Texte intégral
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs,
Le projet de loi portant réforme de la SNCF que j'ai l'honneur de vous présenter au nom du Gouvernement a un triple objet.
Il vise d'abord à créer un nouvel établissement public à caractère industriel et commercial qui aura pour objet l'aménagement, le développement et la mise en valeur de l'infrastructure du réseau ferroviaire dans le cadre des principes du service public.
Il tire ensuite les conséquences, dans la définition des mission de la SNCF, de l'existence de ce nouvel établissement public, auquel la SNCF sera d'ailleurs très fortement liée dans l'accomplissement de leurs missions respectives.
Il tend enfin à préciser les conditions du lancement de la régionalisation expérimentale des services régionaux de voyageurs, dont le principe avait été posé par l'article 67 de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Chacun se souvient de la contribution essentielle du Sénat à cette grande loi.
Avant de vous présenter ce texte, je voudrais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous indiquer dans quel esprit a été élaborée la réforme de la SNCF.
Dès ma prise de fonctions, j'ai placé le service rendu à l'usager au coeur de mes priorités.
Cette préoccupation inspire toute mon action, qu'il s'agisse des services de l'équipement ou, bien entendu, de la politique des transports.
Je l'ai eue constamment présente à l'esprit tout au long du débat national sur le transport ferroviaire que le Gouvernement a organisé en 1996.
Je le souligne, parce que ce débat a comporté - comme d'ailleurs le projet de loi que le Sénat commence à examiner aujourd'hui - des aspects techniques souvent trop abstraits et ne permettant pas toujours d'avoir une compréhension claire de ce que nous voulons faire.
Or, la réforme d'une grande entreprise de service public telle que la SNCF n'a de sens à mes yeux, comme d'ailleurs toute réforme, que si elle est bien comprise et si, à l'arrivée, elle se traduit par un progrès pour ceux à qui ce service s'adresse, c'est-à-dire tous les Français, et aussi pour ceux qui en sont les acteurs, c'est-à-dire les cheminots.
La SNCF est en effet une très grande entreprise : créée en 1937, transformée en 1982 par la loi d'orientation des transports intérieurs en établissement public à caractère industriel et commercial, elle est pour les Français en quelque sorte un symbole. Nos concitoyens y sont tous très attachés. Ils ont, à juste titre, le sentiment qu'elle appartient à la nation, dont elle a partagé héroïquement les heures sombres au moment de la bataille du rail, avant d'incarner, la paix revenue, les succès de la technologie ferroviaire française. Tous les élus, parlementaires mais aussi élus locaux, se montrent très attentifs à ce qui la concerne.
Aujourd'hui, on l'oublie trop souvent, elle transporte en moyenne chaque année environ 800 millions de voyageurs. Bien sûr, cela ne signifie pas que chaque Français prend personnellement le train quatorze ou quinze fois chaque année. Ce chiffre très élevé doit en effet beaucoup à tous ceux qui, en région parisienne, prennent tous les jours le train entre leur travail et leur domicile.
Cependant, tous les Français, je dis bien tous les Français, ont besoin d'un meilleur service ferroviaire, et ils le souhaitent. Voilà pourquoi la réforme de la SNCF s'adresse à la fois à tous les Français et aux cheminots.
Aux Français, qui sont attachés au transport ferroviaire, elle a pour ambition d'offrir demain un meilleur service, c'est-à-dire de meilleurs trains, des correspondances mieux adaptées, non seulement entre trains, mais aussi entre trains, avions et autobus, une information plus complète, des tarifs plus simples, des gares plus accueillantes, etc.
C'est, bien sûr, l'objet du projet industriel actuellement en cours d'élaboration à l'intérieur de la SNCF, sous la responsabilité de son président, M. Gallois. Sa préparation associe de manière très participative tous les cheminots. Il doit permettre d'identifier tous les domaines dépendant directement des personnels de l'entreprise où des progrès sont possibles pour attirer davantage de clients vers le train.
Je tiens à souligner ici que ce projet industriel avance bien, que son texte a été largement débattu et amendé au sein de l'entreprise depuis le mois de septembre dernier, qu'il prévoit de placer le client au coeur de trente programmes d'action prioritaires et de redéployer une partie des personnels vers le contact direct avec la clientèle.
Comme l'a souhaité le Gouvernement, le projet de loi dont nous allons débattre est directement lié à ce projet industriel. En effet, grâce à l'effort sans précédent que représente le très large désendettement de la SNCF et grâce à l'augmentation des crédits accordés à l'infrastructure et aux services régionaux de voyageurs, il crée incontestablement un contexte de nature à redonner aux cheminots une forte motivation pour rendre aux utilisateurs du train un meilleur service.
Aux contribuables - car les Français sont aussi des contribuables - la réforme, à travers leurs représentants dans les assemblées parlementaires, permettra de mieux connaître et de mieux cerner l'utilisation des importants concours publics alloués au transport ferroviaire. Désormais, en effet, il sera possible de distinguer facilement ce qui relève, d'une part, de l'entretien et du développement des infrastructures, c'est-à-dire pour l'essentiel des lignes, et, d'autre part, des aides accordées au transport ferroviaire dans le cadre des missions de service public confiées à la SNCF.
