Déclaration de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur l'essor d'internet et la politique gouvernementale de démocratisation de l'accès à la société de l'information et d'aide aux entreprises innovantes, Paris, le 20 juin 2000.

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Circonstance : Clôture du colloque "Strat-Tech Forum" à Paris, le 20 juin 2000

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Je suis particulièrement heureux de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de m'exprimer devant vous dans le cadre du Start-Tech forum. Je tiens à remercier Alex Serge Vieux, Président Directeur Général de Dasar, de l'occasion qu'il m'offre ainsi de vous faire part de l'engagement du gouvernement, de mon engagement personnel, pour le développement du web et des start-ups.
Je reviens d'un voyage aux Etats-Unis, dans la Silicon Valley. Voyage qui m'a permis de mieux comprendre les raisons du succès considérable de la vallée de San Francisco, les perspectives de développement de l'économie de l'internet dans les prochaines années et enfin, et surtout, les éléments de cette réussite qui pourraient être utilement réutilisés dans le contexte français.
Je reviens de cette visite avec trois mots clés qui résument mon état d'esprit : l'enthousiasme, l'engagement, la fierté.
1 - L'enthousiasme
Nous vivons actuellement une révolution technologique que je décrirai en trois formules :
un monde plus proche
Le passage de l'informatique à la micro-informatique puis à l'internet, c'est plus d'informations partagées par les citoyens mais aussi par les consommateurs dans leur vie quotidienne notamment par le développement de la micro-informatique et désormais des mobiles.
un monde plus dynamique
L'économie de l'internet dessine la perspective d'une croissance plus forte, plus riche en emplois avec des tensions inflationnistes moins marquées. C'est ce que montre avec brio l'exemple américain. C'est le modèle de croissance qui s'impose également en France et en Europe - j'y reviendrai. - Un monde plus coopératif
La réussite de la Silicon Valley, c'est enfin et surtout, la rencontre de trois univers : celui de la recherche qui produit l'innovation, avec des universités prestigieuses ; celui de l'industrie qui sait faire de ces innovations des produits faciles d'accès ; celui de la finance qui accepte d'accompagner le risque inhérent aux activités innovantes. Ce nouveau modèle économique trace ainsi des liens plus forts entre recherche, industrie et finance autour de jeunes pousses qui, de tour de table en tour de table, peuvent espérer rapidement parvenir à maturité. Chacun est intéressé à la réussite du projet commun et se trouve récompensé de la prise de risque qu'il a accepté. Plus proche, plus dynamique, plus coopérative, telle est la société qui se construit devant nous, grâce à vous, avec nous.
2 - L'engagement
Car nous avons voulu construire cette société à notre image. Là aussi, trois illustrations :
-internet ne peut et ne doit se limiter au culte de l'argent roi ou de l'argent facile : la nouvelle économie ne doit pas se réduire à la création de bulles spéculatives mais permettre de financer les projets innovants fondés sur une réelle prise de risque. Et je souhaite qu'ils soient de plus en plus nombreux.
-internet ne peut et ne doit remettre en cause la liberté, le libre arbitre, la vie privée de nos concitoyens :
La mise en réseau des informations ouvre potentiellement la voie à l'utilisation à des fins commerciales d'informations de nature privée sur les habitudes d'information et de consommation de chacun. Dans son mémorandum sur le commerce électronique et le développement de l'internet de 1998, la France avait mis en avant ces préoccupations. Les Etats-Unis avaient préféré défendre un système moins contraignant, le safe harbor. Je constate qu'aux Etats-Unis, et le Président Clinton vient d'intervenir en ce sens, on se rapproche maintenant des positions défendues par l'Union européenne. La diffusion de l'internet dans toute la population suppose que soit encore renforcée la confiance au niveau mondial.
internet ne peut et ne doit dessiner de nouvelles exclusions :
Je pense non seulement aux populations qui n'ont pas accès à la société de l'information, mais aussi aux petites entreprises, et enfin aux territoires plus défavorisés.
