Texte intégral
Permettez-moi de vous dire, tout d'abord, combien je suis heureux de me trouver aujourd'hui parmi vous, à l'occasion de votre assemblée annuelle. Je veux également vous remercier, Monsieur le Président, pour votre accueil et vos mots chaleureux.
C'est en effet pour moi la première occasion de m'exprimer comme Ministre de la Pêche devant l'ensemble des familles du monde de la pêche et de l'aquaculture.
Votre représentativité des intérêts de la profession fait de vous des interlocuteurs privilégiés et, j'ajouterai, indispensables des pouvoirs publics, que ce soit à l'échelon national, régional ou local. A cet égard, je tiens à vous rassurer, Monsieur le Président, la taxe parafiscale, supprimée fin 2003, sera remplacée début 2004 par un nouveau mécanisme de financement, dont le statut juridique sera connu dans les prochains mois.
Il vous revient de vous prononcer sur les mesures nationales ou communautaires touchant à la préservation et à la gestion de la ressource, aux conditions d'exercice de la pêche professionnelle ou au fonctionnement de l'interprofession elle-même. Mais c'est le dialogue permanent que vous entretenez avec les pouvoirs publics que je voudrais saluer aujourd'hui.
Je vous remercie des nombreuses questions que vous m'avez posées. Je veillerai à répondre à vos préoccupations. Au-delà, je m'efforcerai d'apporter ma contribution au dialogue et de vous faire partager les grandes lignes de la politique française des pêches que j'entends conduire.
La politique des pêches ne saurait évidemment se résumer à répondre ponctuellement, dans l'urgence, sinon dans la crise, à une succession de problèmes conjoncturels, aussi importants ou cruciaux soient-ils.
Or, force est de constater que, depuis trop longtemps, la politique des pêches dans notre pays a été conduite en l'absence de toute vision et de toute stratégie au long cours. Cela est regrettable.
Activité traditionnelle de notre littoral, les pêches maritimes participent au développement économique et à l'aménagement du territoire. Par leur ancrage littoral et l'éventail des activités induites, elles constituent un vecteur d'équilibre essentiel à l'animation du tissu social, en même temps qu'un puissant identifiant culturel. Elles méritent donc mieux qu'une approche à courte vue.
La nouvelle politique que je veux conduire devra s'appuyer sur une réflexion globale et approfondie de votre secteur. Sans ignorer le poids des réalités, elle devra être suffisamment imaginative et audacieuse pour créer les conditions d'un développement économique prometteur de votre activité et consolider votre place dans notre société.
A cet égard, la discussion sur la réforme de la PCP, qui s'engage à Bruxelles, ne constitue, en tout état de cause, qu'une étape dans ce processus.
Vous connaissez ma détermination à m'opposer à ces orientations inacceptables. Ne nous méprenons pas, la PCP ne répondra pas, quoi qu'il advienne, à elle seule à toutes les questions qui nous sont aujourd'hui posées. Nous aurons à définir des règles nationales complémentaires.
Sans préjuger du résultat de ces discussions conduites au niveau communautaire, je souhaiterais, en réponse à vos interrogations, vous livrer dès aujourd'hui quelques orientations, que je considère comme fondamentales dans l'élaboration d'une stratégie positive et durable, car soucieuse de l'avenir du secteur et respectueuse de ses ressources.
I - La ressource
L'avenir de la pêche, c'est d'abord la question du renouvellement de la ressource. Or, celle-ci n'est pas inépuisable. Elle se trouve parfois même fragilisée.
Toute politique des pêches qui se veut responsable doit donc intégrer la contrainte de la ressource et mettre en uvre une gestion adaptée, donc durable de son exploitation.
A mes yeux, les instruments les plus efficaces sont les TAC et les quotas, complétés de quelques autres mesures techniques qui devront être ciblées pour être justes et parfaitement efficaces.
Pour être efficaces et acceptés, les TAC doivent, en effet, reposer sur des diagnostics scientifiques aussi incontestables que possible.
A cet égard, les méthodes actuelles de rendu des avis scientifiques doivent être améliorées. Ce n'est évidemment pas la compétence professionnelle des scientifiques eux-mêmes qui est en cause ; elle est grande et reconnue internationalement. Ce qui est en cause, c'est à la fois l'insuffisante concertation entre tous les acteurs, et notamment les pêcheurs, dans l'élaboration des diagnostics et le caractère excessivement simplificateur des questions posées au CIEM par la Commission lors de l'élaboration des recommandations de gestion.
Ainsi, je crois beaucoup à la valeur des expertises collectives et internationales. Il ne nous est plus possible aujourd'hui de raisonner institut par institut. C'est dans le cadre d'une procédure interactive et grâce à un dialogue permanent que nous pourrons enrichir, en les confrontant les uns aux autres, des avis des scientifiques, ce qui supprime le caractère définitif qu'ils revêtent trop souvent aujourd'hui.
J'ai dit tout à l'heure que l'on pouvait envisager, dans certains cas, des méthodes de gestion alternatives aux TAC et quotas. Mais je suis fermement convaincu que l'on ne peut gérer efficacement la ressource par la superposition d'instruments.
Les TAC et quotas relèvent de logiques différentes de la gestion de l'effort de pêche. Vouloir les superposer conduit à une gestion complexe et à un résultat incertain.
Ces précisions apportées, vous comprendrez mes réactions aux propositions du Commissaire FISCHLER concernant la gestion de la ressource.