Les sommes considérables consacrées chaque année par la collectivité à la SNCF imposent, en effet - et j'y insiste -, de bien clarifier les responsabilités respectives de l'Etat et de la SNCF.
Aux 180 000 cheminots de tous grades et de toutes catégories professionnelles qui font vivre chaque jour la SNCF, ce projet adresse un double message.
Tout d'abord, en réaffirmant les principes du service public et même, dans certains cas, en les explicitant plus clairement que les textes aujourd'hui en vigueur, par exemple lorsqu'il inscrit dans la loi le principe de concours financiers de l'Etat pour les missions de service public de la SNCF, le projet dissipe les craintes parfois exprimées ici ou là de voir disparaître ce qui constitue le service public à la française.
Par ailleurs, en débarrassant la SNCF de la dette qu'elle avait contractée pour financer l'entretien et le développement de son réseau,.ce projet répond directement à une revendication très ancienne, dont le débat national organisé l'an dernier a d'ailleurs fait ressortir la légitimité.
Cette revendication était d'ailleurs très compréhensible, non seulement parce que la SNCF était le seul mode de transport à supporter directement dans ses comptes le financement de son infrastructure, mais aussi parce que le poids écrasant de cette dette privait les cheminots de toute perspective, pour leur entreprise et donc pour eux-mêmes, en anéantissant, en quelque sorte, par avance le produit de leurs efforts.
Enfin, ni le statut ni le régime de retraite des personnels ne sont naturellement, en quoi que ce soit, modifiés par la réforme.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui répond donc à la volonté du Gouvernement de créer les conditions du renouveau du transport ferroviaire dans notre pays.
Au mois de juin dernier, nous avions, Mme Idrac et moi-même, tiré devant vous et avec vous les conclusions du débat national engagé alors depuis plusieurs mois, sur l'initiative du Gouvernement, sur le transport ferroviaire.
Je rappelle, que ce débat a impliqué, tout au long de l'année 1996, les conseils économiques et sociaux régionaux,.les conseils régionaux, le Conseil national des transports, le Conseil économique et social, puis, en juin dernier, le Parlement.
J'ai personnellement reçu, avec Mme Idrac, à de nombreuses reprises, depuis un an, chaque fédération syndicale de cheminots afin de les consulter,.de les informer de l'avancement de notre réflexion et de recueillir leurs observations et leurs suggestions.
Personne ne peut, me semble-t-il, affirmer sérieusement que cette réforme n'a pas été longuement, très longuement, mûrie et concertée.
Je voudrais ici profiter de l'occasion qui m'est donnée pour remercier le Sénat de sa contribution à ce débat. Depuis plusieurs années, votre assemblée a en effet consacré à la situation de la SNCF d'importants travaux, notamment sous l'impulsion de M. Haenel. Ces travaux ont été précieux pour le Gouvernement par la qualité de leurs analyses comme par les orientations qu'ils contenaient, dont beaucoup, j'y insiste, se retrouvent dans la réforme que nous avons préparée.
A l'issue de ce grand débat national, deux conclusions s'étaient imposées à tous, et je dis bien à tous.
Premièrement, le caractère inacceptable, pour la SNCF, pour les cheminots, comme d'ailleurs pour l'Etat, du statu quo.
Dans ses conclusions, la commission Martinand présentait comme " un risque majeur le statu quo, c'est-à-dire la poursuite de la politique d'accompagnement du déclin, malgré des investissements passés très importants, dont la rentabilité s'avère insuffisante, avec le risque d'aggravation des déséquilibres financiers et des tensions sociales. "
Ce constat n'a fait depuis lors que se renforcer, et je crois qu'aujourd'hui il s'impose réellement à tous. J'ai ainsi pu constater, en recevant, il y a encore quelques jours, l'ensemble des organisations syndicales de la SNCF, que toutes, je dis bien toutes, sans aucune exception, considèrent désormais que le statu quo est inacceptable.
Le Gouvernement pour sa part s'en était convaincu dès le mois de juin de l'an dernier et l'avait d'ailleurs fait savoir au Parlement en présentant les principes de la réforme qui se retrouvent aujourd'hui dans le projet de loi qui vous est présenté.
La deuxième conclusion concernait la nécessité de clarifier les responsabilités respectives de l'Etat et de la SNCF en matière d'infrastructures et, corrélativement, de débarrasser la SNCF de la partie de sa dette correspondant au financement de ces infrastructures.
La raison d'être du nouvel établissement public dont la création est prévue par le projet de loi est en effet de permettre à l'Etat, à travers lui, d'assumer complètement à l'avenir ses responsabilités dans l'étude, le financement et le développement des infrastructures.
A ce titre, cet établissement sera doté d'une capacité d'expertise économique et technique des projets d'investissement distincte de celle de la SNCF. Il contribuera ainsi à éclairer l'Etat avant toute décision de création d'infrastructure nouvelle.
On a parfois critiqué le monopole d'expertise de la SNCF, qui aurait été en quelque sorte juge et partie dans la décision de créer des lignes nouvelles. Il serait plus conforme à la réalité de dire que cette confusion des responsabilités convenait apparemment à tout le monde, du moins dans une vision de très court terme.