Lutter contre cette nouvelle fracture est au coeur de la politique du Gouvernement de Lionel JOSPIN. Nous aurons dans les semaines qui viennent l'occasion autour du Premier Ministre de montrer notre détermination à poursuivre dans cette voie. C'est un point central de la loi sur la société de l'information que je prépare. Celle-ci s'inscrit dans trois thèmes majeurs : la liberté, l'accès de tous aux réseaux et enfin la sécurité des transactions électroniques. Pour toutes ces raisons, je préfère parler d'économie et même de société de la connaissance, plutôt que de nouvelle économie.
3 - La fierté
Fierté : Là encore, trois illustrations pour mon propos :
- La France a en trois ans rattrapé le niveau de ses partenaires européens et se rapproche de celui des Etats-Unis. En 1996, nous étions considérablement en retard. Aujourd'hui la situation a radicalement changé :
-au niveau global d'abord : la France est la quatrième puissance mondiale pour la production de TIC. Avec une contribution à la croissance de 20 % possible le secteur des TIC a un effet d'entraînement sur l'ensemble de l'économie.
au niveau des entreprises : moins de 15 % des PME étaient connectées à l'internet en 1996, elles sont près des deux tiers maintenant, soit un niveau comparable à celui des Etats-Unis ;- au niveau des particuliers enfin : certes le nombre d'internautes via les PC en France reste en deça de celui des Etats-Unis, mais le rattrapage est très rapide : + 24 % au premier trimestre 2000 ; avec le développement des accès à internet via les portables, le nombre d'internautes français pourra croître très rapidement dans les mois qui viennent. Enfin, si le commerce électronique B to C reste plus faible en France que chez nos principaux partenaires, la France se place loin devant l'ensemble des autres pays européens si on tient compte du commerce électronique via le Minitel.
- Le Gouvernement a mené depuis trois ans une politique active et déterminée pour atteindre cet objectif. Si ce retard a pu être rattrapé aussi rapidement, c'est grâce à votre mobilisation. C'est aussi grâce aux réformes conduites par le Gouvernement dans le cadre notamment du PAGSI et que nous poursuivons avec Laurent FABIUS :
soutien actif à l'innovation et à sa diffusion sous former entreprenariale, au travers notamment de la loi sur l'innovation ;
-mise en place de dispositifs permettant de mieux récompenser la prise de risque, en particulier au niveau fiscal avec le régime des BSPCE ; c'est aussi le travail qui a été mené pour faire évoluer progressivement le régime des stocks-options ;
-encouragement à la création d'entreprise, maintenant possible en 24 heures (sans que l'Etat ne perçoive aucune taxe) ;
-orientation des financements vers l'économie de la connaissance au travers du capital-risque : les fonds publics ont joué un rôle d'entraînement et continueront à le faire avec 1 MdF nouveaux pour 2000.
-Cette fierté vaut aussi et surtout pour l'avenir où les atouts dont dispose la France et l'ensemble de l'Europe me paraissent déterminants. Il nous faut, ensemble, oeuvrer autour de deux axes :
-le faire-savoir : il nous faut encore mieux faire connaître, notamment à l'étranger et dans le monde financier, nos réussites industrielles et les réformes qui ont été conduites en France. Votre action de conviction est à ce titre essentielle. Le Gouvernement y prend sa part et continuera à le faire.
- le savoir-faire : je suis persuadé que l'Europe et la France ont une carte maîtresse à jouer dans la nouvelle génération de l'économie de la connaissance qui se dessine aujourd'hui : les réseaux réclament de plus en plus des standards ouverts et l'Europe maîtrise particulièrement bien ce type de réseaux. L'utilisation de plus en plus massive des téléphones cellulaires place l'Europe, et en particulier la France, en très bonne position pour l'avenir. Enfin et surtout, nous disposons d'un potentiel d'innovation dans les entreprises, reconnu internationalement. Approfondir notre engagement, mieux récompenser le risque, garantir à tous l'accès à la société de la connaissance : ce sont les défis que le gouvernement à la volonté de relever. Vous êtes le coeur battant de la nouvelle économie. Nous voulons qu'avec vous, le progrès qu'elle invente soit partagé par tous !

(source http://www.industrie.gouv.fr, le 22 juin 2000)