Je suis fermement hostile à la mise en place de plans de gestion pluriannuels, car ceux-ci reposent sur trois présupposés que je récuse catégoriquement :
l'automaticité, tout d'abord, d'une gestion globalisée et uniformisée de l'ensemble des stocks halieutiques, sans que soient apportées les arguments scientifiques solides et incontestables qui la justifient ;
la superposition, ensuite, pour la gestion d'un même stock de plusieurs instruments de régulation de capture ;
l'abandon, enfin, par le Conseil, de sa compétence politique de gestion de la ressource au profit de décisions appliquées technocratiquement par les Commissaires.
Cette simplification de notre politique de gestion de la ressource halieutique exige, en contrepartie, une amélioration de la politique de contrôle, que j'appelle de mes vux.
Pour être efficace, cette politique de contrôle devra être équitable et harmonisée au sein de l'Union Européenne. Elle doit demeurer ferme dans ses objectifs et effective dans sa mise en uvre.
Il ne saurait y avoir de politique de gestion durable de la ressource sans un strict respect des quotas de captures, auxquels vous concourrez d'ailleurs très utilement en communiquant vos livres de bord, vos log books et en respectant les normes techniques visant à assurer une meilleure sélectivité des engins de pêche et des tailles minimales de commercialisation.
Notre position sera d'autant plus forte et respectée à Bruxelles que la France sera irréprochable dans l'application des règles. Cela relève d'une responsabilité collective, à laquelle bien sûr les pouvoirs publics prendront toute leur part.
La gestion durable de la ressource relève conjointement de votre responsabilité et, de façon tout à fait légitime, de la responsabilité de la société tout entière. A cet égard, nous veillerons à ce que l'attention accrue que portent les mouvements environnementalistes à votre activité soit l'occasion d'engager un dialogue et de parvenir à une meilleure perception de la noblesse et des contraintes de votre métier. Dans le même esprit, les perspectives de développement de l'aquaculture, préconisées par le projet de réforme de la PCP me semblent présenter un grand intérêt.
Il importe de ne pas vous placer sur la défensive. Je vous engage au contraire à adopter une approche positive et surtout proactive, qui vous permettra de faire partager votre vision et votre amour de ce métier.
II - La flotte de pêche
Au-delà des ressources halieutiques, il n'est pas de pêche sans moyen de capture, c'est-à-dire sans une flotte adaptée.
La politique de la flotte suivie par l'Union Européenne ces vingt dernières années ne me paraît pas satisfaisante, loin s'en faut.
La Commission fait, en effet, du navire de pêche l'instrument principal de gestion de la ressource. Ce choix est à la fois inefficace et pervers.
Il est inefficace car il présuppose que l'on pourra quantifier la capacité de pêche d'un navire à partir de critères aussi généraux que la puissance de son moteur ou l'importance de sa jauge. Or, beaucoup d'autres paramètres difficilement quantifiables entrent en jeu, tels que le type d'engin de pêche utilisé, l'équipement électronique du navire ou la compétence du patron, élément essentiel dans une activité qui demeure avant tout humaine.
Il est également pervers, car il tend à déstructurer nos flottilles. Il favorise d'une part la concentration des armements et la disparition des plus petites unités. Il accroît, d'autre part, le prix des navires d'occasion, en accordant à ces derniers une valeur incorporelle, en constante augmentation et souvent sans rapport avec leur qualité réelle de pêche ou de sécurité. Plus gravement, cette évolution décourage l'entrée des jeunes dans le métier, alors que les années à venir verront de nombreux patrons poser leur sac à terre.
Je souhaite, dans ces conditions, qu'émerge au niveau communautaire une politique rénovée de la flotte. Cette rénovation demeure éloignée, et c'est un euphémisme, des propositions faites par le Commissaire FISCHLER, que nous ne pouvons accepter en l'état, je vous l'ai déjà dit.
Si je considère comme nécessaire un certain encadrement et un suivi rigoureux de nos capacités de pêche, je ne peux, en revanche, admettre la proposition visant à supprimer tout accompagnement public dans le financement et le renouvellement des navires de pêche.
Quoique certains prétendent, les aides publiques ne seront pas un facteur de surcapacité et de surpêche, si nous évoluons dans un cadre où l'accès à la ressource est réglementé par les TAC et quotas, et où la capacité de la flotte de pêche se trouve plafonnée.
Ces aides sont, en revanche, indispensables pour bon nombre d'entreprises, et tout particulièrement pour la flotte artisanale.
La France est riche de la diversité de ses flottilles et de ses métiers. J'entends la préserver. Elle garantit la variété de nos approvisionnements et le maintien d'une présence économique sur l'ensemble du littoral, dans des régions souvent très périphériques où la diversification des activités est plus difficile.
Le renouvellement et la modernisation des navires sont un impératif pour garantir aux équipages sécurité et confort et assurer aux exploitants une meilleure valorisation des captures et une plus grande rentabilité économique. L'amélioration des conditions de travail à bord est nécessaire pour rendre à ce métier son attractivité notamment auprès des jeunes, dans une société faisant une place grandissante à la qualité de vie professionnelle et extra-professionnelle.
Les aides publiques sont essentielles au renouvellement et à la modernisation de la flotte de pêche. Mais elles n'épuisent pas la question plus globale des conditions de financement des navires.
Dans la rentabilité de l'entreprise de pêche, le poids du capital investi et la charge des remboursements d'emprunt sont déterminants.
Sans proposer, à ce stade, des pistes de réforme qui seraient par trop définitives, je souhaiterais vous inviter à la réflexion.
Comment réduire le coût d'acquisition d'un navire, lorsque l'on connaît la valeur incorporelle de son permis de mise en exploitation ? Comment maintenir la rentabilité des navires sans accroître les capacités de capture, dans un contexte où la ressource est moins généreuse ? Comment enfin alléger les charges financières pesant sur les comptes de résultat des entreprises de pêche ?
Les réponses que nous apporterons ensemble à ces questions nourriront, le moment venu, le projet de nouvelle politique des pêches que j'appelle de mes vux.
