemble de la population…
STEPHANE VERNAY
Donc les informations circulent bien…
ANNICK GIRARDIN
Y compris les marins. Et sachez que, que ce soit les armateurs, que ce soit les marins, que ce soit les ports, aujourd'hui, sont des organismes extrêmement ou des personnes extrêmement responsables, et il n'y a pas eu de cluster particulier, ni dans la première vague ni aujourd'hui du Covid, sur ces sites.
ORIANE MANCINI
Est-ce qu'il y a des obligations sanitaires particulières pour les bateaux qui battent pavillon français, ou est-ce que vous comptez sur la responsabilité des équipages ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, il y a la responsabilité, il y a des armateurs qui ont mis des conditions de réembarquement à bord, c'est géré par les armateurs eux-mêmes. Et sur le volet pêche, la question du Covid a été plutôt l'inconvénient de ne pas pouvoir aller en mer ou de ne pas pouvoir effectivement exercer leur métier comme ils le voulaient, et là, il y a eu un accompagnement de l'État pour les uns comme pour les autres, qui est identique ou presque à l'ensemble des propositions qui ont été faites par le gouvernement pour l'ensemble des entreprises.
ORIANE MANCINI
Pour finir sur cette crise sanitaire, on va parler, on va dire un mot des entreprises aquacoles qui sont évidemment touchées par la crise sanitaire, vous avez mis en place vendredi, avec Julien DENORMANDIE, qui est le ministre de l'Agriculture, des mesures spécifiques, est-ce que vous pouvez nous en dire plus.
ANNICK GIRARDIN
Eh bien, écoutez, on a annoncé 300 000 euros d'aide pour les aquaculteurs. C'est une des filières de la pêche et de l'aquaculture qui n'avait pas complètement été prise en compte, où on n'avait pas exactement vu les détails de la prise en charge de ces aquaculteurs. Et donc c'est chose faite aujourd'hui, on a pu les recevoir plusieurs fois, un travail d'accompagnement a été fait, je crois que le plus important pour moi, comme pour Julien DENORMANDIE, c'est d'être sur le terrain, aux côtés de ceux qui souffrent des conséquences du Covid, que ce soit les pêcheurs, les aquaculteurs ou l'ensemble des marins, en ce qui me concerne, être présent et répondre à leurs besoins, parce que, bien sûr qu'on a appréhendé et envisagé toutes les difficultés, mais il y a toujours la maille un peu trop large, qui fait que, une personne, une entreprise ne peut pas être prise en charge ou ne peut pas avoir une réponse, et c'est ça auquel il faut veiller, c'est que chacun soit accompagné et que personne ne reste sur le bord de la route.
ORIANE MANCINI
On va parler d'un sujet d'inquiétude pour nos pêcheurs, c'est le Brexit, Stéphane.
STEPHANE VERNAY
Alors, il y a eu des accords sur la pêche, mais est-ce que tout est réglé pour autant, comment est-ce que les choses se passent, il était notamment prévu une réduction progressive des quotas de pêche de 25% d'ici 2026, quelles sont les compensations qui sont négociées, et comment est-ce qu'elles vont se mettre en place ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, peut-être rappeler, parce que c'est important, qu'il y a un accord de pêche, il y a quelques semaines avant Noël, on m'aurait posé la question que j'étais un peu pessimiste, et donc, on a cet accord. Et je veux rappeler que cet accord, c'est d'abord parce qu'il y a eu un rôle déterminant dans le combat, c'est celui du président Emmanuel MACRON, qui s'est totalement impliqué, et avec Clément BEAUNE, nous avons fait en sorte que les intérêts des pêcheurs européens et les intérêts des pêcheurs français soient défendus, rappelez-vous, on avait dit, il a été dit, le gouvernement l'a rappelé, le Premier ministre l'a rappelé dans les Hauts-de-France avant effectivement la connaissance de cet accord, les pêcheurs ne seront pas les victimes, ou ne paieront pas la facture de la décision du Brexit. Alors, cet accord, nous ne connaissons le 24 décembre au soir, et jusqu'à 20h30, avec Clément BEAUNE, avec le président de la République…
ORIANE MANCINI
Qui est le secrétaire d'État aux Affaires européennes, je précise…
ANNICK GIRARDIN
Tout à fait, nous sommes au contact des pêcheurs, et jusqu'au bout, pourquoi, parce que les propositions françaises ont toujours été regardées avec les socioprofessionnels, et ça, c'est important, parce que quand l'accord arrive, on ne l'a pas en totalité, mais on sait déjà quelles sont les lignes rouges qui ont été respectées, et puis, celles qu'on a un peu dépassées, mais rappelons-nous que c'était 80% que voulaient récupérer de leurs quotas les Britanniques, eh bien, c'est 25%, et rappelons-nous qu'ils voulaient qu'on sorte de la totalité de leurs eaux, et aujourd'hui, on a gardé la totalité des accès. Alors bien sûr, il y a des contraintes, bien sûr, il y a des conditions…