Elle permettait en effet à l'Etat de décider d'investissements ferroviaires sans supporter directement les conséquences financières de ses décisions, quitte à critiquer a posteriori, dans certains cas, les prévisions de la SNCF, faute, le plus souvent, d'avoir su les expertiser a priori.
Le nouvel établissement mettra fin à cette confusion.
Pour autant, contrairement à ce qui a parfois été avancé, il n'y aura évidemment aucun démantèlement de la SNCF. Le nouvel établissement public sera, en effet, une toute petite structure d'environ 200 personnes alors que, je le rappelle, la SNCF en compte près de 180 000.
Le désendettement de la SNCF de la partie de sa dette liée au financement des infrastructures, sur lequel l'accent a été mis très fortement, n'est donc en réalité que la conséquence logique tirée pour le passé de cette clarification des responsabilités instaurée essentiellement pour l'avenir.
Il est vrai, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'importance des sommes en cause explique très facilement l'attention portée par les commentateurs. Ce désendettement porte, en effet, sur 134,2 milliards de francs : le Gouvernement suivra, en proposant sur ce point un amendement, les conclusions de l'audit effectué par un cabinet indépendant pour évaluer la dette d'infrastructure. Ces conclusions n'étaient pas encore disponibles au moment du dépôt du projet de loi : le chiffre de 125 milliards de francs correspondait à une étude interne ayant pour terme la fin de l'année 1995 alors que l'audit qui a été effectué par un organisme indépendant s'est conclu à la fin de l'année 1996.
Si la création de ce nouvel établissement public est dictée, d'abord, par le souci de clarification des responsabilités en matière d'infrastructures, la conviction du Gouvernement est que celui-ci constitue aussi la modalité la plus appropriée pour désendetter la SNCF.
Cette analyse avait d'ailleurs été faite, dans le cadre du débat national, à la fois par le conseil national des transports et par le Conseil économique et social. L'un et l'autre avaient en effet suggéré, dans leurs avis, la création d'une structure nouvelle chargée, pour l'avenir, de la responsabilité, du développement et de la modernisation du réseau ferroviaire et, pour le passé, de l'apurement de la dette d'infrastructure de la SNCF.
L'expérience du service annexe de l'amortissement de la dette, créé en 1990 dans les écritures comptables de la SNCF, avait, en effet, montré les limites de ce genre de solution : alors même que l'Etat avait, en 1990, sorti des comptes principaux de la SNCF 38 milliards de francs de dette, il avait laissé subsister tous les mécanismes de reconstitution rapide de cette dette, entretenant la confusion originelle entre les responsabilités qui relèvent de l'Etat en matière d'infrastructures et les comptes de la SNCF.
Je vais maintenant vous présenter rapidement, mesdames, messieurs les sénateurs, les principaux points du projet de loi, qui seront discutés ultérieurement dans le détail.
Je m'en tiendrai pour l'instant à quatre observations principales.
Première observation : ce texte définit tout d'abord les missions respectives de la SNCF et du nouvel établissement public dont il prévoit la création.
Le nouvel établissement aura pour objet " d'aménager, de développer et de mettre en valeur l'infrastructure ferroviaire ". Comme la SNCF, il s'agit d'un établissement public à caractère industriel et commercial. Comme la SNCF, il sera soumis au contrôle économique et financier de l'Etat et, toujours comme la SNCF, il tiendra sa comptabilité selon les règles applicables aux entreprises.
La SNCF assurera, pour le compte de ce nouvel établissement, la gestion du trafic et des circulations sur le réseaux ferré national, ainsi, bien sûr, que le fonctionnement et l'entretien des installations techniques et de sécurité de ce réseau.
La SNCF conservera donc sa double mission de transporteur ferroviaire et de gestionnaire de l'infrastructure.
Deuxième observation : en contrepartie de la prise en charge par le nouvel établissement public d'une dette vis-à-vis de la SNCF de 134,2 milliards de francs, le projet organise le transfert au nouvel établissement public des biens constitutifs de l'infrastructure ferroviaire, ainsi que des terrains et bâtiments non affectés à l'exploitation des services de transport.
Jusqu'à présent, ces biens appartenaient à l'Etat et ils étaient gérés par la SNCF. Le présent projet de loi prévoit qu'ils seront apportés en pleine propriété au nouvel établissement public, ce qui lui permettra de décider, au sein du conseil d'administration, des actes de gestion de son patrimoine - terrains, bâtiments - sauf en ce qui concerne la consistance du réseau, à propos de laquelle les décisions resteront soumises à l'Etat.
Cette formule apportera simplification et efficacité au fonctionnement de l'établissement public industriel et commercial - et facilitera ses relations avec les collectivités territoriales, en maintenant toute garantie sur l'évolution du réseau.
De son côté, la SNCF demeure, dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui, gestionnaire des biens dévolus à l'exploitation du service de transport ferroviaire, c'est-à-dire en particulier des gares et des ateliers d'entretien du matériel roulant, mais aussi des magasins et ateliers de réparation et d'assemblage, des équipements des voies, des immeubles administratifs, des biens affectés au logement et aux activités sociales.
Bien entendu, l'Etat conservera toutes ses prérogatives en matière de définition et de consistance du réseau. Cela signifie que les décisions de création de ligne nouvelle, toute comme les éventuels projets de déclassement continueront d'être soumis à l'autorisation de l'Etat.
