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Narcotrafic en France : la montée en puissance des réseaux criminels - Entretien avec Étienne Blanc

Temps de lecture  19 minutes

Par : Etienne Blanc - Sénateur du Rhône

Créée en novembre 2023, la Commission d’enquête du Sénat sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier a rendu son rapport en mai 2024. Son rapporteur dresse ici le portrait d’une France submergée par les drogues et identifie les failles qui nuisent aux réponses de l’État.

L'appréhension du narcotrafic

Quelles sont les sources dont vous avez disposées et les méthodes que vous avez mises en œuvre pour connaître et analyser l’ampleur du narcotrafic en France ?

Les commissions d’enquête sont un outil de contrôle puissant pour les assemblées parlementaires. En application d’une ordonnance organique de 1958, je dispose en tant que rapporteur d’un droit de communication – ce qui signifie que je peux obtenir la transmission de tout document utile à nos travaux – et d’un pouvoir de contrôle sur pièces et sur place. Le refus de faire droit à ces deux prérogatives est passible de sanctions pénales. Nous avons très largement fait jouer le droit de communication et obtenu par ce biais nombre d’informations précieuses.

Nous avons, aussi et surtout, conduit de multiples auditions qui nous ont permis d’entendre au Sénat plus de 150 personnes, dont la plupart ont témoigné publiquement et sous serment. Elles venaient de tous les horizons et représentaient la diversité de nos territoires : des chercheurs, des journalistes, des juristes, des élus locaux, des membres d’associations, des avocats, mais surtout des « praticiens » de la lutte contre le narcotrafic – policiers, gendarmes, douaniers, magistrats. Nous avons fait des déplacements sur le terrain, à la fois dans des secteurs notoirement touchés par le trafic de stupéfiants, comme Marseille, la Seine-Saint-Denis ou Valence, mais aussi dans des zones rurales et des villes moyennes qui souffrent, elles aussi, de ce fléau, comme Verdun ou Le Creusot. Le sujet n’étant évidemment pas limité à la France, nous avons aussi fait un déplacement à Anvers, en Belgique, et nous avons entendu des représentants d’Europol et d’Eurojust comme des spécialistes de certaines zones à enjeu – l’Amérique du Sud, Dubaï, le Maghreb, etc.

Tous nos travaux, et c’est une particularité dont le Parlement doit être fier, ont été menés de manière pluraliste : la commission d’enquête compte 23 membres, issus de tous les groupes politiques du Sénat, et notre défi est de bâtir un consensus en dépassant les clivages traditionnels, puis de proposer sur cette base une stratégie de lutte contre le narcotrafic qui soit à la fois pragmatique et ambitieuse. 

Le terme de narcotrafic recouvre un vaste ensemble de drogues (cannabis, cocaïne, drogues de synthèse...) Peut-on établir une liste de ces drogues et de leur importance relative ?

Le narcotrafic est, par définition, une réalité opaque. Les chiffres dont nous disposons – saisies, statistiques de consommation, estimations de la production... – montrent toutefois que les deux drogues que vous citez restent les "produits phares" du narcotrafic : le cannabis est, de loin, le produit le plus trafiqué, et la cocaïne connaît une croissance exponentielle – notamment parce que la saturation du marché américain et l’émergence du fentanyl ont obligé les trafiquants à aller chercher des débouchés ailleurs, et qu’ils ont ciblé l’Europe. Il ne faut pas oublier l’héroïne, moins visible car elle se trafique par petites quantités mais dont les conséquences sanitaires sont ravageuses. Tous ces produits ont aussi des dérivés – héroïne grise, crack, etc. –, moins chers et plus nocifs car "coupés" avec des substances peu onéreuses et de basse qualité, qui participent à leur rentabilité.

La nouveauté la plus importante est l’essor des drogues de synthèse, avec une production indépendante des climats, qui peut virtuellement avoir lieu partout dans le monde – y compris en Europe – dès lors qu’on peut implanter des laboratoires et se fournir en précurseurs chimiques. C’est une première difficulté, mais ce n’est pas la seule : la lutte contre ces stupéfiants est rendue plus complexe par leur composition incertaine, à la fois extrêmement toxique – leur appellation en témoigne, puisque l’un des plus connus s’appelle le PTC, pour "pète ton crâne" – et qui échappe à la plupart des modes traditionnels de détection – les drogues de synthèse n’ont, par exemple, pas d’odeur distinctive. La situation est particulièrement préoccupante. 

