Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Messieurs les Élus,
Mesdames, Messieurs,
En vous écoutant, j'ai relevé plus particulièrement vos propos à la fois, ceux reconnaissants les avancées substantielles qui ont été faites dans le secteur du transport routier, mais surtout ceux plus incisifs que vous avez sur certains dossiers.
Je souhaite aller à l'essentiel et je vous répondrai autour de trois thèmes :
la situation économique du secteur et la compétitivité du pavillon français,
la réduction du temps de travail et les questions sociales,
les conséquences de l'accident du tunnel du Mont Blanc.
Comment se présente la situation économique du secteur et la compétitivité du pavillon français ?
Nous observons en 1999 trois tendances lourdes :
une évolution forte du volume du trafic global plus forte encore pour le compte d'autrui en raison du repli continu de l'activité du transport en compte propre,
une stabilité du nombre des entreprises avec une diminution des défaillances et une modération des nouvelles inscriptions, ce qui m'autorise à penser que l'accès à la profession n'est pas si mal réglé,
une augmentation significative du chiffre d'affaires, mais aussi un écart, qui n'est pas nouveau, entre l'évolution des prix et celle des coûts (due notamment au gazole) et qui a pesé sur les marges du premier semestre.
C'est dans ce contexte économique assez favorable que s'inscrit notre volonté commune de réguler le secteur en tenant compte de l'évolution de la concurrence internationale.
Parlons donc de votre compétitivité, et d'abord du problème du gazole.
L'augmentation sur les 4 derniers mois a été très forte après une période de prix bas, mais depuis la semaine dernière, on enregistre à nouveau une baisse.
Vous noterez avec moi que cette évolution erratique est identique pour tous les pays de l'Union européenne. Le prix du litre de gazole à la pompe est toujours en France dans la moyenne européenne et se situe à la sixième place loin derrière le Royaume-Uni et l'Italie.
Je tiens à vous indiquer que je ne pourrais concevoir d'augmentation des taxes en France en dehors d'une mesure générale au sein de la Communauté européenne
La lutte contre les distorsions liées aux écarts d'accises dans l'Union européenne est pour moi une priorité, et je suis donc favorable à l'harmonisation qui est toujours en débat dans les instances communautaires.
La création du gazole utilitaire, demande forte de votre profession, a atténué la pression liée à cette forte évolution du cours du pétrole brut.
La majoration de 7 centimes pendant 7 ans est connue de tous depuis la loi de Finances 1999.
Les entreprises utilisant des véhicules de plus de 12 tonnes bénéficieront d'un remboursement d'une part de cette majoration en 2001 comme elles vont en bénéficier en février 2000 pour la consommation 1999, de sorte que le coût réel sera stabilisé.
Pour autant, il serait illusoire de penser que la taxe sur les produits pétroliers (TIPP) peut être réduite pour compenser les hausses du marché pétrolier. Le transport routier doit participer équitablement à la couverture des coûts qu'il génère pour la collectivité, et ne peut ignorer les préoccupations environnementales de la population.
La difficulté pour votre profession aujourd'hui comme toujours est de pouvoir répercuter cette augmentation auprès de vos clients. J'ai vu récemment avec intérêt que certains groupes n'hésitaient pas à afficher publiquement leur politique de relèvement tarifaire, en considérant que le contexte leur commandait et leur permettait de le faire.
L'amélioration des relations chargeurs-transporteurs passe par le rééquilibrage des moyens d'action de chacune des parties.
Lors de l'examen de la loi relative à l'amélioration de l'exercice de la profession de transporteur routier en février 1998, des clauses spécifiques ont été introduites avec comme objectif de donner à votre profession des outils pour que ses prestations lui soient plus facilement payées. Deux ans plus tard, il nous faut savoir si ces mesures (l'action directe et le privilège du voiturier) sont utilisées et sont bien adaptées aux besoins des professionnels.