III - Le marché
Enfin, la pêche c'est aussi et surtout la commercialisation des produits. Je voudrais particulièrement insister sur ce point car il me parait essentiel.
Le revenu des pêcheurs résulte, bien sûr, de la quantité pêchée, mais également, sinon plus, du prix de vente des produits. C'est ce dernier élément, le prix de vente, qui doit faire l'objet de toute notre attention.
J'aimerais avec vous aborder les conditions qui me paraissent nécessaires pour atteindre cet objectif.
Nous devons, tout d'abord, rechercher un meilleur équilibre entre l'offre et la demande. A cet égard, toutes les initiatives visant à une meilleure régulation des apports, à travers la mission essentielle des organisations de producteurs, me paraissent judicieuses. Sur un marché structurellement déficitaire comme le vôtre, il n'est pas normal de constater des prix bas, voire des retraits, au seul motif d'une gestion déficiente de l'offre. Je sais qu'il est difficile de planifier à l'avance les quantités de poissons pêchées par un navire qui quitte le port, mais je suis persuadé que l'on peut, dans le cadre d'une gestion collective et concertée, lisser les variations de ces apports.
Là encore, je suis disposé, si le besoin s'en fait sentir et après m'être concerté avec vous, à établir les fondements réglementaires d'une mise en marché mieux ordonnée et plus rémunératrice.
Nous devons par ailleurs optimiser la valorisation du produit vendu. Cette valorisation suppose une démarche de qualité, la recherche de la traçabilité, ainsi qu'une transformation qui corresponde aux attentes des consommateurs. Ce souci de valorisation est l'affaire de tous les acteurs de la filière : le pêcheur bien sûr, mais également le mareyeur qui joue un rôle essentiel dans la chaîne de la qualité. La réglementation nationale et communautaire vous offre à cet égard de nombreux leviers ; à vous de les saisir.
Certes, vous êtes confrontés, comme les autres acteurs du marché des produits de la mer, à une forte concurrence émanant de nos partenaires de l'Union Européenne ou de pays tiers.
Dans les prochains mois, la France mènera une action déterminée, notamment au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce, afin de conserver aux produits de la mer une protection tarifaire minimale. Pour autant, la meilleure défense de nos produits résidera sans doute moins dans un combat difficile en faveur du maintien des droits de douane élevés que dans une action forte de différenciation de l'origine, de la dénomination de vos produits ou le recours à des signes de qualité reconnus par les consommateurs.
C'est d'ailleurs l'objet de l'action que la France mène tant au sein de l'Union Européenne qu'au sein des organisations internationales compétentes, tel que le CODEX.
IV - La politique extérieure de la pêche
Malgré les inquiétudes qu'inspirent les propositions du Commissaire FISCHLER, la France reste déterminée à soutenir le développement et le renforcement du volet externe de la politique commune des pêches.
Ce volet repose, dans mon esprit, sur deux piliers : la politique des accords de pêche et la participation de l'Union Européenne aux organisations régionales de pêche.
Certes, une étude IFREMER publiée en 1999 a montré l'intérêt et la rentabilité des accords de pêche. Mais, la pêche, hors des eaux communautaires, comprend de nombreux aspects qui ne sauraient se réduire à des considérations strictement budgétaires.
L'activité de nos navires contribue d'abord à une présence politique dans ces zones et au rayonnement du pavillon communautaire dans le monde.
Elle concourt également à renforcer nos liens avec les pays auxquels nous lient des accords de coopération.
Nous devons, en revanche, observer la plus extrême vigilance à l'égard de certaines flottes extra-communautaires : il n'est pas raisonnable en effet de laisser le champ libre à des navires qui ne feraient pas l'objet d'un suivi aussi rigoureux que les nôtres et dont la participation à la gestion durable des pêcheries n'est pas garantie.
Pour toutes ces raisons, je souhaite que l'Union Européenne prenne davantage part aux discussions conduites dans les organisations régionales de pêche. Déjà, le rôle de celles-ci s'est considérablement accru depuis l'adoption de l'accord de New York en 1995. Il est sans doute appelé à se renforcer encore.
Il faut donc " muscler " la présence communautaire dans ces enceintes, afin de mieux défendre nos intérêts.
V - Le volet social
Au-delà des trois piliers économiques traditionnels que sont la ressource, les structures et le marché, la pêche c'est aussi et d'abord des hommes. Et le volet social est une dimension essentielle de ce secteur d'activité.
Je sais, qu'en ce domaine, de nombreuses questions vous préoccupent. Le volet social, déjà évoqué incidemment dans le Livre Vert, demeure pourtant l'un des enjeux majeurs du projet de réforme de la PCP.
Je voudrais tout d'abord aborder les difficultés que vous rencontrez pour recruter et fidéliser vos équipages.
Je sais, en effet, que certains navires sont contraints de rester à quai ou d'appareiller avec un équipage réduit, avec les conséquences économiques pour les armements et les risques pour les marins que l'on peut imaginer.
Ces difficultés ne sont certes pas nouvelles, mais elles se sont très sensiblement aggravées ces dernières années.
Dans ces conditions, les conclusions du Contrat d'Etudes Prospectives qui viennent d'être connues, doivent être très rapidement mises en uvre dans le cadre d'une action concertée avec mon collègue, le Secrétaire d'Etat aux Transports et à la Mer, Dominique BUSSEREAU, directement en charge de ces questions.
Le constat dressé est, en effet, accablant. Pour durer, une activité économique doit évoluer et innover. Or, notre système actuel de formation, caractérisé par le poids des formations réglementaires et son manque d'ouverture sur le monde, ne répond plus aux évolutions et aux besoins de la profession.
