Texte intégral
(La conférence de presse débute à 14 h 45)
M.STRAUSS-KAHN. - Mesdames, Messieurs, Christian SAUTTER et moi sommes ravis d'avoir l'occasion de vous retrouver pour ce rendez-vous annuel. Il en sort toujours un petit peu dans vos colonnes avant la date de la présentation du budget en Conseil des Ministres, mais cette année tous les records ont été battus à l'occasion d'indiscrétions dont je ne m'explique pas la cause, et qui font que vous avez été capables de pratiquement tout détailler à l'avance, ce qui rend cette cérémonie un peu inutile.
J'ai quand même une information pour vous : ce matin, le Conseil des Ministres a approuvé le projet de loi de Finances. Sorti de là, tout le reste n'est que des choses que vous connaissez, que je vais essayer de remettre dans mon ordre. Vous en ferez ce que bon vous semble.
Je vais vous parler un peu de la conjoncture économique, un peu de la partie fiscale, des équilibres ; Christian SAUTTER, selon un rythme maintenant bien organisé, vous parlera de la partie " dépenses ".
Le point central de toute cette affaire, c'est qu'évidemment le projet de loi de finance traduit pour un Gouvernement, non pas l'intégralité, mais la majeure partie de ses choix de politique économique. Cette année, comme d'ailleurs l'année dernière. les choix sont clairs.
D'abord, le choix de l'emploi ; je crois qu'il apparaît clairement. dans les mesures qui ont été prises et que je détaillerai tout à 1'lietire, en en expliquant le lien avec l'emploi, que toutes les décisions que nous allons soumettre au Parlement sont fondées sur cette analyse, ce qui d'ailleurs prend aujourd'hui un caractère un peu différent de ce qui a pu être le cas au cours des deux projets de loi que Christian SAUTTER et moi avons déjà présentés devant vous.
Lorsque, à l'occasion des mesures d'urgence -vous vous rappelez le MUFF de 1997-, comme pour la loi de finances pour 1998 ou pour celle pour 1999, nous vous disions : " Le coeur de la politique que le gouvernement veut mener, donc le coeur de la logique du budget que l'on vous présente, c'est l'emploi ", vous n'étiez certes pas dubitatifs, parce que vous êtes polis, mais, néanmoins. les preuves restaient à faire. Aujourd'hui, cette priorité est devenue une perspective, parce que les premiers résultats sont au rendez-vous. C'est ce qui permet au Premier Ministre de parler d'une perspective de plein emploi, qui est certes encore loin devant nous., mais que ces deux années permettent d'envisager à une échéance relativement raisonnable. J'aurai l'occasion d'y revenir.
L'autre élément du contexte dans lequel se situe ce projet de loi, c'est la nouvelle donne européenne, c'est-à-dire le fait que, après en avoir beaucoup parlé et l'avoir beaucoup préparé, l'euro est notre monnaie depuis le début de l'année et met fin à toute une décennie de débats, car chacun aujourd'hui a bien conscience, même les opposants les plus farouches à cette monnaie unique, que l'euro a protégé l'économie européenne en général, et l'économie française en particulier, des effets de la crise économique à la fin de l'année dernière et au début de cette année.
C'est donc dans ce double contexte emploi et euro que s'organise notre budget, avec une conviction : c'est que nous sommes en train de retrouver un chemin de croissance qui redonne un sens à l'espoir du progrès. Le progrès ne résulte pas que de la croissance économique, mais chacun sait bien que, dans une société dans laquelle la croissance n'est pas là, le pouvoir d'achat non plus, le chômage se développe, l'espoir, pas simplement pour les jeunes mais pour l'ensemble de la société, est une idée un peu abstraite. Aujourd'hui, nos concitoyens aspirent à un progrès, un progrès solidaire. C'est ce progrès solidaire qui inspire notre action, donc ce budget en particulier.
Le premier point dont je veux vous parler,, c'est la conjoncture que je mettrai sous le titre du temps venu de la nouvelle croissance. Pour 1999, la prévision de croissance que je fais aujourd'hui est de 2,3 %. Vous savez qu'initialement le budget avait été établi sur 2,7, qu'en mars, en raison des événements internationaux, c'était redressé dans une fourchette de 2,2 à 2,5. Aujourd'hui, je dirai 2,3. On ne sait pas ce qu'il en sera d'ici la fin de l'année. Nous sommes sur une pente de croissance de l'ordre de 3 %. Durera-t-elle jusqu'à la Fin de l'année ? Comment se développera-t-elle ? Une moyenne annuelle de 2,3 pour 1999 me paraît réaliste. Pour 2000, nous avons arrêté, Christian SAUTTER et moi, une fourchette comprise entre 2,6 et 3. Le budget est d'ailleurs calé sur le milieu de cette fourchette (2,8). L'existence de la fourchette ne fait que traduire les risques qui continuent de peser sur l'économie mondiale. Notre expérience de l'année dernière d'avoir donné un chiffre précis, sitôt parti sitôt critiqué, nous avons dû passer plusieurs mois à justifier que celui-ci bougerait ou pas en fonction de la conjoncture.
L'accélération de la croissance est évidemment au rendez-vous. Une fourchette qui tangente 3 est tout à fait réaliste. Nous pouvons atteindre ce 3 %. Nous pouvons aussi être un peu en dessous en fonction de différents aléas.
Je veux exposer devant vous pourquoi cette croissance est solidaire, forte et probablement durable. Elle est solidaire de deux manières. Elle l'est au regard des générations actuelles et au regard des générations futures. Solidaire au regard des Générations actuelles parce qu'il faut regarder maintenant, en se retournant, ce qui s'est passé pendant les deux ans qui nous séparent, ou deux ans et demi, de l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement. Là, il y a deux ruptures. Certains d'entre vous se souviennent peut-être de ce que j'avais évoqué en 1997 ; l'idée du double partage en disant que la croissance devait donner lieu à un double partage, un nouveau partage entre travail et capital et, au sein du travail, un nouveau partage entre pouvoir d'achat et emploi. J'avais indiqué que c'était à l'aune de ces deux partages et à leur évolution que l'on pourrait juger la réussite ou non de la politique économique du gouvernement.
Reprenons ces deux partages aujourd'hui.
Sur le premier, partage entre travail et capital, il y a une vraie rupture. Les revenus du travail ont recommencé à croître de façon rapide. Le pouvoir d'achat des salaires a augmenté de près de 4 %, 6 % pour le SMIC. Le résultat de tout cela, c'est un redressement du partage de la valeur ajoutée au profit des salaires, qui 'était pour nous une des conditions absolument indispensables d'un rééquilibrage de la consommation. à partir de là de la croissance, etc. J'y reviendrai.
Le premier graphique, que je veux juste commenter une seconde devant vous, est bien celui, depuis 1996, pour 2000 et probablement pour la suite encore -il s'agit là des salaires nets-, d'un redressement de la part des salaires dans la valeur ajoutée. C'est le premier partage. Nous nous étions engagés à le mettre en oeuvre. Les résultats aujourd'hui sont là.
Dans cette masse globale de salaires augmentés dans la valeur ajoutée, quelle est la part qui va au pouvoir d'achat de ceux qui ont déjà un travail et quelle est la part qui va aux nouveaux emplois ? On pourrait concevoir que cette part se redresse dans la valeur ajoutée, mais que cela aille entièrement aux salariés en place et qu'il n'y ait rien pour les nouveaux emplois. Il est très important que le double partage existe.
Sommes-nous ou pas sur la bonne voie ? En réalité, oui. Le partage est grosso modo de moitié moitié : moitié pour la création d'emplois, moitié pour l'augmentation du pouvoir d'achat.
Au total, comment peut-on analyser les fruits de la croissance de 1997 à 2000 ? C'est relativement simple. Il y en a un gros tiers pour l'emploi, un peu moins d'un tiers pour le pouvoir d'achat des salaires, et environ 30 % pour les capacités d'investissement. A la louche, on pourrait dire trois tiers. Ce n'est pas exactement cela. On pourrait dire trois tiers : un tiers salaires, un tiers emploi, un tiers capacité d'investissement. Ce qui surprend sans doute le plus aujourd'hui, c'est que le tiers sur les capacités d'investissement existe, alors que l'on a longtemps craint que l'investissement n'arrive pas à prendre le relais de la consommation, consommation dont il était clair qu'elle était repartie. Il fallait que le relais par l'investissement se prenne. On voit aujourd'hui que c'est le cas.
Contrairement à une idée extrêmement répandue, le taux d'autofinancement des entreprises en France est sensiblement en-dessous de 100 %, ce qui retrace bien le fait que le choix vers l'investissement réel, et non pas vers les investissements financiers, a pris une réalité que l'on retrouve dans les statistiques.
Sur ce qui est de la solidarité entre les Générations aujourd'hui. la croissance que nous venons de vivre est bel et bien solidaire. Elle s'est partagée entre ceux qui avaient un emploi et ceux qui étaient chômeurs.
Il y a l'autre élément de la solidarité avec les générations futures. Vous vous en souvenez certainement, j'avais dit, en juillet 1997, lors des premières mesures de redressement pour être capable de satisfaire aux contraintes de l'euro, que je nous fixais comme objectif en l'an 2000 de voir le ratio de la dette sur le PIB décroître, ce qui n'était pas arrivé dans notre pays depuis 20 ans. Cela est au rendez-vous. Nous avons un début de décroissance. Il faut qu'il se poursuive bien sûr. Ce sont des sommets assez plats. La décroissance initiale est faible. Le sommet a bien été atteint en 1999. En 2000, le ratio dette sur PIB, quand on prend la même manière de calculer... Vous savez que la nomenclature comptable a un peu changé, ce qui perturbe la manière de calculer ; mais que l'on prenne dans l'ancienne ou dans la nouvelle, dans les deux cas l'année 2000 est en dessous de l'année 1999. Le ratio dette sur PIB redécroît dans notre pays pour la première fois depuis 1980.
C'est bien un élément majeur de solidarité entre les générations, car une augmentation de ce ratio est simplement le fait que la génération actuelle vit de plus en plus au crédit de ses enfants. La diminution du ratio, au contraire, est que nous prenons en charme nous-mêmes nos dépenses et que nous allégeons la charge sur nos enfants.
C'est le second élément de solidarité que retrace la croissance depuis deux ans et demi, à savoir l'obtention de ce ralentissement, puis de ce changement de sens de la courbe qui est sur cet écran.
Evidemment, c'est le résultat de la réduction des déficits, il n'y a pas de secret. C'est le résultat de la réduction des déficits. Pour 1999, le déficit sera de 2,2 % du PIB. Nous avions annoncé 2,3. La situation un peu meilleure en exécution que ce que nous aurions pu espérer me donne à penser que ce sera plutôt 2,2. Pour 2000, le déficit a été fixé à 1,8, ce qui est tout à fait en ligne avec la programmation triennale que nous avons déposée à Bruxelles -vous vous en souvenez peut-être- à la Fin de l'année dernière, qui prévoyait une évolution du déficit qui dépendait de la croissance. En situation de la croissance plutôt forte, on devait aller vers 1,8, 1,7. La croissance est plutôt forte. Elle n'atteint pas 3 %. Je vous ai dit que notre perspective pour l'année prochaine était 2,8. Nous sommes dans cette fourchette à 1,8.
Au passage, je m'arrête une seconde parce qu'il ne manque pas de commentateurs. Il y a des commentateurs qui critiquent dans les deux sens. Il y a la critique de gauche et celle de droite, pour faire vite. La critique de droite est de dire que tout cela ne va pas assez vite, que l'on ne diminue pas le déficit assez vite. Outre que c'est la branche supérieure de la diminution que nous avons programmée -on va donc au maximum de ce que nous avons annoncé il y a un an ; on nous disait déjà que c'était probablement irréaliste ; nous allons au maximum de ce qui avait été annoncé-, je voudrais, pour essayer de convaincre ces détracteurs, vous montrer, dans les différents pays de l'Union, pour nombre d'entre eux, quelle a été l'évolution des déficits publics de 1997 à 2000.
On constate, ce qui n'est pas une idée reçue, et que vous n'avez peut-être pas à esprit, que nous avons 1,7 % de diminution du déficit de 1997 à 2000 en France, que c'est le meilleur résultat -vous voyez les autres s'afficher-, la moyenne de la zone euro étant à 0,8. Certains pays, comme les Pays-Bas, en partant de peu il est vrai, ont plutôt vu leur déficit réaugmenter. On peut toujours faire mieux, c'est sûr. Le problème est de trouver le bon arbitrage entre la diminution du déficit, la diminution des impôts et le soutien de la croissance. J'ai le sentiment, sans vouloir être prétentieux, que le calibrage de la croissance que nous avons trouvé est plutôt bon -j'y reviendrai tout à l'heure-, ce qui justifie une réduction des déficits régulière, sérieuse, pas aussi importante que certains en France le souhaiteraient, notamment les libéraux ; mais je pense qu'ils ont tort car, avec une réduction plus forte du déficit, nous n'aurions pas eu la croissance que nous avons. Quand on la compare à celle de nos voisins, pour le moins, c'est une réduction du déficit qui visiblement n'a pas à rougir de la comparaison internationale.
Cette croissance est plus solidaire. Elle est aussi plus forte, plus durable. C'est ce qui justifie l'idée que, finalement, nous sommes probablement sur une voie assez positive. Pourquoi est-elle plus forte et plus durable ?
D'abord, parce que l'économie mondiale devrait moins peser sur notre croissance en 2000, probablement aussi en 2001, que cela n'a été le cas en 1999. En 1999, il est clair que le choc a été assez rude. Vous l'avez beaucoup décrit. Le ralentissement est très sensible. Juste un chiffre pour l'illustré : nos exportations qui croissaient à 10 % d'une année sur l'autre, fin 1997, ont brutalement chuté.
C'est vrai de ce qui passait vers l'Asie, en particulier vers le Japon . c'est vrai d'autres pays. Vous avez décrit cela durant toute l'année, je n'y reviens pas.
La surprise vient de plutôt de ce que, au bout du compte, nous avons traversé ce trou d'air avec moins d'effets qu'attendus mais avec quand même quelque chose qui a pesé sensiblement sur notre activité. Il a été rude en France. Il a été un peu plus rude encore en Europe et on le voit bien sur la plupart des graphiques trimestriels qui évoquent la situation de la croissance.
J'ai ici très rapidement une illustration de ce phénomène qui montre que nous avons eu l'entrée dans le trou d'air, c'est-à-dire une demande intérieure -en rouge- qui ne se maintenait pas trop mal mais des exportations qui, elles, se sont effondrées et puis une sortie du trou d'air avec des exportations qui ont commencé à ressortir, c'est-à-dire la fin de l'aspect international, mais une demande intérieure qui avait continué à se maintenir au même niveau. Bon an mal an, le trou n'a donc pas été trop long, et la croissance n'a fléchi -vous l'avez noté- que sur le premier semestre 1999.
En 2000, je pense que la croissance mondiale sera plus équilibrée. D'abord, parce que le seul Moteur de la croissance ne devrait plus être les Etats-Unis. La croissance repart partout en Europe. Ensuite, parce que la situation asiatique est à l'évidence moins mauvaise. Il reste des difficultés mais la plupart des économies asiatiques -pas vraiment le Japon encore que cela aille un peu moins mal-, la Corée. la Thaïlande, etc., qui étaient à l'origine de la crise des pays émergeants, ces pays vont plutôt mieux. Nous entrons dans une situation dans laquelle ce meilleur équilibre fait que les risques internationaux sur la croissance sont moins forts.
Dans ces conditions, si la décennie 90 a été largement celle de la prospérité américaine, il n'est pas déraisonnable de penser que la première décennie qui suit l'an 2000 peut être le retour à la croissance et la puissance européennes, une décennie de croissance avec un pari, un défi par rapport à la croissance américaine : c'est d'obtenir aussi une décennie de croissance mais sans les inégalités, c'est-à-dire d'arriver à creuser l'écart, à avoir une activité forte, à faire chuter le chômage sans pour autant que se développent, comme se sont développées aux Etats-Unis dans cette même période, des inégalités fortes.
Pour autant, il reste des risques. Je ne voudrais pas vous donner le sentiment d'une vision naïve ou béate des choses. Le principal risque est de savoir comment l'économie américaine va effectivement évoluer. Chacun s'accorde à penser qu'elle va ralentir, encore que cela fait des années que l'on dit cela et que l'on ne la voit pas ralentir. Il est probable que l'économie américaine sera moins active l'année prochaine mais on ne sait pas exactement de combien. Selon que cet atterrissage comme l'on dit- sera plus au moins violent, alors au bout du compte les conséquences immédiates par les importations, par le biais des marchés financiers, peuvent être relativement lourdes.
Ce que nous avons provisionné pour ne pas prendre de risques dans nos prévisions, c'est que la croissance américaine serait divisée par deux. Certains trouveront que c'est trop pessimiste, que cela ira mieux que cela aux Etats-Unis. Tant mieux. Si c'est le cas, cela justifiera le haut de notre fourchette de croissance vers 2,9 Ou 3. Mais on ne peut pas exclure que ce chiffre, cette croissance américaine divisée par deux, soit la réalité voire même pire que cela. C'est le principal aléa devant lequel nous sommes pour la croissance de l'an 2000. Il faut donc être prudent sur la prévision. C'est la raison pour laquelle, je ne dis pas qu'obligatoirement nous serons dans le haut de la fourchette de croissance que nous prévoyons.
Ce qui est clair, c'est que d'une part la situation internationale devrait nous être moins nocive qu'elle ne l'a été en 1999. D'autre part, que le maintien à un niveau élevé de la demande intérieure continue à nous protéger. Une sorte de cercle vertueux de l'économie française s'est mis en place. Lorsque le Gouvernement est arrivé, il a su recréer par un certain nombre de mesures la confiance des ménages. Cela vient de la hausse de revenus rapide qui a été organisée, cela vient du transfert de CSG, cela vient d'un ensemble d'éléments. A cette confiance a répondu de la part des ménages, la consommation qui ne s'est pas démentie depuis. Cette consommation a été à l'origine d'un taux de croissance plus fort que par le passé. Ce taux de croissance a des conséquences immédiates en termes de création d'emploi et la création d'emploi vient réalimenter la confiance des ménages.
Ces quatre C, en boucle (confiance, consommation, croissance, création d'emploi) sont donc bel et bien un cercle vertueux dont on peut par malheur sortir -par accident, si l'on n'y veille pas- mais dans lequel nous sommes engagés et qui n'a, de mon point de vue, aucune raison de se démentir dans l'année. voire les deux ou trois années qui viennent.
La conséquence de cela, vous la connaissez tous. Je ne vais quand même pas me gâcher mon plaisir de vous la rappeler même si vous la connaissez. Ce sont des performances relatives par rapport à nos voisins que je suis sûr, certains de ces voisins que j'aime bien par ailleurs, nous envient parce qu'ils le disent et parce que vos confrères de la presse internationale le disent et que, sans doute, des Gouvernements qui nous ont précédés, qui le disent moins, nous envient aussi. Si je retire les opposants mécaniques comme il y en a quelques uns, et c'est normal, dans l'opposition pour lesquels si le Gouvernement dit blanc, il faut dire noir et si le Gouvernement dit noir, il faut dire blanc, si je retire ceux-là, même dans l'opposition en France aujourd'hui on s'accorde à considérer... Sauf à être un libéral extrême pour lequel toute action de politique économique ne sert à rien et dans ce cas pourquoi ne pas renoncer à faire de la politique et aller faire autre chose si l'on croit vraiment que l'action du Gouvernement est sans aucune efficacité jamais ?
Sauf à croire cela, la plupart des experts et aussi des responsables politiques reconnaît que l'action du Gouvernement a conduit à ce cycle vertueux et à des résultats qui montent et baissent avec nos voisins -nous sommes soumis comme les autres à la conjoncture internationale- mais qui, quand on se compare à nos grands voisins, permettent de mettre en relief des caractéristiques propres à l'économie française et à la politique économique qui a été suivie.
Contrairement à la période précédente, ce que l'on constate c'est que jusqu'à aujourd'hui et de la même manière en prévision, la performance de l'économie française se décale par rapport à la moyenne de la zone euro et par rapport surtout à nos grands voisins, Allemagne et Italie. Je n'ai pas fait porter sur ce Graphique le Royaume Uni parce qu'il n'est pas dans la zone euro mais vous connaissez la performance qui est grosso modo au même niveau que la performance allemande ou italienne.
Je ne m'en réjouis pas plus que cela car, comme une grande partie de notre croissance repose sur celle de nos voisins, je préférerais qu'ils croissent plus vite, ce qui est en train de se produire, pour que nous en bénéficions aussi. Force est de constater que depuis 1997, le décalage est favorable à la France, ce qui n'avait pas été le cas de toute la décennie 90 où, au contraire, on était en arrière.
Si bien que ce cercle vertueux continuant de produire ses effets, la consommation restera solide l'an prochain. L'investissement est enfin au rendez-vous et le retard d'investissement français suffisamment grand pour que l'on puisse penser qu'il va mettre du temps à être comblé. Le faux d'investissement va continuer à être important pendant plusieurs années. Je suis assez optimiste de ce point de vue quand je vois que finalement, et contrairement même à mes propres craintes, le ralentissement du début de l'année n'a pas entraîné chez les chefs d'entreprise un freinage excessif de leur décision d'investissement qui, au contraire, sont bel et bien au rendez-vous.
Néanmoins, la situation de l'économie française aujourd'hui m'inspire deux remarques, dont je voudrais vous faire part rapidement avant de passer aux aspects directement budgétaires.
D'abord, une remarque instantanée, statique. Nous en sommes aujourd'hui. C'est que malgré tout l'économie française est encore convalescente. On peut se réjouir de ses bons résultats, de ce que la politique conduite permette d'aller mieux que nos voisins, espérer que ceux-ci nous rattraperont. Il reste que tout cela est encore fragile. Quand on a 2 millions 800.000 chômeurs dans un pays, il est hors de question de se glorifier des résultats obtenus.
Par ailleurs, les années de croissance ralentie que nous avons connues depuis presque 10 ans ont conduit la précarité à s'installer de façon beaucoup plus forte dans le marché du travail. Si bien que la souffrance sociale reste une réalité extrêmement forte. Je veux mettre cela en parallèle avec l'optimisme que l'on peut avoir par ailleurs au regard des chiffres et des résultats sur ces deux ans.
Le deuxième aspect, toujours statique et instantané, est que la diffusion des technologies nouvelles reste encore beaucoup trop lente. Nous avons accéléré sensiblement, les professionnels le reconnaissent. L'ensemble du monde technologies de l'information voit dans la France une évolution très rapide depuis deux ans. Mais enfin, en pourcentage, nous avons encore quels que soient les critères pris... Vous savez que j'ai mi en place un tableau de bord avec les 19 indicateurs technologies de l'information. Que l'on mesure cela aux nombres d'internautes dans la population, que l'on mesure cela à ce que l'on veut, nous avons encore un retard considérable.
On peut regarder les choses du bon côté et se dire, ce que je vais faire devant vous, que le rattrapage de ce retard puisque nous avons du retard, nous offre des possibilités de croissance très forte dans les années qui viennent. On dit souvent que la moitié des emplois créés aux Etats-Unis le sont dans ce Secteur. En France, j'évalue cela à 15 ou 20 %. On a donc une marge pour rejoindre la situation américaine. Si nous savons mettre à profit cette marge dans les années qui viennent, nous avons une des composantes d'une croissance soutenue pendant plusieurs années.