Je demande au Directeur des Transports Terrestres d'évaluer l'impact de ces deux mesures. Je souhaite que vous soyez associés à cette démarche.
La sauvegarde de votre compétitivité repose bien entendu sur une saine concurrence et donc sur une régulation efficace.
L'action coordonnée de l'ensemble des corps de contrôle lorsqu'elle fait la constatation de mauvais comportements doit être suivi par la sanction de ceux-ci. Il me semble d'ailleurs que nous avons des résultats, et que, parfois, on nous trouve trop sévères.
Cette démarche d'amélioration des contrôles est étendue maintenant à la recherche et à la répression du travail illégal qui est une autre source de distorsion de concurrence dans le transport routier international.
Toutefois, à quoi serviraient nos efforts s'ils n'étaient pas partagés par nos voisins européens ? Les réglementations applicables dans le domaine du transport routier sont de plus en plus européennes, et le contrôle de ces réglementations en France ne peut se faire en ignorant ce qui se passe en Espagne ou en Allemagne par exemple.
C'est pourquoi avec les ministres chargés des transports de la Belgique, du Luxembourg, des Pays Bas et de France, conscients de la dimension européenne du contrôle routier, j'ai signé le 5 octobre 1999 à Luxembourg, un accord entre les services de contrôle des transports routiers.
Cet accord, qui résulte d'une étroite collaboration dans ce domaine entre les pays signataires, a pour objectif de renforcer la coopération entre les 4 États membres. Il devrait bientôt être étendu à l'Allemagne et au Royaume-Uni.
Il prévoit l'organisation de contrôles communs et de contrôles coordonnés, ainsi que l'échange d'informations sur ces contrôles. Il prévoit également le développement de programmes communs de formation des agents de services de contrôle, tout en favorisant les échanges transfrontaliers d'expériences. L'efficacité des contrôles en sera ainsi accrue. Sur cette question, je compte également saisir ma collègue, ministre de la Justice, pour que les niveaux des sanctions soient aussi harmonisés, et je compte bien profiter de la présidence française de l'Union européenne, l'année prochaine, pour donner une forte impulsion dans ce domaine.
S'agissant de l'emploi, nous relevons un certain nombre de phénomènes nouveaux.
Nous voyons circuler sur les routes de France, au volant de camions d'origine intra-communautaire, des conducteurs originaires de pays extra-communautaires.
Si leur contrat de travail est conforme au droit du travail du pays de l'Union où ils sont embauchés, il n'y a rien à dire. Mais si l'on constate qu'ils sont employés aux conditions, et notamment aux conditions de salaire, d'un pays extérieur à l'Union, alors là il y a une faille dans le dispositif juridique, que nous devons rapidement combler.
J'ai demandé au Directeur des Transports Terrestres de rappeler très clairement aux corps de contrôle sur route, quels sont leurs pouvoirs d'investigation sur ce genre d'affaires, dans le cadre tracé par la Délégation Interministérielle de Lutte contre le Travail Illégal. Vous avez été consulté, comme toutes les fédérations de salariés et d'employeurs, sur le projet d'instruction que Monsieur Hubert du MESNIL va adresser dans les jours qui viennent aux Directions Régionales de l'Équipement, en leur demandant d'être très vigilantes sur ce sujet.
Toutefois, comme je viens de le dire, je pense qu'il y a des failles juridiques dans les textes communautaires, et je ferai donc à cet égard, avant la fin de l'année, des propositions à la Commission européenne en liaison avec ma collègue ministre de l'Emploi et de la Solidarité.
C'est une question d'intérêt communautaire, et, s'il n'y a pas lieu, à ce stade, d'en exagérer l'ampleur ou la gravité, il faut trouver rapidement les solutions, au plan communautaire, afin que ne se créé pas un nouveau modèle dévoyé qui conduirait à une véritable régression sociale.