Nous devons faire preuve d'imagination afin d'ouvrir ce secteur à des compétences extérieures et de permettre aux marins de développer à leur tour d'autres savoir-faire. Je n'évoquerai ici que quelques orientations :
créer le bac professionnel attendu depuis longtemps,
développer l'apprentissage et la formation en alternance,
ouvrir les voies de recrutement en reconnaissant les qualifications " terrestres " par la validation des acquis de l'expérience,
améliorer l'insertion dans la profession,
instaurer un véritable partenariat avec les collectivités territoriales.
Il vous appartiendra d'en débattre lors des réunions d'informations du C.E.P. qui se tiendront d'ici à la fin de l'année. Je souhaite que les présidents des Comités Régionaux des Pêches en assurent la conduite. Ce sera là une illustration forte de l'implication de la profession, au-delà de sa participation aux instances institutionnelles de concertation, tel que le Comité Spécialisé de la Formation Professionnelle Maritime, qui vient de se réunir le 27 juin dernier.
Dans l'attente de ce dispositif, certaines mesures en vigueur, et qui ont fait la preuve de leur efficacité, seront reconduites. Je pense notamment au Certificat d'Initiation Nautique pour les emplois les moins qualifiés ou à l'emploi encadré de la main d'uvre étrangère.
S'agissant de la réduction du temps de travail, le décret en préparation, sur lequel vous serez à nouveau consultés, sera complété par une instruction -là encore animée d'un souci de pragmatisme- précisant les modalités de consultation de l'Inspection du Travail maritime.
En parallèle à ce travail réglementaire, l'accord collectif de la pêche artisanale sera examiné, en vue de son extension par la Commission Nationale de la Négociation Collective de la Marine Marchande lors de sa prochaine réunion en septembre. Cette Commission verra sa composition élargie, afin que le secteur de la pêche y soit mieux représenté.
Cette modernisation des relations sociales me paraît essentielle pour rendre à ce métier son attractivité et améliorer son image.
Ma conviction est que l'ensemble du secteur, artisanal et industriel, devra faire l'objet d'une couverture conventionnelle. Parmi vous, j'appelle les partenaires sociaux de la pêche industrielle à se réunir, pour convenir d'un accord, même s'il ne doit viser que les modalités de réduction du temps de travail.
Enfin, je voudrais évoquer le Plan Sécurité des navires de pêche. Certains d'entre vous ont participé à des expériences de port de vêtements flottants individuels ou ont pris part à la mission qui vient de se déplacer en Irlande. Ils savent ainsi que ce dossier progresse. En embarquant vendredi dernier sur un chalutier au Guilvinec, j'ai moi-même pris la mesure de l'importance de ces équipements pour préserver des vies. Il est essentiel que ce plan trouve désormais sa conclusion dans un partenariat avec les organisations professionnelles et les collectivités territoriales.
Mais l'enjeu n'est pas uniquement de définir le contenu des formations ou d'arrêter les modalités de financement de ces matériels. C'est un esprit de sécurité qu'il faut insuffler. Et je sais pouvoir compter sur chacun de vos métiers pour y prendre part.
VI - La simplification et la prise en compte des spécificités
Simplifier les procédures et mieux prendre en compte les spécificités de vos différents métiers constituent des objectifs auxquels j'attache également beaucoup de prix.
Simplifier les démarches tout d'abord. La politique des pêches est marquée, vous le savez, par un excès de réglementations. Devenues lourdes et complexes, celles-ci nuisent à l'efficacité et provoque une exaspération légitime chez les pêcheurs.
Nous devons avoir à cur de simplifier les démarches, tant au niveau national que communautaire. C'est là un vaste chantier que j'ai décidé d'ouvrir rapidement et pour lequel je compte sur votre collaboration active.
Mieux prendre en compte aussi les spécificités de la profession. La politique commune de la pêche doit respecter votre diversité. En disant cela, je pense tout particulièrement à la Méditerranée. Les conditions d'exercice de la pêche en Méditerranée requièrent une approche adaptée qui intègre ses réalités biologiques, économiques, sociales et culturelles.
Il en va de même des départements d'outre-mer pour lesquels la politique communautaire des pêches devra accompagner les efforts d'organisation et de développement de chaque territoire.
Comme au demeurant d'autres secteurs économiques, la pêche française est confrontée à d'importants changements, liés à la fois aux évolutions politiques de la communauté internationale et aux attentes nouvelles de nos concitoyens.
Il ne s'agit donc pas, dans ce monde en mouvement, de céder à la sinistrose et au découragement, mais bien de se mobiliser et s'adapter en permanence à ses évolutions.
Comme je l'ai rappelé précédemment, la réforme de la politique commune de la pêche n'est qu'une étape qu'il conviendra de négocier au mieux de nos intérêts. Elle s'inscrit plus fondamentalement dans un processus de définition d'une nouvelle politique, dont la dimension nationale sera déterminante.
Là encore, notre politique nationale donnera toute sa place au dialogue et à la concertation.
Je sais que vous vous avez toujours su faire preuve d'initiative, d'une grande capacité d'adaptation et maintenir en toute occasion un dialogue avec les pouvoirs publics.
C'est donc en totale confiance que je viens vous proposer cette méthode.
Les quelques orientations que je viens de vous décrire constituent, à ce stade, ma contribution aux évolutions que je crois nécessaires pour votre secteur. Il s'agit d'assurer la rentabilité économique des entreprises de pêche, gage d'attractivité à l'égard des jeunes pêcheurs, de garantir la diversité et la répartition harmonieuse des flottilles sur l'ensemble du littoral, tout en se montrant attentif à une gestion durable des ressources halieutiques. Elles traduisent ma confiance dans l'avenir du " grand métier ". Ne doutez en aucune manière de l'ambition et de l'attachement que j'ai pour lui, c'est-à-dire pour vous.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 9 juillet 2002)
C'est en effet pour moi la première occasion de m'exprimer comme Ministre de la Pêche devant l'ensemble des familles du monde de la pêche et de l'aquaculture.
