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Livreurs de repas des plateformes : les effets sur la santé du "management algorithmique"

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a publié une étude sur les conditions de travail des livreurs de repas dans le cadre des plateformes numériques. Soumis à un "management algorithmique", les livreurs souffrent de conditions de travail dégradées (pression constante, isolement...).

Accidents de la route, stress, épuisement, maladies cardio-vasculaires, isolement... les livreurs de repas à deux roues des plateformes numériques subissent des conditions de travail qui dégradent leur santé à court, moyen et long terme. C'est le constat de l'expertise publiée, le 26 mars 2025,par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses).

Le nombre de travailleurs en lien avec les plateformes a augmenté du fait de l'expansion de ce modèle économique dans les années 2010 et de la mise en place du statut d'auto-entrepreneur (aujourd'hui micro-entrepreneur).

Le "management algorithmique" : un facteur majeur de risques

Les livreurs des plateformes numériques encourent des risques pour leur santé, essentiellement liés à une organisation du travail spécifique : le "management algorithmique". L'Anses rappelle que les plateformes utilisent l'intelligence artificielle (IA) qui gère automatiquement :

  • l'attribution des courses aux livreurs ;
  • l'évaluation par les consommateurs ;
  • l'évolution des modalités de rémunération ;
  • les sanctions.

Ce type de processus supprime le management de proximité humain et la possibilité de discussion. Le système se caractérise par une certaine "opacité" pour les livreurs et comprend des biais (notamment "la reproduction de stéréotypes socio-ethniques").

Un cumul d'effets néfastes sur la santé

Les livreurs de repas circulant à vélo en ville sont confrontés à : 

  • la traumatologie liée aux chutes et aux accidents ;
  • les troubles musculo-squelettiques (TMS) dus à la pratique intensive du vélo et à une mauvaise ergonomie "humain-vélo" (douleurs, contractures, tendinites, par exemple) et favorisés par un stress important ;
  • des problèmes de santé mentale (stress, épuisement physique, burn-out, anxiété, dépression...).

L'Anses souligne aussi à long terme les effets néfastes d'un travail en horaires atypiques et les conditions environnementales liées à cette activité (pollution urbaine, bruit...) pouvant entraîner :

  • une perturbation du sommeil ;
  • des maladies métaboliques, respiratoires ou cardiovasculaires.

L'étude souligne plus généralement "les conséquences sociales profondes" du statut d'indépendant (précarité, revenus instables, protection sociale insuffisante...).

Renforcer la prévention et appliquer la législation en vigueur

L'Anses préconise une prévention des risques et une meilleure protection sociale, en particulier en faisant en sorte de :

  • mieux appliquer les dispositions du code du travail garantissant une protection de la santé des livreurs équivalente à celle des salariés ;
  • veiller à ce que l’ensemble des éléments identifiés dans son expertise soient pris en compte lors de la transposition en droit français de la directive européenne (UE) 2024/2831 du 23 octobre 2024 sur les travailleurs de plateforme.

Cette directive européenne vise à :

  • garantir un statut professionnel correctement défini aux personnes travaillant via des plateformes ;
  • corriger le "faux travail indépendant" ;
  • réglementer le "management algorithmique" (informer les travailleurs de l'utilisation de systèmes de surveillance ou de prise de décision automatisée).

Les États membres de l'Union européenne (UE) ont deux ans pour transposer cette directive dans leur droit national.