Avant d'aborder la question de la réduction du temps de travail, je souhaite rappeler tout l'attachement que je porte à l'amélioration des conditions de travail et d'emploi des salariés du transport routier, et au développement de la sécurité et de l'emploi dans votre profession.
La branche des transports routiers a "reconquis le paritarisme", après les événements de 1996 et 1997, en retrouvant la voie normale du traitement "à froid" des questions sociales, par la discussion et la négociation, dans le cadre de la commission paritaire de la convention collective.
Le nombre des accords collectifs de branche et la diversité de leur contenu montrent, si besoin était, que le dialogue social national de branche dans les transports routiers, et particulièrement dans les transports routiers de marchandises, est riche et constructif.
Vous aviez attiré l'attention des pouvoirs publics, dès 1998, dans le cadre de la première loi sur les 35 heures, sur la spécificité du transport routier, et sur la nécessité de mesures d'adaptation.
Vous aviez à cette époque été entendus, puisque, tout en confirmant l'objectif des 35 heures, nous avions souhaité, Madame AUBRY et moi-même, tenir compte de la situation du transport routier pour la mise en place des aides financières prévues par la loi. C'était l'objet de la circulaire que nous avons co-signée le 31 juillet 1998, et qui prévoyait d'aider la réduction des durées du travail réellement pratiquées, dès lors que les entreprises s'inscrivaient dans la démarche du contrat de progrès dans la création d'emplois.
La loi du 13 juin 1998 n'a pas encore débouché, dans les transports routiers, sur un accord collectif de branche qui aurait organisé la réduction du temps de travail en facilitant les négociations d'entreprises.
Pour autant, ce sont au 1er septembre 1999, 80 accords d'entreprise qui ont été signés sur la réduction du temps de travail dans les transports routiers de marchandises, couvrant 20 000 salariés et qui ont permis la création de 1 200 emplois.
Ces 80 accords, dans leur diversité, montrent qu'il existe toute une palette de solutions d'organisation qui peuvent être mises en place, dans les entreprises, avec l'aval des organisations syndicales représentatives. En quelque sorte ces accords montrent que "c'est faisable".
La seconde loi sur la réduction du temps de travail est en débat au Parlement. La majorité de la gauche plurielle vient hier de la voter en première lecture. Le travail parlementaire va se poursuivre pendant plusieurs semaines. Il me semble légitime qu'à ce stade, on respecte le fonctionnement de nos institutions.
Toutefois, je suis favorable à ce que des discussions se déroulent, dans le même temps, entre les partenaires sociaux eux-mêmes et entre les partenaires sociaux et mon ministère, pour que soient examinées les conditions d'application de ce qui devrait être la loi.
La bonne réussite de ce chantier des 35 heures dépendra aussi, Monsieur le Président, de notre capacité à faire avancer parallèlement le chantier essentiel de l'harmonisation sociale européenne.
Vous connaissez mon engagement aux côtés de la profession pour la mise en place de cette harmonisation sociale européenne. Elle est le complément indispensable de l'ouverture du marché. Elle constitue un objectif majeur, pour les professionnels, les pouvoirs publics, et l'ensemble des organisations syndicales : celles-ci l'ont d'ailleurs manifesté au cours de leurs journées d'action des 5 et 6 octobre.
La présidence allemande de l'Union européenne, au premier semestre 1999, et actuellement la présidence finlandaise, ont recherché des solutions de compromis, mais nous achoppons actuellement sur la question de l'inclusion, dans la directive, des "conducteurs indépendants" : 6 États, rejoints finalement, au cours du Conseil du 6 octobre, par l'Autriche, exigent que le projet reste conforme à la proposition de la Commission, (qui, comme le Parlement, nous soutient), et qu'il intègre les "indépendants". Nous sommes à cet égard sur la même longueur d'onde que la Belgique, le Luxembourg, le Portugal, la Suède, le Danemark, et maintenant l'Autriche : nous sommes 7 sur 15 mais cela ne fait pas encore une majorité.