Votre représentativité des intérêts de la profession fait de vous des interlocuteurs privilégiés et, j'ajouterai, indispensables des pouvoirs publics, que ce soit à l'échelon national, régional ou local. A cet égard, je tiens à vous rassurer, Monsieur le Président, la taxe parafiscale, supprimée fin 2003, sera remplacée début 2004 par un nouveau mécanisme de financement, dont le statut juridique sera connu dans les prochains mois.
Il vous revient de vous prononcer sur les mesures nationales ou communautaires touchant à la préservation et à la gestion de la ressource, aux conditions d'exercice de la pêche professionnelle ou au fonctionnement de l'interprofession elle-même. Mais c'est le dialogue permanent que vous entretenez avec les pouvoirs publics que je voudrais saluer aujourd'hui.
Je vous remercie des nombreuses questions que vous m'avez posées. Je veillerai à répondre à vos préoccupations. Au-delà, je m'efforcerai d'apporter ma contribution au dialogue et de vous faire partager les grandes lignes de la politique française des pêches que j'entends conduire.
La politique des pêches ne saurait évidemment se résumer à répondre ponctuellement, dans l'urgence, sinon dans la crise, à une succession de problèmes conjoncturels, aussi importants ou cruciaux soient-ils.
Or, force est de constater que, depuis trop longtemps, la politique des pêches dans notre pays a été conduite en l'absence de toute vision et de toute stratégie au long cours. Cela est regrettable.
Activité traditionnelle de notre littoral, les pêches maritimes participent au développement économique et à l'aménagement du territoire. Par leur ancrage littoral et l'éventail des activités induites, elles constituent un vecteur d'équilibre essentiel à l'animation du tissu social, en même temps qu'un puissant identifiant culturel. Elles méritent donc mieux qu'une approche à courte vue.
La nouvelle politique que je veux conduire devra s'appuyer sur une réflexion globale et approfondie de votre secteur. Sans ignorer le poids des réalités, elle devra être suffisamment imaginative et audacieuse pour créer les conditions d'un développement économique prometteur de votre activité et consolider votre place dans notre société.
A cet égard, la discussion sur la réforme de la PCP, qui s'engage à Bruxelles, ne constitue, en tout état de cause, qu'une étape dans ce processus.
Vous connaissez ma détermination à m'opposer à ces orientations inacceptables. Ne nous méprenons pas, la PCP ne répondra pas, quoi qu'il advienne, à elle seule à toutes les questions qui nous sont aujourd'hui posées. Nous aurons à définir des règles nationales complémentaires.
Sans préjuger du résultat de ces discussions conduites au niveau communautaire, je souhaiterais, en réponse à vos interrogations, vous livrer dès aujourd'hui quelques orientations, que je considère comme fondamentales dans l'élaboration d'une stratégie positive et durable, car soucieuse de l'avenir du secteur et respectueuse de ses ressources.
I - La ressource
L'avenir de la pêche, c'est d'abord la question du renouvellement de la ressource. Or, celle-ci n'est pas inépuisable. Elle se trouve parfois même fragilisée.
Toute politique des pêches qui se veut responsable doit donc intégrer la contrainte de la ressource et mettre en uvre une gestion adaptée, donc durable de son exploitation.
A mes yeux, les instruments les plus efficaces sont les TAC et les quotas, complétés de quelques autres mesures techniques qui devront être ciblées pour être justes et parfaitement efficaces.
Pour être efficaces et acceptés, les TAC doivent, en effet, reposer sur des diagnostics scientifiques aussi incontestables que possible.
A cet égard, les méthodes actuelles de rendu des avis scientifiques doivent être améliorées. Ce n'est évidemment pas la compétence professionnelle des scientifiques eux-mêmes qui est en cause ; elle est grande et reconnue internationalement. Ce qui est en cause, c'est à la fois l'insuffisante concertation entre tous les acteurs, et notamment les pêcheurs, dans l'élaboration des diagnostics et le caractère excessivement simplificateur des questions posées au CIEM par la Commission lors de l'élaboration des recommandations de gestion.
Ainsi, je crois beaucoup à la valeur des expertises collectives et internationales. Il ne nous est plus possible aujourd'hui de raisonner institut par institut. C'est dans le cadre d'une procédure interactive et grâce à un dialogue permanent que nous pourrons enrichir, en les confrontant les uns aux autres, des avis des scientifiques, ce qui supprime le caractère définitif qu'ils revêtent trop souvent aujourd'hui.
J'ai dit tout à l'heure que l'on pouvait envisager, dans certains cas, des méthodes de gestion alternatives aux TAC et quotas. Mais je suis fermement convaincu que l'on ne peut gérer efficacement la ressource par la superposition d'instruments.
Les TAC et quotas relèvent de logiques différentes de la gestion de l'effort de pêche. Vouloir les superposer conduit à une gestion complexe et à un résultat incertain.
Ces précisions apportées, vous comprendrez mes réactions aux propositions du Commissaire FISCHLER concernant la gestion de la ressource.
Je suis fermement hostile à la mise en place de plans de gestion pluriannuels, car ceux-ci reposent sur trois présupposés que je récuse catégoriquement :
l'automaticité, tout d'abord, d'une gestion globalisée et uniformisée de l'ensemble des stocks halieutiques, sans que soient apportées les arguments scientifiques solides et incontestables qui la justifient ;
la superposition, ensuite, pour la gestion d'un même stock de plusieurs instruments de régulation de capture ;
l'abandon, enfin, par le Conseil, de sa compétence politique de gestion de la ressource au profit de décisions appliquées technocratiquement par les Commissaires.