S’il est essentiel de recenser l’existant, ce n’est pas suffisant. Nous devons faire en sorte de ne plus être en réaction et de récupérer une capacité d’anticipation pour mieux nous défendre contre les trafiquants. Les désastres provoqués par le fentanyl aux États-Unis doivent nous inquiéter (plus de 100 000 morts par an), et nous ne devons pas attendre d’être confrontés au problème pour nous poser la question des opioïdes de synthèse, car s’ils arrivaient sur notre sol et étaient massivement consommés, les ravages seraient terribles. 

L'ampleur du narcotrafic

Marseille semble être un point majeur d’importation, de fixation et de diffusion des drogues en France. La deuxième ville de France est-elle devenue une "narcoville" ?

Marseille a payé un lourd tribut au narcotrafic, c’est une certitude : 49 personnes y ont perdu la vie en 2023. Pour autant, il ne faut pas stigmatiser la ville. Non seulement nombreux sont ceux qui se battent pour empêcher les trafiquants de prendre le contrôle – il faut saluer l’engagement remarquable des policiers, des douaniers, des magistrats et de tous ceux qui luttent avec eux –, mais surtout nos travaux ont révélé que l’idée selon laquelle le narcotrafic est une réalité métropolitaine est fausse. Aujourd’hui, le trafic a lieu partout et tout le temps. 

Des villes moyennes ont connu l’année passée, et encore il y a quelques semaines, des règlements de comptes à l’arme de guerre. Certaines collectivités d’outre-mer, qui servent de "rebond" aux trafics, subissent des situations dramatiques. Les trafiquants se déplacent quand leur marché d’origine est saturé, et ce qui était auparavant un mythe – à savoir l’investissement de villes moyennes par des "Marseillais" ou des "Parisiens" – est en passe de devenir une réalité. 

On ne peut donc plus raisonner sur un strict plan territorial : le narcotrafic a changé de visage avec les commandes en ligne depuis des messageries cryptées et les livraisons de porte à porte – ce qu’on appelle trivialement "Uber shit" ou "Uber coke" –, mais aussi avec des outils techniques qui permettent aux commanditaires d’animer les réseaux depuis un lieu tiers, et même depuis l’étranger. 

Dispose-t-on d’une évaluation fiable du chiffre d’affaires du narcotrafic en France, et a -t-on des données sur sa croissance sur quelques décennies ?

Là encore, les chiffres sont malheureusement incertains. Ce que l’on sait, c’est que le narcotrafic représente au moins trois milliards d’euros de revenus – les estimations vont jusqu’à six milliards, ce qui atteste une grande marge d’incertitude. Lors de son audition par la commission d’enquête, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a chiffré à 3,5 milliards d’euros le bénéfice annuel du narcotrafic en France. Environ 200 000 personnes vivent de ce trafic en France. C’est en tout cas le principal marché criminel et le plus rentable. 

Pendant son audition par la commission d’enquête, Roberto Saviano, l’écrivain et journaliste italien connu pour avoir décrit et dénoncé les milieux mafieux, rappelait que si l’on investit 1 000 euros dans des actions en Bourse, on peut escompter récupérer 1 100, voire 1 200 euros au bout d'un an, tandis que 1 000 euros investis dans le marché de la cocaïne rapportent dans le même délai plus de 180 000 euros – soit environ un million d’euros gagnés pour 5 000 euros investis. Aucun marché légal ne permet de tels gains. Cela suscite la convoitise et même une forme de folie, de déconnexion morale, et cela permet aux trafiquants de disposer de moyens financiers quasiment illimités et, partant, de résister à de fortes pertes. 