STEPHANE VERNAY
Et il y a des points de friction aussi…
ANNICK GIRARDIN
Il y a des conditions, alors, mettre un accord en place, c'est des points de friction, mais on est passé à côté de la catastrophe, alors mettre cet accord en place, ce n'est pas simple, ce n'est pas simple, parce que pour aller pêcher dans la ZEE du Royaume-Uni, les autorisations ont été données, pour aller pêcher dans la zone des 6-12 000 du Royaume-Uni, comme dans les zones de nos voisins de Jersey et Guernesey, il y a la condition d'antériorité, et c'est ça qui aujourd'hui pose un certain nombre de petites difficultés d'analyses de dossier…
STEPHANE VERNAY
Alors, est-ce qu'on peut parler… on peut s'arrêter sur le cas spécifique de Jersey, ça ne se passe pas très bien, puisqu'il était question… les accords mettent fin au permis de la baie de Granville, sauf qu'il était question d'un délai de 4 mois pour renégocier les accès aux eaux de Jersey, et que les Jersiais ont fermé leurs eaux dimanche. Ils n'acceptent plus que 57 navires dont 36 normands, et vous avez 119 bateaux normands qui sont exclus d'un coup, alors que les pêcheurs normands pensaient avoir 4 mois pour négocier l'accès à leurs eaux. Donc du coup, on voit bien qu'il y a aussi, malgré les accords, on voit bien qu'il y a aussi des coups de canif ou des choses qui n'étaient pas prévues, qui sont en train de se passer ; comment est-ce que vous pouvez intervenir pour les aider à régler ce type de différend ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, sachez qu'on intervient et qu'on ne fait que ça d'ailleurs avec, à nouveau, Clément BEAUNE, et puis, d'ailleurs, je le fais aussi régulièrement avec le commissaire européen, et nous aurons également avec Michel BARNIER, dans les quelques heures qui viennent, une rencontre sur ce sujet, parce que, effectivement, on est dans l'analyse et la mise en application d'un accord, jamais facile, parce qu'il faut, là aussi, pouvoir les analyser. Alors, qu'est-ce qui se passe sur Jersey et Guernesey, c'est que, et notamment Jersey, c'est que le traité de la baie de Granville est écrasé, on va dire, ou est supprimé, si on veut que tout le monde le comprenne, par cet accord de pêche. Et donc cet accord de pêche prime sur le traité et dit simplement que nous pouvons aller dans les eaux de Jersey avec des licences provisoires, et que ces licences provisoire sont données avec une antériorité, c'est comme ça que c'est compris, alors, ce n'est pas, il y a que, ou il n'y a plus que 57, c'est que pour l'instant, il y a des dossiers qui ont été validés et d'autres pour lesquels Jersey, comme d'ailleurs le Royaume-Uni, pour les 6-12 000, demandent des compléments d'informations pour démontrer que les pêcheurs ont une antériorité. Moi, j'ai proposé, et ça s'appelle du bon voisinage, et je continue à le faire, que dans cette période de transition, tous ceux qui y allaient puissent effectivement se rendre dans les eaux de Jersey, comme d'ailleurs, je le souhaite, et on pourra l'évoquer, et je l'ai redit à Michel BARNIER, je l'ai redit au commissaire, que les Français puissent aller pêcher dans les 6-12 000 du Royaume-Uni, et on fera, dans ces 3 mois, le bilan ou l'analyse complète des dossiers, et d'ailleurs, c'est réciproque, puisque Jersey vient pêcher dans les eaux françaises, et nous avons, et la Commission a, là aussi, à valider les choses. Je crois qu'il faut le faire en bon voisinage et en bonne intelligence, et c'est ça que je continue effectivement à porter, et c'est important. Alors, vous parliez tout à l'heure, et je crois que je n'ai pas complètement répondu à cette question, sur l'accompagnement, parce que, bien sûr, que ce soit sur le temps que ça prend pour avoir les licences, trop de temps, à mon goût, puisque la Commission s'était engagée à 15 jours, 15 jours, on les a largement dépassés, donc l'énervement, le mécontentement des pêcheurs est normal, c'est pour ça que je me suis rendue plusieurs fois dans plusieurs ports de pêche en Normandie, comme en Bretagne, à la fois, pour expliquer la méthode, la manière de travailler, et en même temps, pour présenter le plan d'accompagnement, puisque de toute façon, moins 25% de quotas en valeur, ça veut dire des pertes