Cette simplification de notre politique de gestion de la ressource halieutique exige, en contrepartie, une amélioration de la politique de contrôle, que j'appelle de mes vux.
Pour être efficace, cette politique de contrôle devra être équitable et harmonisée au sein de l'Union Européenne. Elle doit demeurer ferme dans ses objectifs et effective dans sa mise en uvre.
Il ne saurait y avoir de politique de gestion durable de la ressource sans un strict respect des quotas de captures, auxquels vous concourrez d'ailleurs très utilement en communiquant vos livres de bord, vos log books et en respectant les normes techniques visant à assurer une meilleure sélectivité des engins de pêche et des tailles minimales de commercialisation.
Notre position sera d'autant plus forte et respectée à Bruxelles que la France sera irréprochable dans l'application des règles. Cela relève d'une responsabilité collective, à laquelle bien sûr les pouvoirs publics prendront toute leur part.
La gestion durable de la ressource relève conjointement de votre responsabilité et, de façon tout à fait légitime, de la responsabilité de la société tout entière. A cet égard, nous veillerons à ce que l'attention accrue que portent les mouvements environnementalistes à votre activité soit l'occasion d'engager un dialogue et de parvenir à une meilleure perception de la noblesse et des contraintes de votre métier. Dans le même esprit, les perspectives de développement de l'aquaculture, préconisées par le projet de réforme de la PCP me semblent présenter un grand intérêt.
Il importe de ne pas vous placer sur la défensive. Je vous engage au contraire à adopter une approche positive et surtout proactive, qui vous permettra de faire partager votre vision et votre amour de ce métier.
II - La flotte de pêche
Au-delà des ressources halieutiques, il n'est pas de pêche sans moyen de capture, c'est-à-dire sans une flotte adaptée.
La politique de la flotte suivie par l'Union Européenne ces vingt dernières années ne me paraît pas satisfaisante, loin s'en faut.
La Commission fait, en effet, du navire de pêche l'instrument principal de gestion de la ressource. Ce choix est à la fois inefficace et pervers.
Il est inefficace car il présuppose que l'on pourra quantifier la capacité de pêche d'un navire à partir de critères aussi généraux que la puissance de son moteur ou l'importance de sa jauge. Or, beaucoup d'autres paramètres difficilement quantifiables entrent en jeu, tels que le type d'engin de pêche utilisé, l'équipement électronique du navire ou la compétence du patron, élément essentiel dans une activité qui demeure avant tout humaine.
Il est également pervers, car il tend à déstructurer nos flottilles. Il favorise d'une part la concentration des armements et la disparition des plus petites unités. Il accroît, d'autre part, le prix des navires d'occasion, en accordant à ces derniers une valeur incorporelle, en constante augmentation et souvent sans rapport avec leur qualité réelle de pêche ou de sécurité. Plus gravement, cette évolution décourage l'entrée des jeunes dans le métier, alors que les années à venir verront de nombreux patrons poser leur sac à terre.
Je souhaite, dans ces conditions, qu'émerge au niveau communautaire une politique rénovée de la flotte. Cette rénovation demeure éloignée, et c'est un euphémisme, des propositions faites par le Commissaire FISCHLER, que nous ne pouvons accepter en l'état, je vous l'ai déjà dit.
Si je considère comme nécessaire un certain encadrement et un suivi rigoureux de nos capacités de pêche, je ne peux, en revanche, admettre la proposition visant à supprimer tout accompagnement public dans le financement et le renouvellement des navires de pêche.
Quoique certains prétendent, les aides publiques ne seront pas un facteur de surcapacité et de surpêche, si nous évoluons dans un cadre où l'accès à la ressource est réglementé par les TAC et quotas, et où la capacité de la flotte de pêche se trouve plafonnée.
Ces aides sont, en revanche, indispensables pour bon nombre d'entreprises, et tout particulièrement pour la flotte artisanale.
La France est riche de la diversité de ses flottilles et de ses métiers. J'entends la préserver. Elle garantit la variété de nos approvisionnements et le maintien d'une présence économique sur l'ensemble du littoral, dans des régions souvent très périphériques où la diversification des activités est plus difficile.
Le renouvellement et la modernisation des navires sont un impératif pour garantir aux équipages sécurité et confort et assurer aux exploitants une meilleure valorisation des captures et une plus grande rentabilité économique. L'amélioration des conditions de travail à bord est nécessaire pour rendre à ce métier son attractivité notamment auprès des jeunes, dans une société faisant une place grandissante à la qualité de vie professionnelle et extra-professionnelle.
Les aides publiques sont essentielles au renouvellement et à la modernisation de la flotte de pêche. Mais elles n'épuisent pas la question plus globale des conditions de financement des navires.
Dans la rentabilité de l'entreprise de pêche, le poids du capital investi et la charge des remboursements d'emprunt sont déterminants.
Sans proposer, à ce stade, des pistes de réforme qui seraient par trop définitives, je souhaiterais vous inviter à la réflexion.
Comment réduire le coût d'acquisition d'un navire, lorsque l'on connaît la valeur incorporelle de son permis de mise en exploitation ? Comment maintenir la rentabilité des navires sans accroître les capacités de capture, dans un contexte où la ressource est moins généreuse ? Comment enfin alléger les charges financières pesant sur les comptes de résultat des entreprises de pêche ?
Les réponses que nous apporterons ensemble à ces questions nourriront, le moment venu, le projet de nouvelle politique des pêches que j'appelle de mes vux.