Pour en revenir à votre question, à mon sens le meilleur indicateur est celui des prix : les tarifs des produits ont nettement baissé depuis quelques années et, malgré d’importantes saisies, ils ne remontent plus. Même après des saisies "record", il n’y a pas de tension sur les stocks et donc les prix n’augmentent pas. Cela montre que le trafic est, malheureusement, en très bonne santé. De même, malgré les saisies, les délais de livraison n’augmentent pas, ce qui atteste, là aussi, qu’un important stock est constitué.

On connaît les conséquences du narcotrafic : crimes de sang, blanchiment, corruption… Peut-on dire que la France, sans être un narco-État, est un pays corrompu ? 

Il faut distinguer deux enjeux. La violence connexe aux trafics est indéniable. Les trafiquants sont des barbares dont les méthodes sont celles de la traite des êtres humains. Pour garder le contrôle du réseau, ils torturent, ils assassinent. Ils recrutent les plus faibles comme "petites mains", leurs méthodes sont celles de prédateurs froids et calculateurs. Ceux qui blanchissent ne valent pas mieux : les collecteurs, les banquiers occultes ou sarafs (agents de change en arabe), les mafias étrangères, notamment asiatiques, spécialisées dans le blanchiment, tous ces argentiers ont du sang sur les mains. Les trafiquants sont des barbares dont les méthodes sont celles de la traite des êtres humains. Pour garder le contrôle du réseau, ils torturent, ils assassinent.

Ensuite, il y a la corruption, qui répond à une mécanique différente. On connaît la technique des trafiquants : la compromission a deux faces, la promesse et la menace, et celui qui refuse la corruption subira des pressions ou des violences – rappelons l’adage, glaçant, le plomb ou l’argent (plomo o plata).
Le risque de corruption liée au narcotrafic est, en dépit de sa gravité, encore largement sous-estimé dans notre pays. Heureusement, les consciences commencent à s’éveiller et des initiatives sont prises, notamment dans l’administration des douanes ou dans la police et la gendarmerie. Il faut aller plus loin, et vite, car il s’agit d’un danger existentiel pour nos institutions. Il est d’ailleurs dangereux de parler de « corruption de basse intensité », comme on l’entend parfois, car l’expression laisse entendre qu’une telle corruption – qui se traduit par la vente d’informations qu’on trouve dans les fichiers de police, par exemple, ou par la "perte" d’un badge donnant accès à une zone sensible d’un port – est négligeable. Rien n’est plus faux, et c’est sur cette base que les trafiquants prospèrent. Ils ont besoin des informations et des compétences qu’ils achètent au prix fort grâce à la corruption, et celle-ci est toujours une faillite, un échec. Face au péril, il faut un sursaut. 

Quels sont les circuits internationaux d’approvisionnement des narcotrafics en France ? 

Les principaux circuits n’évoluent qu’à la marge, les produits de base des principaux stupéfiants étant cultivés dans des zones bien connues : le Maroc pour le cannabis, l’Amérique du Sud pour la coca. Les changements sont plus sensibles pour l’opium, puisqu’il semble que la Birmanie ait récemment détrôné l’Afghanistan au palmarès des pays producteurs. Certains pays basculent : la Syrie du dictateur Bachar al-Assad est, avec le captagon, devenue un narco-État. 

En tout état de cause, nous savons que les stupéfiants ne sont que rarement expédiés vers les zones de consommation directement de leur lieu de production. Les trafiquants repèrent les États qu’ils perçoivent comme "faillis" pour exploiter leurs faiblesses et en faire leurs bases arrière, comme le montre l’exemple tragique de l’Équateur. 

Depuis ces points de départ, les trafiquants exploitent toutes les routes possibles et leur créativité pour dissimuler les cargaisons illicites ou pour découvrir des circuits nouveaux est inépuisable. Fermez une porte, ils ouvriront une fenêtre. Toute sécurisation d’un point A génère la création d’un circuit parallèle au point B. Nous l’avons déjà constaté : lorsque le "100 % contrôle" a été mis en place à l’aéroport Félix-Éboué en Guyane pour lutter contre les "mules", le trafic s’est reporté aux Antilles ; depuis que le niveau de sécurité a été relevé à Rotterdam et à Anvers, le port du Havre est davantage exposé, et la sécurisation qu’il a lui-même entreprise s’est traduite par l’arrivée de cargaisons dans des ports secondaires et de plaisance. 