Troisième observation : je connais bien l'attention que porte le Sénat à tout ce qui concerne la fiscalité locale, dont la SNCF est un très gros contribuable puisqu'elle a versé, en 1995, 2,3 milliards de francs au titre de la taxe professionnelle, 250 millions de francs au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties et 42 millions de francs au titre de la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Je voudrais souligner que, sur ce point, le projet de loi organise en son article 8 un système de double neutralité.
Il s'agit d'abord d'une neutralité pour la SNCF et le nouvel établissement public, dans la mesure où la somme des impôts payés demain par les deux établissements sera égale à la somme payée aujourd'hui par la SNCF.
La neutralité jouera également pour les collectivités locales bénéficiaires, dans la mesure où le produit fiscal désormais supporté par les deux établissements publics sera réparti entre les collectivités locales dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui.
Quatrième observation : l'Etat tirera naturellement les conséquences, dans ses relations financières avec la SNCF, de l'existence du nouvel établissement public.
C'est à lui que sera versée désormais la contribution aux charges d'infrastructures, qui complétera ses autres resssources : dotations en capital de l'Etat, produits de son domaine et péages payés par la SNCF pour l'utilisation du réseau.
De son côté, la SNCF conserve naturellement le bénéfice de tous les autres concours publics qu'elle percevait jusqu'ici, en particulier au titre de ses missions de service public et au titre de ses charges de retraite, concours dont le principe est désormais prévu par la loi.
Certains s'interrogeront peut-être sur la complexité de ce dispositif.
La conviction du Gouvernement est qu'elle est plus apparente que réelle et qu'elle constitue en quelque sorte, cela paraît peut-être paradoxal, le prix à payer pour clarifier les missions respectives du responsable de l'infrastructure et du transporteur ferroviaire.
En outre, l'avant-projet de décret relatif aux missions et au statut du nouvel établissement public prévoit que la SNCF passera avec lui une convention qui précisera leurs relations.
Enfin, cinquième observation : le projet de loi précise les modalités de mise en oeuvre de la régionalisation expérimentale des services régionaux de voyageurs, dont le principe avait été posé par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. A cet égard, je voudrais simplement rappeler que, grâce à la dotation de 800 millions de francs inscrite dans la loi de finances initiale pour 1997, qui s'ajoute à la contribution versée jusqu'ici au titre de ces services, l'expérimentation se déroulera sans aucun transfert de charges pour les six régions concernées.
Je rappelle également que la mise en oeuvre de cette expérimentation passe par l'élaboration dans chaque région concernée de deux conventions : la première, signée entre l'Etat et la région, a pour objet de délimiter ces services ; la seconde, signée entre la région et la SNCF, vise à définir la consistance et les conditions de fonctionnement de ces services.
Avant de conclure, je souhaiterais remercier chaleureusement le rapporteur désigné sur ce texte par votre commission des affaires économiques, M. François Gerbaud.
Celui-ci m'avait demandé, en novembre dernier, de reporter de quelques semaines l'examen de ce projet afin, d'une part, de dissiper les malentendus qui, selon sa propre expression, paraissaient " à tort ou à raison " subsister dans certains esprits sur les objectifs de la réforme et, d'autre part, de permettre au Gouvernement - cela correspondait d'ailleurs à un souhait que j'avais formulé - d'approfondir, en liaison avec le Sénat, certaines modalités d'application.
M. le Premier ministre a bien voulu, sur la proposition de Mme Idrac et de moi-même, faire droit à cette demande.
Je crois pouvoir dire que ces quelques semaines ont été très utilement mises à profit, tant par le Sénat que par le Gouvernement, et je voudrais en donner trois témoignages.
Tout d'abord, pendant ces quelques semaines, a pu être achevé l'audit d'infrastructure commandé à une cabinet indépendant, ce qui nous a permis de préciser le montant de la dette d'infrastructure de la SNCF, dont le projet de loi prévoit le transfert à la charge du nouvel établissement public. Je rappelle que ce montant est de 134,2 milliards de francs.
Ensuite, nous avons pu ajuster à 8 milliards de francs le niveau de la dotation en capital dont bénéficiera cet établissement public en 1997, somme qui lui permettra de partir sur des bases solides pour remplir l'ensemble des missions qui lui sont dévolues.
Enfin, nous avons pu élaborer les avant-projets de trois décrets d'application de la loi, ce qui a permis, fait exceptionnel, de les présenter au Parlement et aux organisations syndicales.
Tout cela marque l'aboutissement d'un processus de concertation et de transparence sans précédent dans ce secteur.
Je voudrais donc remercier les deux rapporteurs désignés par le Sénat, M. Gerbaud, rapporteur au fond, et M. Haenel, rapporteur pour avis, qui nous ont aidés l'un et l'autre, pendant ces quelques semaines, à perfectionner le dispositif de notre réforme.
J'y vois, pour ma part, mesdames, messieurs les sénateurs, une forme exemplaire de coopération entre votre assemblée et le Gouvernement, qui laisse fort bien augurer, à mes yeux, les conditions dans lesquelles va se dérouler le débat législatif qui s'engage aujourd'hui.