pour les pêcheurs, il fallait donc un plan d'accompagnement, plan d'accompagnement validé par le Premier ministre, souhaité par le Premier ministre, validé par le Premier ministre, avant que l'accord soit connu, c'est-à-dire, qui a pris en compte toutes les conditions possibles ou toutes les difficultés possibles, y compris en cas de non-accord. Donc on a une palette d'outils à court, à moyen et à long terme, qui accompagne la pêche, y compris dans la transition nécessaire. Et ça, c'est important, et j'ai voulu qu'il y ait également des ressources humaines supplémentaires sur les territoires pour accompagner au quotidien les pêcheurs ; à court terme, ça veut dire quoi, à court terme, ça veut dire des aides qui peuvent aller jusqu'à 30 000 euros immédiatement pour la trésorerie des entreprises, à moyen terme, c'est à la fois la compensation de la perte du chiffre d'affaires, y compris jusqu'en 2026, puisque, je vous le rappelle, l'accord est pour cinq ans et demi, et puis, sur du plus long terme, et c'est pour ça que là, je parle d'adaptation, de transformation de la filière, on est dans l'extension de l'activité partielle, mais on est aussi dans les sorties de flotte, une sortie de flotte, c'est : on indemnise le patron-pêcheur pour qu'il sorte avec son navire de la flotte, de la formation en même temps, parce qu'on traite les hommes, les bateaux, les hommes, de manière à ce qu'on puisse former pour revenir dans la filière s'ils le souhaitent, dans d'autres niveaux de la filière, et puis, des aides à l'investissement, tout ça, pour les pêcheurs, mais aussi pour l'ensemble de la filière. Et puis, la prise en compte aussi des territoires, puisque c'est des hommes, des femmes vivant sur des territoires et qu'il y a une conséquence globale.
ORIANE MANCINI
Et justement, vous nous parlez de l'inquiétude des pêcheurs, inquiétude aussi des élus locaux, la semaine dernière, on était à Boulogne-sur-Mer, pour suivre justement les pêcheurs face au Brexit, on a rencontré Frédéric CUVILLIER, qui est le maire de la ville, on va l'écouter, il était au micro de Jérôme RABIER.
FREDERIC CUVILLIER, MAIRE (PS) DE BOULOGNE-SUR-MER
Il y a l'accord, qui est l'accord général du Brexit, mais pour ce qui est du domaine de la pêche et de toute la filière halieutique, il convient d'avoir ce que j'appelle des accords dans l'accord, c'est-à-dire, au-delà des zones de pêche, il y a les conditions dans lesquelles nous pourrons assurer l'approvisionnement à Boulogne, comment les flux vont pouvoir, de produits halieutiques, vont pouvoir se réaliser notamment en provenance d'Irlande, d'Ecosse, et transitant par la Grande-Bretagne.
ORIANE MANCINI
Comment vous pouvez le rassurer, Frédéric CUVILLIER ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, Frédéric CUVILLIER a été ministre de la Pêche, dont connaît extrêmement bien le sujet, et nous travaillons ensemble depuis le début de ces négociations, ou du moins depuis que je suis arrivée à la tête de ce ministère, en juillet dernier. Ce qui est clair, c'est que les Hauts-de-France risquaient d'être touchés par cet accord de pêche, par le Brexit, pour deux raisons, d'abord, parce que, effectivement, c'est un port de pêche conséquent, et ensuite, parce que transitent par Boulogne beaucoup de produits de la pêche qui sont transformés dans la région. Et donc ça pouvait être des doubles peines selon les résultats de la négociation. Frédéric CUVILLIER a raison de dire, il y a, à la fois, effectivement, l'accompagnement sur le volet pêche, donc les pêcheurs français et leur accompagnement, et sur l'ensemble de la filière, c'est pour ça que j'insistais tout à l'heure, pour dire que les aides sont pour l'ensemble de la filière. Et puis, il a raison aussi de se préoccuper, et nous le faisons, c'est-à-dire aussi du marché, le Royaume-Uni livre la plupart de ses poissons, le produit de leur pêche en France, comme d'ailleurs Jersey le fait également, et donc au-delà des zones de pêche, de l'accès, il y a le flux également qui est important. La France a mis les moyens, là aussi, 1°) : pour faciliter le flux, et 2°) : pour le garantir.
ORIANE MANCINI
Mais il y a des inquiétudes, on a vu notamment hier la colère des pêcheurs écossais qui disent qu'il y a trop de paperasse, je cite, que, du coup, eh bien, les produits, ils mettent trop de temps à arriver dans l'Union européenne avec des risques de jeter ces produits parce qu'ils auront mis trop de temps à arriver. Comment on fait pour lutter contre ça ?