N’oublions pas que la sécurisation des voies maritimes aux abords des États-Unis et le renforcement de leur frontière terrestre avec le Mexique avaient conduit les trafiquants, dans la seconde moitié des années 2000, à utiliser la voie aérienne avec des petits avions de tourisme et même des ULM. Gardons aussi à l’esprit que certains réseaux ont déjà recours à des petits sous-marins pour acheminer des stupéfiants…

Nous devons donc faire des efforts coordonnés et ne pas penser qu’en colmatant une brèche on a réglé le problème. Nous devons également agir le plus en amont possible – d’où la nécessité absolue de développer la coopération internationale avec les pays producteurs ou de transit – et faire en sorte de mieux connaître les stratégies des trafiquants : cela passe non seulement par des enquêtes pénales, mais aussi par du renseignement. Nous devons nous mettre en capacité de repérer immédiatement les moyens d’action nouveaux que les trafiquants déploient, les routes nouvelles qu’ils utilisent, sans quoi nous nous condamnerons à être perpétuellement débordés.

Quelle lutte contre le narcotrafic ?

Quelles vous semblent être les conditions d’efficacité de la lutte contre le narcotrafic ?

Les acteurs de la lutte contre le narcotrafic peuvent avoir le sentiment de vider l’océan à la petite cuillère. La commission d’enquête du Sénat sur le narcotrafic en France a entendu leur désarroi face au manque de moyens humains, juridiques et techniques, mais aussi leur détermination farouche. 

Pour filer votre métaphore, peut-être faut-il imaginer Sisyphe heureux et nous révolter contre l’idée que le combat est perdu d’avance. Nous devons nous rappeler que, de toute façon, nous n’avons pas le choix. La lutte contre le narcotrafic est un combat vital et il importe non pas seulement de le mener mais de le gagner. Je garde la conviction que la victoire est à portée de main si nous prenons la juste mesure de la situation et que nous nous dotons de moyens adaptés en acceptant de changer d’échelle, en prenant le sujet "par le haut", en visant notamment les têtes de réseau. 

Pour ce faire, la commission d’enquête du Sénat propose un plan d’attaque dont les grands axes sont les suivants : frapper les trafiquants au portefeuille, car ils ne sont motivés que par l’appât du gain et ne craignent plus la prison, ce qui implique d’aller encore plus loin dans l’identification et la confiscation des avoirs criminels ; lutter contre la réinjection directe de l’argent liquide dans l’économie légale, puisque, au-delà du blanchiment, toute une partie des fruits du trafic reste "noire" et repart directement dans des circuits licites – on a beaucoup cité le cas de secteurs « classiques » qui s’approvisionneraient par ce biais pour financer le travail dissimulé – ; aller chercher les logisticiens et les argentiers qui échappent aujourd’hui à la répression pénale ; donner à chaque acteur un rôle clair, avec des chefs de file dotés d’une véritable autorité sur les autres services, au niveau tant du terrain – police, gendarmerie et douane – que dans la sphère judiciaire ; affermir la coopération internationale pour mettre fin à l’impunité dont jouissent les trafiquants du haut du spectre dans des « pays refuges » ; mettre à niveau notre procédure pénale – on parle beaucoup des "repentis", et il faut en effet aller beaucoup plus loin sur ce terrain, mais la réflexion doit être plus globale et nous devons également réformer la gestion des informateurs et le système des infiltrations. 