(Source http://www.senat.fr, le 21 février 2002)
mesdames, messieurs les sénateurs,
Le projet de loi portant réforme de la SNCF que j'ai l'honneur de vous présenter au nom du Gouvernement a un triple objet.
Il vise d'abord à créer un nouvel établissement public à caractère industriel et commercial qui aura pour objet l'aménagement, le développement et la mise en valeur de l'infrastructure du réseau ferroviaire dans le cadre des principes du service public.
Il tire ensuite les conséquences, dans la définition des mission de la SNCF, de l'existence de ce nouvel établissement public, auquel la SNCF sera d'ailleurs très fortement liée dans l'accomplissement de leurs missions respectives.
Il tend enfin à préciser les conditions du lancement de la régionalisation expérimentale des services régionaux de voyageurs, dont le principe avait été posé par l'article 67 de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Chacun se souvient de la contribution essentielle du Sénat à cette grande loi.
Avant de vous présenter ce texte, je voudrais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous indiquer dans quel esprit a été élaborée la réforme de la SNCF.
Dès ma prise de fonctions, j'ai placé le service rendu à l'usager au coeur de mes priorités.
Cette préoccupation inspire toute mon action, qu'il s'agisse des services de l'équipement ou, bien entendu, de la politique des transports.
Je l'ai eue constamment présente à l'esprit tout au long du débat national sur le transport ferroviaire que le Gouvernement a organisé en 1996.
Je le souligne, parce que ce débat a comporté - comme d'ailleurs le projet de loi que le Sénat commence à examiner aujourd'hui - des aspects techniques souvent trop abstraits et ne permettant pas toujours d'avoir une compréhension claire de ce que nous voulons faire.
Or, la réforme d'une grande entreprise de service public telle que la SNCF n'a de sens à mes yeux, comme d'ailleurs toute réforme, que si elle est bien comprise et si, à l'arrivée, elle se traduit par un progrès pour ceux à qui ce service s'adresse, c'est-à-dire tous les Français, et aussi pour ceux qui en sont les acteurs, c'est-à-dire les cheminots.
La SNCF est en effet une très grande entreprise : créée en 1937, transformée en 1982 par la loi d'orientation des transports intérieurs en établissement public à caractère industriel et commercial, elle est pour les Français en quelque sorte un symbole. Nos concitoyens y sont tous très attachés. Ils ont, à juste titre, le sentiment qu'elle appartient à la nation, dont elle a partagé héroïquement les heures sombres au moment de la bataille du rail, avant d'incarner, la paix revenue, les succès de la technologie ferroviaire française. Tous les élus, parlementaires mais aussi élus locaux, se montrent très attentifs à ce qui la concerne.
Aujourd'hui, on l'oublie trop souvent, elle transporte en moyenne chaque année environ 800 millions de voyageurs. Bien sûr, cela ne signifie pas que chaque Français prend personnellement le train quatorze ou quinze fois chaque année. Ce chiffre très élevé doit en effet beaucoup à tous ceux qui, en région parisienne, prennent tous les jours le train entre leur travail et leur domicile.
Cependant, tous les Français, je dis bien tous les Français, ont besoin d'un meilleur service ferroviaire, et ils le souhaitent. Voilà pourquoi la réforme de la SNCF s'adresse à la fois à tous les Français et aux cheminots.
Aux Français, qui sont attachés au transport ferroviaire, elle a pour ambition d'offrir demain un meilleur service, c'est-à-dire de meilleurs trains, des correspondances mieux adaptées, non seulement entre trains, mais aussi entre trains, avions et autobus, une information plus complète, des tarifs plus simples, des gares plus accueillantes, etc.
C'est, bien sûr, l'objet du projet industriel actuellement en cours d'élaboration à l'intérieur de la SNCF, sous la responsabilité de son président, M. Gallois. Sa préparation associe de manière très participative tous les cheminots. Il doit permettre d'identifier tous les domaines dépendant directement des personnels de l'entreprise où des progrès sont possibles pour attirer davantage de clients vers le train.
Je tiens à souligner ici que ce projet industriel avance bien, que son texte a été largement débattu et amendé au sein de l'entreprise depuis le mois de septembre dernier, qu'il prévoit de placer le client au coeur de trente programmes d'action prioritaires et de redéployer une partie des personnels vers le contact direct avec la clientèle.
Comme l'a souhaité le Gouvernement, le projet de loi dont nous allons débattre est directement lié à ce projet industriel. En effet, grâce à l'effort sans précédent que représente le très large désendettement de la SNCF et grâce à l'augmentation des crédits accordés à l'infrastructure et aux services régionaux de voyageurs, il crée incontestablement un contexte de nature à redonner aux cheminots une forte motivation pour rendre aux utilisateurs du train un meilleur service.
Aux contribuables - car les Français sont aussi des contribuables - la réforme, à travers leurs représentants dans les assemblées parlementaires, permettra de mieux connaître et de mieux cerner l'utilisation des importants concours publics alloués au transport ferroviaire. Désormais, en effet, il sera possible de distinguer facilement ce qui relève, d'une part, de l'entretien et du développement des infrastructures, c'est-à-dire pour l'essentiel des lignes, et, d'autre part, des aides accordées au transport ferroviaire dans le cadre des missions de service public confiées à la SNCF.