J'ai l'intention de prendre des initiatives en direction de la présidence finlandaise pour demander que le dossier de l'harmonisation sociale dans le transport routier soit traité en priorité.
Il ne faudra pas non plus ensuite oublier de faire avancer aussi le projet, qui nous tient à coeur, de révision du règlement n°3820 de 1985 sur les temps de conduite et de repos, et la solution reposera peut être sur
l'utilisation complémentaire de ces deux instruments.
Vous pouvez compter, pour la bonne mise en oeuvre de tous ces chantiers sociaux, Monsieur le Président, sur mon engagement, et ma détermination.
Je voudrais également m'attarder quelques instants, Monsieur le Président, sur le chantier de la formation professionnelle.
Il est peut-être moins médiatique que celui des 35 heures. Mais il est très structurant, me semble-t-il, pour votre profession. Il résulte de la loi de 1998, qui a généralisé le dispositif de formation obligatoire à tous les conducteurs routiers professionnels, après que le transport routier public de marchandises ait montré la voie, en ce qui concerne ses conducteurs salariés, par l'accord du 20 janvier 1995.
Il ne faut pas sous-estimer l'ampleur de cette réforme, pour la modernisation du transport routier, l'amélioration des conditions de travail des personnels, le développement de l'emploi et la sécurité.
55 000 stagiaires en formation continue en 1998, 10 000 en formation initiale, ce sont des chiffres très importants qui montrent l'effort de formation accompli par la branche avec le concours financier des pouvoirs publics.
Vous savez qu'à cet égard, j'ai obtenu le renouvellement, dans mon budget, pour l'an 2000, d'une subvention, destinée à faciliter le bon déroulement des stages, et à accompagner aussi, en 2000, leur extension aux conducteurs "artisans", aux conducteurs du compte propre, et aux conducteurs routiers de voyageurs.
En application de la loi, les "artisans" sont déjà "couverts" : le décret du 18 novembre 1998 a étendu aux conducteurs non salariés du transport public de marchandises, le régime qui était applicable depuis 1995 aux conducteurs salariés. En outre, conformément à la loi, plusieurs branches du compte propre ont conclu des accords collectifs de branche.
Sur ce dossier, la Direction des Transports Terrestres prépare actuellement le décret, qui définira le régime applicable aux conducteurs non couverts par un accord, afin d'achever la mise en place du dispositif. Ce décret fera naturellement l'objet de la plus large concertation.
Avant de conclure, et à plus forte raison dans cette région, j'évoquerai les conséquences de l'accident du tunnel du Mont Blanc, parce qu'elles créent une situation difficile, et en même temps parce qu'elles nous obligent à réfléchir à l'avenir et aux problèmes que nous devons affronter.
Depuis l'incendie qui a entraîné la fermeture du Tunnel du Mont Blanc le 23 mars 1999, le trafic qui l'empruntait a été reporté vers le tunnel routier du Fréjus par la vallée de la Maurienne, et la traversée des Alpes est devenue pour tous un problème délicat.
L'État a placé toutes les décisions prises depuis sous le signe de la sécurité. Je sais que certaines d'entre elles perturbent et peuvent entraîner des coûts supplémentaires et ne sont pas toujours comprises.
Pour répondre aux contraintes de sécurité et de limitation du trafic des poids lourds sous le tunnel du Fréjus, une régulation a été mise en uvre pour l'ensemble du trafic poids lourds de transit.
Une aire, celle d'Aiton-Bourgneuf, d'une capacité de 350 poids lourds a été créée afin de concilier d'une part les impératifs liés à la sécurité routière du tunnel et des communes traversée et d'autre part la fluidité du trafic dans la vallée de la Maurienne.
Sur l'aire d'Aiton, pratiquement tous les équipements sont en place. Même si des petits problèmes se font encore ressentir ils sont en cours de solution, et tous les responsables locaux ont fait le maximum pour cela : je tiens à leur rendre hommage.