III - Le marché
Enfin, la pêche c'est aussi et surtout la commercialisation des produits. Je voudrais particulièrement insister sur ce point car il me parait essentiel.
Le revenu des pêcheurs résulte, bien sûr, de la quantité pêchée, mais également, sinon plus, du prix de vente des produits. C'est ce dernier élément, le prix de vente, qui doit faire l'objet de toute notre attention.
J'aimerais avec vous aborder les conditions qui me paraissent nécessaires pour atteindre cet objectif.
Nous devons, tout d'abord, rechercher un meilleur équilibre entre l'offre et la demande. A cet égard, toutes les initiatives visant à une meilleure régulation des apports, à travers la mission essentielle des organisations de producteurs, me paraissent judicieuses. Sur un marché structurellement déficitaire comme le vôtre, il n'est pas normal de constater des prix bas, voire des retraits, au seul motif d'une gestion déficiente de l'offre. Je sais qu'il est difficile de planifier à l'avance les quantités de poissons pêchées par un navire qui quitte le port, mais je suis persuadé que l'on peut, dans le cadre d'une gestion collective et concertée, lisser les variations de ces apports.
Là encore, je suis disposé, si le besoin s'en fait sentir et après m'être concerté avec vous, à établir les fondements réglementaires d'une mise en marché mieux ordonnée et plus rémunératrice.
Nous devons par ailleurs optimiser la valorisation du produit vendu. Cette valorisation suppose une démarche de qualité, la recherche de la traçabilité, ainsi qu'une transformation qui corresponde aux attentes des consommateurs. Ce souci de valorisation est l'affaire de tous les acteurs de la filière : le pêcheur bien sûr, mais également le mareyeur qui joue un rôle essentiel dans la chaîne de la qualité. La réglementation nationale et communautaire vous offre à cet égard de nombreux leviers ; à vous de les saisir.
Certes, vous êtes confrontés, comme les autres acteurs du marché des produits de la mer, à une forte concurrence émanant de nos partenaires de l'Union Européenne ou de pays tiers.
Dans les prochains mois, la France mènera une action déterminée, notamment au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce, afin de conserver aux produits de la mer une protection tarifaire minimale. Pour autant, la meilleure défense de nos produits résidera sans doute moins dans un combat difficile en faveur du maintien des droits de douane élevés que dans une action forte de différenciation de l'origine, de la dénomination de vos produits ou le recours à des signes de qualité reconnus par les consommateurs.
C'est d'ailleurs l'objet de l'action que la France mène tant au sein de l'Union Européenne qu'au sein des organisations internationales compétentes, tel que le CODEX.
IV - La politique extérieure de la pêche
Malgré les inquiétudes qu'inspirent les propositions du Commissaire FISCHLER, la France reste déterminée à soutenir le développement et le renforcement du volet externe de la politique commune des pêches.
Ce volet repose, dans mon esprit, sur deux piliers : la politique des accords de pêche et la participation de l'Union Européenne aux organisations régionales de pêche.
Certes, une étude IFREMER publiée en 1999 a montré l'intérêt et la rentabilité des accords de pêche. Mais, la pêche, hors des eaux communautaires, comprend de nombreux aspects qui ne sauraient se réduire à des considérations strictement budgétaires.
L'activité de nos navires contribue d'abord à une présence politique dans ces zones et au rayonnement du pavillon communautaire dans le monde.
Elle concourt également à renforcer nos liens avec les pays auxquels nous lient des accords de coopération.
Nous devons, en revanche, observer la plus extrême vigilance à l'égard de certaines flottes extra-communautaires : il n'est pas raisonnable en effet de laisser le champ libre à des navires qui ne feraient pas l'objet d'un suivi aussi rigoureux que les nôtres et dont la participation à la gestion durable des pêcheries n'est pas garantie.
Pour toutes ces raisons, je souhaite que l'Union Européenne prenne davantage part aux discussions conduites dans les organisations régionales de pêche. Déjà, le rôle de celles-ci s'est considérablement accru depuis l'adoption de l'accord de New York en 1995. Il est sans doute appelé à se renforcer encore.
Il faut donc " muscler " la présence communautaire dans ces enceintes, afin de mieux défendre nos intérêts.
V - Le volet social
Au-delà des trois piliers économiques traditionnels que sont la ressource, les structures et le marché, la pêche c'est aussi et d'abord des hommes. Et le volet social est une dimension essentielle de ce secteur d'activité.
Je sais, qu'en ce domaine, de nombreuses questions vous préoccupent. Le volet social, déjà évoqué incidemment dans le Livre Vert, demeure pourtant l'un des enjeux majeurs du projet de réforme de la PCP.
Je voudrais tout d'abord aborder les difficultés que vous rencontrez pour recruter et fidéliser vos équipages.
Je sais, en effet, que certains navires sont contraints de rester à quai ou d'appareiller avec un équipage réduit, avec les conséquences économiques pour les armements et les risques pour les marins que l'on peut imaginer.
Ces difficultés ne sont certes pas nouvelles, mais elles se sont très sensiblement aggravées ces dernières années.
Dans ces conditions, les conclusions du Contrat d'Etudes Prospectives qui viennent d'être connues, doivent être très rapidement mises en uvre dans le cadre d'une action concertée avec mon collègue, le Secrétaire d'Etat aux Transports et à la Mer, Dominique BUSSEREAU, directement en charge de ces questions.
Le constat dressé est, en effet, accablant. Pour durer, une activité économique doit évoluer et innover. Or, notre système actuel de formation, caractérisé par le poids des formations réglementaires et son manque d'ouverture sur le monde, ne répond plus aux évolutions et aux besoins de la profession.