Les sommes considérables consacrées chaque année par la collectivité à la SNCF imposent, en effet - et j'y insiste -, de bien clarifier les responsabilités respectives de l'Etat et de la SNCF.
Aux 180 000 cheminots de tous grades et de toutes catégories professionnelles qui font vivre chaque jour la SNCF, ce projet adresse un double message.
Tout d'abord, en réaffirmant les principes du service public et même, dans certains cas, en les explicitant plus clairement que les textes aujourd'hui en vigueur, par exemple lorsqu'il inscrit dans la loi le principe de concours financiers de l'Etat pour les missions de service public de la SNCF, le projet dissipe les craintes parfois exprimées ici ou là de voir disparaître ce qui constitue le service public à la française.
Par ailleurs, en débarrassant la SNCF de la dette qu'elle avait contractée pour financer l'entretien et le développement de son réseau,.ce projet répond directement à une revendication très ancienne, dont le débat national organisé l'an dernier a d'ailleurs fait ressortir la légitimité.
Cette revendication était d'ailleurs très compréhensible, non seulement parce que la SNCF était le seul mode de transport à supporter directement dans ses comptes le financement de son infrastructure, mais aussi parce que le poids écrasant de cette dette privait les cheminots de toute perspective, pour leur entreprise et donc pour eux-mêmes, en anéantissant, en quelque sorte, par avance le produit de leurs efforts.
Enfin, ni le statut ni le régime de retraite des personnels ne sont naturellement, en quoi que ce soit, modifiés par la réforme.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui répond donc à la volonté du Gouvernement de créer les conditions du renouveau du transport ferroviaire dans notre pays.
Au mois de juin dernier, nous avions, Mme Idrac et moi-même, tiré devant vous et avec vous les conclusions du débat national engagé alors depuis plusieurs mois, sur l'initiative du Gouvernement, sur le transport ferroviaire.
Je rappelle, que ce débat a impliqué, tout au long de l'année 1996, les conseils économiques et sociaux régionaux,.les conseils régionaux, le Conseil national des transports, le Conseil économique et social, puis, en juin dernier, le Parlement.
J'ai personnellement reçu, avec Mme Idrac, à de nombreuses reprises, depuis un an, chaque fédération syndicale de cheminots afin de les consulter,.de les informer de l'avancement de notre réflexion et de recueillir leurs observations et leurs suggestions.
Personne ne peut, me semble-t-il, affirmer sérieusement que cette réforme n'a pas été longuement, très longuement, mûrie et concertée.
Je voudrais ici profiter de l'occasion qui m'est donnée pour remercier le Sénat de sa contribution à ce débat. Depuis plusieurs années, votre assemblée a en effet consacré à la situation de la SNCF d'importants travaux, notamment sous l'impulsion de M. Haenel. Ces travaux ont été précieux pour le Gouvernement par la qualité de leurs analyses comme par les orientations qu'ils contenaient, dont beaucoup, j'y insiste, se retrouvent dans la réforme que nous avons préparée.
A l'issue de ce grand débat national, deux conclusions s'étaient imposées à tous, et je dis bien à tous.
Premièrement, le caractère inacceptable, pour la SNCF, pour les cheminots, comme d'ailleurs pour l'Etat, du statu quo.
Dans ses conclusions, la commission Martinand présentait comme " un risque majeur le statu quo, c'est-à-dire la poursuite de la politique d'accompagnement du déclin, malgré des investissements passés très importants, dont la rentabilité s'avère insuffisante, avec le risque d'aggravation des déséquilibres financiers et des tensions sociales. "
Ce constat n'a fait depuis lors que se renforcer, et je crois qu'aujourd'hui il s'impose réellement à tous. J'ai ainsi pu constater, en recevant, il y a encore quelques jours, l'ensemble des organisations syndicales de la SNCF, que toutes, je dis bien toutes, sans aucune exception, considèrent désormais que le statu quo est inacceptable.
Le Gouvernement pour sa part s'en était convaincu dès le mois de juin de l'an dernier et l'avait d'ailleurs fait savoir au Parlement en présentant les principes de la réforme qui se retrouvent aujourd'hui dans le projet de loi qui vous est présenté.
La deuxième conclusion concernait la nécessité de clarifier les responsabilités respectives de l'Etat et de la SNCF en matière d'infrastructures et, corrélativement, de débarrasser la SNCF de la partie de sa dette correspondant au financement de ces infrastructures.
La raison d'être du nouvel établissement public dont la création est prévue par le projet de loi est en effet de permettre à l'Etat, à travers lui, d'assumer complètement à l'avenir ses responsabilités dans l'étude, le financement et le développement des infrastructures.
A ce titre, cet établissement sera doté d'une capacité d'expertise économique et technique des projets d'investissement distincte de celle de la SNCF. Il contribuera ainsi à éclairer l'Etat avant toute décision de création d'infrastructure nouvelle.
On a parfois critiqué le monopole d'expertise de la SNCF, qui aurait été en quelque sorte juge et partie dans la décision de créer des lignes nouvelles. Il serait plus conforme à la réalité de dire que cette confusion des responsabilités convenait apparemment à tout le monde, du moins dans une vision de très court terme.