Troisième élément quand même de prudence et de modération du jugement toujours d'un point de vue statique, c'est que 1 redressement des Finances publiques est encore très inachevé. J'ai entendu certains pourtant à des niveaux si élevés que leur qualification ne peut être contestée, parler d'excédents et dire aux Français qu'il y avait là des excédents. D'ailleurs, on accusait le Ministère des Finances de les cacher.
Je crois qu'il y a une sorte d'humour noir à parler d'excédents dans un pays où il y a encore 200 milliards de déficits. Loin d'avoir des excédents, nous sommes dans un pays dans lequel les finances publiques sont très loin d'être redressées. J'espère qu'après quelques années de croissance, après avoir inversé la spirale de la dette, nous arriverons à rentrer dans une période dans laquelle nous aurons effectivement des excédents comme les ont les Etats-Unis aujourd'hui. Mais nous ne sommes pas un pays à excédents budgétaires mais avec des déficits publics. Il ne faut donc pas jouer avec les sommes susceptibles d'êtres affectées à la résorption de ces équilibres.
Du point de vue statique donc, des inquiétudes.
Mais du point de vue dynamique, une amélioration de notre situation qui fait que la perspective du plein emploi est quelque chose de réaliste. Je sais bien que beaucoup en France, responsables politiques, syndicaux, chefs d'entreprise sont saisis par une sorte de fatalisme ambiant qui fait que l'on ne pourrait rien faire contre le chômage. Je suis évidemment convaincu du contraire et j'ai plusieurs éléments qui me redonnent du baume au coeur lorsque par extraordinaire je viendrais à douter.
Le premier est de regarder le nombre de création d'emploi sans évoquer les emplois-jeunes. Je parle des emplois marchands, dans les entreprises. En ne comptabilisant que ces emplois créés par les entreprises depuis juin 1997, on atteint un million d'emplois. Un million d'emplois entre juin 1997 et la fin de l'année 2000, c'est-à-dire la période d'exécution de ce budget, auront été créés dans notre pays, ce qui là aussi est même supérieur à ce que l'on a pu connaître dans les fameuses années 60 où, rappelez-vous, on expliquait que l'économie était dans une situation florissante.
Quand on compare cette situation à celle de nos voisins, on retrouve le décalage de tout à l'heure : les créations d'emploi en France traduisant une pente -réalisé pour le bleu plus soutenu et en prévision pour le bleu plus clair- sensiblement plus forte que celle que l'on retrouve dans les comptes de mes collègues allemands ou italiens.
Donc, grand dynamisme de la création d'emploi. Créations d'emploi qui sont l'ordre de 220.000 en 1999, qui dépasseront 300 000 je l'espère en 2000 et qui sont deux fois plus que ce que l'on a créé chaque année dans les années 60, cinq Fois plus que ce que l'on a créé chaque année dans les années 80. Ce rythme, Qu'il faut arriver à tenir. redonne de l'espoir sur les perspectives du plein emploi.
Le deuxième élément est qu'il faut regarder nos voisins. Ils vont moins bien que nous depuis 1997 mais ils sont dans une meilleure situation que nous pour beaucoup d'entre eux. Pour le taux de chômage, nous sommes dans la queue de peloton. Si l'on divise -ce qui est assez réaliste- les 15 pays de l'Union en trois paquets, trois tiers à peu près égaux, on a les pays où le taux de chômage est encore supérieur à 10 %. dont nous, le wagon de queue, quatre ou cinq pays dans lesquels le taux de chômage est entre 5 et 10 % et cinq pays qui ont un taux de chômage inférieur à 5 %. Si certains y sont arrivés. Puisque certains sont arrivés à être en dessous de 5 %, ce qui grosso modo est un chômage frictionnel correspondant au plein emploi, parce que certains y sont arrivés, nous n'avons aucune raison de ne pas pouvoir y arriver nous aussi.
Le troisième, une autre manière de prendre ces informations est de voir à quel rythme baisse notre chômage. Je le dis avec réserve, nous avons un taux de chômage plus fort que celui des autres. Ne soyons pas fiérots. Mais quand on regarde le rythme auquel il baisse, on constate qu'au contraire il baisse plus vite en France qu'ailleurs. Il a baissé de 1,4 point au sens du BIT depuis juin 1997 en France, de 0,4 en Italie et de 0,8 en Allemagne. Nous sommes en retard, c'est clair.
Mais nous avons un rythme d'évolution sensiblement plus rapide que les autres, création d'emploi, baisse du chômage, tout cela évidemment mesure à peu près la même chose et donc l'idée que nous pouvons, dans une durée qui n'est pas de deux ans ou trois ans -le premier Ministre a fixé un horizon plus lointain- atteindre ce que d'autres ont réussi à faire, c'est-à-dire un taux de chômage en dessous de 5 %, n'a aucune raison d'être une idée que nous ne prenons pas en considération et qui me semble aujourd'hui réaliste.
Dans ce contexte, le budget doit soutenir cet objectif et faire suite aux deux budgets que Christian SAUTTER et moi vous avons déjà présentés. Ce que je veux illustrer devant vous, c'est la partie fiscale. Christian développera la partie des dépenses.
La deuxième mesure est due à une proposition de Jean-Claude GAYSSOT. Elle consiste à supprimer le droit au bail que paient les locataires. Sur chaque quittance de loyer, le droit au bail représente 2,5 %/'o pour les locataires. Au ler janvier prochain. ce droit au bail disparaît pour 80 % des locataires, ceux dont les loyers sont au plus égal à 2 500 F par mois -30 000 F par an- et l'année suivante pour tout le reste des locataires.
Ceux dont les loyers sont inférieurs à 2 500 F par mois représentent 80 % de la population, 94 % des locataires de HLM. Le reste, 20 % de la population, ne verra son droit au bail supprimé que l'année suivante, simplement pour des raisons de répartition du coût sur deux années budgétaires.
Enfin, troisième mesure, c'est celle qui touche à la baisse des droits de mutation. L'année dernière, le rapport des droits au bail pour l'Etat était de 7 milliards. La première année la poire est grosso modo coupée en deux par les premiers 80 % de la population. La deuxième année, en 2001, on tombera à zéro.
La troisième mesure est celle qui touche aux droits de mutation qu'on appelle communément les frais de notaires. Nous avions l'année dernière fait passer ces frais de notaires à 6 % par une première diminution de 20 %. Cette année est mise en oeuvre une deuxième diminution de 20 % pour nous amener à 4,8 %, ce qui se situe honorablement quand on compare aux droits analogues dans les pays qui nous entourent.
Le mouvement est maintenant achevé. Tous les professionnels sont du même avis et considèrent que la mesure de l'année dernière a considérablement aidé au déblocage du marché de l'immobilier. Je ne doute pas que le parachèvement de cette mesure cette année servira également. C'est d'ailleurs une mesure qui touche beaucoup à la mobilité du travail. Pour que l'on puisse être mobile et prendre un emploi à l'autre bout de la France si on vous le propose, encore faut-il qu'il n'y ait pas de charges excessives au fait d'avoir éventuellement à revendre un bien immobilier. Au-delà d'une baisse d'impôt, c'est une mesure qui favorise la mobilité et donc l'emploi.
Enfin, dans un domaine qui est complètement différent, mais qui ne touche pas le logement, pour favoriser, toujours vers l'emploi, les ressources des entreprises, nous poursuivrons une mesure qui a été initiée l'année dernière, qui concerne le régime d'exonération des dividendes, qui sera durci, comme il l'a été l'année dernière, de façon à réorienter les flux d'investissement des placements financiers vers l'investissement réel. Je vous disais tout à l'heure, en vous parlant de l'investissement, que les effets de ce genre de mesures se faisaient sentir.
Il y a un certain nombre de mesures sur l'innovation et la création.
D'abord, la suppression de tous les impôts d'Etat qui pénalisaient jusqu'à maintenant la création d'entreprises, et notamment le droit de 1500 francs lors de création d'une entreprise. De la même manière, la baisse des droits de mutation sur les fonds de commerce, qui sont ramenés de 11 à 4,8 % notamment pour faciliter les transmissions d'entreprises. Enfin, la suppression de l'imposition annuelle forfaitaire, que 180.000 petites entreprises payaient, même si elles ne faisaient pas de bénéfices, qui était de 5000 francs, qui disparaît intégralement.
Ces trois mesures, surtout la première sur la création d'entreprises -vous en verrez les détails-, constituent un paquet de soutien à l'activité des toutes petites entreprises en création ou déjà existantes, qui est loin d'être négligeable,
Enfin. la dernière étape est celle d'une croissance plus soutenable par une fiscalité plus écologique. Nous avons fait une première étape dans ce sens l'année dernière. Il y a cette année deux nouvelles étapes : celle qui consiste à poursuivre le mouvement engagé dans le rattrapage du prix du gaz oïl par rapport au super sans plomb. Le prix du gaz oïl sera augmenté de 7 centimes comme l'année dernière et, chose que vous n'avez peut-être pas encore écrite dans vos colonnes, pour la deuxième année consécutive, le prix du super sans plomb ne verra pas les taxes changer.
Cela nous met dans une situation sensiblement différente de celle de beaucoup d'autres pays. Les taxes sur l'essence sans plomb, depuis juillet 1998, ont pas mal varié en centimes français dans les différents pays qui nous entourent ; la France est toute à droite, c'est-à-dire zéro, à un moment où il nous semble que l'augmentation du prix de la matière première (le pétrole lui-même) pèse déjà sur les budgets des ménages. Si on regarde en France, dans le temps, on voit. que l'évolution a été variée, heurtée, mais que c'est la première fois, en effet, que nous avons deux années consécutives -l'année dernière, c'était la première fois qu'il y avait une année, donc a fortiori deux années consécutives- dans lesquelles la fiscalité sur l'essence ne bouge pas,
Quels enseignements tirer de tout cela ? Quels enseignements tirer de ce troisième budget en perspective avec les deux précédents ?
Je me rappelle vous avoir dit, l'année dernière -j'ai vérifié-, que la méthode du gouvernement se voulait progressive pour ne céder ni à la tentation de l'immobilisme ni au grand soir fiscal. Il s'agit ni de ne rien faire ni de prétendre, comme on le dit beaucoup quand on fait des débats publics, mais comme on ne le fait pas ensuite quand on est au pouvoir, que l'on va tout changer en un tour de main. Au contraire, notre méthode était en cinq ans, une législature, de parcourir l'ensemble des impôts et d'apporter les améliorations qui nous semblaient nécessaires au vu de la justice et de l'emploi à cet ensemble d'impôts.
En 1997 et 1998, quel a été le choix ?
Augmenter les impôts sur les entreprises pour passer le cap de l'euro et équilibrer la fiscalité entre les revenus du travail et les revenus du capital. Cela a notamment été fait au travers de la CSG.
En 1999, quel a été le choix ? La réforme de la taxe professionnelle, l'effet emploi attendu de la suppression progressive de la part salaires.
En 2000, c'est la fiscalité indirecte qui est à l'honneur (TVA sur le logement, droits de mutation, droits de bail, et quelques autres éléments que je vous ai indiqués).
Comme l'a annoncé le Premier Ministre, pour l'année prochaine ce sont les impôts directs qui seront traités pour l'ensemble des Français, et non pas, comme cela a pu être le cas sous une majorité précédente, uniquement pour la fraction qui paye l'impôt sur le revenu, en traitant tous les impôts directs, c'est-à-dire l'impôt sur le revenu, certes, mais aussi la taxe d'habitation, de façon à couvrir l'ensemble de la distribution des revenus.
Quand j'entends quelques critiques qui me reviennent sur le thème " Mais cela n'a pas de structure, de vertèbres, on ne sait pas où l'on va ", je suis surpris, au-delà de ce qu'il faut bien critiquer. En réalité, je crois qu'en cinq ans -ce n'est pas encore fait-, quand la législature sera achevée, l'ensemble de la réforme fiscale qui aura été accomplie n'aura pas d'équivalent dans aucune législature que j'ai pu examiner depuis une vingtaine d'années. Nous aurons, dans le domaine du rééquilibrage impôts sur le revenu travail ou sur le revenu du capital, dans le domaine de la fiscalité indirecte, dans le domaine de la fiscalité de l'emploi et dans le domaine de la fiscalité directe à venir pour l'année prochaine, fait un ensemble de réformes, je crois honnêtement sans comparaison.
Quel est pour le moment le résultat de ces réformes ? Vous me direz " La réforme de l'impôt direct, taxe d'habitation et impôt sur le revenu, c'est l'année prochaine ". Où en est-on aujourd'hui ?
Il n'est pas inutile, pour finir, de faire un rapide bilan en le regardant du côté des entreprises et du côté des ménages.
Du côté des entreprises, ce qui a été fait depuis deux ans et demi est fondamentalement favorable au travail. Je vais vous le montrer maintenant.
Quelle est la méthode pour le faire ? J'ai vu fleurir, comme vous sans doute, des chiffres très farfelus. Monsieur DEVEDJAN disait, il y a trois ou quatre semaines, 167 milliards d'augmentation. Puis, M. SARKOZY disait, la semaine suivante, 80 milliards. Il avait divisé par deux. Monsieur COPEE disait. la semaine suivante, 35 milliards. Il avait encore divisé par deux. Ils peuvent continuer à ce rythme. Je vais leur faciliter la tâche en leur donnant les bons chiffres, de façon qu'ils n'aient pas besoin de poursuivre l'exercice.
La réalité est la suivante : il faut comparer, pour être rigoureux, les mesures qui ont été prises à différents moments depuis 1997 et leur impact en 2000, tenir compte de ce qui monte et de ce qui baisse, ne pas tenir compte des rentrées d'impôts en plus ou en moins qui viennent de la conjoncture et qui n'ont pas de rapport avec des décisions de politique fiscale.
Si on fait cela, on constate d'abord pour les entreprises que l'effet total net est grosso modo nul, - 1,7 milliard d'imposition pour l'ensemble des entreprises, effet en 2000 des mesures à la hausse, à la baisse, prises depuis 1997. Cet effet nul provient de deux mouvements pratiquement équivalents dans les deux sens : des mesures qui ont plus imposé les entreprises qu'elles ne l'étaient avant. Si ces mesures n'avaient pas été prises en 1997, les entreprises ne paieraient pas ces 22,5 milliards. Elles ont été prises. Elles payent donc 22,5 milliards en 2000 de plus. Ce sont des mesures sur le durcissement du régime MERFI, les plus-values financières, l'avoir fiscal ; c'est un ensemble de mesures qui touchent la distribution du profit et du capital. A la hausse aussi, 3,5 milliards de mesures difficilement classables, comme touchant directement le profit, des mesures sans beaucoup de signification mais qui ont quand même rapporté 3,5 milliards.
A la baisse, 27,6 milliards de mesures qui bénéficient à l'emploi : la baisse de la taxe professionnelle, le crédit impôts emploi, la réduction des cotisations liée à la RTT.
L'effet an 2000 est à peu près équilibré pour les entreprises, sauf qu'il y a un formidable déplacement, de l'ordre d'une trentaine de milliards, en plus des impôts qui touchent à la partie financière de l'activité des entreprises, en moins des impôts qui touchent à la partie emploi de l'activité des entreprises.
De la même manière, s'agissant des ménages, cette fois-ci, lorsque l'on regarde l'impact redistributif de ce qui a été fait pour les entreprises, ce que l'on regarde c'est l'effet sur l'emploi. Pour les ménages, on regarde l'effet redistributif. On constate que 90 % de la population, à l'exclusion des 10 % qui touchent les revenus les plus élevés, verra ses impôts en 2000 baisser de 28 milliards par rapport à ce qu'ils auraient été si aucune des mesures n'avaient été prises.
A l'inverse, le premier décile, le décile des 10 % de la population qui a les plus hauts revenus, voit sa pression fiscale augmenter de 3,8 milliards.
D'où cela vient-il ? Là aussi de mouvements dans les deux sens. Il y a le solde des deux pour l'ensemble des ménages (- 28 + 4, c'est - 24). L'ensemble des ménages a bénéficié d'une situation qui fait - 24. Cela vient de mesures de nature différente, qui sont indiquées en haut. Les mesures en vert sont des mesures de taxation du patrimoine et du capital, notamment la CSG sur l'épargne, le durcissement de l'ISF ; à l'inverse, les mesures vers le bas sont en faveur de l'activité. Ce sont les mesures qui touchent la TVA, qui a été incluse là-dedans., ou les différentes mesures d'allégements qui concernent les ménages, qui sont généralement des mesures sur les impôts indirects.
De la même manière que, pour les entreprises, on voit que l'effet, en 2000, de l'ensemble des mesures prises depuis deux ans et demi est à peu près nul, mais avec un fort effet de restructuration, taxant plus le profit, taxant moins le travail, pour les ménages l'effet n'est pas nul. Il est de - 24, réparti correctement dans la distribution des revenus au bénéfice des 90 % et au détriment des 10 % supérieurs. L'explication de ce mouvement vient de mouvements dans les deux sens : des hausses et des baisses. Il v a eu des hausses et des baisses. Les hausses, ce sont CSG, ISF, notamment ; les baisses, ce sont principalement celles qui concernent la TVA, d'autres droits indirects, etc.
Si bien que le bilan, de ce point de vue, ne me paraît pas contraire, ni aux engagements de la majorité ni à ce que, à chacun des budgets, Christian SAUTTER et moi avions annoncé comme étant notre intention, dont on constate après coup que cela a eu les effets que nous attendions.
Un dernier mot pour finir. Chacun ressent les hausses ou les baisses d'impôts sur sa feuille d'impôts, quand il va faire des travaux et quand il aura moins de TVA, etc. Il y a un concept globalisant pour mesurer tout cela, qui est le taux de prélèvements obligatoires. Il n'y a pas de surprise à ce que, alors que nous attendions la stabilité, nous ayons en 1999 une légère hausse. On l'a vu. il y a deux phénomènes :
- des impôts, comme l'impôt sur les sociétés, qui ont rapporté plus. S'ils ont rapporté plus, cela tend à alimenter le taux de prélèvements obligatoires
- un phénomène qui est un peu compliqué à comprendre pour beaucoup de vos lecteurs, mais que beaucoup d'entre vous ont expliqué de façon très correcte. à savoir que, à partir du moment où la croissance est un peu plus faible que prévu (2,3 au lieu de 2,7), où l'inflation est plus faible que prévu, le dénominateur de la fraction est plus faible. Si le dénominateur est plus faible, le taux a tendance mécaniquement à monter. Cela ne résulte d'une décision de politique économique, mais de l'effet de l'évolution économique sur ce taux.
Il est intéressant de distinguer, dans les différentes évolutions, ce qui vient de l'évolution des prélèvements obligatoires due aux régimes sociaux, de l'évolution des prélèvements obligatoires qui vont à l'Etat et de l'évolution des prélèvements obligatoires qui viennent des collectivités locales. Les régimes sociaux, comme il est normal d'ailleurs, notamment en raison de ce que consomment l'assurance maladie et la retraite, ont un taux d'évolution des prélèvements obligatoires plutôt croissant. Pour l'Etat, en raison des baisses d'impôts mises en oeuvre successivement, surtout cette année, le taux est plutôt à la baisse. Les collectivités locales ont un taux plutôt à la baisse, apparent, qui vient notamment de ce que la baisse de la TP leur est imputée alors qu'elle a été payée par l'Etat. Peu importe, que ce soit l'un ou l'autre ne change pas grand-chose.
Si l'on ramène tout cela à une base 100 pour que ce soit plus visible, on voit quelque chose qui caractérise nos sociétés modernes, à savoir que l'évolution des prélèvements obligatoires est très différente suivant le type de prélèvements obligatoires, à la hausse pour les régimes sociaux, à la baisse pour l'Etat et les collectivités locales.
Pour 2000, la baisse d'impôts qui est mise en oeuvre (39 milliards net), devrait ramener le taux de prélèvements obligatoires à 44,8, ce qui est à peine en dessous (0,1) de ce qu'il était en 1997, absorbant donc par là la bosse que nous allons vivre en 1999 en raison de circonstances économiques très particulières.
Si nous pouvons poursuivre, ce que je pense, cet effort pour la loi de finances pour 2001, dans la ligne de ce que le Premier Ministre a annoncé. c'est-à-dire les impôts directs (impôts sur le revenu et taxe d'habitation), ce taux pourra baisser plus significativement pour 2001. Contentons-nous pour le moment de nous satisfaire de ce qu'il baisse en 2000 et qu'il se retrouve fin 2000, si les choses se passent économiquement comme prévu dans ce budget, à un niveau légèrement inférieur de celui de 1997.
Bien sûr, j'aurai plaisir à répondre à vos questions Sur ce sujet juste après, quand j'aurai laissé Christian SAUTTER nous parler des dépenses.
M. SAUTTER - Rassurez-vous, même si les dépenses dépassent encore les recettes en raison du déficit, mon temps de parole sera beaucoup plus restreint !
Dominique STRAUSS-KAHN l'a expliqué, nous avons préparé un budget dont la dépense est stable en volume. Je voudrais vous montrer brièvement que cette dépense stable n'est pas une dépense immobile.
La dépense est maîtrisée, mais les priorités budgétaires du gouvernement sont clairement affirmées et financées.
Quelles sont les marges de manoeuvre dont on peut disposer dans un budget stable ?
Elles sont de deux types : il y a d'abord l'effet immédiat de la réduction des déficits et de la baisse des taux d'intérêt ; cela correspond, pour l'an prochain, à une somme de l'ordre de 4 milliards de francs. Et puis, il y a un travail patient, obscure mais indispensable d'économies, de remise en cause de dépenses traditionnelles, qui porte dans l'ensemble sur 30 milliards, dont vous avez sur ce graphique une décomposition.
Il y a d'abord, sur le fonctionnement, un échenillage des dépenses, un redéploiement en matière d'emploi car, dans le budget 2000, les effectifs budgétaires civils de l'Etat resteront stables, même si certains ministères, comme la Justice (plus de 1200 emplois), l'Emploi et la Solidarité ou l'Environnement. ont des créations de postes.
Sept milliards de francs d'économie de fonctionnement, 19 sur les interventions économiques et les transferts au profit des entreprises, et 4 sur les interventions sociales.
Je voudrais ajouter un point. Derrière ce travail de recherche d'économies, il y a une oeuvre en profondeur de modernisation de la procédure budgétaire (passation de contrats pluriannuels avec un certain nombre de ministères ou de directions dépensières, globalisation des crédits). Nous allons vers plus de responsabilité, plus de transparence, plus d'évaluation. Je crois que la préparation du budget, de ce point de vue, rejoint parfaitement la volonté de l'Assemblée nationale, impulsée par son Président, de chercher à dépenser mieux, c'est-à-dire d'évaluer en permanence la dépense publique.
Les budgets prioritaires sont les mêmes. Ce sont l'emploi et la solidarité, l'éducation et la recherche, la justice et la sécurité, l'environnement et la culture. Pour ces huit budgets, la somme de ces budgets croit quatre fois plus vite que la moyenne du budget de l'Etat. Il y a donc là un effort important pour financer les priorités. Je vais assez vite sur ces budgets que je passe rapidement en revue.