D'ici l'été 2000, l'autoroute sera achevée ce qui réduira les nuisances, mais il nous faut tenir d'ici là et nous ne pouvons pas ignorer l'extrême sensibilité des populations riveraines.
Le tunnel du Mont-Blanc sera à nouveau ouvert à la circulation. Je m'y suis engagé avec mon collègue italien, pour l'automne 2000. Bien entendu, cette ouverture ne se fera qu'avec des conditions de sécurité maximum et d'une unité d'exploitation.
Je n'exclus pas des mesures de régulation spécifiques afin de respecter les volumes de trafic pouvant être absorbés lors de la réouverture et je suivrais pour cela les recommandations de la Commission de sécurité que nous avons installée conformément aux recommandations de la Commission d'enquête.
Les catastrophes qui se sont produites ces derniers mois dans les tunnels routiers du Mont Blanc en France et du Tauern en Autriche, ont mis en lumière la croissance des dysfonctionnements qu'entraîne le développement des transports dans une région aussi sensible que les Alpes : accroissement des risques dans les grands tunnels du fait de la primauté du transport routier et de la densité du trafic, concentration des trafics sur un nombre limité de corridors entraînant une concentration des nuisances et des impacts sur l'environnement.
Le développement du trafic alpin n'a pas seulement pour origine les États alpins et n'agit pas à leur seul bénéfice. Les flux de transport dans cette région intéressent bien l'ensemble des pays de la Communauté et des pays qui postulent à l'adhésion.
Jusqu'à présent, la solution de ces problèmes a été le plus souvent prise en charge sur des bases strictement locales et nationales, rarement bilatérales, sans qu'il soit tenu compte des difficultés qui peuvent éventuellement en résulter dans l'État voisin. Elle n'est plus durable dans de telles conditions car elle provoque une instabilité chronique des trafics longue distance. On a ainsi vu des pans entiers de trafic basculer brutalement d'un passage à un autre suite à une décision prise par tel ou tel pays.
A cet effet, le Mémorandum que j'ai présenté à nos partenaires européens propose qu'en matière de sécurité et de régulation, des règles adaptées au cas du massif alpin soient élaborées.
C'est pourquoi un système global de régulation du trafic poids lourds couvrant la totalité des Alpes, et fonctionnant dans chacun des États selon des modes harmonisés devra être mis en place avec les priorités suivantes :
la fixation des objectifs à atteindre en matière de sécurité routière et d'environnement sur les principaux itinéraires de transit,
la mise en oeuvre de moyens spécifiques de régulation permettant d'accroître l'attractivité de la technique ferroviaire y compris pour le transport combiné et le ferroutage,
l'harmonisation des conditions de circulation des poids lourds sur ces itinéraires dès lors que cette harmonisation est de nature à aider à atteindre les objectifs de sécurité et de préservation de l'environnement.
Le principe fondamental de libre circulation des biens et des personnes à l'intérieur de l'Union Européenne, ne doit pas conduire, pour autant à une exploitation tellement intense des capacités des infrastructures, qu'elle crée une situation insupportable.
Il peut en conséquence être légitime de fixer, en fonction de contraintes d'environnement et dans le cadre des mesures de protection, des objectifs de modération, voire d'interdiction du trafic de poids lourds à certaines périodes et sur certains tronçons des grands axes de transit alpin.
Cet objectif de dissuasion peut aussi être atteint par la combinaison d'un ensemble de dispositions : mesures d'harmonisation tarifaire (péages de tunnels, droits d'usage sur les itinéraires d'accès en vallée, sur des routes de col...), mesures de réglementation technique confortée par un mécanisme financier.
En conclusions de mon propos, je terminerai sur les priorités du gouvernement. Elles sont de plusieurs natures.
