Dans un avis du 25 juillet 2023 publié au Journal officiel du 14 septembre 2023, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot, rappelle des chiffres qui, au 1er juin 2023, "illustrent de manière dramatique" le niveau record de la surpopulation carcérale :
- 73 699 détenus pour 60 562 places opérationnelles ;
- taux moyen d'occupation des maisons d'arrêt de 145% ;
- 27 000 détenus hébergés dans des établissements dont la densité d'occupation est supérieure à 150% ;
- 2 336 matelas au sol.
Face à cette dégradation, la CGLPL préconise un mécanisme législatif de régulation carcérale. Le ministre de la justice, Éric Dupond-Moretti, fait part de ses observations dans un courrier joint au Journal officiel électronique authentifié.
Maîtriser la surpopulation carcérale ?
Dès 2012, le CGLPL préconise de diversifier les mesures d'aménagement de peines et de s'emparer des formes non carcérales de sanctions pénales. Le CGLPL déplore aussi la disparition de l'amnistie de l'horizon législatif.
Le CGLPL recommande dès 2018 la mise en place d'un mécanisme législatif de régulation carcérale contraignant, avec l'objectif qu'aucun établissement ne dépasse un taux d'occupation de 100%.
La CGLPL signale dans son avis que les évolutions législatives depuis 2018 n'ont pas démontré leur efficacité.
Des mesures législatives censées éviter les courtes peines ou la création d'un nouvel aménagement de peine pour les détenus en ayant purgé les deux tiers n'ont pu enrayer la progression de la surpopulation carcérale.
Les États généraux de la justice préconisent d'établir pour chaque établissement un seuil de criticité, à partir duquel ses services ne sont plus en mesure de fonctionner sans affecter de manière durable la prise en charge des condamnés. Il ne s'agit pas d'un numerus clausus, la politique d'exécution des peines relevant du seul procureur de la République.
Renforcer la politique immobilière carcérale ?
La CGLPL signale que le projet de loi faisant suite aux États généraux de la justice ne comporte aucune disposition relative à la régulation carcérale, à l'exception de promesses de constructions immobilières "irréalistes". Certains parlementaires avaient proposé des amendements visant à instaurer une régulation carcérale par contrainte législative, qui ont été retirés avant même les débats ou rejetés.
La CGLPL conclut que la surpopulation carcérale "doit cesser d'être appréhendée comme une problématique essentiellement pénitentiaire et devenir l‘objet d'une véritable politique publique, dotée de moyens propres et pérennes."
Réponse du Garde des sceaux
Le ministre de la justice partage le constat sur la surpopulation carcérale, "de nature à dégrader significativement les conditions de détention", mais rejette les solutions de la CGLPL.
Le ministre rappelle le programme immobilier pénitentiaire de 15 000 nouvelles places de prison.
Le ministre préconise trois solutions pour lutter contre la surpopulation carcérale :
- construire de nouvelles places opérationnelles de prison ;
- s'assurer que la détention est réservée aux situations qui l'imposent ;
- favoriser les aménagements des courtes peines ou les peines de substitution (détention à domicile sous surveillance électronique, travail d'intérêt général).