Le budget de l'emploi et de la solidarité est devenu avec 254 milliards de francs le deuxième budget de l'Etat derrière le budget de l'éducation nationale mais devant les charges d'intérêt qui pesaient très lourd dans le passé et qui continuent à peser lourd. Ce budget progresse de 4,3 %, 10 milliards de francs, avec à l'intérieur de ce budget un effort pour financer des actions nouvelles, y compris par la remise en cause d'actions traditionnelles.
Ces actions nouvelles, je vous les énumère rapidement sans être exhaustif: 100.000 emplois-jeunes supplémentaires pour arriver aux 350.000 fin 2000 sur lesquels le Gouvernement s'était engagé. C'est la poursuite de l'effort pour la réduction du temps de travail milliards de francs en 1999, 7 milliards de Francs en 2000. Ce sont des moyens supplémentaires pour l'agence nationale pour l'emploi, pour qu'elle puisse faire un million d'entretiens personnalisés pour ramener les chômeurs sur le marché du travail. Sur la solidarité, on peut parler de la couverture d'assurance maladie universelle qui va coûter à l'Etat 7 milliards de francs.
Dans cet ensemble emploi et solidarité, je mentionnerai aussi la politique de la ville. C'est un budget modeste, 1,3 milliard de francs, mais il progresse de 26 %. La priorité que vous retrouverez dans les contrats de plan Etat-région est clairement affirmée dans le budget 2000.
Le budget de l'éducation, le premier budget, progresse de 3,3 %. Il atteint donc 361 milliards de francs avec une hausse de 12 milliards de francs sur la période 1999-2000. Il y a des créations d'emploi d'enseignants dans le second degré. 3 300 postes. Il y a une action particulière de soutien aux enfants en difficulté pour bien manifester notre volonté d'égalité des chances. Il y a l'enseignement artistique. Il y a le plan social étudiants avec le renforcement des bourses de l'enseignement supérieur : près de 10 %. Il y a le plan université du troisième millénaire.
Le budget justice progresse de 4 % avec le principal montant de création d'emploi : 1.237 postes budgétaires supplémentaires. On doit remarquer l'effort sur la protection judiciaire de la jeunesse, Sur l'administration pénitentiaire, sur l'entrée des juges professionnels dans les tribunaux de commerce. Je crois qu'il y a là un effort considérable qui trouve son écho dans le budget de la sécurité publique : 54 milliards, en hausse de 3 %. Enorme effort vers la police de proximité : les crédits de fonctionnement de la police progressent de 5 %. Les crédits d'équipement progressent de 38 % notamment pour construire des commissariats dans les zones difficiles. Et il y aura plus de 4.000 adjoints de sécurité supplémentaires qui iront dans ces zones sensibles pour arriver à un total de 20.000.
Je passe sur l'environnement dont le budget progresse de 9 %, sur l'aménagement du territoire, sur la culture qui chemine étape par étape vers 1% du budget de l'Etat en l'an 2000. Je cite en passant l'audiovisuel public dont l'ensemble des moyens publics progressent de 5 %. Je crois que c'est une priorité claire. Et je dirai un mot enfin du budget de la défense où l'effort de recherche d'économies a été manifeste puisque la professionnalisation des armées se poursuit comme prévue, les autorisations de programme vont monter à 87,5 milliards de francs mais les crédits de paiement ont été calculés en tenant compte des reports de l'année précédente et des capacités d'engagement. Cela fait que ce budget de la défense, qui atteindra tous ses objectifs, s'élèvera à 242 milliards de francs et baisse légèrement de 0,7 % par rapport à 1999.
Vu l'heure, je ne veux mentionner, ni en détail ni même pour l'essentiel, les modifications de périmètre du budget de l'Etat. Je dirai simplement une chose. Nous avions l'an dernier, poussés par la Cour des comptes et par le Conseil constitutionnel, réintégré 46 milliards de francs de dépenses dans le budget de l'Etat. L'effort porte cette année sur 10 milliards de francs. Vous en trouverez le détail dans le dossier de presse.
De la même manière, s'agissant des ménages, cette fois-ci, lorsque l'on regarde l'impact redistributif de ce qui a été fait pour les entreprises, ce que l'on regarde c'est l'effet sur l'emploi. Pour les ménages, on regarde l'effet redistributif. On constate que 90 % de la population, à l'exclusion des 10 % qui touchent les revenus les plus élevés, verra ses impôts en 2000 baisser de 28 milliards par rapport à ce qu'ils auraient été si aucune des mesures n'avaient été prises.
A l'inverse, le premier décile, le décile des 10 % de la population qui a les plus hauts revenus, voit sa pression fiscale augmenter de 3,8 milliards.
D'où cela vient-il ? Là aussi de mouvements dans les deux sens. Il y a le solde des deux pour l'ensemble des ménages (- 28 + 4, c'est - 24). L'ensemble des ménages a bénéficié d'une situation qui fait - 24. Cela vient de mesures de nature différente, qui sont indiquées en haut. Les mesures en vert sont des mesures de taxation du patrimoine et du capital, notamment la CSG sur l'épargne, le durcissement de l'ISF ; à l'inverse, les mesures vers le bas sont en faveur de l'activité. Ce sont les mesures qui touchent la TVA, qui a été incluse là-dedans., ou les différentes mesures d'allégements qui concernent les ménages, qui sont généralement des mesures sur les impôts indirects.
De la même manière que, pour les entreprises, on voit que l'effet, en 2000, de l'ensemble des mesures prises depuis deux ans et demi est à peu près nul, mais avec un fort effet de restructuration, taxant plus le profit, taxant moins le travail, pour les ménages l'effet n'est pas nul. Il est de - 24, réparti correctement dans la distribution des revenus au bénéfice des 90 % et au détriment des 10 % supérieurs. L'explication de ce mouvement vient de mouvements dans les deux sens : des hausses et des baisses. Il v a eu des hausses et des baisses. Les hausses, ce sont CSG, ISF, notamment ; les baisses, ce sont principalement celles qui concernent la TVA, d'autres droits indirects, etc.
Si bien que le bilan, de cc point de vue, ne me paraît pas contraire, ni aux engagements de la majorité ni à ce que, à chacun des budgets, Christian SAUTTER et moi avions annoncé comme étant notre intention, dont on constate après coup que cela a eu les effets que nous attendions.
Un dernier mot pour finir. Chacun ressent les hausses ou les baisses d'impôts sur sa feuille d'impôts, quand il va faire des travaux et quand il aura moins de TVA, etc. Il y a un concept globalisant pour mesurer tout cela, qui est le taux de prélèvements obligatoires. Il n'y a pas de surprise à ce que, alors que nous attendions la stabilité, nous ayons en 1999 une légère hausse. On l'a vu. il y a deux phénomènes :
- des impôts, comme l'impôt sur les sociétés, qui ont rapporté plus. S'ils ont rapporté plus, cela tend à alimenter le taux de prélèvements obligatoires
- un phénomène qui est un peu compliqué à comprendre pour beaucoup de vos lecteurs, mais que beaucoup d'entre vous ont expliqué de façon très correcte. à savoir que, à partir du moment où la croissance est un peu plus faible que prévu (2,3 au lieu de 2,7), où l'inflation est plus faible que prévu, le dénominateur de la fraction est plus faible. Si le dénominateur est plus faible, le taux a tendance mécaniquement à monter. Cela ne résulte d'une décision de politique économique, mais de l'effet de l'évolution économique sur ce taux.
Il est intéressant de distinguer, dans les différentes évolutions, ce qui vient de l'évolution des prélèvements obligatoires due aux régimes sociaux, de l'évolution des prélèvements obligatoires qui vont à l'Etat et de l'évolution des prélèvements obligatoires qui viennent des collectivités locales. Les régimes sociaux, comme il est normal d'ailleurs, notamment en raison de ce que consomment l'assurance maladie et la retraite, ont un taux d'évolution des prélèvements obligatoires plutôt croissant. Pour l'Etat, en raison des baisses d'impôts mises en oeuvre successivement, surtout cette année, le taux est plutôt à la baisse. Les collectivités locales ont un taux plutôt à la baisse, apparent, qui vient notamment de ce que la baisse de la TP leur est imputée alors qu'elle a été payée par l'Etat. Peu importe, que ce soit l'un ou l'autre ne change pas grand-chose.
Si l'on ramène tout cela à une base 100 pour que ce soit plus visible, on voit quelque chose qui caractérise nos sociétés modernes, à savoir que l'évolution des prélèvements obligatoires est très différente suivant le type de prélèvements obligatoires, à la hausse pour les régimes sociaux, à la baisse pour l'Etat et les collectivités locales.
Pour 2000, la baisse d'impôts qui est mise en oeuvre (39 milliards net), devrait ramener le taux de prélèvements obligatoires à 44,8, ce qui est à peine en dessous (0,1) de ce qu'il était en 1997, absorbant donc par là la bosse que nous allons vivre en 1999 en raison de circonstances économiques très particulières.
Si nous pouvons poursuivre, ce que je pense, cet effort pour la loi de finances pour 2001, dans la ligne de ce que le Premier Ministre a annoncé. c'est-à-dire les impôts directs (impôts sur le revenu et taxe d'habitation), ce taux pourra baisser plus significativement pour 2001. Contentons-nous pour le moment de nous satisfaire de ce qu'il baisse en 2000 et qu'il se retrouve fin 2000, si les choses se passent économiquement comme prévu dans ce budget, à un niveau légèrement inférieur de celui de 1997.
Bien sûr, j'aurai plaisir à répondre à vos questions Sur ce sujet juste après, quand j'aurai laissé Christian SAUTTER nous parler des dépenses.
M. SAUTTER - Rassurez-vous, même si les dépenses dépassent encore les recettes en raison du déficit, mon temps de parole sera beaucoup plus restreint !
Dominique STRAUSS-KAHN l'a expliqué, nous avons préparé un budget dont la dépense est stable en volume. Je voudrais vous montrer brièvement que cette dépense stable n'est pas une dépense immobile.
La dépense est maîtrisée, mais les priorités budgétaires du gouvernement sont clairement affirmées et financées.
Quelles sont les marges de manoeuvre dont on peut disposer dans un budget stable ?
Elles sont de deux types : il y a d'abord l'effet immédiat de la réduction des déficits et de la baisse des taux d'intérêt ; cela correspond, pour l'an prochain, à une somme de l'ordre de 4 milliards de francs. Et puis, il y a un travail patient, obscure mais indispensable d'économies, de remise en cause de dépenses traditionnelles, qui porte dans l'ensemble sur 30 milliards, dont vous avez sur ce graphique une décomposition.
Il y a d'abord, sur le fonctionnement, un échenillage des dépenses, un redéploiement en matière d'emploi car, dans le budget 2000, les effectifs budgétaires civils de l'Etat resteront stables, même si certains ministères, comme la Justice (plus de 1200 emplois), l'Emploi et la Solidarité ou l'Environnement. ont des créations de postes.
Sept milliards de francs d'économie de fonctionnement, 19 sur les interventions économiques et les transferts au profit des entreprises, et 4 sur les interventions sociales.
Je voudrais ajouter un point. Derrière ce travail de recherche d'économies, il y a une oeuvre en profondeur de modernisation de la procédure budgétaire (passation de contrats pluriannuels avec un certain nombre de ministères ou de directions dépensières, globalisation des crédits). Nous allons vers plus de responsabilité, plus de transparence, plus d'évaluation. Je crois que la préparation du budget, de ce point de vue, rejoint parfaitement la volonté de l'Assemblée nationale, impulsée par son Président, de chercher à dépenser mieux, c'est-à-dire d'évaluer en permanence la dépense publique.
Les budgets prioritaires sont les mêmes. Ce sont l'emploi et la solidarité, l'éducation et la recherche, la justice et la sécurité, l'environnement et la culture. Pour ces huit budgets, la somme de ces budgets croit quatre fois plus vite que la moyenne du budget de l'Etat. Il y a donc là un effort important pour financer les priorités. Je vais assez vite sur ces budgets que je passe rapidement en revue.
Le budget de l'emploi et de la solidarité est devenu avec 254 milliards de francs le deuxième budget de l'Etat derrière le budget de l'éducation nationale mais devant les charges d'intérêt qui pesaient très lourd dans le passé et qui continuent à peser lourd. Ce budget progresse de 4,3 %, 10 milliards de francs, avec à l'intérieur de ce budget un effort pour financer des actions nouvelles, y compris par la remise en cause d'actions traditionnelles.
Ces actions nouvelles, je vous les énumère rapidement sans être exhaustif: 100.000 emplois-jeunes supplémentaires pour arriver aux 350.000 fin 2000 sur lesquels le Gouvernement s'était engagé. C'est la poursuite de l'effort pour la réduction du temps de travail milliards de francs en 1999, 7 milliards de Francs en 2000. Ce sont des moyens supplémentaires pour l'agence nationale pour l'emploi, pour qu'elle puisse faire un million d'entretiens personnalisés pour ramener les chômeurs sur le marché du travail. Sur la solidarité, on peut parler de la couverture d'assurance maladie universelle qui va coûter à l'Etat 7 milliards de francs.
Dans cet ensemble emploi et solidarité, je mentionnerai aussi la politique de la ville. C'est un budget modeste, 1,3 milliard de francs, mais il progresse de 26 %. La priorité que vous retrouverez dans les contrats de plan Etat-région est clairement affirmée dans le budget 2000.
Le budget de l'éducation, le premier budget, progresse de 3,3 %. Il atteint donc 361 milliards de francs avec une hausse de 12 milliards de francs sur la période 1999-2000. Il y a des créations d'emploi d'enseignants dans le second degré. 3 300 postes. Il y a une action particulière de soutien aux enfants en difficulté pour bien manifester notre volonté d'égalité des chances. Il y a l'enseignement artistique. Il y a le plan social étudiants avec le renforcement des bourses de l'enseignement supérieur : près de 10 %. Il y a le plan université du troisième millénaire.
Le budget justice progresse de 4 % avec le principal montant de création d'emploi : 1.237 postes budgétaires supplémentaires. On doit remarquer l'effort sur la protection judiciaire de la jeunesse, Sur l'administration pénitentiaire, sur l'entrée des juges professionnels dans les tribunaux de commerce. Je crois qu'il y a là un effort considérable qui trouve son écho dans le budget de la sécurité publique : 54 milliards, en hausse de 3 %. Enorme effort vers la police de proximité : les crédits de fonctionnement de la police progressent de 5 %. Les crédits d'équipement progressent de 38 % notamment pour construire des commissariats dans les zones difficiles. Et il y aura plus de 4.000 adjoints de sécurité supplémentaires qui iront dans ces zones sensibles pour arriver à un total de 20.000.
Je passe sur l'environnement dont le budget progresse de 9 %, sur l'aménagement du territoire, sur la culture qui chemine étape par étape vers 1% du budget de l'Etat en l'an 2000. Je cite en passant l'audiovisuel public dont l'ensemble des moyens publics progressent de 5 %. Je crois que c'est une priorité claire. Et je dirai un mot enfin du budget de la défense où l'effort de recherche d'économies a été manifeste puisque la professionnalisation des armées se poursuit comme prévue, les autorisations de programme vont monter à 87,5 milliards de francs mais les crédits de paiement ont été calculés en tenant compte des reports de l'année précédente et des capacités d'engagement. Cela fait que ce budget de la défense, qui atteindra tous ses objectifs, s'élèvera à 242 milliards de francs et baisse légèrement de 0,7 % par rapport à 1999.
Vu l'heure, je ne veux mentionner, ni en détail ni même pour l'essentiel, les modifications de périmètre du budget de l'Etat. Je dirai simplement une chose. Nous avions l'an dernier, poussés par la Cour des comptes et par le Conseil constitutionnel, réintégré 46 milliards de francs de dépenses dans le budget de l'Etat. L'effort porte cette année sur 10 milliards de francs. Vous en trouverez le détail dans le dossier de presse.
Je voudrais en conclusion, comme Dominique STRAUSS-KAHN l'a fait pour la fiscalité et pour les déficits, mettre l'effort que nous menons en perspective dans l'espace et dans le temps.
Vous voyez qu'en ce qui concerne la diminution de la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut, la France est dans un peloton de tête avec la Belgique, l'Espagne et l'Italie, avec une diminution de la part des dépenses publiques de l'ordre de 1,8 %. C'est nettement au-dessus de la moyenne de la zone euro, nettement au-dessus de l'Allemagne, des Pays-Bas qui sont souvent cités comme des exemples. Dernière référence ayant d'en terminer, c'est une comparaison dans le temps qui me semble-t-il permet de relativiser un certain nombre de propos. Vous voyez qu'entre 1993 et 1996, chaque année les dépenses de l'Etat en volume, c'est-à-dire après inflation, ont cru en moyenne de 1,6 ou 1,7 % alors que sur la période 1997-2000 cette croissance a été de l'ordre de 0,3 %. La comparaison parle d'elle-même.
C'est sur cette comparaison qui montre que nous allons dans la direction de la maîtrise des dépenses publiques que j'arrêterai cet exposé introductif.
Je voudrais en conclusion, comme Dominique STRAUSS-KAHN l'a fait pour la fiscalité et pour les déficits, mettre l'effort que nous menons en perspective dans l'espace et dans le temps.
Vous voyez qu'en ce qui concerne la diminution de la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut, la France est dans un peloton de tête avec la Belgique, l'Espagne et l'Italie, avec une diminution de la part des dépenses publiques de l'ordre de 1,8 %. C'est nettement au-dessus de la moyenne de la zone euro, nettement au-dessus de l'Allemagne, des Pays-Bas qui sont souvent cités comme des exemples. Dernière référence ayant d'en terminer, c'est une comparaison dans le temps qui me semble-t-il permet de relativiser un certain nombre de propos. Vous voyez qu'entre 1993 et 1996, chaque année les dépenses de l'Etat en volume, c'est-à-dire après inflation, ont cru en moyenne de 1,6 ou 1,7 % alors que sur la période 1997-2000 cette croissance a été de l'ordre de 0,3 %. La comparaison parle d'elle-même.
C'est sur cette comparaison qui montre que nous allons dans la direction de la maîtrise des dépenses publiques que j'arrêterai cet exposé introductif.
Un intervenant. - Sur le solde primaire et la baisse des charges d'intérêt, il a été fait mention de 4 milliards tout à l'heure. Qu'est-ce que cela représente en valeur absolue ? Pourriez-vous nous donner une fourchette pour le solde primaire en 2000 ?
M. STRAUSS-KAHN. - Pour ce qui est des charges d'intérêt en valeur absolue, cela représente justement 4 milliards. C'est la première fois. Ce que l'on avait les années précédentes, c'était un ralentissement de la progression des charges d'intérêt en raison des taux d'intérêt plus faibles et aussi du plafonnement, du fait que la dette commençait à plafonner. Là, on a pour la première fois une vraie baisse, pas simplement un ralentissement de la progression, une vraie baisse des charges d'intérêt dans le budget pour un montant de 4 milliards.
L'intervenant. - A quel niveau total ?
M.. SAUTTER. - On passe, Pour les charges d'intérêt au sens strict, de 237 milliards de francs l'an dernier à 235. Cela fait deux. Les deux autres deux, l'Etat verse des bonifications d'intérêt, par exemple pour l'accession au logement. Deux plus deux font quatre. Les charges d'intérêt au sens strict baissent donc de deux milliards. C'est une première.
M.. STRAUSS-KAHN. - Quant aux soldes primaires, nous avons vécu malheureusement beaucoup d'années avec un solde primaire négatif, c'est-à-dire avec un déficit primaire, c'est-à-dire avant charges d'intérêt. L'année dernière, nous avons, pour la première fois depuis je ne sais combien d'années, réussi à équilibrer. Cette année, il y a une vingtaine de milliards d'excédents primaires. C'est vingt pile. Ce qui est un changement très structurel de notre budget.
Une intervenante. - Le million d'emplois créés dont vous avez fait état est à 80 % sous forme précaire. Etes-vous en faveur de la taxation des emplois précaires ?
M.. STRAUSS-KAHN. - Je ne sais pas d'où vous avez votre information sur le fait qu'il y a 80 % sous forme précaire. Il y a une part de ces créations d'emploi qui découle soit d'emplois à temps partiel, ce qui n'est pas obligatoirement du travail précaire, soit d'emplois précaires. Ce que les statistiques nous donnent, c'est que plus la croissance est forte, plus la part des emplois stables et durables augmente, c'est-à-dire que plus nous serons capables d'avoir un nombre d'années de croissance importante, successives, les unes derrière les autres, moins dans la croissance, la part des emplois créés qui est précaire sera importante. Aujourd'hui, nous n'en sommes pas encore là. Ce n'est pas 80 % mais nous avons beaucoup d'emplois précaires.
Non, je ne suis pas favorable, le Gouvernement n'est pas favorable à une taxation. En revanche, le premier Ministre s'est exprimé là-dessus il y a deux jours, il faut que nous mettions en oeuvre les éléments qui permettent de faire en sorte que, partout où c'est possible et au rythme le plus rapide possible, les emplois créés par la croissance soient des emplois aussi durables qu'il est concevable.
Mais il n'y a qu'une seule manière de faire en sorte que les emplois soient durables. C'est que l'activité des entreprises dans lesquels ils se trouvent, se développe. Et cela veut dire que la croissance continue à se développer. La boucle est vite atteinte. L'emploi ne recommence à démarrer que s'il y a de la croissance., c'est vrai en partie sous forme précaire. La sortie de cette précarité repose sur la durabilité, la longueur de cette croissance. Comme nous n'avons pour le moment que trois ans avec l'an 2000 de croissance assez forte (3,2 3,3 en 1998, 2,3 en 1999, 2,8 peut-être plus je ne sais en 2000), nous n'aurons que trois ans. Dans le million en question, vous avez raison, il restera beaucoup de précaire. Mais cela diminuera à mesure que la croissance se poursuivra.
Une intervenante. - Dans les 290.000 emplois de votre scénario pour 2000, quelle est la part des emplois 35 heures, créés grâce aux 35 heures dans votre scénario ?
M. SAUTTER. - On a prévu, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, une somme de l'ordre de 7 milliards de francs pour la part Etat. On escompte peut-être 60 à 80.000 emplois qui viendront s'ajouter au mouvement spontané de la croissance et aussi à l'amplification des emplois-jeunes qui arriveront si je puis dire à leur zénith à la fin de l'an 2000.
Un intervenant. - A propos de la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien, allez-vous supprimer la réduction d'impôt pour les gros travaux et le crédit d'impôt pour les travaux d'entretien qui existent actuellement ?
M. STRAUSS-KAHN. - Il y avait deux mesures : une mesure concernant les gros travaux qui est une réduction d'impôt et nous avions créé, il y a deux ans, un crédit d'impôt parce que l'on n'était pas en état de faire de la baisse de TVA car nous n'avions pas l'autorisation bruxelloise. Il était tel que, quand il a été créé, vous pouviez déduire 15 % -c'est-à-dire l'écart entre 20,6 et 5,5- de votre impôt. Et quand vous n'étiez pas imposable à l'impôt sur le revenu, vous pouviez aller chercher un chèque de l'Etat pour vous le rembourser. Le moins que l'on puisse dire est que la complexité de la méthode fait qu'elle n'a pas été très utilisée. Cela n'a rien à voir avec l'effet qu'aura la baisse de la TVA.