Tout d'abord au plan stratégique, je le répète et je vous le confirme aujourd'hui, le Gouvernement s'est résolument engagé dans une politique de rééquilibrage de la répartition modale du transport de marchandises. Les raisons vous sont bien connues. Ce sont essentiellement des préoccupations d'ordre environnemental, de sécurité et de seuil de tolérance par les populations.
Ce rééquilibrage vise en fait à maintenir la part de marché global du transport ferroviaire dans les 10 ans qui viennent. Cela signifie que les deux modes de transport que sont la route et le rail connaîtront une croissance importante de trafic. La nouveauté, c'est que cette croissance sera parallèle même s'il est vrai que dans les zones sensibles, la nécessité du transfert modal peut se révéler plus importante.
Il n'est pas forcément très heureux que le transport à longue distance par voie routière se développe lorsque la voie ferrée est en mesure d'absorber dans de bonnes conditions environnementales la croissance du trafic. Il faut bien entendu que cette orientation soit rendu possible par les efforts de la voie ferrée et plus particulièrement de la SNCF et de RFF. Les décisions lors du dernier conseil des ministres des transports vont dans ce sens.
Quand je parle transport de fret par la voie ferrée il s'agit bien entendu de privilégier le transport combiné non accompagné et en particulier le recours aux caisses mobiles et également d'utiliser, à un délai plus ou moins rapproché selon les cas, les potentialités, sur la courte distance, pour le franchissement des obstacles naturels, du transport combiné accompagné : le ferroutage, comme pour le tunnel sous la Manche.
La seconde priorité spécifique au transport routier, c'est la prise en compte, comme le prévoit la loi de 1998 et les textes d'application déjà parus ou qui seront publiés dans les prochaines semaines, des entreprises de moins de 3,5 tonnes.
Ceci a pour objectif de placer toutes les entreprises routières de marchandises sur un plan d'égalité en termes de réglementation et ainsi d'équilibrer les termes de la concurrence. Cette nouvelle régulation que la FNTR a toujours défendue, demande des efforts d'adaptation pour mes services et je sais pouvoir compter sur votre soutien pour y arriver.
La troisième priorité, après avoir au cours des années précédentes renforcé la régulation par l'accès à la profession, c'est la mise en oeuvre d'une régulation économique par la vérification de la capacité financière des entreprises.
La profession sera totalement impliquée. En effet, les cas litigieux seront soumis à la commission des sanctions administratives dont la représentativité a été améliorée. J'en profite pour remercier tout ceux qui acceptent de participer à ces structures régionales et contribuent ainsi à leur bon fonctionnement. Ils rendent un service appréciable à leur profession et au service de l'intérêt général.
Enfin, quatrième priorité l'Europe : il s'agit de faire progresser l'harmonisation, sous toutes ses formes. Et l'harmonisation, pour moi elle ne peut se faire que par le haut. C'est vrai sur le plan social, c'est vrai aussi lorsque l'on parle de la circulation le week-end, ou comme vous le savez avec toute la profession, toutes les organisations syndicales, et d'autres États, je me suis opposé à toute velléité de remise en cause de notre régime actuel.
Le transport routier apporte une contribution essentielle au développement économique et à l'emploi. Mais on le fragilise si on le livre aux forces anarchiques de la concurrence et du marché et aux risques d'incompréhension ou de rejet de nos concitoyens. Une bonne régulation, une véritable harmonisation sociale par le haut, une complémentarité bien comprise avec un mode ferroviaire rénové et redynamisé, telles sont les clés de l'avenir du transport routier pour lequel nous devons agir chacun à notre place. C'est en tout cas ce à quoi je m'engage, appréciant pour cela de pouvoir compter sur un dialogue constructif avec la FNTR et ses dirigeants et sur la responsabilité des organisations socioprofessionnelles.
Je souhaite à tous un bon retour dans vos régions et bien entendu plein succès dans vos entreprises.
(Source http://www.equipement.gouv.fr, le 28 octobre 1999)