Elle permettait en effet à l'Etat de décider d'investissements ferroviaires sans supporter directement les conséquences financières de ses décisions, quitte à critiquer a posteriori, dans certains cas, les prévisions de la SNCF, faute, le plus souvent, d'avoir su les expertiser a priori.
Le nouvel établissement mettra fin à cette confusion.
Pour autant, contrairement à ce qui a parfois été avancé, il n'y aura évidemment aucun démantèlement de la SNCF. Le nouvel établissement public sera, en effet, une toute petite structure d'environ 200 personnes alors que, je le rappelle, la SNCF en compte près de 180 000.
Le désendettement de la SNCF de la partie de sa dette liée au financement des infrastructures, sur lequel l'accent a été mis très fortement, n'est donc en réalité que la conséquence logique tirée pour le passé de cette clarification des responsabilités instaurée essentiellement pour l'avenir.
Il est vrai, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'importance des sommes en cause explique très facilement l'attention portée par les commentateurs. Ce désendettement porte, en effet, sur 134,2 milliards de francs : le Gouvernement suivra, en proposant sur ce point un amendement, les conclusions de l'audit effectué par un cabinet indépendant pour évaluer la dette d'infrastructure. Ces conclusions n'étaient pas encore disponibles au moment du dépôt du projet de loi : le chiffre de 125 milliards de francs correspondait à une étude interne ayant pour terme la fin de l'année 1995 alors que l'audit qui a été effectué par un organisme indépendant s'est conclu à la fin de l'année 1996.
Si la création de ce nouvel établissement public est dictée, d'abord, par le souci de clarification des responsabilités en matière d'infrastructures, la conviction du Gouvernement est que celui-ci constitue aussi la modalité la plus appropriée pour désendetter la SNCF.
Cette analyse avait d'ailleurs été faite, dans le cadre du débat national, à la fois par le conseil national des transports et par le Conseil économique et social. L'un et l'autre avaient en effet suggéré, dans leurs avis, la création d'une structure nouvelle chargée, pour l'avenir, de la responsabilité, du développement et de la modernisation du réseau ferroviaire et, pour le passé, de l'apurement de la dette d'infrastructure de la SNCF.
L'expérience du service annexe de l'amortissement de la dette, créé en 1990 dans les écritures comptables de la SNCF, avait, en effet, montré les limites de ce genre de solution : alors même que l'Etat avait, en 1990, sorti des comptes principaux de la SNCF 38 milliards de francs de dette, il avait laissé subsister tous les mécanismes de reconstitution rapide de cette dette, entretenant la confusion originelle entre les responsabilités qui relèvent de l'Etat en matière d'infrastructures et les comptes de la SNCF.
Je vais maintenant vous présenter rapidement, mesdames, messieurs les sénateurs, les principaux points du projet de loi, qui seront discutés ultérieurement dans le détail.
Je m'en tiendrai pour l'instant à quatre observations principales.
Première observation : ce texte définit tout d'abord les missions respectives de la SNCF et du nouvel établissement public dont il prévoit la création.
Le nouvel établissement aura pour objet " d'aménager, de développer et de mettre en valeur l'infrastructure ferroviaire ". Comme la SNCF, il s'agit d'un établissement public à caractère industriel et commercial. Comme la SNCF, il sera soumis au contrôle économique et financier de l'Etat et, toujours comme la SNCF, il tiendra sa comptabilité selon les règles applicables aux entreprises.
La SNCF assurera, pour le compte de ce nouvel établissement, la gestion du trafic et des circulations sur le réseaux ferré national, ainsi, bien sûr, que le fonctionnement et l'entretien des installations techniques et de sécurité de ce réseau.
La SNCF conservera donc sa double mission de transporteur ferroviaire et de gestionnaire de l'infrastructure.
Deuxième observation : en contrepartie de la prise en charge par le nouvel établissement public d'une dette vis-à-vis de la SNCF de 134,2 milliards de francs, le projet organise le transfert au nouvel établissement public des biens constitutifs de l'infrastructure ferroviaire, ainsi que des terrains et bâtiments non affectés à l'exploitation des services de transport.
Jusqu'à présent, ces biens appartenaient à l'Etat et ils étaient gérés par la SNCF. Le présent projet de loi prévoit qu'ils seront apportés en pleine propriété au nouvel établissement public, ce qui lui permettra de décider, au sein du conseil d'administration, des actes de gestion de son patrimoine - terrains, bâtiments - sauf en ce qui concerne la consistance du réseau, à propos de laquelle les décisions resteront soumises à l'Etat.
Cette formule apportera simplification et efficacité au fonctionnement de l'établissement public industriel et commercial - et facilitera ses relations avec les collectivités territoriales, en maintenant toute garantie sur l'évolution du réseau.
De son côté, la SNCF demeure, dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui, gestionnaire des biens dévolus à l'exploitation du service de transport ferroviaire, c'est-à-dire en particulier des gares et des ateliers d'entretien du matériel roulant, mais aussi des magasins et ateliers de réparation et d'assemblage, des équipements des voies, des immeubles administratifs, des biens affectés au logement et aux activités sociales.
Bien entendu, l'Etat conservera toutes ses prérogatives en matière de définition et de consistance du réseau. Cela signifie que les décisions de création de ligne nouvelle, toute comme les éventuels projets de déclassement continueront d'être soumis à l'autorisation de l'Etat.