L'année dernière, ces 15 %, sous la pression de la majorité, sont devenus 20 %. On déduisait l'ensemble de la TVA, non pas l'écart entre le taux normal et le taux réduit, mais l'ensemble.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Evidemment la part entre 26 et 5,5 que couvrait le crédit d'impôt, disparaît. Vous ne pouvez pas à la fois ne pas le payer parce que la TVA a baissé et quand même vous le faire rembourser par l'Etat. Il y a des limites à la façon dont on peut abandonner des ressources. En revanche, la part qui avait été créée l'année dernière entre 5,5 et 0 demeure.
Autrement dit, hier vous faisiez faire 100 francs de travaux ; vous payiez 120,6 et vous pouviez aller vous faire rembourser -peu le faisait- 20 francs, les 20,6 qui étaient au-dessus de 100. Aujourd'hui, effectivement à partir d'aujourd'hui, vous ne paierez plus que 105,5 et les 5,5 vous pouvez continuer à vous les faire rembourser. Par ailleurs, la réduction d'impôts gros travaux demeure comme elle était.
Tous les produits du bâtiment sont donc couverts soit par la baisse de TVA -c'est la plus grosse partie- soit pour ce qui excède parce que ce sont des travaux trop gros qui ne rentrent pas dans la liste large des travaux d'entretien, etc. Vous pouvez alors avoir l'avantage au titre de la mesure gros travaux.
Merci d'avoir posé cette question. J'avais oublié de le mentionner tout à l'heure. Contrairement à ce qui a été écrit de ci de là, il n'y a pas reprise d'une main ce qui est lâché de l'autre puisque la seule chose qui disparaît, c'est que l'on peut difficilement concevoir que vous vous fassiez rembourser quand vous payez 105,5 les 15 francs de TVA que vous n'avez pas payée et que vous auriez payée si vous aviez payé 120,6.
M. SAUTTER. - J'ajoute un complément. Il va subsister un crédit d'impôt grosses réparations pour les matériels qui restent à 20,6, c'est-à-dire les ascenseurs et les chaudières collectifs. Et c'est un crédit d'impôt, c'est-à-dire que dans le système, pour les orfèvres, de la réduction d'impôt pour grosses réparations, il fallait payer des impôts pour avoir une réduction d'impôt. Maintenant, si on installe un ascenseur, il y aura un crédit d'impôt même pour ceux qui ne paient pas d'impôt.
Le dispositif est donc complet et encore plus complet si je puis dire que celui qui existait actuellement.
Une intervenante. - Sur ce même sujet, il y a beaucoup de confusion pour les gens qui ont démarré les travaux le 14, hier.
M. STRAUSS-KAHN. - Peu importe.
L'intervenante. - Que se passe-t-il jusqu'à la Fin de l'année ? Les deux systèmes coexistent-ils ?
M. STRAUSS-KAHN. - C'est la date de la facture. On chance de monde aujourd'hui, si j'ose dire. Les factures datées d'hier sont dans l'ancien système. les factures datées de demain sont dans le nouveau système. quelle qu'ait été la date des travaux.
EM2
Une Intervenante.- En ce qui concerne le droit de bail, est-ce que la suppression annoncée sur deux ans laisse subsister la taxe additionnelle et est-ce que le dégrèvement qui était possible pour les bailleurs sur l'imposition de cette année -la simplification de cette année- continue d'exister ?
M. STRAUSS-KAHN.- Je vais répondre à la première partie de la question. La suppression du droit de bail est pour les locataires. La taxe additionnelle au droit de bail que paient les propriétaires continue d'exister. Il faudra peut-être lui changer de nom parce que c'est difficile d'être une taxe additionnelle à un droit de bail qui n'existe plus. Mais à part cela, ce que payaient les propriétaires demeurent, cc sont les 2,5 % que payaient les locataires qui disparaissent.
Un Intervenante.- Qu'objectez-vous quand on vous dit que la taxe additionnelle n'est due qu'à partir du moment où le droit de bail s'applique ?
M. STRAUSS-KAHN.- Evidemment, la législation doit être adaptée, mais l'intention du Gouvernement n'est pas de renoncer à la perception sur les propriétaires. Maintenant, sur l'interférence avec la mesure de simplification de l'année dernière, je pense que je vais me défausser et passer cela à Christian.
M. SAUTTER.- A partir du moment où nous changeons le système, nous allons rembourser les fameux neuf mois en question aux propriétaires, c'est-à-dire que les locataires, à partir du 1er janvier de l'an 2000, à condition qu'ils paient moins de 30.000 F de loyer, ne paieront plus 2,5 % de droit de bail.
Dans les HLM dont vous savez que les loyers sont stabilisés, cela veut dire que la quittance de loyer va baisser de 2,5 %. En ce qui concerne les propriétaires, ils devront sur leur feuille d'impôts du 15 septembre 2000 en principe la contribution additionnelle sur l'ensemble de l'année 1999, c'est-à-dire quatre trimestres, mais comme on va leur rembourser trois trimestres, en fait ils ne paieront plus qu'un trimestre.
Je pense que c'est une façon heureuse de sortir d'une disposition qui était apparue à la réflexion un peu complexe, aussi bien aux propriétaires qu'aux parlementaires et même qu'aux ministres.
Une Intervenante.- Excusez-moi d'insister. Est-ce à dire que l'obligation d'avoir son logement libre pendant neuf mois tombe ?
M. SAUTTER.- A partir du moment où on change de système, effectivement on va rembourser ces fameux neuf mois sur le droit de bail. Les choses sont relativement claires, en tout cas beaucoup plus claires qu'elles ne l'étaient jusqu'à présent.
M. STRAUSS-KAHN.- Nous rentrons bien dans la situation heureuse que vous pressentiez !
Un intervenant. - Sur le solde primaire et la baisse des charges d'intérêt, il a été fait mention de 4 milliards tout à l'heure. Qu'est-ce que cela représente en valeur absolue ? Pourriez-vous nous donner une fourchette pour le solde primaire en 2000 ?
M. STRAUSS-KAHN. - Pour ce qui est des charges d'intérêt en valeur absolue, cela représente justement 4 milliards. C'est la première fois. Ce que l'on avait les années précédentes, c'était un ralentissement de la progression des charges d'intérêt en raison des taux d'intérêt plus faibles et aussi du plafonnement, du fait que la dette commençait à plafonner. Là, on a pour la première fois une vraie baisse, pas simplement un ralentissement de la progression, une vraie baisse des charges d'intérêt dans le budget pour un montant de 4 milliards.
L'intervenant. - A quel niveau total ?
M.. SAUTTER. - On passe, Pour les charges d'intérêt au sens strict, de 237 milliards de francs l'an dernier à 235. Cela fait deux. Les deux autres deux, l'Etat verse des bonifications d'intérêt, par exemple pour l'accession au logement. Deux plus deux font quatre. Les charges d'intérêt au sens strict baissent donc de deux milliards. C'est une première.
M.. STRAUSS-KAHN. - Quant aux soldes primaires, nous avons vécu malheureusement beaucoup d'années avec un solde primaire négatif, c'est-à-dire avec un déficit primaire, c'est-à-dire avant charges d'intérêt. L'année dernière, nous avons, pour la première fois depuis je ne sais combien d'années, réussi à équilibrer. Cette année, il y a une vingtaine de milliards d'excédents primaires. C'est vingt pile. Ce qui est un changement très structurel de notre budget.
Une intervenante. - Le million d'emplois créés dont vous avez fait état est à 80 % sous forme précaire. Etes-vous en faveur de la taxation des emplois précaires ?
M.. STRAUSS-KAHN. - Je ne sais pas d'où vous avez votre information sur le fait qu'il y a 80 % sous forme précaire. Il y a une part de ces créations d'emploi qui découle soit d'emplois à temps partiel, ce qui n'est pas obligatoirement du travail précaire, soit d'emplois précaires. Ce que les statistiques nous donnent, c'est que plus la croissance est forte, plus la part des emplois stables et durables augmente, c'est-à-dire que plus nous serons capables d'avoir un nombre d'années de croissance importante, successives, les unes derrière les autres, moins dans la croissance, la part des emplois créés qui est précaire sera importante. Aujourd'hui, nous n'en sommes pas encore là. Ce n'est pas 80 % mais nous avons beaucoup d'emplois précaires.
Non, je ne suis pas favorable, le Gouvernement n'est pas favorable à une taxation. En revanche, le premier Ministre s'est exprimé là-dessus il y a deux jours, il faut que nous mettions en oeuvre les éléments qui permettent de faire en sorte que, partout où c'est possible et au rythme le plus rapide possible, les emplois créés par la croissance soient des emplois aussi durables qu'il est concevable.
Mais il n'y a qu'une seule manière de faire en sorte que les emplois soient durables. C'est que l'activité des entreprises dans lesquels ils se trouvent, se développe. Et cela veut dire que la croissance continue à se développer. La boucle est vite atteinte. L'emploi ne recommence à démarrer que s'il y a de la croissance., c'est vrai en partie sous forme précaire. La sortie de cette précarité repose sur la durabilité, la longueur de cette croissance. Comme nous n'avons pour le moment que trois ans avec l'an 2000 de croissance assez forte (3,2 3,3 en 1998, 2,3 en 1999, 2,8 peut-être plus je ne sais en 2000), nous n'aurons que trois ans. Dans le million en question, vous avez raison, il restera beaucoup de précaire. Mais cela diminuera à mesure que la croissance se poursuivra.
Une intervenante. - Dans les 290.000 emplois de votre scénario pour 2000, quelle est la part des emplois 35 heures, créés grâce aux 35 heures dans votre scénario ?
M. SAUTTER. - On a prévu, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, une somme de l'ordre de 7 milliards de francs pour la part Etat. On escompte peut-être 60 à 80.000 emplois qui viendront s'ajouter au mouvement spontané de la croissance et aussi à l'amplification des emplois-jeunes qui arriveront si je puis dire à leur zénith à la fin de l'an 2000.
Un intervenant. - A propos de la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien, allez-vous supprimer la réduction d'impôt pour les gros travaux et le crédit d'impôt pour les travaux d'entretien qui existent actuellement ?
M. STRAUSS-KAHN. - Il y avait deux mesures : une mesure concernant les gros travaux qui est une réduction d'impôt et nous avions créé, il y a deux ans, un crédit d'impôt parce que l'on n'était pas en état de faire de la baisse de TVA car nous n'avions pas l'autorisation bruxelloise. Il était tel que, quand il a été créé, vous pouviez déduire 15 % -c'est-à-dire l'écart entre 20,6 et 5,5- de votre impôt. Et quand vous n'étiez pas imposable à l'impôt sur le revenu, vous pouviez aller chercher un chèque de l'Etat pour vous le rembourser. Le moins que l'on puisse dire est que la complexité de la méthode fait qu'elle n'a pas été très utilisée. Cela n'a rien à voir avec l'effet qu'aura la baisse de la TVA.
L'année dernière, ces 15 %, sous la pression de la majorité, sont devenus 20 %. On déduisait l'ensemble de la TVA, non pas l'écart entre le taux normal et le taux réduit, mais l'ensemble.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Evidemment la part entre 26 et 5,5 que couvrait le crédit d'impôt, disparaît. Vous ne pouvez pas à la fois ne pas le payer parce que la TVA a baissé et quand même vous le faire rembourser par l'Etat. Il y a des limites à la façon dont on peut abandonner des ressources. En revanche, la part qui avait été créée l'année dernière entre 5,5 et 0 demeure.
Autrement dit, hier vous faisiez faire 100 francs de travaux ; vous payiez 120,6 et vous pouviez aller vous faire rembourser -peu le faisait- 20 francs, les 20,6 qui étaient au-dessus de 100. Aujourd'hui, effectivement à partir d'aujourd'hui, vous ne paierez plus que 105,5 et les 5,5 vous pouvez continuer à vous les faire rembourser. Par ailleurs, la réduction d'impôts gros travaux demeure comme elle était.
Tous les produits du bâtiment sont donc couverts soit par la baisse de TVA -c'est la plus grosse partie- soit pour ce qui excède parce que ce sont des travaux trop gros qui ne rentrent pas dans la liste large des travaux d'entretien, etc. Vous pouvez alors avoir l'avantage au titre de la mesure gros travaux.
Merci d'avoir posé cette question. J'avais oublié de le mentionner tout à l'heure. Contrairement à ce qui a été écrit de ci de là, il n'y a pas reprise d'une main ce qui est lâché de l'autre puisque la seule chose qui disparaît, c'est que l'on peut difficilement concevoir que vous vous fassiez rembourser quand vous payez 105,5 les 15 francs de TVA que vous n'avez pas payée et que vous auriez payée si vous aviez payé 120,6.
M. SAUTTER. - J'ajoute un complément. Il va subsister un crédit d'impôt grosses réparations pour les matériels qui restent à 20,6, c'est-à-dire les ascenseurs et les chaudières collectifs. Et c'est un crédit d'impôt, c'est-à-dire que dans le système, pour les orfèvres, de la réduction d'impôt pour grosses réparations, il fallait payer des impôts pour avoir une réduction d'impôt. Maintenant, si on installe un ascenseur, il y aura un crédit d'impôt même pour ceux qui ne paient pas d'impôt.
Le dispositif est donc complet et encore plus complet si je puis dire que celui qui existait actuellement.
Une intervenante. - Sur ce même sujet, il y a beaucoup de confusion pour les gens qui ont démarré les travaux le 14, hier.
M. STRAUSS-KAHN. - Peu importe.
L'intervenante. - Que se passe-t-il jusqu'à la Fin de l'année ? Les deux systèmes coexistent-ils ?
M. STRAUSS-KAHN. - C'est la date de la facture. On chance de monde aujourd'hui, si j'ose dire. Les factures datées d'hier sont dans l'ancien système. les factures datées de demain sont dans le nouveau système. quelle qu'ait été la date des travaux.
EM2
Une Intervenante.- En ce qui concerne le droit de bail, est-ce que la suppression annoncée sur deux ans laisse subsister la taxe additionnelle et est-ce que le dégrèvement qui était possible pour les bailleurs sur l'imposition de cette année -la simplification de cette année- continue d'exister ?
M. STRAUSS-KAHN.- Je vais répondre à la première partie de la question. La suppression du droit de bail est pour les locataires. La taxe additionnelle au droit de bail que paient les propriétaires continue d'exister. Il faudra peut-être lui changer de nom parce que c'est difficile d'être une taxe additionnelle à un droit de bail qui n'existe plus. Mais à part cela, ce que payaient les propriétaires demeurent, cc sont les 2,5 % que payaient les locataires qui disparaissent.
Un Intervenante.- Qu'objectez-vous quand on vous dit que la taxe additionnelle n'est due qu'à partir du moment où le droit de bail s'applique ?
M. STRAUSS-KAHN.- Evidemment, la législation doit être adaptée, mais l'intention du Gouvernement n'est pas de renoncer à la perception sur les propriétaires. Maintenant, sur l'interférence avec la mesure de simplification de l'année dernière, je pense que je vais me défausser et passer cela à Christian.
M. SAUTTER.- A partir du moment où nous changeons le système, nous allons rembourser les fameux neuf mois en question aux propriétaires, c'est-à-dire que les locataires, à partir du 1er janvier de l'an 2000, à condition qu'ils paient moins de 30.000 F de loyer, ne paieront plus 2,5 % de droit de bail.
Dans les HLM dont vous savez que les loyers sont stabilisés, cela veut dire que la quittance de loyer va baisser de 2,5 %. En ce qui concerne les propriétaires, ils devront sur leur feuille d'impôts du 15 septembre 2000 en principe la contribution additionnelle sur l'ensemble de l'année 1999, c'est-à-dire quatre trimestres, mais comme on va leur rembourser trois trimestres, en fait ils ne paieront plus qu'un trimestre.
Je pense que c'est une façon heureuse de sortir d'une disposition qui était apparue à la réflexion un peu complexe, aussi bien aux propriétaires qu'aux parlementaires et même qu'aux ministres.
Une Intervenante.- Excusez-moi d'insister. Est-ce à dire que l'obligation d'avoir son logement libre pendant neuf mois tombe ?
M. SAUTTER.- A partir du moment où on change de système, effectivement on va rembourser ces fameux neuf mois sur le droit de bail. Les choses sont relativement claires, en tout cas beaucoup plus claires qu'elles ne l'étaient jusqu'à présent.
M. STRAUSS-KAHN.- Nous rentrons bien dans la situation heureuse que vous pressentiez !
Un Intervenant.- Excusez-moi de revenir sur les problèmes de robinet. Si j'ai bien compris, il y a d'une part la réduction d'impôts sur les gros travaux qui demeure pour tout ce qui est travaux à 20,6 % et d'autre part le crédit d'impôts qui est ramené de 20 à 5 %. C'est-à-dire, sauf erreur de ma part, que la masse de déduction globale reste la même, elle change simplement de nom.
Pour prendre les crédits d'impôts, par exemple cette année, jusqu'au 14 septembre on avait 20 % de crédits d'impôts possible, maintenant on a 15 %... 12,5 % en fait de baisse de TVA, plus 5 % en résiduel en crédits d'impôts. On arrive donc semble-t-il au même montant.
M. STRAUSS-KAHN.- Non, dans le système actuel, les l30 milliards de chiffre d'affaires ... Oublions une seconde les gros travaux pour lesquels rien ne change par rapport à avant... Cela chance un peu quand même parce que comme le disait Christian, avant c'était une réduction d'impôts donc on ne bénéficiait que si on payait de l'impôt sur le revenu, maintenant c'est un crédit d'impôts et on en bénéficie.
Pour le reste, le chiffre d'affaires du secteur fait en gros 130 milliards et donc les 20,6 % de TVA représentent grosso modo 26 milliards. La réduction que nous proposons fait 19 milliards. Ces 19 milliards vont effectivement disparaître car personne ne va s'amuser à payer plus de TVA qu'il n'a droit.
Dans l'ancien système, si tous ceux qui font des travaux étaient venus demander, cela aurait été pareil, sauf que ce n'était pas le cas et qu'au total il n'y a eu que 2,5 milliards de remboursement. En théorie vous avez raison, et si le système antérieur avait totalement marché, on n'aurait pas eu besoin de baisser la TVA, vous la payiez à 20,6 et vous demandiez le remboursement. Mais comme il n'y a pas une personne sur dix qui le faisait, en réalité cela n'aura pas du tout le même effet.
Un Intervenant.- D'accord, ce sont donc les négligeants et les oublieux qui vont en bénéficier.
Deuxième chose, on a vu il y a quelques années, quand Juppé avait augmenté la TVA de 2 points, qu'en fait, du fait de la concurrence et d'autres facteurs, cela n'avait pas été répercuté intégralement. Pensez-vous que la baisse de la TVA va être répercutée intégralement -c'est difficile à dire avec précision à l'avance- ? Vous vous attendez à peu près à quelle part de répercussion ?
M. STRAUSS-KAHN.- C'est difficile à dire mais c'est un vrai sujet. C'est cette réflexion qui conduit, si on veut faire de la baisse de TVA, à ne pas privilégier des baisses du taux de 20,6 car pour la même masse, par exemple 20 milliards, baisser le taux de 20,6 conduit à le baisser à 20. Là, pour le coup, on est sûr qu'il n'y a pratiquement pas de répercussion. Ce sont les intermédiaires qui le gardent.
Evidemment, quand on passe de 20,6 à 5,5, les clients qui le savent vont demander d'avoir la baisse, mais on ne peut pas être sûr que l'intégralité sera répercutée, c'est-à-dire que certains artisans n'en profiteront pas pour augmenter les prix hors taxes. Là, il n'y a pas d'argument, c'est simplement la concurrence qui fait que cela jouera ou que cela ne jouera pas. Globalement, les expériences étrangères montrent -et l'expérience française, lors de la disparition du taux majoré pour les automobiles- qu'assez rapidement quand même la quasi totalité du coût est répercuté, mais on ne peut pas le mesurer à l'avance.
Un Intervenant.- Concernant la baisse de la TVA, vous avez dit que cela se traduirait par un manque à gagner pour le budget de l'Etat d'une petite vingtaine de milliards de francs en année pleine. Est-ce que vous incluez dans ce chiffre les rentrées fiscales qui découleront du fait que du travail qui était au noir sera blanchi ?
M. STRAUSS-KAHN.- Non, on ne l'inclut pas parce qu'on est incapable de le mesurer. Tous les travaux d'universitaires et de spécialistes qui ont été faits sur le travail au noir semblent indiquer que la seule vraie mesure efficace pour lutter contre le travail au noir c'est ce genre de mesure. Mais combien cela fait à l'arrivée ? Honnêtement on n'en sait rien.
Donc il n'est pas impossible que l'on constate après coup qu'en effet, pour un chiffre d'affaires.... Il y a deux causes, il y a ce que vous dites et aussi le fait que comme c'est moins cher, le volume des travaux peut augmenter. Donc ces deux effets peuvent conduire à ce qu'au total l'Etat s'y retrouve en partie et cela permettra de faire d'autres baisses d'impôts l'année suivante.
Nous calculons cela selon les règles habituelles de l'Etat, c'est-à-dire de façon précautionneuse, sans tenir compte d'un éventuel effet volume. Mais vous avez raison de dire cela. L'année dernière, la baisse des droits de mutation qui a été mise en place, donc la première tranche sur les frais de notaires, a donné lieu à une très grande croissance des transactions qui étaient bloquées depuis des années et qui se sont débloquées. Donc finalement, le coût est moins important parce que le taux a baissé, mais il y a eu plus de transactions.
Cet effet volume dure on ne sait pas combien de temps, et de toute façon on ne sait pas le comptabiliser à l'avance. Mais il est exact qu'il est probable qu'une mesure de ce genre, parce qu'elle relance l'activité -travail au noir d'une part et effet volume d'autre part parce que plus de gens voudront faire des travaux- peut permettre de dégager des ressources nouvelles l'année prochaine pour d'autres choses. Mais ce n'est pas comptabilisé.
Un Intervenant.- Deuxième question très précise à propos des droits de mutation : est-ce que vous nous confirmez que la baisse des droits de mutation intervient au 15 septembre ?
M. STRAUSS-KAHN.- Absolument. La baisse de la TVA, comme la baisse des droits de mutation, intervient aujourd'hui.
Un Intervenant.- Je connais cela un peu, je suis à La vie ouvrière impôts, mais sur la TVA réduction d'impôts et crédits d'impôts, je commence à m'y perdre complètement.
Jusqu'ici cela concerne uniquement l'habitation principale qui existe actuellement. Dans les réductions d'impôts, on a des gros travaux, améliorations, revêtements. Dans les crédits d'impôts, on a dépenses d'entretien courants qui bénéficiaient uniquement pour les crédits d'impôts locataires-propriétaires, autres uniquement propriétaires habitation principale, copropriétés et autres.
Aujourd'hui, on me dit que les gros travaux ne rentrent pas par rapport à la baisse de la TVA. Au passage, je ne comprends pas très bien. Mais c'est un point de vue personnel. Si on fait faire une chaudière collective, il y a 100 personnes qui font une chaudière collective, 100 personnes qui font des chauffe-bains individuels et je ne vois pas pourquoi d'un côté on bénéficie et pas de l'autre.