Nous devons faire preuve d'imagination afin d'ouvrir ce secteur à des compétences extérieures et de permettre aux marins de développer à leur tour d'autres savoir-faire. Je n'évoquerai ici que quelques orientations :
créer le bac professionnel attendu depuis longtemps,
développer l'apprentissage et la formation en alternance,
ouvrir les voies de recrutement en reconnaissant les qualifications " terrestres " par la validation des acquis de l'expérience,
améliorer l'insertion dans la profession,
instaurer un véritable partenariat avec les collectivités territoriales.
Il vous appartiendra d'en débattre lors des réunions d'informations du C.E.P. qui se tiendront d'ici à la fin de l'année. Je souhaite que les présidents des Comités Régionaux des Pêches en assurent la conduite. Ce sera là une illustration forte de l'implication de la profession, au-delà de sa participation aux instances institutionnelles de concertation, tel que le Comité Spécialisé de la Formation Professionnelle Maritime, qui vient de se réunir le 27 juin dernier.
Dans l'attente de ce dispositif, certaines mesures en vigueur, et qui ont fait la preuve de leur efficacité, seront reconduites. Je pense notamment au Certificat d'Initiation Nautique pour les emplois les moins qualifiés ou à l'emploi encadré de la main d'uvre étrangère.
S'agissant de la réduction du temps de travail, le décret en préparation, sur lequel vous serez à nouveau consultés, sera complété par une instruction -là encore animée d'un souci de pragmatisme- précisant les modalités de consultation de l'Inspection du Travail maritime.
En parallèle à ce travail réglementaire, l'accord collectif de la pêche artisanale sera examiné, en vue de son extension par la Commission Nationale de la Négociation Collective de la Marine Marchande lors de sa prochaine réunion en septembre. Cette Commission verra sa composition élargie, afin que le secteur de la pêche y soit mieux représenté.
Cette modernisation des relations sociales me paraît essentielle pour rendre à ce métier son attractivité et améliorer son image.
Ma conviction est que l'ensemble du secteur, artisanal et industriel, devra faire l'objet d'une couverture conventionnelle. Parmi vous, j'appelle les partenaires sociaux de la pêche industrielle à se réunir, pour convenir d'un accord, même s'il ne doit viser que les modalités de réduction du temps de travail.
Enfin, je voudrais évoquer le Plan Sécurité des navires de pêche. Certains d'entre vous ont participé à des expériences de port de vêtements flottants individuels ou ont pris part à la mission qui vient de se déplacer en Irlande. Ils savent ainsi que ce dossier progresse. En embarquant vendredi dernier sur un chalutier au Guilvinec, j'ai moi-même pris la mesure de l'importance de ces équipements pour préserver des vies. Il est essentiel que ce plan trouve désormais sa conclusion dans un partenariat avec les organisations professionnelles et les collectivités territoriales.
Mais l'enjeu n'est pas uniquement de définir le contenu des formations ou d'arrêter les modalités de financement de ces matériels. C'est un esprit de sécurité qu'il faut insuffler. Et je sais pouvoir compter sur chacun de vos métiers pour y prendre part.
VI - La simplification et la prise en compte des spécificités
Simplifier les procédures et mieux prendre en compte les spécificités de vos différents métiers constituent des objectifs auxquels j'attache également beaucoup de prix.
Simplifier les démarches tout d'abord. La politique des pêches est marquée, vous le savez, par un excès de réglementations. Devenues lourdes et complexes, celles-ci nuisent à l'efficacité et provoque une exaspération légitime chez les pêcheurs.
Nous devons avoir à cur de simplifier les démarches, tant au niveau national que communautaire. C'est là un vaste chantier que j'ai décidé d'ouvrir rapidement et pour lequel je compte sur votre collaboration active.
Mieux prendre en compte aussi les spécificités de la profession. La politique commune de la pêche doit respecter votre diversité. En disant cela, je pense tout particulièrement à la Méditerranée. Les conditions d'exercice de la pêche en Méditerranée requièrent une approche adaptée qui intègre ses réalités biologiques, économiques, sociales et culturelles.
Il en va de même des départements d'outre-mer pour lesquels la politique communautaire des pêches devra accompagner les efforts d'organisation et de développement de chaque territoire.
Comme au demeurant d'autres secteurs économiques, la pêche française est confrontée à d'importants changements, liés à la fois aux évolutions politiques de la communauté internationale et aux attentes nouvelles de nos concitoyens.
Il ne s'agit donc pas, dans ce monde en mouvement, de céder à la sinistrose et au découragement, mais bien de se mobiliser et s'adapter en permanence à ses évolutions.
Comme je l'ai rappelé précédemment, la réforme de la politique commune de la pêche n'est qu'une étape qu'il conviendra de négocier au mieux de nos intérêts. Elle s'inscrit plus fondamentalement dans un processus de définition d'une nouvelle politique, dont la dimension nationale sera déterminante.
Là encore, notre politique nationale donnera toute sa place au dialogue et à la concertation.
Je sais que vous vous avez toujours su faire preuve d'initiative, d'une grande capacité d'adaptation et maintenir en toute occasion un dialogue avec les pouvoirs publics.
C'est donc en totale confiance que je viens vous proposer cette méthode.
Les quelques orientations que je viens de vous décrire constituent, à ce stade, ma contribution aux évolutions que je crois nécessaires pour votre secteur. Il s'agit d'assurer la rentabilité économique des entreprises de pêche, gage d'attractivité à l'égard des jeunes pêcheurs, de garantir la diversité et la répartition harmonieuse des flottilles sur l'ensemble du littoral, tout en se montrant attentif à une gestion durable des ressources halieutiques. Elles traduisent ma confiance dans l'avenir du " grand métier ". Ne doutez en aucune manière de l'ambition et de l'attachement que j'ai pour lui, c'est-à-dire pour vous.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 9 juillet 2002)