Troisième observation : je connais bien l'attention que porte le Sénat à tout ce qui concerne la fiscalité locale, dont la SNCF est un très gros contribuable puisqu'elle a versé, en 1995, 2,3 milliards de francs au titre de la taxe professionnelle, 250 millions de francs au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties et 42 millions de francs au titre de la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Je voudrais souligner que, sur ce point, le projet de loi organise en son article 8 un système de double neutralité.
Il s'agit d'abord d'une neutralité pour la SNCF et le nouvel établissement public, dans la mesure où la somme des impôts payés demain par les deux établissements sera égale à la somme payée aujourd'hui par la SNCF.
La neutralité jouera également pour les collectivités locales bénéficiaires, dans la mesure où le produit fiscal désormais supporté par les deux établissements publics sera réparti entre les collectivités locales dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui.
Quatrième observation : l'Etat tirera naturellement les conséquences, dans ses relations financières avec la SNCF, de l'existence du nouvel établissement public.
C'est à lui que sera versée désormais la contribution aux charges d'infrastructures, qui complétera ses autres resssources : dotations en capital de l'Etat, produits de son domaine et péages payés par la SNCF pour l'utilisation du réseau.
De son côté, la SNCF conserve naturellement le bénéfice de tous les autres concours publics qu'elle percevait jusqu'ici, en particulier au titre de ses missions de service public et au titre de ses charges de retraite, concours dont le principe est désormais prévu par la loi.
Certains s'interrogeront peut-être sur la complexité de ce dispositif.
La conviction du Gouvernement est qu'elle est plus apparente que réelle et qu'elle constitue en quelque sorte, cela paraît peut-être paradoxal, le prix à payer pour clarifier les missions respectives du responsable de l'infrastructure et du transporteur ferroviaire.
En outre, l'avant-projet de décret relatif aux missions et au statut du nouvel établissement public prévoit que la SNCF passera avec lui une convention qui précisera leurs relations.
Enfin, cinquième observation : le projet de loi précise les modalités de mise en oeuvre de la régionalisation expérimentale des services régionaux de voyageurs, dont le principe avait été posé par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. A cet égard, je voudrais simplement rappeler que, grâce à la dotation de 800 millions de francs inscrite dans la loi de finances initiale pour 1997, qui s'ajoute à la contribution versée jusqu'ici au titre de ces services, l'expérimentation se déroulera sans aucun transfert de charges pour les six régions concernées.
Je rappelle également que la mise en oeuvre de cette expérimentation passe par l'élaboration dans chaque région concernée de deux conventions : la première, signée entre l'Etat et la région, a pour objet de délimiter ces services ; la seconde, signée entre la région et la SNCF, vise à définir la consistance et les conditions de fonctionnement de ces services.
Avant de conclure, je souhaiterais remercier chaleureusement le rapporteur désigné sur ce texte par votre commission des affaires économiques, M. François Gerbaud.
Celui-ci m'avait demandé, en novembre dernier, de reporter de quelques semaines l'examen de ce projet afin, d'une part, de dissiper les malentendus qui, selon sa propre expression, paraissaient " à tort ou à raison " subsister dans certains esprits sur les objectifs de la réforme et, d'autre part, de permettre au Gouvernement - cela correspondait d'ailleurs à un souhait que j'avais formulé - d'approfondir, en liaison avec le Sénat, certaines modalités d'application.
M. le Premier ministre a bien voulu, sur la proposition de Mme Idrac et de moi-même, faire droit à cette demande.
Je crois pouvoir dire que ces quelques semaines ont été très utilement mises à profit, tant par le Sénat que par le Gouvernement, et je voudrais en donner trois témoignages.
Tout d'abord, pendant ces quelques semaines, a pu être achevé l'audit d'infrastructure commandé à une cabinet indépendant, ce qui nous a permis de préciser le montant de la dette d'infrastructure de la SNCF, dont le projet de loi prévoit le transfert à la charge du nouvel établissement public. Je rappelle que ce montant est de 134,2 milliards de francs.
Ensuite, nous avons pu ajuster à 8 milliards de francs le niveau de la dotation en capital dont bénéficiera cet établissement public en 1997, somme qui lui permettra de partir sur des bases solides pour remplir l'ensemble des missions qui lui sont dévolues.
Enfin, nous avons pu élaborer les avant-projets de trois décrets d'application de la loi, ce qui a permis, fait exceptionnel, de les présenter au Parlement et aux organisations syndicales.
Tout cela marque l'aboutissement d'un processus de concertation et de transparence sans précédent dans ce secteur.
Je voudrais donc remercier les deux rapporteurs désignés par le Sénat, M. Gerbaud, rapporteur au fond, et M. Haenel, rapporteur pour avis, qui nous ont aidés l'un et l'autre, pendant ces quelques semaines, à perfectionner le dispositif de notre réforme.
J'y vois, pour ma part, mesdames, messieurs les sénateurs, une forme exemplaire de coopération entre votre assemblée et le Gouvernement, qui laisse fort bien augurer, à mes yeux, les conditions dans lesquelles va se dérouler le débat législatif qui s'engage aujourd'hui.
(Source http://www.senat.fr, le 21 février 2002)