Sur les dépenses de gros travaux, il y a les gros travaux mais aussi l'amélioration et la limite entre améliorations et dépenses d'entretien, on ne sait pas très bien où sont les limites et c'est une source de contentieux. Là on a une liste qui passe dans le bulletin officiel des impôts ou la DB qui est extrêmement complexe. Les entrepreneurs qui font leurs déclarations sont des professionnels et non des spécialistes en droit, c'est la confusion totale.
Quand ils tombent sur une personne comme moi, je leur dis : il faut me marquer cela". Je reprends la DB et je leur dis "il faut me recopier cela surtout, parce que je vais rentrer dans le cadre". C'est la boîte à Canigou !
M. SAUTTER.- Nous n'allons pas entrer dans un débat technique alors que vous êtes à l'évidence un orfèvre. Sur cette baisse de la TVA, nous avons fait un double effort de clarté, et même un triple effort de clarté.
Premièrement, on a inclus à 5,5 % pratiquement tout et il a fallu batailler à Bruxelles -Dominique Strauss-Kahn l'a fait pour ce point.
Deuxièmement, vous trouverez dans le dossier de presse un document particulier où une bonne partie des réponses à vos questions figurent, c'est-à-dire que nous avons fait un fascicule particulier pour les professionnels, pour vous journalistes, pour les particuliers, sur la baisse de la TVA sur les travaux dans le logement.
Troisièmement, et c'est vraiment exceptionnel, ce matin au Bulletin officiel des impôts, nous avons publié une instruction fiscale qui détaille dans les termes techniques très remarquables que vous avez employés tout ceci pour les professionnels.
C'est la première fois que l'instruction fiscale sort en même temps que la disposition fiscale et je dirais même avant que ceci ait été voté par le Parlement. Donc je crois qu'on a fait un effort de clarté. Nous en avons beaucoup discuté tout l'été avec les professionnels, ceci a été fait avec les professionnels et avec les services compétents, direction de la législation fiscale notamment, avec le secrétaire d'Etat au logement.
Cela aurait pu être très compliqué, comme vous le craignez, je pense que cela va être simple et vous pourrez vous en rendre compte dans les documents qui ont été préparés à cet effet.
Une Intervenante. - Je voudrais aborder un autre sujet : les dépenses de solidarité. Avez-vous prévu d'autres mesures que la CMU en faveur des populations précarisées ?
M. SAUTTER. - Je peux vous répondre sur ce point. Vous avez peut-être remarqué que, durant le mois d'août, nous avons sorti un document budgétaire un peu technique, qui s'appelle un décret d'avance, qui comprend 3 milliards de francs de dépenses supplémentaires pour 1999. On s'interroge pour 1999 de façon à financer les accroissements des minima sociaux qui ont été décidés durant l'hiver précédent, trop tard pour que cela soit inscrit dans la loi de finances. Evidemment, dans le budget de la 1 solidarité dont je vous ai parlé, il y a ce qu'il faut pour faire progresser les minima sociaux de façon tout à fait conforme à la volonté du Gouvernement.
Je pense qu'en regardant un peu en détail, Madame, le budget de la solidarité, que Mme AUBRY présentera, vous verrez qu'il y a une réponse positive à votre question.
Un Intervenant. - Pour la baisse de la TVA sur les travaux à domicile, comment cela s'imbrique-t-il avec les crédits d'impôts sur les emplois familiaux ? Cela se cumule-t-il ?
M. SAUTTER. - Oui.
Juste un mot sur la TVA sur les emplois à domicile. Actuellement, dans notre pays, il y a deux systèmes de services à domicile. Le principal, c'est celui qui est assuré par des associations, qui sont très nombreuses, qui font un formidable travail pour aider les personnes âgées, garder les enfants notamment. Ces associations sont exonérées de TVA. Elles ne sont absolument pas concernées. Elles n'ont pas à s'inquiéter de la disposition qui est prise.
Dans notre pays, à la différence de ce qui existe en Europe du Nord par exemple, peu d'entreprises assurent des services à domicile. La mesure qui est prise a pour but, à côté du secteur associatif qui va continuer de se développer, de renforcer l'intervention des entreprises avec un taux de TVA, mais les autres systèmes fiscaux restent.
Un Intervenant. - L'année dernière, pour revenir au retour à l'universalité des allocations familiales, vous avez passé pour une demi part pour enfant à charge le quotient de 16 380 à 11 000 francs. Cela a eu des répercussions sur les pensions alimentaires pour enfants majeurs de 30 000 à 20 000 francs. Aujourd'hui, des gens doivent solder leur solde avant minuit. Ils ont eu leur alimentation d'impôt. Les gens qui sont à 24 % sont autour de 100.000. Cela leur a fait 2400 francs en plus d'impôt. Ce ne sont pas des riches. Ils ne touchent pas d'allocations familiales. Ils sont seuls. Ils ont une augmentation d'impôt de 2400 francs. Pensez-vous remonter le plafond des pensions alimentaires pour les enfants majeurs, notamment pour les gens défavorisés ?
M. SAUTTER. - Vous posez une question de citoyen. Le débat reviendra peut-être devant l'Assemblée. Nous avons effectivement diminué parallèlement le quotient familial et ces allocations pour les enfants majeurs parce que, parallèlement, le gouvernement a décidé, en accord avec les associations familiales, de déplafonner les allocations familiales. Il est vrai que, pour un très petit nombre de foyers, le coût peut être substantiel. L'essentiel des familles ont retrouvé leurs allocations familiales et, grosso modo, ne doivent pas subir le préjudice que vous indiquez.
Un Intervenant. - Pour revenir à la conjoncture, plusieurs économistes anticipent un relèvement des taux de la Banque centrale européenne d'ici six mois ou un an. Est-ce un risque pour la croissance française ?
M. STRAUSS-KAHN. - Si les taux d'intérêt se relèvent, c'est toujours un risque pour la croissance. Cela dépend de quelle ampleur. Mais, pour le moment, ceux qui prennent un risque sont ceux qui anticipent une hausse des taux.
Une Intervenante. - Je reviens sur les mesures en faveur de la création d'entreprises, la suppression de tous les impôts d'Etat qui pénalisaient ces créations. Je voudrais savoir si vous avez des prévisions d'impact et de déblocage. Il y a beaucoup de porteurs de projets en France. Avez-vous une idée du déclic, du nombre d'entreprises qui vont être créées et du nombre d'emplois ?
M. STRAUSS-KAHN. - Honnêtement pas. Je pense que cela a un effet fort. Toutes les prévisions que nous pouvons faire dans ce domaine sont sujettes à caution. Les chiffres dont nous disposons se situent autour de 140 000 entreprises concernées. Quel est l'effet démultiplicateur ou de déclic, comme vous dites, d'une mesure de ce genre ? C'est très difficile à estimer à l'avance. C'est une demande répétée dans le secteur de créations d'entreprises. On voit bien qu'il y avait un frein. On lève petit à petit les freins. L'effet dynamique que cela aura est difficile à estimer à l'avance.
Merci beaucoup.
M.STRAUSS-KAHN. - Mesdames, Messieurs, Christian SAUTTER et moi sommes ravis d'avoir l'occasion de vous retrouver pour ce rendez-vous annuel. Il en sort toujours un petit peu dans vos colonnes avant la date de la présentation du budget en Conseil des Ministres, mais cette année tous les records ont été battus à l'occasion d'indiscrétions dont je ne m'explique pas la cause, et qui font que vous avez été capables de pratiquement tout détailler à l'avance, ce qui rend cette cérémonie un peu inutile.
J'ai quand même une information pour vous : ce matin, le Conseil des Ministres a approuvé le projet de loi de Finances. Sorti de là, tout le reste n'est que des choses que vous connaissez, que je vais essayer de remettre dans mon ordre. Vous en ferez ce que bon vous semble.
Je vais vous parler un peu de la conjoncture économique, un peu de la partie fiscale, des équilibres ; Christian SAUTTER, selon un rythme maintenant bien organisé, vous parlera de la partie " dépenses ".
Le point central de toute cette affaire, c'est qu'évidemment le projet de loi de finance traduit pour un Gouvernement, non pas l'intégralité, mais la majeure partie de ses choix de politique économique. Cette année, comme d'ailleurs l'année dernière. les choix sont clairs.
D'abord, le choix de l'emploi ; je crois qu'il apparaît clairement. dans les mesures qui ont été prises et que je détaillerai tout à 1'lietire, en en expliquant le lien avec l'emploi, que toutes les décisions que nous allons soumettre au Parlement sont fondées sur cette analyse, ce qui d'ailleurs prend aujourd'hui un caractère un peu différent de ce qui a pu être le cas au cours des deux projets de loi que Christian SAUTTER et moi avons déjà présentés devant vous.
Lorsque, à l'occasion des mesures d'urgence -vous vous rappelez le MUFF de 1997-, comme pour la loi de finances pour 1998 ou pour celle pour 1999, nous vous disions : " Le coeur de la politique que le gouvernement veut mener, donc le coeur de la logique du budget que l'on vous présente, c'est l'emploi ", vous n'étiez certes pas dubitatifs, parce que vous êtes polis, mais, néanmoins. les preuves restaient à faire. Aujourd'hui, cette priorité est devenue une perspective, parce que les premiers résultats sont au rendez-vous. C'est ce qui permet au Premier Ministre de parler d'une perspective de plein emploi, qui est certes encore loin devant nous., mais que ces deux années permettent d'envisager à une échéance relativement raisonnable. J'aurai l'occasion d'y revenir.
L'autre élément du contexte dans lequel se situe ce projet de loi, c'est la nouvelle donne européenne, c'est-à-dire le fait que, après en avoir beaucoup parlé et l'avoir beaucoup préparé, l'euro est notre monnaie depuis le début de l'année et met fin à toute une décennie de débats, car chacun aujourd'hui a bien conscience, même les opposants les plus farouches à cette monnaie unique, que l'euro a protégé l'économie européenne en général, et l'économie française en particulier, des effets de la crise économique à la fin de l'année dernière et au début de cette année.
C'est donc dans ce double contexte emploi et euro que s'organise notre budget, avec une conviction : c'est que nous sommes en train de retrouver un chemin de croissance qui redonne un sens à l'espoir du progrès. Le progrès ne résulte pas que de la croissance économique, mais chacun sait bien que, dans une société dans laquelle la croissance n'est pas là, le pouvoir d'achat non plus, le chômage se développe, l'espoir, pas simplement pour les jeunes mais pour l'ensemble de la société, est une idée un peu abstraite. Aujourd'hui, nos concitoyens aspirent à un progrès, un progrès solidaire. C'est ce progrès solidaire qui inspire notre action, donc ce budget en particulier.
Le premier point dont je veux vous parler,, c'est la conjoncture que je mettrai sous le titre du temps venu de la nouvelle croissance. Pour 1999, la prévision de croissance que je fais aujourd'hui est de 2,3 %. Vous savez qu'initialement le budget avait été établi sur 2,7, qu'en mars, en raison des événements internationaux, c'était redressé dans une fourchette de 2,2 à 2,5. Aujourd'hui, je dirai 2,3. On ne sait pas ce qu'il en sera d'ici la fin de l'année. Nous sommes sur une pente de croissance de l'ordre de 3 %. Durera-t-elle jusqu'à la Fin de l'année ? Comment se développera-t-elle ? Une moyenne annuelle de 2,3 pour 1999 me paraît réaliste. Pour 2000, nous avons arrêté, Christian SAUTTER et moi, une fourchette comprise entre 2,6 et 3. Le budget est d'ailleurs calé sur le milieu de cette fourchette (2,8). L'existence de la fourchette ne fait que traduire les risques qui continuent de peser sur l'économie mondiale. Notre expérience de l'année dernière d'avoir donné un chiffre précis, sitôt parti sitôt critiqué, nous avons dû passer plusieurs mois à justifier que celui-ci bougerait ou pas en fonction de la conjoncture.
L'accélération de la croissance est évidemment au rendez-vous. Une fourchette qui tangente 3 est tout à fait réaliste. Nous pouvons atteindre ce 3 %. Nous pouvons aussi être un peu en dessous en fonction de différents aléas.
Je veux exposer devant vous pourquoi cette croissance est solidaire, forte et probablement durable. Elle est solidaire de deux manières. Elle l'est au regard des générations actuelles et au regard des générations futures. Solidaire au regard des Générations actuelles parce qu'il faut regarder maintenant, en se retournant, ce qui s'est passé pendant les deux ans qui nous séparent, ou deux ans et demi, de l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement. Là, il y a deux ruptures. Certains d'entre vous se souviennent peut-être de ce que j'avais évoqué en 1997 ; l'idée du double partage en disant que la croissance devait donner lieu à un double partage, un nouveau partage entre travail et capital et, au sein du travail, un nouveau partage entre pouvoir d'achat et emploi. J'avais indiqué que c'était à l'aune de ces deux partages et à leur évolution que l'on pourrait juger la réussite ou non de la politique économique du gouvernement.
Reprenons ces deux partages aujourd'hui.
Sur le premier, partage entre travail et capital, il y a une vraie rupture. Les revenus du travail ont recommencé à croître de façon rapide. Le pouvoir d'achat des salaires a augmenté de près de 4 %, 6 % pour le SMIC. Le résultat de tout cela, c'est un redressement du partage de la valeur ajoutée au profit des salaires, qui 'était pour nous une des conditions absolument indispensables d'un rééquilibrage de la consommation. à partir de là de la croissance, etc. J'y reviendrai.
Le premier graphique, que je veux juste commenter une seconde devant vous, est bien celui, depuis 1996, pour 2000 et probablement pour la suite encore -il s'agit là des salaires nets-, d'un redressement de la part des salaires dans la valeur ajoutée. C'est le premier partage. Nous nous étions engagés à le mettre en oeuvre. Les résultats aujourd'hui sont là.
Dans cette masse globale de salaires augmentés dans la valeur ajoutée, quelle est la part qui va au pouvoir d'achat de ceux qui ont déjà un travail et quelle est la part qui va aux nouveaux emplois ? On pourrait concevoir que cette part se redresse dans la valeur ajoutée, mais que cela aille entièrement aux salariés en place et qu'il n'y ait rien pour les nouveaux emplois. Il est très important que le double partage existe.
Sommes-nous ou pas sur la bonne voie ? En réalité, oui. Le partage est grosso modo de moitié moitié : moitié pour la création d'emplois, moitié pour l'augmentation du pouvoir d'achat.
Au total, comment peut-on analyser les fruits de la croissance de 1997 à 2000 ? C'est relativement simple. Il y en a un gros tiers pour l'emploi, un peu moins d'un tiers pour le pouvoir d'achat des salaires, et environ 30 % pour les capacités d'investissement. A la louche, on pourrait dire trois tiers. Ce n'est pas exactement cela. On pourrait dire trois tiers : un tiers salaires, un tiers emploi, un tiers capacité d'investissement. Ce qui surprend sans doute le plus aujourd'hui, c'est que le tiers sur les capacités d'investissement existe, alors que l'on a longtemps craint que l'investissement n'arrive pas à prendre le relais de la consommation, consommation dont il était clair qu'elle était repartie. Il fallait que le relais par l'investissement se prenne. On voit aujourd'hui que c'est le cas.
Contrairement à une idée extrêmement répandue, le taux d'autofinancement des entreprises en France est sensiblement en-dessous de 100 %, ce qui retrace bien le fait que le choix vers l'investissement réel, et non pas vers les investissements financiers, a pris une réalité que l'on retrouve dans les statistiques.
Sur ce qui est de la solidarité entre les Générations aujourd'hui. la croissance que nous venons de vivre est bel et bien solidaire. Elle s'est partagée entre ceux qui avaient un emploi et ceux qui étaient chômeurs.
Il y a l'autre élément de la solidarité avec les générations futures. Vous vous en souvenez certainement, j'avais dit, en juillet 1997, lors des premières mesures de redressement pour être capable de satisfaire aux contraintes de l'euro, que je nous fixais comme objectif en l'an 2000 de voir le ratio de la dette sur le PIB décroître, ce qui n'était pas arrivé dans notre pays depuis 20 ans. Cela est au rendez-vous. Nous avons un début de décroissance. Il faut qu'il se poursuive bien sûr. Ce sont des sommets assez plats. La décroissance initiale est faible. Le sommet a bien été atteint en 1999. En 2000, le ratio dette sur PIB, quand on prend la même manière de calculer... Vous savez que la nomenclature comptable a un peu changé, ce qui perturbe la manière de calculer ; mais que l'on prenne dans l'ancienne ou dans la nouvelle, dans les deux cas l'année 2000 est en dessous de l'année 1999. Le ratio dette sur PIB redécroît dans notre pays pour la première fois depuis 1980.
C'est bien un élément majeur de solidarité entre les générations, car une augmentation de ce ratio est simplement le fait que la génération actuelle vit de plus en plus au crédit de ses enfants. La diminution du ratio, au contraire, est que nous prenons en charme nous-mêmes nos dépenses et que nous allégeons la charge sur nos enfants.
C'est le second élément de solidarité que retrace la croissance depuis deux ans et demi, à savoir l'obtention de ce ralentissement, puis de ce changement de sens de la courbe qui est sur cet écran.
Evidemment, c'est le résultat de la réduction des déficits, il n'y a pas de secret. C'est le résultat de la réduction des déficits. Pour 1999, le déficit sera de 2,2 % du PIB. Nous avions annoncé 2,3. La situation un peu meilleure en exécution que ce que nous aurions pu espérer me donne à penser que ce sera plutôt 2,2. Pour 2000, le déficit a été fixé à 1,8, ce qui est tout à fait en ligne avec la programmation triennale que nous avons déposée à Bruxelles -vous vous en souvenez peut-être- à la Fin de l'année dernière, qui prévoyait une évolution du déficit qui dépendait de la croissance. En situation de la croissance plutôt forte, on devait aller vers 1,8, 1,7. La croissance est plutôt forte. Elle n'atteint pas 3 %. Je vous ai dit que notre perspective pour l'année prochaine était 2,8. Nous sommes dans cette fourchette à 1,8.
Au passage, je m'arrête une seconde parce qu'il ne manque pas de commentateurs. Il y a des commentateurs qui critiquent dans les deux sens. Il y a la critique de gauche et celle de droite, pour faire vite. La critique de droite est de dire que tout cela ne va pas assez vite, que l'on ne diminue pas le déficit assez vite. Outre que c'est la branche supérieure de la diminution que nous avons programmée -on va donc au maximum de ce que nous avons annoncé il y a un an ; on nous disait déjà que c'était probablement irréaliste ; nous allons au maximum de ce qui avait été annoncé-, je voudrais, pour essayer de convaincre ces détracteurs, vous montrer, dans les différents pays de l'Union, pour nombre d'entre eux, quelle a été l'évolution des déficits publics de 1997 à 2000.
On constate, ce qui n'est pas une idée reçue, et que vous n'avez peut-être pas à esprit, que nous avons 1,7 % de diminution du déficit de 1997 à 2000 en France, que c'est le meilleur résultat -vous voyez les autres s'afficher-, la moyenne de la zone euro étant à 0,8. Certains pays, comme les Pays-Bas, en partant de peu il est vrai, ont plutôt vu leur déficit réaugmenter. On peut toujours faire mieux, c'est sûr. Le problème est de trouver le bon arbitrage entre la diminution du déficit, la diminution des impôts et le soutien de la croissance. J'ai le sentiment, sans vouloir être prétentieux, que le calibrage de la croissance que nous avons trouvé est plutôt bon -j'y reviendrai tout à l'heure-, ce qui justifie une réduction des déficits régulière, sérieuse, pas aussi importante que certains en France le souhaiteraient, notamment les libéraux ; mais je pense qu'ils ont tort car, avec une réduction plus forte du déficit, nous n'aurions pas eu la croissance que nous avons. Quand on la compare à celle de nos voisins, pour le moins, c'est une réduction du déficit qui visiblement n'a pas à rougir de la comparaison internationale.
Cette croissance est plus solidaire. Elle est aussi plus forte, plus durable. C'est ce qui justifie l'idée que, finalement, nous sommes probablement sur une voie assez positive. Pourquoi est-elle plus forte et plus durable ?
D'abord, parce que l'économie mondiale devrait moins peser sur notre croissance en 2000, probablement aussi en 2001, que cela n'a été le cas en 1999. En 1999, il est clair que le choc a été assez rude. Vous l'avez beaucoup décrit. Le ralentissement est très sensible. Juste un chiffre pour l'illustré : nos exportations qui croissaient à 10 % d'une année sur l'autre, fin 1997, ont brutalement chuté.
C'est vrai de ce qui passait vers l'Asie, en particulier vers le Japon . c'est vrai d'autres pays. Vous avez décrit cela durant toute l'année, je n'y reviens pas.
La surprise vient de plutôt de ce que, au bout du compte, nous avons traversé ce trou d'air avec moins d'effets qu'attendus mais avec quand même quelque chose qui a pesé sensiblement sur notre activité. Il a été rude en France. Il a été un peu plus rude encore en Europe et on le voit bien sur la plupart des graphiques trimestriels qui évoquent la situation de la croissance.
J'ai ici très rapidement une illustration de ce phénomène qui montre que nous avons eu l'entrée dans le trou d'air, c'est-à-dire une demande intérieure -en rouge- qui ne se maintenait pas trop mal mais des exportations qui, elles, se sont effondrées et puis une sortie du trou d'air avec des exportations qui ont commencé à ressortir, c'est-à-dire la fin de l'aspect international, mais une demande intérieure qui avait continué à se maintenir au même niveau. Bon an mal an, le trou n'a donc pas été trop long, et la croissance n'a fléchi -vous l'avez noté- que sur le premier semestre 1999.
En 2000, je pense que la croissance mondiale sera plus équilibrée. D'abord, parce que le seul Moteur de la croissance ne devrait plus être les Etats-Unis. La croissance repart partout en Europe. Ensuite, parce que la situation asiatique est à l'évidence moins mauvaise. Il reste des difficultés mais la plupart des économies asiatiques -pas vraiment le Japon encore que cela aille un peu moins mal-, la Corée. la Thaïlande, etc., qui étaient à l'origine de la crise des pays émergeants, ces pays vont plutôt mieux. Nous entrons dans une situation dans laquelle ce meilleur équilibre fait que les risques internationaux sur la croissance sont moins forts.
Dans ces conditions, si la décennie 90 a été largement celle de la prospérité américaine, il n'est pas déraisonnable de penser que la première décennie qui suit l'an 2000 peut être le retour à la croissance et la puissance européennes, une décennie de croissance avec un pari, un défi par rapport à la croissance américaine : c'est d'obtenir aussi une décennie de croissance mais sans les inégalités, c'est-à-dire d'arriver à creuser l'écart, à avoir une activité forte, à faire chuter le chômage sans pour autant que se développent, comme se sont développées aux Etats-Unis dans cette même période, des inégalités fortes.
Pour autant, il reste des risques. Je ne voudrais pas vous donner le sentiment d'une vision naïve ou béate des choses. Le principal risque est de savoir comment l'économie américaine va effectivement évoluer. Chacun s'accorde à penser qu'elle va ralentir, encore que cela fait des années que l'on dit cela et que l'on ne la voit pas ralentir. Il est probable que l'économie américaine sera moins active l'année prochaine mais on ne sait pas exactement de combien. Selon que cet atterrissage comme l'on dit- sera plus au moins violent, alors au bout du compte les conséquences immédiates par les importations, par le biais des marchés financiers, peuvent être relativement lourdes.
