Le cadre juridique de la lutte contre la corruption a fortement évolué au cours de la décennie passée. Cette politique publique vise à assurer la probité des décideurs publics et la bonne utilisation des fonds publics. Plusieurs lois ont été promulguées à cette fin :
- une loi du 11 octobre 2013, à la suite de l'affaire dite "Cahuzac", imposant de nouvelles règles de transparence et de prévention des conflits d'intérêts à destination des élus, des responsables publics et des agents publics ;
- la loi du 9 décembre 2016 dite "Sapin 2", qui acte la mise en place obligatoire d'un dispositif de prévention de la corruption au sein des grandes entreprises et entités publiques françaises ;
- la loi du 13 juin 2025 visant à sortir la France du piège du narcotrafic, qui renforce la lutte contre la corruption liée à la criminalité organisée dans les administrations sensibles, les ports et les aéroports.
Dans un rapport du 9 décembre 2025, la Cour des comptes évalue la politique nationale de lutte contre la corruption depuis la loi de 2013.
Un cadre juridique complexe
Les récentes évolutions législatives ont conduit à la création de nouveaux acteurs : Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), Parquet national financier (PNF), Agence française anticorruption (Afa)... et, plus récemment, le Parquet national anticriminalité organisée (Pnaco) institué par la loi de 2025 contre le narcotrafic.
La Cour des comptes alerte sur la complexité et le manque de lisibilité qui découlent de cette organisation comprenant une diversité d'acteurs. Plusieurs d'entre eux ne sont par ailleurs pas uniquement dédiés à la lutte contre la corruption. Les citoyens sont par conséquent insuffisamment informés en la matière.
L'accompagnement des lanceurs d'alertes et des associations habilitées à effectuer des signalements demeure lacunaire.
Que recommande la Cour des comptes ?
La Cour recommande, entre autres, que l'Afa renforce son dispositif de mesure et d'analyse de la corruption. Elle considère que cette institution, créée par la loi "Sapin 2", pourrait jouer un "rôle pivot de coordination, de centralisation des données et d'évaluation", en lien avec les autres acteurs.
Une lutte contre la corruption de basse intensité insuffisante
Depuis la loi "Sapin 2", les grandes entreprises ont mis en place des instruments de prévention, même si leur déploiement demeure inégal. Si la prévention et la détection de la corruption progressent dans le secteur privé, elle reste néanmoins limitée dans le secteur public. Cette asymétrie s'explique notamment par des contraintes moindres dans le public.
Les sanctions administratives sont insuffisamment mises en œuvre pour lutter contre la corruption dite "de basse intensité", à savoir celle d'agents publics (fonctionnaires, élus locaux ou contractuels). Les mesures à leur encontre sont "peu fréquentes" et "inégalement appliquées". La commission des sanctions de l'Afa n'a pas été saisie depuis 2021. Les pouvoirs d'enquête et de sanction des autres autorités, notamment de la HATVP, sont quant à eux restreints.
Au niveau pénal, 53% des dossiers ne font pas l'objet de poursuites, et les délais de jugement sont élevés (plus de six ans en première instance et plus de huit ans en appel).
Quelles priorités pour la suite ?
Le nouveau plan de lutte contre la corruption pour la période 2025-2029 a été publié en novembre 2025 par l'Afa. Il comprend plusieurs mesures : mise en place d'un dispositif interministériel de veille, de partage d'expérience et de bonnes pratiques entre les administrations les plus concernées, renforcement du criblage des agents publics et salariés...