En 2021, 91 300 logements étaient vacants en France. Les logements en attente de règlement d'indivision successorale en font partie. Afin de remédier à la crise actuelle du logement, la députée auteure de la proposition de loi considère nécessaire de se pencher sur la question de la sortie des biens des successions qui sont en indivision.
Le contentieux de l'indivision est une procédure longue et complexe. Lorsqu'il existe plusieurs héritiers, les éventuelles divergences entre eux conduisent à bloquer la succession. À l'inverse, certaines successions sont vacantes car aucun héritier n'a été trouvé. L'indivision successorale, censée être transitoire jusqu'au partage du bien, peut ainsi s'étaler sur des dizaines d'années. Au-delà des héritiers, les difficultés successorales impactent également les élus locaux, qui doivent gérer des biens immobiliers vacants et donc non entretenus.
La proposition de loi entend remédier aux complications qui résultent de cette situation, en anticipant l'abandon de biens immobiliers, en facilitant la résolution des conflits successoraux et en permettant la clôture des successions bloquées depuis longtemps. Elle s'inspire pour certaines mesures du droit local applicable dans les territoires ultramarins ainsi qu'en Alsace-Moselle.
Base des biens abandonnés et sortie des indivisions bloquées
Le texte prévoit la création d'une base de données permettant de recenser les biens immobiliers abandonnés, dans le cadre de différentes procédures (déclaration de parcelles en état d'abandon, gestion de biens par l’État agissant comme curateur...). La base de données sera alimentée par les administrations et certaines professions réglementées, et ouverte aux élus locaux qui pourront plus facilement identifier des biens abandonnés, afin de prendre les mesures nécessaires.
Le principe pour pouvoir sortir d'une indivision est l'unanimité des indivisaires. Plusieurs procédures permettent déjà de déroger à ce principe. La proposition de loi élargit les possibilités de sortir d'une indivision sans décision unanime.
Un nouveau mécanisme est ainsi mis en place pour sortir d'une indivision bloquée, dans un cas particulièrement complexe. La Direction nationale d'intervention domaniale (DNID) se heurte en effet à des difficultés lorsque l'identité ou l'adresse d'un indivisaire est inconnue. Pour remédier à ces obstacles, le texte ouvre la possibilité de demander au tribunal judiciaire la vente d'un bien en indivision, lorsque la succession est vacante, sous certaines conditions :
- l'indivision doit être constituée depuis au moins dix ans, et l'un des indivisaires décédé depuis au moins deux ans ;
- l'identité ou l'adresse d'au moins un indivisaire n'est pas connue et n'a pas été trouvée malgré les recherches entreprises (la possibilité initialement prévue de vendre le bien dans le cas où l'indivisaire est bien identifié, mais s'oppose à la vente ou n'est pas en mesure d'exprimer sa volonté, a été supprimée par les députés ) ;
- aucune atteinte excessive ne doit être portée aux intérêts des indivisaires.
Les députés ont également prévu que la publicité de l'ordonnance du juge, qui désigne l’État (en pratique la DNID) comme curateur dans le cadre d'une succession vacante, se fasse aussi sur le site internet de l’administration chargée des domaines. Il s'agit d'assurer une diffusion plus large de l'ordonnance.
Des mesures inspirées du droit local des outre-mer et d'Alsace-Moselle
Deux mesures adoptées par les députés s'inspirent de régimes appliqués outre-mer et en Alsace-Moselle, sans pour autant les étendre directement et entièrement, comme le prévoyait la proposition de loi initiale.
S'inspirant de la loi du 27 décembre 2018 visant à faciliter la sortie de l'indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer, dite "loi Letchimy", le texte abaisse la part requise pour permettre la vente d'un bien indivis avec l'autorisation du tribunal judiciaire de 2/3 à la moitié des indivisaires, soit la majorité simple.
Une expérimentation est également prévue pendant 5 ans pour assouplir et accélérer la procédure de partage judiciaire, qui est aujourd'hui lente et complexe. La procédure reposera davantage sur le notaire, dont les pouvoirs seront renforcés, que sur le juge. Cette expérimentation, qui s'inspire du régime du partage judiciaire de droit alsacien-mosellan, sera ouverte aux départements volontaires. Elle doit être précisée par arrêté.
Le gouvernement devra remettre au Parlement deux rapports faisant le bilan de la loi "Letchimy" de 2018 et de la procédure de partage judiciaire en Alsace-Moselle.
Le Sénat doit à présent examiner la proposition de loi.
Cette page propose un résumé explicatif du texte pour le grand public. Elle ne remplace pas le texte officiel.