Ce que nous avons provisionné pour ne pas prendre de risques dans nos prévisions, c'est que la croissance américaine serait divisée par deux. Certains trouveront que c'est trop pessimiste, que cela ira mieux que cela aux Etats-Unis. Tant mieux. Si c'est le cas, cela justifiera le haut de notre fourchette de croissance vers 2,9 Ou 3. Mais on ne peut pas exclure que ce chiffre, cette croissance américaine divisée par deux, soit la réalité voire même pire que cela. C'est le principal aléa devant lequel nous sommes pour la croissance de l'an 2000. Il faut donc être prudent sur la prévision. C'est la raison pour laquelle, je ne dis pas qu'obligatoirement nous serons dans le haut de la fourchette de croissance que nous prévoyons.
Ce qui est clair, c'est que d'une part la situation internationale devrait nous être moins nocive qu'elle ne l'a été en 1999. D'autre part, que le maintien à un niveau élevé de la demande intérieure continue à nous protéger. Une sorte de cercle vertueux de l'économie française s'est mis en place. Lorsque le Gouvernement est arrivé, il a su recréer par un certain nombre de mesures la confiance des ménages. Cela vient de la hausse de revenus rapide qui a été organisée, cela vient du transfert de CSG, cela vient d'un ensemble d'éléments. A cette confiance a répondu de la part des ménages, la consommation qui ne s'est pas démentie depuis. Cette consommation a été à l'origine d'un taux de croissance plus fort que par le passé. Ce taux de croissance a des conséquences immédiates en termes de création d'emploi et la création d'emploi vient réalimenter la confiance des ménages.
Ces quatre C, en boucle (confiance, consommation, croissance, création d'emploi) sont donc bel et bien un cercle vertueux dont on peut par malheur sortir -par accident, si l'on n'y veille pas- mais dans lequel nous sommes engagés et qui n'a, de mon point de vue, aucune raison de se démentir dans l'année. voire les deux ou trois années qui viennent.
La conséquence de cela, vous la connaissez tous. Je ne vais quand même pas me gâcher mon plaisir de vous la rappeler même si vous la connaissez. Ce sont des performances relatives par rapport à nos voisins que je suis sûr, certains de ces voisins que j'aime bien par ailleurs, nous envient parce qu'ils le disent et parce que vos confrères de la presse internationale le disent et que, sans doute, des Gouvernements qui nous ont précédés, qui le disent moins, nous envient aussi. Si je retire les opposants mécaniques comme il y en a quelques uns, et c'est normal, dans l'opposition pour lesquels si le Gouvernement dit blanc, il faut dire noir et si le Gouvernement dit noir, il faut dire blanc, si je retire ceux-là, même dans l'opposition en France aujourd'hui on s'accorde à considérer... Sauf à être un libéral extrême pour lequel toute action de politique économique ne sert à rien et dans ce cas pourquoi ne pas renoncer à faire de la politique et aller faire autre chose si l'on croit vraiment que l'action du Gouvernement est sans aucune efficacité jamais ?
Sauf à croire cela, la plupart des experts et aussi des responsables politiques reconnaît que l'action du Gouvernement a conduit à ce cycle vertueux et à des résultats qui montent et baissent avec nos voisins -nous sommes soumis comme les autres à la conjoncture internationale- mais qui, quand on se compare à nos grands voisins, permettent de mettre en relief des caractéristiques propres à l'économie française et à la politique économique qui a été suivie.
Contrairement à la période précédente, ce que l'on constate c'est que jusqu'à aujourd'hui et de la même manière en prévision, la performance de l'économie française se décale par rapport à la moyenne de la zone euro et par rapport surtout à nos grands voisins, Allemagne et Italie. Je n'ai pas fait porter sur ce Graphique le Royaume Uni parce qu'il n'est pas dans la zone euro mais vous connaissez la performance qui est grosso modo au même niveau que la performance allemande ou italienne.
Je ne m'en réjouis pas plus que cela car, comme une grande partie de notre croissance repose sur celle de nos voisins, je préférerais qu'ils croissent plus vite, ce qui est en train de se produire, pour que nous en bénéficions aussi. Force est de constater que depuis 1997, le décalage est favorable à la France, ce qui n'avait pas été le cas de toute la décennie 90 où, au contraire, on était en arrière.
Si bien que ce cercle vertueux continuant de produire ses effets, la consommation restera solide l'an prochain. L'investissement est enfin au rendez-vous et le retard d'investissement français suffisamment grand pour que l'on puisse penser qu'il va mettre du temps à être comblé. Le faux d'investissement va continuer à être important pendant plusieurs années. Je suis assez optimiste de ce point de vue quand je vois que finalement, et contrairement même à mes propres craintes, le ralentissement du début de l'année n'a pas entraîné chez les chefs d'entreprise un freinage excessif de leur décision d'investissement qui, au contraire, sont bel et bien au rendez-vous.
Néanmoins, la situation de l'économie française aujourd'hui m'inspire deux remarques, dont je voudrais vous faire part rapidement avant de passer aux aspects directement budgétaires.
D'abord, une remarque instantanée, statique. Nous en sommes aujourd'hui. C'est que malgré tout l'économie française est encore convalescente. On peut se réjouir de ses bons résultats, de ce que la politique conduite permette d'aller mieux que nos voisins, espérer que ceux-ci nous rattraperont. Il reste que tout cela est encore fragile. Quand on a 2 millions 800.000 chômeurs dans un pays, il est hors de question de se glorifier des résultats obtenus.
Par ailleurs, les années de croissance ralentie que nous avons connues depuis presque 10 ans ont conduit la précarité à s'installer de façon beaucoup plus forte dans le marché du travail. Si bien que la souffrance sociale reste une réalité extrêmement forte. Je veux mettre cela en parallèle avec l'optimisme que l'on peut avoir par ailleurs au regard des chiffres et des résultats sur ces deux ans.
Le deuxième aspect, toujours statique et instantané, est que la diffusion des technologies nouvelles reste encore beaucoup trop lente. Nous avons accéléré sensiblement, les professionnels le reconnaissent. L'ensemble du monde technologies de l'information voit dans la France une évolution très rapide depuis deux ans. Mais enfin, en pourcentage, nous avons encore quels que soient les critères pris... Vous savez que j'ai mi en place un tableau de bord avec les 19 indicateurs technologies de l'information. Que l'on mesure cela aux nombres d'internautes dans la population, que l'on mesure cela à ce que l'on veut, nous avons encore un retard considérable.
On peut regarder les choses du bon côté et se dire, ce que je vais faire devant vous, que le rattrapage de ce retard puisque nous avons du retard, nous offre des possibilités de croissance très forte dans les années qui viennent. On dit souvent que la moitié des emplois créés aux Etats-Unis le sont dans ce Secteur. En France, j'évalue cela à 15 ou 20 %. On a donc une marge pour rejoindre la situation américaine. Si nous savons mettre à profit cette marge dans les années qui viennent, nous avons une des composantes d'une croissance soutenue pendant plusieurs années.
Troisième élément quand même de prudence et de modération du jugement toujours d'un point de vue statique, c'est que 1 redressement des Finances publiques est encore très inachevé. J'ai entendu certains pourtant à des niveaux si élevés que leur qualification ne peut être contestée, parler d'excédents et dire aux Français qu'il y avait là des excédents. D'ailleurs, on accusait le Ministère des Finances de les cacher.
Je crois qu'il y a une sorte d'humour noir à parler d'excédents dans un pays où il y a encore 200 milliards de déficits. Loin d'avoir des excédents, nous sommes dans un pays dans lequel les finances publiques sont très loin d'être redressées. J'espère qu'après quelques années de croissance, après avoir inversé la spirale de la dette, nous arriverons à rentrer dans une période dans laquelle nous aurons effectivement des excédents comme les ont les Etats-Unis aujourd'hui. Mais nous ne sommes pas un pays à excédents budgétaires mais avec des déficits publics. Il ne faut donc pas jouer avec les sommes susceptibles d'êtres affectées à la résorption de ces équilibres.
Du point de vue statique donc, des inquiétudes.
Mais du point de vue dynamique, une amélioration de notre situation qui fait que la perspective du plein emploi est quelque chose de réaliste. Je sais bien que beaucoup en France, responsables politiques, syndicaux, chefs d'entreprise sont saisis par une sorte de fatalisme ambiant qui fait que l'on ne pourrait rien faire contre le chômage. Je suis évidemment convaincu du contraire et j'ai plusieurs éléments qui me redonnent du baume au coeur lorsque par extraordinaire je viendrais à douter.
Le premier est de regarder le nombre de création d'emploi sans évoquer les emplois-jeunes. Je parle des emplois marchands, dans les entreprises. En ne comptabilisant que ces emplois créés par les entreprises depuis juin 1997, on atteint un million d'emplois. Un million d'emplois entre juin 1997 et la fin de l'année 2000, c'est-à-dire la période d'exécution de ce budget, auront été créés dans notre pays, ce qui là aussi est même supérieur à ce que l'on a pu connaître dans les fameuses années 60 où, rappelez-vous, on expliquait que l'économie était dans une situation florissante.
Quand on compare cette situation à celle de nos voisins, on retrouve le décalage de tout à l'heure : les créations d'emploi en France traduisant une pente -réalisé pour le bleu plus soutenu et en prévision pour le bleu plus clair- sensiblement plus forte que celle que l'on retrouve dans les comptes de mes collègues allemands ou italiens.
Donc, grand dynamisme de la création d'emploi. Créations d'emploi qui sont l'ordre de 220.000 en 1999, qui dépasseront 300 000 je l'espère en 2000 et qui sont deux fois plus que ce que l'on a créé chaque année dans les années 60, cinq Fois plus que ce que l'on a créé chaque année dans les années 80. Ce rythme, Qu'il faut arriver à tenir. redonne de l'espoir sur les perspectives du plein emploi.
Le deuxième élément est qu'il faut regarder nos voisins. Ils vont moins bien que nous depuis 1997 mais ils sont dans une meilleure situation que nous pour beaucoup d'entre eux. Pour le taux de chômage, nous sommes dans la queue de peloton. Si l'on divise -ce qui est assez réaliste- les 15 pays de l'Union en trois paquets, trois tiers à peu près égaux, on a les pays où le taux de chômage est encore supérieur à 10 %. dont nous, le wagon de queue, quatre ou cinq pays dans lesquels le taux de chômage est entre 5 et 10 % et cinq pays qui ont un taux de chômage inférieur à 5 %. Si certains y sont arrivés. Puisque certains sont arrivés à être en dessous de 5 %, ce qui grosso modo est un chômage frictionnel correspondant au plein emploi, parce que certains y sont arrivés, nous n'avons aucune raison de ne pas pouvoir y arriver nous aussi.
Le troisième, une autre manière de prendre ces informations est de voir à quel rythme baisse notre chômage. Je le dis avec réserve, nous avons un taux de chômage plus fort que celui des autres. Ne soyons pas fiérots. Mais quand on regarde le rythme auquel il baisse, on constate qu'au contraire il baisse plus vite en France qu'ailleurs. Il a baissé de 1,4 point au sens du BIT depuis juin 1997 en France, de 0,4 en Italie et de 0,8 en Allemagne. Nous sommes en retard, c'est clair.
Mais nous avons un rythme d'évolution sensiblement plus rapide que les autres, création d'emploi, baisse du chômage, tout cela évidemment mesure à peu près la même chose et donc l'idée que nous pouvons, dans une durée qui n'est pas de deux ans ou trois ans -le premier Ministre a fixé un horizon plus lointain- atteindre ce que d'autres ont réussi à faire, c'est-à-dire un taux de chômage en dessous de 5 %, n'a aucune raison d'être une idée que nous ne prenons pas en considération et qui me semble aujourd'hui réaliste.
Dans ce contexte, le budget doit soutenir cet objectif et faire suite aux deux budgets que Christian SAUTTER et moi vous avons déjà présentés. Ce que je veux illustrer devant vous, c'est la partie fiscale. Christian développera la partie des dépenses.
La deuxième mesure est due à une proposition de Jean-Claude GAYSSOT. Elle consiste à supprimer le droit au bail que paient les locataires. Sur chaque quittance de loyer, le droit au bail représente 2,5 %/'o pour les locataires. Au ler janvier prochain. ce droit au bail disparaît pour 80 % des locataires, ceux dont les loyers sont au plus égal à 2 500 F par mois -30 000 F par an- et l'année suivante pour tout le reste des locataires.
Ceux dont les loyers sont inférieurs à 2 500 F par mois représentent 80 % de la population, 94 % des locataires de HLM. Le reste, 20 % de la population, ne verra son droit au bail supprimé que l'année suivante, simplement pour des raisons de répartition du coût sur deux années budgétaires.
Enfin, troisième mesure, c'est celle qui touche à la baisse des droits de mutation. L'année dernière, le rapport des droits au bail pour l'Etat était de 7 milliards. La première année la poire est grosso modo coupée en deux par les premiers 80 % de la population. La deuxième année, en 2001, on tombera à zéro.
La troisième mesure est celle qui touche aux droits de mutation qu'on appelle communément les frais de notaires. Nous avions l'année dernière fait passer ces frais de notaires à 6 % par une première diminution de 20 %. Cette année est mise en oeuvre une deuxième diminution de 20 % pour nous amener à 4,8 %, ce qui se situe honorablement quand on compare aux droits analogues dans les pays qui nous entourent.
Le mouvement est maintenant achevé. Tous les professionnels sont du même avis et considèrent que la mesure de l'année dernière a considérablement aidé au déblocage du marché de l'immobilier. Je ne doute pas que le parachèvement de cette mesure cette année servira également. C'est d'ailleurs une mesure qui touche beaucoup à la mobilité du travail. Pour que l'on puisse être mobile et prendre un emploi à l'autre bout de la France si on vous le propose, encore faut-il qu'il n'y ait pas de charges excessives au fait d'avoir éventuellement à revendre un bien immobilier. Au-delà d'une baisse d'impôt, c'est une mesure qui favorise la mobilité et donc l'emploi.
Enfin, dans un domaine qui est complètement différent, mais qui ne touche pas le logement, pour favoriser, toujours vers l'emploi, les ressources des entreprises, nous poursuivrons une mesure qui a été initiée l'année dernière, qui concerne le régime d'exonération des dividendes, qui sera durci, comme il l'a été l'année dernière, de façon à réorienter les flux d'investissement des placements financiers vers l'investissement réel. Je vous disais tout à l'heure, en vous parlant de l'investissement, que les effets de ce genre de mesures se faisaient sentir.
Il y a un certain nombre de mesures sur l'innovation et la création.
D'abord, la suppression de tous les impôts d'Etat qui pénalisaient jusqu'à maintenant la création d'entreprises, et notamment le droit de 1500 francs lors de création d'une entreprise. De la même manière, la baisse des droits de mutation sur les fonds de commerce, qui sont ramenés de 11 à 4,8 % notamment pour faciliter les transmissions d'entreprises. Enfin, la suppression de l'imposition annuelle forfaitaire, que 180.000 petites entreprises payaient, même si elles ne faisaient pas de bénéfices, qui était de 5000 francs, qui disparaît intégralement.
Ces trois mesures, surtout la première sur la création d'entreprises -vous en verrez les détails-, constituent un paquet de soutien à l'activité des toutes petites entreprises en création ou déjà existantes, qui est loin d'être négligeable,
Enfin. la dernière étape est celle d'une croissance plus soutenable par une fiscalité plus écologique. Nous avons fait une première étape dans ce sens l'année dernière. Il y a cette année deux nouvelles étapes : celle qui consiste à poursuivre le mouvement engagé dans le rattrapage du prix du gaz oïl par rapport au super sans plomb. Le prix du gaz oïl sera augmenté de 7 centimes comme l'année dernière et, chose que vous n'avez peut-être pas encore écrite dans vos colonnes, pour la deuxième année consécutive, le prix du super sans plomb ne verra pas les taxes changer.
Cela nous met dans une situation sensiblement différente de celle de beaucoup d'autres pays. Les taxes sur l'essence sans plomb, depuis juillet 1998, ont pas mal varié en centimes français dans les différents pays qui nous entourent ; la France est toute à droite, c'est-à-dire zéro, à un moment où il nous semble que l'augmentation du prix de la matière première (le pétrole lui-même) pèse déjà sur les budgets des ménages. Si on regarde en France, dans le temps, on voit. que l'évolution a été variée, heurtée, mais que c'est la première fois, en effet, que nous avons deux années consécutives -l'année dernière, c'était la première fois qu'il y avait une année, donc a fortiori deux années consécutives- dans lesquelles la fiscalité sur l'essence ne bouge pas,
Quels enseignements tirer de tout cela ? Quels enseignements tirer de ce troisième budget en perspective avec les deux précédents ?
Je me rappelle vous avoir dit, l'année dernière -j'ai vérifié-, que la méthode du gouvernement se voulait progressive pour ne céder ni à la tentation de l'immobilisme ni au grand soir fiscal. Il s'agit ni de ne rien faire ni de prétendre, comme on le dit beaucoup quand on fait des débats publics, mais comme on ne le fait pas ensuite quand on est au pouvoir, que l'on va tout changer en un tour de main. Au contraire, notre méthode était en cinq ans, une législature, de parcourir l'ensemble des impôts et d'apporter les améliorations qui nous semblaient nécessaires au vu de la justice et de l'emploi à cet ensemble d'impôts.
En 1997 et 1998, quel a été le choix ?
Augmenter les impôts sur les entreprises pour passer le cap de l'euro et équilibrer la fiscalité entre les revenus du travail et les revenus du capital. Cela a notamment été fait au travers de la CSG.
En 1999, quel a été le choix ? La réforme de la taxe professionnelle, l'effet emploi attendu de la suppression progressive de la part salaires.
En 2000, c'est la fiscalité indirecte qui est à l'honneur (TVA sur le logement, droits de mutation, droits de bail, et quelques autres éléments que je vous ai indiqués).
Comme l'a annoncé le Premier Ministre, pour l'année prochaine ce sont les impôts directs qui seront traités pour l'ensemble des Français, et non pas, comme cela a pu être le cas sous une majorité précédente, uniquement pour la fraction qui paye l'impôt sur le revenu, en traitant tous les impôts directs, c'est-à-dire l'impôt sur le revenu, certes, mais aussi la taxe d'habitation, de façon à couvrir l'ensemble de la distribution des revenus.
Quand j'entends quelques critiques qui me reviennent sur le thème " Mais cela n'a pas de structure, de vertèbres, on ne sait pas où l'on va ", je suis surpris, au-delà de ce qu'il faut bien critiquer. En réalité, je crois qu'en cinq ans -ce n'est pas encore fait-, quand la législature sera achevée, l'ensemble de la réforme fiscale qui aura été accomplie n'aura pas d'équivalent dans aucune législature que j'ai pu examiner depuis une vingtaine d'années. Nous aurons, dans le domaine du rééquilibrage impôts sur le revenu travail ou sur le revenu du capital, dans le domaine de la fiscalité indirecte, dans le domaine de la fiscalité de l'emploi et dans le domaine de la fiscalité directe à venir pour l'année prochaine, fait un ensemble de réformes, je crois honnêtement sans comparaison.
Quel est pour le moment le résultat de ces réformes ? Vous me direz " La réforme de l'impôt direct, taxe d'habitation et impôt sur le revenu, c'est l'année prochaine ". Où en est-on aujourd'hui ?
Il n'est pas inutile, pour finir, de faire un rapide bilan en le regardant du côté des entreprises et du côté des ménages.
Du côté des entreprises, ce qui a été fait depuis deux ans et demi est fondamentalement favorable au travail. Je vais vous le montrer maintenant.
Quelle est la méthode pour le faire ? J'ai vu fleurir, comme vous sans doute, des chiffres très farfelus. Monsieur DEVEDJAN disait, il y a trois ou quatre semaines, 167 milliards d'augmentation. Puis, M. SARKOZY disait, la semaine suivante, 80 milliards. Il avait divisé par deux. Monsieur COPEE disait. la semaine suivante, 35 milliards. Il avait encore divisé par deux. Ils peuvent continuer à ce rythme. Je vais leur faciliter la tâche en leur donnant les bons chiffres, de façon qu'ils n'aient pas besoin de poursuivre l'exercice.
La réalité est la suivante : il faut comparer, pour être rigoureux, les mesures qui ont été prises à différents moments depuis 1997 et leur impact en 2000, tenir compte de ce qui monte et de ce qui baisse, ne pas tenir compte des rentrées d'impôts en plus ou en moins qui viennent de la conjoncture et qui n'ont pas de rapport avec des décisions de politique fiscale.
Si on fait cela, on constate d'abord pour les entreprises que l'effet total net est grosso modo nul, - 1,7 milliard d'imposition pour l'ensemble des entreprises, effet en 2000 des mesures à la hausse, à la baisse, prises depuis 1997. Cet effet nul provient de deux mouvements pratiquement équivalents dans les deux sens : des mesures qui ont plus imposé les entreprises qu'elles ne l'étaient avant. Si ces mesures n'avaient pas été prises en 1997, les entreprises ne paieraient pas ces 22,5 milliards. Elles ont été prises. Elles payent donc 22,5 milliards en 2000 de plus. Ce sont des mesures sur le durcissement du régime MERFI, les plus-values financières, l'avoir fiscal ; c'est un ensemble de mesures qui touchent la distribution du profit et du capital. A la hausse aussi, 3,5 milliards de mesures difficilement classables, comme touchant directement le profit, des mesures sans beaucoup de signification mais qui ont quand même rapporté 3,5 milliards.
A la baisse, 27,6 milliards de mesures qui bénéficient à l'emploi : la baisse de la taxe professionnelle, le crédit impôts emploi, la réduction des cotisations liée à la RTT.
L'effet an 2000 est à peu près équilibré pour les entreprises, sauf qu'il y a un formidable déplacement, de l'ordre d'une trentaine de milliards, en plus des impôts qui touchent à la partie financière de l'activité des entreprises, en moins des impôts qui touchent à la partie emploi de l'activité des entreprises.
De la même manière, s'agissant des ménages, cette fois-ci, lorsque l'on regarde l'impact redistributif de ce qui a été fait pour les entreprises, ce que l'on regarde c'est l'effet sur l'emploi. Pour les ménages, on regarde l'effet redistributif. On constate que 90 % de la population, à l'exclusion des 10 % qui touchent les revenus les plus élevés, verra ses impôts en 2000 baisser de 28 milliards par rapport à ce qu'ils auraient été si aucune des mesures n'avaient été prises.
A l'inverse, le premier décile, le décile des 10 % de la population qui a les plus hauts revenus, voit sa pression fiscale augmenter de 3,8 milliards.
D'où cela vient-il ? Là aussi de mouvements dans les deux sens. Il y a le solde des deux pour l'ensemble des ménages (- 28 + 4, c'est - 24). L'ensemble des ménages a bénéficié d'une situation qui fait - 24. Cela vient de mesures de nature différente, qui sont indiquées en haut. Les mesures en vert sont des mesures de taxation du patrimoine et du capital, notamment la CSG sur l'épargne, le durcissement de l'ISF ; à l'inverse, les mesures vers le bas sont en faveur de l'activité. Ce sont les mesures qui touchent la TVA, qui a été incluse là-dedans., ou les différentes mesures d'allégements qui concernent les ménages, qui sont généralement des mesures sur les impôts indirects.