ANNICK GIRARDIN
Alors, comment on fait pour lutter contre ça, quand ce n'est pas la problématique que française, c'est-à-dire que, en vrai, le Royaume-Uni n'était pas prêt, le Royaume-Uni qui décide de sortir de l'UE n'est pas prêt, ne s'est pas préparé, à la fois sur ce qui est administratif, ce qui nécessite et qui est nécessaire en ressources humaines, contrairement à la France, qui a renforcé les ressources humaines sur l'ensemble de son littoral, et notamment dans les Hauts-de-France. Et donc on voit bien qu'il y a une difficulté aujourd'hui qui est celle du Royaume-Uni, un Royaume-Uni qui n'est pas du tout à la hauteur de ses annonces, qui a quelque part largement menti à l'ensemble de ses populations.
ORIANE MANCINI
Une dernière question, Stéphane, bon, deux dernières questions, pour vous, Stéphane.
STEPHANE VERNAY
Une question rapide sur le projet de parc éolien, au large du Cotentin, en fait, qui verra le jour en 2022, donc 1 000 mégawatts, 800 000 foyers servis, c'est à 32 kilomètres des côtes, donc c'est assez loin, c'est loin du littoral, est-ce que ce type de grand projet en fait sera ouvert à la pêche, ou ça fait partie des zones d'exclusion, comment ça fonctionne ?
STEPHANE VERNAY
Alors, sur les EMR, d'ailleurs, il faut dire aux Français, parce qu'on en parle depuis très longtemps des éoliennes en mer, aujourd'hui, en France, nous n'en avons qu'une, bon. Alors, il y a plusieurs projets, plusieurs grands projets, mais c'est…
STEPHANE VERNAY
Ah, en Normandie, c'est le quatrième…
ANNICK GIRARDIN
Oui, non, mais c'est bien de le rappeler, mais il y en a une qui tourne aujourd'hui. Et donc, il y a plusieurs projets qui ont été des projets ambitieux, qui ont été avancés par le gouvernement, qui ont été négociés par le passé, pas toujours très bien, Barbara POMPILI l'a dit, il y a très peu de temps, et publiquement, aujourd'hui, l'arrivée du ministère de la Mer a quel intérêt dans ces projets, c'est de dire, alors, moi je définis mon ministère, comme le ministère de la planification en mer, c'est important, le ministère des usages et des usagers, et donc ce type de grand projet doit être pris en compte dans le cadre d'une planification globale à l'avenir. Alors, bien sûr, on dit tous que c'est trop lent dans la négociation, dans les échanges avec les usagers, ce n'est pas que c'est trop lent, c'est que, derrière, il y a un certain nombre de démarches qui sont toujours compliquées ou juridiques, souvent, parce qu'on n'a pas pris le temps de travailler avec les utilisateurs, avec les usagers, de leur garantir les conditions futures de l'accès à la mer, et notamment pour les pêcheurs…
STEPHANE VERNAY
Et là, ce sera le cas, pour un parc comme celui-là ?
ANNICK GIRARDIN
Donc moi, je me suis engagée à ce qu'on travaille sur ces solutions, alors sur les parcs du passé, c'est compliqué pour moi, parce que les choses ont été garanties…
STEPHANE VERNAY
Et ceux de l'avenir…
ANNICK GIRARDIN
Sur les parcs de l'avenir, on a effectivement un travail qui se fait, prenons l'exemple de la Méditerranée, sur laquelle aujourd'hui, on travaille sur des éoliennes en mer flottantes, puisque sur la Méditerranée, c'est le choix qui a été fait, eh bien, le travail est de très grande qualité, il commence largement en amont, il prend en compte tous les usagers et tous les usages, et il recherche les espaces où, certes, ça a un intérêt pour les énergies renouvelables en mer, mais aussi, ça ne bloque pas ni les pêcheurs, ni les autres utilisateurs. Alors, il y a toujours effectivement un impact qui reste, mais c'est important de le faire ; à Saint-Nazaire, le projet qui a été mis en place, a pris en compte les pêcheurs, ça s'est très bien passé, les pêcheurs ont été indemnisés le temps de la pose des câbles, et ont été associés en permanence au travail qui a été fait. Donc quand les industriels embarquent, on va le dire comme ça, l'ensemble des usagers avec eux, et que les élus des territoires ont aussi travaillé en amont le sujet, eh bien, ça se passe bien. Et moi, depuis mon arrivée, je veille à ce que les nouveaux projets se passent de cette manière-là.
ORIANE MANCINI
Et merci beaucoup, merci Madame la Ministre d'être venue nous voir ce matin, nous parler de ces sujets dont on parle moins, mais qui sont pourtant importants. Merci d'avoir accepté notre invitation.
ANNICK GIRARDIN
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 janvier 2021