Pour tout cela, il faut des moyens ; or les moyens ont un coût. C’est un effort que nous devons consentir, car il ne s’agit pas d’un sacrifice mais d’un investissement pour l’avenir. La lutte contre le narcotrafic nous coûtera encore plus cher si nous attendons d’être au pied du mur pour réagir. J’ajoute que le produit des saisies d’avoirs illégaux devrait largement couvrir le coût de cette lutte acharnée.
Je note aussi que sans consommateurs, il n’y aurait pas de trafics. Le sanitaire et le social n’étaient pas dans le périmètre de la commission d’enquête du Sénat, mais cela ne l’a pas empêchée pas de se poser certaines questions : le niveau de sanction envers les consommateurs est-il le bon ? En France, nous avons massivement communiqué pour exposer les dangers de l’alcool et du tabac, avec des grandes campagnes nationales. Pourquoi ne prend-on pas des initiatives analogues pour les stupéfiants ? Il est incompréhensible qu’il n’y ait pas de discours fort sur ce sujet, et paradoxal qu’on ait fait davantage pour dissuader de consommer des produits légaux que pour rappeler les dangers que l’on court et les atrocités que l’on cautionne lorsque l’on consomme des drogues illégales…

Ne faudrait-il pas un programme de lutte international contre le narcotrafic, associant États et organisations internationales ? 

Les conséquences du narcotrafic à l’étrangers ont également de quoi inquiéter. Il n’y a pas besoin d’aller bien loin pour voir ce que le narcotrafic peut faire aux institutions : en Belgique, des membres du gouvernement ont été menacés et ont dû être placés sous protection policière renforcée ; aux Pays-Bas, le procès de certains membres de la tristement célèbre Mocro maffia a dû se faire dans des conditions de sécurité inédites, avec notamment des juges anonymes et au visage masqué pendant les audiences… Nous ne devons pas attendre que la France subisse le même sort pour réagir. 
La coopération internationale est l’une des clés du sujet. 

Malheureusement, la bonne volonté des États est moins forte contre le narcotrafic que contre le terrorisme, car certains ont des intérêts financiers directs à ce que ce trafic continue… L’ONU a déjà des programmes, et même un office dédié, de même que l’Union européenne. C’est une bonne chose, car cela donne une assise aux initiatives qui peuvent être prises à l’international et cela permet de mettre tout le monde autour de la table, ce qui constitue un symbole important. Cela permet aussi des avancées réelles : je pense notamment à la future réglementation européenne contre le blanchiment qui sera un levier essentiel, à la fois en créant de nouvelles possibilités de confiscation dans tous les pays de l’Union et en régulant l’usage de l’argent liquide, ce qui est un enjeu majeur – même si le seuil de 10 000 euros permet encore quelques libéralités… C’est d’ailleurs la coopération européenne qui a permis les grandes réussites qu’ont été les dossiers EncroChat et Sky ECC (respectivement une entreprise de service de télécommunications chiffrées néerlandaise utilisée pour des activités criminelles et une messagerie privée canadienne qui abritait des échanges de communication entre criminels). 

Mais peut-on aller plus loin sans diluer la lutte et sans se heurter à des résistances qui, finalement, rendront nos efforts vains ? Peut-on être efficace en dépit des différences de conception, de culture et, parfois, de législation, qui font par exemple que des produits illégaux en France ne le sont pas forcément à l’étranger ? Une coalition nous rendrait-elle plus forts ou, à l’inverse, nous forcerait-elle à nous limiter au plus petit commun dénominateur entre un trop grand nombre d’acteurs étatiques qui n’ont pas les mêmes intérêts et pas la même vision ? 

Par pragmatisme, en l’état, je crois davantage à des partenariats multilatéraux. La France l’a fait en matière portuaire sous l’égide des États de la façade Nord-Ouest de l’Europe et cela constitue, je crois, un succès. Nous l’avons également fait en matière de renseignement maritime avec le Centre opérationnel d’analyse du renseignement maritime pour les stupéfiants (MAOC-N) et le Centre de coordination de la lutte anti-drogue en Méditerranée (CeCLAD-M). Nous devons reproduire ces exemples avec d’autres pays et dans d’autres matières. 

La France tente, par ailleurs, de coopérer étroitement avec les pays sud-américains qui le souhaitent. Nous devons faire encore davantage auprès des pays producteurs pour couper les réseaux à la racine. Nous devons aussi trouver des moyens de rendre coopératifs des États qui, en l’état, ne le sont pas suffisamment. Dubaï et les pays du Maghreb dans lesquels se cachent les trafiquants, ainsi que les banques étrangères qui font office de "blanchisseuses" doivent être nos priorités pour l’avenir. 

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