De la même manière que, pour les entreprises, on voit que l'effet, en 2000, de l'ensemble des mesures prises depuis deux ans et demi est à peu près nul, mais avec un fort effet de restructuration, taxant plus le profit, taxant moins le travail, pour les ménages l'effet n'est pas nul. Il est de - 24, réparti correctement dans la distribution des revenus au bénéfice des 90 % et au détriment des 10 % supérieurs. L'explication de ce mouvement vient de mouvements dans les deux sens : des hausses et des baisses. Il v a eu des hausses et des baisses. Les hausses, ce sont CSG, ISF, notamment ; les baisses, ce sont principalement celles qui concernent la TVA, d'autres droits indirects, etc.
Si bien que le bilan, de ce point de vue, ne me paraît pas contraire, ni aux engagements de la majorité ni à ce que, à chacun des budgets, Christian SAUTTER et moi avions annoncé comme étant notre intention, dont on constate après coup que cela a eu les effets que nous attendions.
Un dernier mot pour finir. Chacun ressent les hausses ou les baisses d'impôts sur sa feuille d'impôts, quand il va faire des travaux et quand il aura moins de TVA, etc. Il y a un concept globalisant pour mesurer tout cela, qui est le taux de prélèvements obligatoires. Il n'y a pas de surprise à ce que, alors que nous attendions la stabilité, nous ayons en 1999 une légère hausse. On l'a vu. il y a deux phénomènes :
- des impôts, comme l'impôt sur les sociétés, qui ont rapporté plus. S'ils ont rapporté plus, cela tend à alimenter le taux de prélèvements obligatoires
- un phénomène qui est un peu compliqué à comprendre pour beaucoup de vos lecteurs, mais que beaucoup d'entre vous ont expliqué de façon très correcte. à savoir que, à partir du moment où la croissance est un peu plus faible que prévu (2,3 au lieu de 2,7), où l'inflation est plus faible que prévu, le dénominateur de la fraction est plus faible. Si le dénominateur est plus faible, le taux a tendance mécaniquement à monter. Cela ne résulte d'une décision de politique économique, mais de l'effet de l'évolution économique sur ce taux.
Il est intéressant de distinguer, dans les différentes évolutions, ce qui vient de l'évolution des prélèvements obligatoires due aux régimes sociaux, de l'évolution des prélèvements obligatoires qui vont à l'Etat et de l'évolution des prélèvements obligatoires qui viennent des collectivités locales. Les régimes sociaux, comme il est normal d'ailleurs, notamment en raison de ce que consomment l'assurance maladie et la retraite, ont un taux d'évolution des prélèvements obligatoires plutôt croissant. Pour l'Etat, en raison des baisses d'impôts mises en oeuvre successivement, surtout cette année, le taux est plutôt à la baisse. Les collectivités locales ont un taux plutôt à la baisse, apparent, qui vient notamment de ce que la baisse de la TP leur est imputée alors qu'elle a été payée par l'Etat. Peu importe, que ce soit l'un ou l'autre ne change pas grand-chose.
Si l'on ramène tout cela à une base 100 pour que ce soit plus visible, on voit quelque chose qui caractérise nos sociétés modernes, à savoir que l'évolution des prélèvements obligatoires est très différente suivant le type de prélèvements obligatoires, à la hausse pour les régimes sociaux, à la baisse pour l'Etat et les collectivités locales.
Pour 2000, la baisse d'impôts qui est mise en oeuvre (39 milliards net), devrait ramener le taux de prélèvements obligatoires à 44,8, ce qui est à peine en dessous (0,1) de ce qu'il était en 1997, absorbant donc par là la bosse que nous allons vivre en 1999 en raison de circonstances économiques très particulières.
Si nous pouvons poursuivre, ce que je pense, cet effort pour la loi de finances pour 2001, dans la ligne de ce que le Premier Ministre a annoncé. c'est-à-dire les impôts directs (impôts sur le revenu et taxe d'habitation), ce taux pourra baisser plus significativement pour 2001. Contentons-nous pour le moment de nous satisfaire de ce qu'il baisse en 2000 et qu'il se retrouve fin 2000, si les choses se passent économiquement comme prévu dans ce budget, à un niveau légèrement inférieur de celui de 1997.
Bien sûr, j'aurai plaisir à répondre à vos questions Sur ce sujet juste après, quand j'aurai laissé Christian SAUTTER nous parler des dépenses.
M. SAUTTER - Rassurez-vous, même si les dépenses dépassent encore les recettes en raison du déficit, mon temps de parole sera beaucoup plus restreint !
Dominique STRAUSS-KAHN l'a expliqué, nous avons préparé un budget dont la dépense est stable en volume. Je voudrais vous montrer brièvement que cette dépense stable n'est pas une dépense immobile.
La dépense est maîtrisée, mais les priorités budgétaires du gouvernement sont clairement affirmées et financées.
Quelles sont les marges de manoeuvre dont on peut disposer dans un budget stable ?
Elles sont de deux types : il y a d'abord l'effet immédiat de la réduction des déficits et de la baisse des taux d'intérêt ; cela correspond, pour l'an prochain, à une somme de l'ordre de 4 milliards de francs. Et puis, il y a un travail patient, obscure mais indispensable d'économies, de remise en cause de dépenses traditionnelles, qui porte dans l'ensemble sur 30 milliards, dont vous avez sur ce graphique une décomposition.
Il y a d'abord, sur le fonctionnement, un échenillage des dépenses, un redéploiement en matière d'emploi car, dans le budget 2000, les effectifs budgétaires civils de l'Etat resteront stables, même si certains ministères, comme la Justice (plus de 1200 emplois), l'Emploi et la Solidarité ou l'Environnement. ont des créations de postes.
Sept milliards de francs d'économie de fonctionnement, 19 sur les interventions économiques et les transferts au profit des entreprises, et 4 sur les interventions sociales.
Je voudrais ajouter un point. Derrière ce travail de recherche d'économies, il y a une oeuvre en profondeur de modernisation de la procédure budgétaire (passation de contrats pluriannuels avec un certain nombre de ministères ou de directions dépensières, globalisation des crédits). Nous allons vers plus de responsabilité, plus de transparence, plus d'évaluation. Je crois que la préparation du budget, de ce point de vue, rejoint parfaitement la volonté de l'Assemblée nationale, impulsée par son Président, de chercher à dépenser mieux, c'est-à-dire d'évaluer en permanence la dépense publique.
Les budgets prioritaires sont les mêmes. Ce sont l'emploi et la solidarité, l'éducation et la recherche, la justice et la sécurité, l'environnement et la culture. Pour ces huit budgets, la somme de ces budgets croit quatre fois plus vite que la moyenne du budget de l'Etat. Il y a donc là un effort important pour financer les priorités. Je vais assez vite sur ces budgets que je passe rapidement en revue.
Le budget de l'emploi et de la solidarité est devenu avec 254 milliards de francs le deuxième budget de l'Etat derrière le budget de l'éducation nationale mais devant les charges d'intérêt qui pesaient très lourd dans le passé et qui continuent à peser lourd. Ce budget progresse de 4,3 %, 10 milliards de francs, avec à l'intérieur de ce budget un effort pour financer des actions nouvelles, y compris par la remise en cause d'actions traditionnelles.
Ces actions nouvelles, je vous les énumère rapidement sans être exhaustif: 100.000 emplois-jeunes supplémentaires pour arriver aux 350.000 fin 2000 sur lesquels le Gouvernement s'était engagé. C'est la poursuite de l'effort pour la réduction du temps de travail milliards de francs en 1999, 7 milliards de Francs en 2000. Ce sont des moyens supplémentaires pour l'agence nationale pour l'emploi, pour qu'elle puisse faire un million d'entretiens personnalisés pour ramener les chômeurs sur le marché du travail. Sur la solidarité, on peut parler de la couverture d'assurance maladie universelle qui va coûter à l'Etat 7 milliards de francs.
Dans cet ensemble emploi et solidarité, je mentionnerai aussi la politique de la ville. C'est un budget modeste, 1,3 milliard de francs, mais il progresse de 26 %. La priorité que vous retrouverez dans les contrats de plan Etat-région est clairement affirmée dans le budget 2000.
Le budget de l'éducation, le premier budget, progresse de 3,3 %. Il atteint donc 361 milliards de francs avec une hausse de 12 milliards de francs sur la période 1999-2000. Il y a des créations d'emploi d'enseignants dans le second degré. 3 300 postes. Il y a une action particulière de soutien aux enfants en difficulté pour bien manifester notre volonté d'égalité des chances. Il y a l'enseignement artistique. Il y a le plan social étudiants avec le renforcement des bourses de l'enseignement supérieur : près de 10 %. Il y a le plan université du troisième millénaire.
Le budget justice progresse de 4 % avec le principal montant de création d'emploi : 1.237 postes budgétaires supplémentaires. On doit remarquer l'effort sur la protection judiciaire de la jeunesse, Sur l'administration pénitentiaire, sur l'entrée des juges professionnels dans les tribunaux de commerce. Je crois qu'il y a là un effort considérable qui trouve son écho dans le budget de la sécurité publique : 54 milliards, en hausse de 3 %. Enorme effort vers la police de proximité : les crédits de fonctionnement de la police progressent de 5 %. Les crédits d'équipement progressent de 38 % notamment pour construire des commissariats dans les zones difficiles. Et il y aura plus de 4.000 adjoints de sécurité supplémentaires qui iront dans ces zones sensibles pour arriver à un total de 20.000.
Je passe sur l'environnement dont le budget progresse de 9 %, sur l'aménagement du territoire, sur la culture qui chemine étape par étape vers 1% du budget de l'Etat en l'an 2000. Je cite en passant l'audiovisuel public dont l'ensemble des moyens publics progressent de 5 %. Je crois que c'est une priorité claire. Et je dirai un mot enfin du budget de la défense où l'effort de recherche d'économies a été manifeste puisque la professionnalisation des armées se poursuit comme prévue, les autorisations de programme vont monter à 87,5 milliards de francs mais les crédits de paiement ont été calculés en tenant compte des reports de l'année précédente et des capacités d'engagement. Cela fait que ce budget de la défense, qui atteindra tous ses objectifs, s'élèvera à 242 milliards de francs et baisse légèrement de 0,7 % par rapport à 1999.
Vu l'heure, je ne veux mentionner, ni en détail ni même pour l'essentiel, les modifications de périmètre du budget de l'Etat. Je dirai simplement une chose. Nous avions l'an dernier, poussés par la Cour des comptes et par le Conseil constitutionnel, réintégré 46 milliards de francs de dépenses dans le budget de l'Etat. L'effort porte cette année sur 10 milliards de francs. Vous en trouverez le détail dans le dossier de presse.
De la même manière, s'agissant des ménages, cette fois-ci, lorsque l'on regarde l'impact redistributif de ce qui a été fait pour les entreprises, ce que l'on regarde c'est l'effet sur l'emploi. Pour les ménages, on regarde l'effet redistributif. On constate que 90 % de la population, à l'exclusion des 10 % qui touchent les revenus les plus élevés, verra ses impôts en 2000 baisser de 28 milliards par rapport à ce qu'ils auraient été si aucune des mesures n'avaient été prises.
A l'inverse, le premier décile, le décile des 10 % de la population qui a les plus hauts revenus, voit sa pression fiscale augmenter de 3,8 milliards.
D'où cela vient-il ? Là aussi de mouvements dans les deux sens. Il y a le solde des deux pour l'ensemble des ménages (- 28 + 4, c'est - 24). L'ensemble des ménages a bénéficié d'une situation qui fait - 24. Cela vient de mesures de nature différente, qui sont indiquées en haut. Les mesures en vert sont des mesures de taxation du patrimoine et du capital, notamment la CSG sur l'épargne, le durcissement de l'ISF ; à l'inverse, les mesures vers le bas sont en faveur de l'activité. Ce sont les mesures qui touchent la TVA, qui a été incluse là-dedans., ou les différentes mesures d'allégements qui concernent les ménages, qui sont généralement des mesures sur les impôts indirects.
De la même manière que, pour les entreprises, on voit que l'effet, en 2000, de l'ensemble des mesures prises depuis deux ans et demi est à peu près nul, mais avec un fort effet de restructuration, taxant plus le profit, taxant moins le travail, pour les ménages l'effet n'est pas nul. Il est de - 24, réparti correctement dans la distribution des revenus au bénéfice des 90 % et au détriment des 10 % supérieurs. L'explication de ce mouvement vient de mouvements dans les deux sens : des hausses et des baisses. Il v a eu des hausses et des baisses. Les hausses, ce sont CSG, ISF, notamment ; les baisses, ce sont principalement celles qui concernent la TVA, d'autres droits indirects, etc.
Si bien que le bilan, de cc point de vue, ne me paraît pas contraire, ni aux engagements de la majorité ni à ce que, à chacun des budgets, Christian SAUTTER et moi avions annoncé comme étant notre intention, dont on constate après coup que cela a eu les effets que nous attendions.
Un dernier mot pour finir. Chacun ressent les hausses ou les baisses d'impôts sur sa feuille d'impôts, quand il va faire des travaux et quand il aura moins de TVA, etc. Il y a un concept globalisant pour mesurer tout cela, qui est le taux de prélèvements obligatoires. Il n'y a pas de surprise à ce que, alors que nous attendions la stabilité, nous ayons en 1999 une légère hausse. On l'a vu. il y a deux phénomènes :
- des impôts, comme l'impôt sur les sociétés, qui ont rapporté plus. S'ils ont rapporté plus, cela tend à alimenter le taux de prélèvements obligatoires
- un phénomène qui est un peu compliqué à comprendre pour beaucoup de vos lecteurs, mais que beaucoup d'entre vous ont expliqué de façon très correcte. à savoir que, à partir du moment où la croissance est un peu plus faible que prévu (2,3 au lieu de 2,7), où l'inflation est plus faible que prévu, le dénominateur de la fraction est plus faible. Si le dénominateur est plus faible, le taux a tendance mécaniquement à monter. Cela ne résulte d'une décision de politique économique, mais de l'effet de l'évolution économique sur ce taux.
Il est intéressant de distinguer, dans les différentes évolutions, ce qui vient de l'évolution des prélèvements obligatoires due aux régimes sociaux, de l'évolution des prélèvements obligatoires qui vont à l'Etat et de l'évolution des prélèvements obligatoires qui viennent des collectivités locales. Les régimes sociaux, comme il est normal d'ailleurs, notamment en raison de ce que consomment l'assurance maladie et la retraite, ont un taux d'évolution des prélèvements obligatoires plutôt croissant. Pour l'Etat, en raison des baisses d'impôts mises en oeuvre successivement, surtout cette année, le taux est plutôt à la baisse. Les collectivités locales ont un taux plutôt à la baisse, apparent, qui vient notamment de ce que la baisse de la TP leur est imputée alors qu'elle a été payée par l'Etat. Peu importe, que ce soit l'un ou l'autre ne change pas grand-chose.
Si l'on ramène tout cela à une base 100 pour que ce soit plus visible, on voit quelque chose qui caractérise nos sociétés modernes, à savoir que l'évolution des prélèvements obligatoires est très différente suivant le type de prélèvements obligatoires, à la hausse pour les régimes sociaux, à la baisse pour l'Etat et les collectivités locales.
Pour 2000, la baisse d'impôts qui est mise en oeuvre (39 milliards net), devrait ramener le taux de prélèvements obligatoires à 44,8, ce qui est à peine en dessous (0,1) de ce qu'il était en 1997, absorbant donc par là la bosse que nous allons vivre en 1999 en raison de circonstances économiques très particulières.
Si nous pouvons poursuivre, ce que je pense, cet effort pour la loi de finances pour 2001, dans la ligne de ce que le Premier Ministre a annoncé. c'est-à-dire les impôts directs (impôts sur le revenu et taxe d'habitation), ce taux pourra baisser plus significativement pour 2001. Contentons-nous pour le moment de nous satisfaire de ce qu'il baisse en 2000 et qu'il se retrouve fin 2000, si les choses se passent économiquement comme prévu dans ce budget, à un niveau légèrement inférieur de celui de 1997.
Bien sûr, j'aurai plaisir à répondre à vos questions Sur ce sujet juste après, quand j'aurai laissé Christian SAUTTER nous parler des dépenses.
M. SAUTTER - Rassurez-vous, même si les dépenses dépassent encore les recettes en raison du déficit, mon temps de parole sera beaucoup plus restreint !
Dominique STRAUSS-KAHN l'a expliqué, nous avons préparé un budget dont la dépense est stable en volume. Je voudrais vous montrer brièvement que cette dépense stable n'est pas une dépense immobile.
La dépense est maîtrisée, mais les priorités budgétaires du gouvernement sont clairement affirmées et financées.
Quelles sont les marges de manoeuvre dont on peut disposer dans un budget stable ?
Elles sont de deux types : il y a d'abord l'effet immédiat de la réduction des déficits et de la baisse des taux d'intérêt ; cela correspond, pour l'an prochain, à une somme de l'ordre de 4 milliards de francs. Et puis, il y a un travail patient, obscure mais indispensable d'économies, de remise en cause de dépenses traditionnelles, qui porte dans l'ensemble sur 30 milliards, dont vous avez sur ce graphique une décomposition.
Il y a d'abord, sur le fonctionnement, un échenillage des dépenses, un redéploiement en matière d'emploi car, dans le budget 2000, les effectifs budgétaires civils de l'Etat resteront stables, même si certains ministères, comme la Justice (plus de 1200 emplois), l'Emploi et la Solidarité ou l'Environnement. ont des créations de postes.
Sept milliards de francs d'économie de fonctionnement, 19 sur les interventions économiques et les transferts au profit des entreprises, et 4 sur les interventions sociales.
Je voudrais ajouter un point. Derrière ce travail de recherche d'économies, il y a une oeuvre en profondeur de modernisation de la procédure budgétaire (passation de contrats pluriannuels avec un certain nombre de ministères ou de directions dépensières, globalisation des crédits). Nous allons vers plus de responsabilité, plus de transparence, plus d'évaluation. Je crois que la préparation du budget, de ce point de vue, rejoint parfaitement la volonté de l'Assemblée nationale, impulsée par son Président, de chercher à dépenser mieux, c'est-à-dire d'évaluer en permanence la dépense publique.
Les budgets prioritaires sont les mêmes. Ce sont l'emploi et la solidarité, l'éducation et la recherche, la justice et la sécurité, l'environnement et la culture. Pour ces huit budgets, la somme de ces budgets croit quatre fois plus vite que la moyenne du budget de l'Etat. Il y a donc là un effort important pour financer les priorités. Je vais assez vite sur ces budgets que je passe rapidement en revue.
Le budget de l'emploi et de la solidarité est devenu avec 254 milliards de francs le deuxième budget de l'Etat derrière le budget de l'éducation nationale mais devant les charges d'intérêt qui pesaient très lourd dans le passé et qui continuent à peser lourd. Ce budget progresse de 4,3 %, 10 milliards de francs, avec à l'intérieur de ce budget un effort pour financer des actions nouvelles, y compris par la remise en cause d'actions traditionnelles.
Ces actions nouvelles, je vous les énumère rapidement sans être exhaustif: 100.000 emplois-jeunes supplémentaires pour arriver aux 350.000 fin 2000 sur lesquels le Gouvernement s'était engagé. C'est la poursuite de l'effort pour la réduction du temps de travail milliards de francs en 1999, 7 milliards de Francs en 2000. Ce sont des moyens supplémentaires pour l'agence nationale pour l'emploi, pour qu'elle puisse faire un million d'entretiens personnalisés pour ramener les chômeurs sur le marché du travail. Sur la solidarité, on peut parler de la couverture d'assurance maladie universelle qui va coûter à l'Etat 7 milliards de francs.
Dans cet ensemble emploi et solidarité, je mentionnerai aussi la politique de la ville. C'est un budget modeste, 1,3 milliard de francs, mais il progresse de 26 %. La priorité que vous retrouverez dans les contrats de plan Etat-région est clairement affirmée dans le budget 2000.
Le budget de l'éducation, le premier budget, progresse de 3,3 %. Il atteint donc 361 milliards de francs avec une hausse de 12 milliards de francs sur la période 1999-2000. Il y a des créations d'emploi d'enseignants dans le second degré. 3 300 postes. Il y a une action particulière de soutien aux enfants en difficulté pour bien manifester notre volonté d'égalité des chances. Il y a l'enseignement artistique. Il y a le plan social étudiants avec le renforcement des bourses de l'enseignement supérieur : près de 10 %. Il y a le plan université du troisième millénaire.
Le budget justice progresse de 4 % avec le principal montant de création d'emploi : 1.237 postes budgétaires supplémentaires. On doit remarquer l'effort sur la protection judiciaire de la jeunesse, Sur l'administration pénitentiaire, sur l'entrée des juges professionnels dans les tribunaux de commerce. Je crois qu'il y a là un effort considérable qui trouve son écho dans le budget de la sécurité publique : 54 milliards, en hausse de 3 %. Enorme effort vers la police de proximité : les crédits de fonctionnement de la police progressent de 5 %. Les crédits d'équipement progressent de 38 % notamment pour construire des commissariats dans les zones difficiles. Et il y aura plus de 4.000 adjoints de sécurité supplémentaires qui iront dans ces zones sensibles pour arriver à un total de 20.000.
Je passe sur l'environnement dont le budget progresse de 9 %, sur l'aménagement du territoire, sur la culture qui chemine étape par étape vers 1% du budget de l'Etat en l'an 2000. Je cite en passant l'audiovisuel public dont l'ensemble des moyens publics progressent de 5 %. Je crois que c'est une priorité claire. Et je dirai un mot enfin du budget de la défense où l'effort de recherche d'économies a été manifeste puisque la professionnalisation des armées se poursuit comme prévue, les autorisations de programme vont monter à 87,5 milliards de francs mais les crédits de paiement ont été calculés en tenant compte des reports de l'année précédente et des capacités d'engagement. Cela fait que ce budget de la défense, qui atteindra tous ses objectifs, s'élèvera à 242 milliards de francs et baisse légèrement de 0,7 % par rapport à 1999.
Vu l'heure, je ne veux mentionner, ni en détail ni même pour l'essentiel, les modifications de périmètre du budget de l'Etat. Je dirai simplement une chose. Nous avions l'an dernier, poussés par la Cour des comptes et par le Conseil constitutionnel, réintégré 46 milliards de francs de dépenses dans le budget de l'Etat. L'effort porte cette année sur 10 milliards de francs. Vous en trouverez le détail dans le dossier de presse.
Je voudrais en conclusion, comme Dominique STRAUSS-KAHN l'a fait pour la fiscalité et pour les déficits, mettre l'effort que nous menons en perspective dans l'espace et dans le temps.
Vous voyez qu'en ce qui concerne la diminution de la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut, la France est dans un peloton de tête avec la Belgique, l'Espagne et l'Italie, avec une diminution de la part des dépenses publiques de l'ordre de 1,8 %. C'est nettement au-dessus de la moyenne de la zone euro, nettement au-dessus de l'Allemagne, des Pays-Bas qui sont souvent cités comme des exemples. Dernière référence ayant d'en terminer, c'est une comparaison dans le temps qui me semble-t-il permet de relativiser un certain nombre de propos. Vous voyez qu'entre 1993 et 1996, chaque année les dépenses de l'Etat en volume, c'est-à-dire après inflation, ont cru en moyenne de 1,6 ou 1,7 % alors que sur la période 1997-2000 cette croissance a été de l'ordre de 0,3 %. La comparaison parle d'elle-même.
