Dans un rapport publié le 22 février 2024, la Cour des comptes européenne a présenté ses observations sur le cadre de protection des intérêts financiers de l’UE.
Depuis 2021, le règlement sur la conditionnalité renforce le cadre juridique européen pour améliorer le respect des principes de l’État de droit dans les États membres car les violations de l’État de droit peuvent compromettre la bonne gestion financière du budget de l’UE. Le règlement donne la possibilité de suspendre, de réduire ou d’interdire l’accès d’un État membre aux financements de l’UE.
Protéger les principes de l'État de droit
Avant 2021, l'UE disposait d'outils en matière d'État de droit mais qui avaient démontré certaines limites.
Le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027, entériné fin 2020, prévoit un nouvel instrument qui lie le budget global à la panoplie pour l'État de droit dont le régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l'Union. S'y ajoutent une version actualisée du règlement sur les dispositions communes relatives aux programmes de cohésion ainsi que les mécanismes de protection prévus par la facilité pour la reprise et la résilience (FRR).
La conditionnalité budgétaire, un instrument efficace ?
Le rapport est consacré à six États membres de l'UE : la Bulgarie, la Grèce, l’Italie, la Hongrie, la Pologne et la Roumanie. Cet échantillon comprend notamment des pays faisant l’objet de procédures :
- Pologne et Hongrie en lien avec l’article 7 du Traité sur l'Union européenne (TUE) ;
- Hongrie avec le règlement relatif à la conditionnalité.
La Cour constate que le règlement relatif à la conditionnalité a permis de renforcer le cadre de l'État de droit. Mais, elle pointe ses faiblesses, entre autres :
- le raisonnement sous-tendant le choix de ne pas appliquer le règlement relatif à la conditionnalité n'est ni suffisamment clair ni bien documenté ;
- à court terme, les conséquences budgétaires d’un non-respect de l’État de droit sont limitées ;
- un respect formel des exigences ne se traduit pas nécessairement par une atténuation réelle des risques pour les intérêts financiers de l’UE ;
- le risque d'annulation des mesures est important puisque des considérations politiques peuvent peser dans les décisions de ne pas bloquer ou de libérer des fonds.
État de droit : le pari de la conditionnalité
L’UE dispose, depuis le 1er janvier 2021, d’un règlement de conditionnalité. Pour l'appliquer, il faut que les violations constatées menacent "d'une manière suffisamment directe" la bonne gestion du budget ou la protection des intérêts financiers de l'UE.
La conditionnalité budgétaire diffère, pour deux raisons, des autres outils à la disposition de l'UE (article 7 du TUE qui donne à l'UE la possibilité de sanctionner un État membre qui ne respecterait pas les valeurs énumérées dans le TUE) :
- elle déplace les procédures du terrain des valeurs, propices au relativisme politique, à celui des finances ;
- la sanction est lourde à la fois financièrement et symboliquement puisque touchant à la distribution des fonds européens, en lien avec l'un des fondements de la solidarité européenne.