C'est sur cette comparaison qui montre que nous allons dans la direction de la maîtrise des dépenses publiques que j'arrêterai cet exposé introductif.
Je voudrais en conclusion, comme Dominique STRAUSS-KAHN l'a fait pour la fiscalité et pour les déficits, mettre l'effort que nous menons en perspective dans l'espace et dans le temps.
Vous voyez qu'en ce qui concerne la diminution de la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut, la France est dans un peloton de tête avec la Belgique, l'Espagne et l'Italie, avec une diminution de la part des dépenses publiques de l'ordre de 1,8 %. C'est nettement au-dessus de la moyenne de la zone euro, nettement au-dessus de l'Allemagne, des Pays-Bas qui sont souvent cités comme des exemples. Dernière référence ayant d'en terminer, c'est une comparaison dans le temps qui me semble-t-il permet de relativiser un certain nombre de propos. Vous voyez qu'entre 1993 et 1996, chaque année les dépenses de l'Etat en volume, c'est-à-dire après inflation, ont cru en moyenne de 1,6 ou 1,7 % alors que sur la période 1997-2000 cette croissance a été de l'ordre de 0,3 %. La comparaison parle d'elle-même.
C'est sur cette comparaison qui montre que nous allons dans la direction de la maîtrise des dépenses publiques que j'arrêterai cet exposé introductif.
Un intervenant. - Sur le solde primaire et la baisse des charges d'intérêt, il a été fait mention de 4 milliards tout à l'heure. Qu'est-ce que cela représente en valeur absolue ? Pourriez-vous nous donner une fourchette pour le solde primaire en 2000 ?
M. STRAUSS-KAHN. - Pour ce qui est des charges d'intérêt en valeur absolue, cela représente justement 4 milliards. C'est la première fois. Ce que l'on avait les années précédentes, c'était un ralentissement de la progression des charges d'intérêt en raison des taux d'intérêt plus faibles et aussi du plafonnement, du fait que la dette commençait à plafonner. Là, on a pour la première fois une vraie baisse, pas simplement un ralentissement de la progression, une vraie baisse des charges d'intérêt dans le budget pour un montant de 4 milliards.
L'intervenant. - A quel niveau total ?
M.. SAUTTER. - On passe, Pour les charges d'intérêt au sens strict, de 237 milliards de francs l'an dernier à 235. Cela fait deux. Les deux autres deux, l'Etat verse des bonifications d'intérêt, par exemple pour l'accession au logement. Deux plus deux font quatre. Les charges d'intérêt au sens strict baissent donc de deux milliards. C'est une première.
M.. STRAUSS-KAHN. - Quant aux soldes primaires, nous avons vécu malheureusement beaucoup d'années avec un solde primaire négatif, c'est-à-dire avec un déficit primaire, c'est-à-dire avant charges d'intérêt. L'année dernière, nous avons, pour la première fois depuis je ne sais combien d'années, réussi à équilibrer. Cette année, il y a une vingtaine de milliards d'excédents primaires. C'est vingt pile. Ce qui est un changement très structurel de notre budget.
Une intervenante. - Le million d'emplois créés dont vous avez fait état est à 80 % sous forme précaire. Etes-vous en faveur de la taxation des emplois précaires ?
M.. STRAUSS-KAHN. - Je ne sais pas d'où vous avez votre information sur le fait qu'il y a 80 % sous forme précaire. Il y a une part de ces créations d'emploi qui découle soit d'emplois à temps partiel, ce qui n'est pas obligatoirement du travail précaire, soit d'emplois précaires. Ce que les statistiques nous donnent, c'est que plus la croissance est forte, plus la part des emplois stables et durables augmente, c'est-à-dire que plus nous serons capables d'avoir un nombre d'années de croissance importante, successives, les unes derrière les autres, moins dans la croissance, la part des emplois créés qui est précaire sera importante. Aujourd'hui, nous n'en sommes pas encore là. Ce n'est pas 80 % mais nous avons beaucoup d'emplois précaires.
Non, je ne suis pas favorable, le Gouvernement n'est pas favorable à une taxation. En revanche, le premier Ministre s'est exprimé là-dessus il y a deux jours, il faut que nous mettions en oeuvre les éléments qui permettent de faire en sorte que, partout où c'est possible et au rythme le plus rapide possible, les emplois créés par la croissance soient des emplois aussi durables qu'il est concevable.
Mais il n'y a qu'une seule manière de faire en sorte que les emplois soient durables. C'est que l'activité des entreprises dans lesquels ils se trouvent, se développe. Et cela veut dire que la croissance continue à se développer. La boucle est vite atteinte. L'emploi ne recommence à démarrer que s'il y a de la croissance., c'est vrai en partie sous forme précaire. La sortie de cette précarité repose sur la durabilité, la longueur de cette croissance. Comme nous n'avons pour le moment que trois ans avec l'an 2000 de croissance assez forte (3,2 3,3 en 1998, 2,3 en 1999, 2,8 peut-être plus je ne sais en 2000), nous n'aurons que trois ans. Dans le million en question, vous avez raison, il restera beaucoup de précaire. Mais cela diminuera à mesure que la croissance se poursuivra.
Une intervenante. - Dans les 290.000 emplois de votre scénario pour 2000, quelle est la part des emplois 35 heures, créés grâce aux 35 heures dans votre scénario ?
M. SAUTTER. - On a prévu, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, une somme de l'ordre de 7 milliards de francs pour la part Etat. On escompte peut-être 60 à 80.000 emplois qui viendront s'ajouter au mouvement spontané de la croissance et aussi à l'amplification des emplois-jeunes qui arriveront si je puis dire à leur zénith à la fin de l'an 2000.
Un intervenant. - A propos de la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien, allez-vous supprimer la réduction d'impôt pour les gros travaux et le crédit d'impôt pour les travaux d'entretien qui existent actuellement ?
M. STRAUSS-KAHN. - Il y avait deux mesures : une mesure concernant les gros travaux qui est une réduction d'impôt et nous avions créé, il y a deux ans, un crédit d'impôt parce que l'on n'était pas en état de faire de la baisse de TVA car nous n'avions pas l'autorisation bruxelloise. Il était tel que, quand il a été créé, vous pouviez déduire 15 % -c'est-à-dire l'écart entre 20,6 et 5,5- de votre impôt. Et quand vous n'étiez pas imposable à l'impôt sur le revenu, vous pouviez aller chercher un chèque de l'Etat pour vous le rembourser. Le moins que l'on puisse dire est que la complexité de la méthode fait qu'elle n'a pas été très utilisée. Cela n'a rien à voir avec l'effet qu'aura la baisse de la TVA.
L'année dernière, ces 15 %, sous la pression de la majorité, sont devenus 20 %. On déduisait l'ensemble de la TVA, non pas l'écart entre le taux normal et le taux réduit, mais l'ensemble.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Evidemment la part entre 26 et 5,5 que couvrait le crédit d'impôt, disparaît. Vous ne pouvez pas à la fois ne pas le payer parce que la TVA a baissé et quand même vous le faire rembourser par l'Etat. Il y a des limites à la façon dont on peut abandonner des ressources. En revanche, la part qui avait été créée l'année dernière entre 5,5 et 0 demeure.
Autrement dit, hier vous faisiez faire 100 francs de travaux ; vous payiez 120,6 et vous pouviez aller vous faire rembourser -peu le faisait- 20 francs, les 20,6 qui étaient au-dessus de 100. Aujourd'hui, effectivement à partir d'aujourd'hui, vous ne paierez plus que 105,5 et les 5,5 vous pouvez continuer à vous les faire rembourser. Par ailleurs, la réduction d'impôts gros travaux demeure comme elle était.
Tous les produits du bâtiment sont donc couverts soit par la baisse de TVA -c'est la plus grosse partie- soit pour ce qui excède parce que ce sont des travaux trop gros qui ne rentrent pas dans la liste large des travaux d'entretien, etc. Vous pouvez alors avoir l'avantage au titre de la mesure gros travaux.
Merci d'avoir posé cette question. J'avais oublié de le mentionner tout à l'heure. Contrairement à ce qui a été écrit de ci de là, il n'y a pas reprise d'une main ce qui est lâché de l'autre puisque la seule chose qui disparaît, c'est que l'on peut difficilement concevoir que vous vous fassiez rembourser quand vous payez 105,5 les 15 francs de TVA que vous n'avez pas payée et que vous auriez payée si vous aviez payé 120,6.
M. SAUTTER. - J'ajoute un complément. Il va subsister un crédit d'impôt grosses réparations pour les matériels qui restent à 20,6, c'est-à-dire les ascenseurs et les chaudières collectifs. Et c'est un crédit d'impôt, c'est-à-dire que dans le système, pour les orfèvres, de la réduction d'impôt pour grosses réparations, il fallait payer des impôts pour avoir une réduction d'impôt. Maintenant, si on installe un ascenseur, il y aura un crédit d'impôt même pour ceux qui ne paient pas d'impôt.
Le dispositif est donc complet et encore plus complet si je puis dire que celui qui existait actuellement.
Une intervenante. - Sur ce même sujet, il y a beaucoup de confusion pour les gens qui ont démarré les travaux le 14, hier.
M. STRAUSS-KAHN. - Peu importe.
L'intervenante. - Que se passe-t-il jusqu'à la Fin de l'année ? Les deux systèmes coexistent-ils ?
M. STRAUSS-KAHN. - C'est la date de la facture. On chance de monde aujourd'hui, si j'ose dire. Les factures datées d'hier sont dans l'ancien système. les factures datées de demain sont dans le nouveau système. quelle qu'ait été la date des travaux.
EM2
Une Intervenante.- En ce qui concerne le droit de bail, est-ce que la suppression annoncée sur deux ans laisse subsister la taxe additionnelle et est-ce que le dégrèvement qui était possible pour les bailleurs sur l'imposition de cette année -la simplification de cette année- continue d'exister ?
M. STRAUSS-KAHN.- Je vais répondre à la première partie de la question. La suppression du droit de bail est pour les locataires. La taxe additionnelle au droit de bail que paient les propriétaires continue d'exister. Il faudra peut-être lui changer de nom parce que c'est difficile d'être une taxe additionnelle à un droit de bail qui n'existe plus. Mais à part cela, ce que payaient les propriétaires demeurent, cc sont les 2,5 % que payaient les locataires qui disparaissent.
Un Intervenante.- Qu'objectez-vous quand on vous dit que la taxe additionnelle n'est due qu'à partir du moment où le droit de bail s'applique ?
M. STRAUSS-KAHN.- Evidemment, la législation doit être adaptée, mais l'intention du Gouvernement n'est pas de renoncer à la perception sur les propriétaires. Maintenant, sur l'interférence avec la mesure de simplification de l'année dernière, je pense que je vais me défausser et passer cela à Christian.
M. SAUTTER.- A partir du moment où nous changeons le système, nous allons rembourser les fameux neuf mois en question aux propriétaires, c'est-à-dire que les locataires, à partir du 1er janvier de l'an 2000, à condition qu'ils paient moins de 30.000 F de loyer, ne paieront plus 2,5 % de droit de bail.
Dans les HLM dont vous savez que les loyers sont stabilisés, cela veut dire que la quittance de loyer va baisser de 2,5 %. En ce qui concerne les propriétaires, ils devront sur leur feuille d'impôts du 15 septembre 2000 en principe la contribution additionnelle sur l'ensemble de l'année 1999, c'est-à-dire quatre trimestres, mais comme on va leur rembourser trois trimestres, en fait ils ne paieront plus qu'un trimestre.
Je pense que c'est une façon heureuse de sortir d'une disposition qui était apparue à la réflexion un peu complexe, aussi bien aux propriétaires qu'aux parlementaires et même qu'aux ministres.
Une Intervenante.- Excusez-moi d'insister. Est-ce à dire que l'obligation d'avoir son logement libre pendant neuf mois tombe ?
M. SAUTTER.- A partir du moment où on change de système, effectivement on va rembourser ces fameux neuf mois sur le droit de bail. Les choses sont relativement claires, en tout cas beaucoup plus claires qu'elles ne l'étaient jusqu'à présent.
M. STRAUSS-KAHN.- Nous rentrons bien dans la situation heureuse que vous pressentiez !
Un intervenant. - Sur le solde primaire et la baisse des charges d'intérêt, il a été fait mention de 4 milliards tout à l'heure. Qu'est-ce que cela représente en valeur absolue ? Pourriez-vous nous donner une fourchette pour le solde primaire en 2000 ?
M. STRAUSS-KAHN. - Pour ce qui est des charges d'intérêt en valeur absolue, cela représente justement 4 milliards. C'est la première fois. Ce que l'on avait les années précédentes, c'était un ralentissement de la progression des charges d'intérêt en raison des taux d'intérêt plus faibles et aussi du plafonnement, du fait que la dette commençait à plafonner. Là, on a pour la première fois une vraie baisse, pas simplement un ralentissement de la progression, une vraie baisse des charges d'intérêt dans le budget pour un montant de 4 milliards.
L'intervenant. - A quel niveau total ?
M.. SAUTTER. - On passe, Pour les charges d'intérêt au sens strict, de 237 milliards de francs l'an dernier à 235. Cela fait deux. Les deux autres deux, l'Etat verse des bonifications d'intérêt, par exemple pour l'accession au logement. Deux plus deux font quatre. Les charges d'intérêt au sens strict baissent donc de deux milliards. C'est une première.
M.. STRAUSS-KAHN. - Quant aux soldes primaires, nous avons vécu malheureusement beaucoup d'années avec un solde primaire négatif, c'est-à-dire avec un déficit primaire, c'est-à-dire avant charges d'intérêt. L'année dernière, nous avons, pour la première fois depuis je ne sais combien d'années, réussi à équilibrer. Cette année, il y a une vingtaine de milliards d'excédents primaires. C'est vingt pile. Ce qui est un changement très structurel de notre budget.
Une intervenante. - Le million d'emplois créés dont vous avez fait état est à 80 % sous forme précaire. Etes-vous en faveur de la taxation des emplois précaires ?
M.. STRAUSS-KAHN. - Je ne sais pas d'où vous avez votre information sur le fait qu'il y a 80 % sous forme précaire. Il y a une part de ces créations d'emploi qui découle soit d'emplois à temps partiel, ce qui n'est pas obligatoirement du travail précaire, soit d'emplois précaires. Ce que les statistiques nous donnent, c'est que plus la croissance est forte, plus la part des emplois stables et durables augmente, c'est-à-dire que plus nous serons capables d'avoir un nombre d'années de croissance importante, successives, les unes derrière les autres, moins dans la croissance, la part des emplois créés qui est précaire sera importante. Aujourd'hui, nous n'en sommes pas encore là. Ce n'est pas 80 % mais nous avons beaucoup d'emplois précaires.
Non, je ne suis pas favorable, le Gouvernement n'est pas favorable à une taxation. En revanche, le premier Ministre s'est exprimé là-dessus il y a deux jours, il faut que nous mettions en oeuvre les éléments qui permettent de faire en sorte que, partout où c'est possible et au rythme le plus rapide possible, les emplois créés par la croissance soient des emplois aussi durables qu'il est concevable.
Mais il n'y a qu'une seule manière de faire en sorte que les emplois soient durables. C'est que l'activité des entreprises dans lesquels ils se trouvent, se développe. Et cela veut dire que la croissance continue à se développer. La boucle est vite atteinte. L'emploi ne recommence à démarrer que s'il y a de la croissance., c'est vrai en partie sous forme précaire. La sortie de cette précarité repose sur la durabilité, la longueur de cette croissance. Comme nous n'avons pour le moment que trois ans avec l'an 2000 de croissance assez forte (3,2 3,3 en 1998, 2,3 en 1999, 2,8 peut-être plus je ne sais en 2000), nous n'aurons que trois ans. Dans le million en question, vous avez raison, il restera beaucoup de précaire. Mais cela diminuera à mesure que la croissance se poursuivra.
Une intervenante. - Dans les 290.000 emplois de votre scénario pour 2000, quelle est la part des emplois 35 heures, créés grâce aux 35 heures dans votre scénario ?
M. SAUTTER. - On a prévu, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, une somme de l'ordre de 7 milliards de francs pour la part Etat. On escompte peut-être 60 à 80.000 emplois qui viendront s'ajouter au mouvement spontané de la croissance et aussi à l'amplification des emplois-jeunes qui arriveront si je puis dire à leur zénith à la fin de l'an 2000.
Un intervenant. - A propos de la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien, allez-vous supprimer la réduction d'impôt pour les gros travaux et le crédit d'impôt pour les travaux d'entretien qui existent actuellement ?
M. STRAUSS-KAHN. - Il y avait deux mesures : une mesure concernant les gros travaux qui est une réduction d'impôt et nous avions créé, il y a deux ans, un crédit d'impôt parce que l'on n'était pas en état de faire de la baisse de TVA car nous n'avions pas l'autorisation bruxelloise. Il était tel que, quand il a été créé, vous pouviez déduire 15 % -c'est-à-dire l'écart entre 20,6 et 5,5- de votre impôt. Et quand vous n'étiez pas imposable à l'impôt sur le revenu, vous pouviez aller chercher un chèque de l'Etat pour vous le rembourser. Le moins que l'on puisse dire est que la complexité de la méthode fait qu'elle n'a pas été très utilisée. Cela n'a rien à voir avec l'effet qu'aura la baisse de la TVA.
L'année dernière, ces 15 %, sous la pression de la majorité, sont devenus 20 %. On déduisait l'ensemble de la TVA, non pas l'écart entre le taux normal et le taux réduit, mais l'ensemble.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Evidemment la part entre 26 et 5,5 que couvrait le crédit d'impôt, disparaît. Vous ne pouvez pas à la fois ne pas le payer parce que la TVA a baissé et quand même vous le faire rembourser par l'Etat. Il y a des limites à la façon dont on peut abandonner des ressources. En revanche, la part qui avait été créée l'année dernière entre 5,5 et 0 demeure.
Autrement dit, hier vous faisiez faire 100 francs de travaux ; vous payiez 120,6 et vous pouviez aller vous faire rembourser -peu le faisait- 20 francs, les 20,6 qui étaient au-dessus de 100. Aujourd'hui, effectivement à partir d'aujourd'hui, vous ne paierez plus que 105,5 et les 5,5 vous pouvez continuer à vous les faire rembourser. Par ailleurs, la réduction d'impôts gros travaux demeure comme elle était.
Tous les produits du bâtiment sont donc couverts soit par la baisse de TVA -c'est la plus grosse partie- soit pour ce qui excède parce que ce sont des travaux trop gros qui ne rentrent pas dans la liste large des travaux d'entretien, etc. Vous pouvez alors avoir l'avantage au titre de la mesure gros travaux.
Merci d'avoir posé cette question. J'avais oublié de le mentionner tout à l'heure. Contrairement à ce qui a été écrit de ci de là, il n'y a pas reprise d'une main ce qui est lâché de l'autre puisque la seule chose qui disparaît, c'est que l'on peut difficilement concevoir que vous vous fassiez rembourser quand vous payez 105,5 les 15 francs de TVA que vous n'avez pas payée et que vous auriez payée si vous aviez payé 120,6.
M. SAUTTER. - J'ajoute un complément. Il va subsister un crédit d'impôt grosses réparations pour les matériels qui restent à 20,6, c'est-à-dire les ascenseurs et les chaudières collectifs. Et c'est un crédit d'impôt, c'est-à-dire que dans le système, pour les orfèvres, de la réduction d'impôt pour grosses réparations, il fallait payer des impôts pour avoir une réduction d'impôt. Maintenant, si on installe un ascenseur, il y aura un crédit d'impôt même pour ceux qui ne paient pas d'impôt.
Le dispositif est donc complet et encore plus complet si je puis dire que celui qui existait actuellement.
Une intervenante. - Sur ce même sujet, il y a beaucoup de confusion pour les gens qui ont démarré les travaux le 14, hier.
M. STRAUSS-KAHN. - Peu importe.
L'intervenante. - Que se passe-t-il jusqu'à la Fin de l'année ? Les deux systèmes coexistent-ils ?
M. STRAUSS-KAHN. - C'est la date de la facture. On chance de monde aujourd'hui, si j'ose dire. Les factures datées d'hier sont dans l'ancien système. les factures datées de demain sont dans le nouveau système. quelle qu'ait été la date des travaux.
EM2
Une Intervenante.- En ce qui concerne le droit de bail, est-ce que la suppression annoncée sur deux ans laisse subsister la taxe additionnelle et est-ce que le dégrèvement qui était possible pour les bailleurs sur l'imposition de cette année -la simplification de cette année- continue d'exister ?
M. STRAUSS-KAHN.- Je vais répondre à la première partie de la question. La suppression du droit de bail est pour les locataires. La taxe additionnelle au droit de bail que paient les propriétaires continue d'exister. Il faudra peut-être lui changer de nom parce que c'est difficile d'être une taxe additionnelle à un droit de bail qui n'existe plus. Mais à part cela, ce que payaient les propriétaires demeurent, cc sont les 2,5 % que payaient les locataires qui disparaissent.
Un Intervenante.- Qu'objectez-vous quand on vous dit que la taxe additionnelle n'est due qu'à partir du moment où le droit de bail s'applique ?
M. STRAUSS-KAHN.- Evidemment, la législation doit être adaptée, mais l'intention du Gouvernement n'est pas de renoncer à la perception sur les propriétaires. Maintenant, sur l'interférence avec la mesure de simplification de l'année dernière, je pense que je vais me défausser et passer cela à Christian.
M. SAUTTER.- A partir du moment où nous changeons le système, nous allons rembourser les fameux neuf mois en question aux propriétaires, c'est-à-dire que les locataires, à partir du 1er janvier de l'an 2000, à condition qu'ils paient moins de 30.000 F de loyer, ne paieront plus 2,5 % de droit de bail.
Dans les HLM dont vous savez que les loyers sont stabilisés, cela veut dire que la quittance de loyer va baisser de 2,5 %. En ce qui concerne les propriétaires, ils devront sur leur feuille d'impôts du 15 septembre 2000 en principe la contribution additionnelle sur l'ensemble de l'année 1999, c'est-à-dire quatre trimestres, mais comme on va leur rembourser trois trimestres, en fait ils ne paieront plus qu'un trimestre.
Je pense que c'est une façon heureuse de sortir d'une disposition qui était apparue à la réflexion un peu complexe, aussi bien aux propriétaires qu'aux parlementaires et même qu'aux ministres.
Une Intervenante.- Excusez-moi d'insister. Est-ce à dire que l'obligation d'avoir son logement libre pendant neuf mois tombe ?
M. SAUTTER.- A partir du moment où on change de système, effectivement on va rembourser ces fameux neuf mois sur le droit de bail. Les choses sont relativement claires, en tout cas beaucoup plus claires qu'elles ne l'étaient jusqu'à présent.
M. STRAUSS-KAHN.- Nous rentrons bien dans la situation heureuse que vous pressentiez !
Un Intervenant.- Excusez-moi de revenir sur les problèmes de robinet. Si j'ai bien compris, il y a d'une part la réduction d'impôts sur les gros travaux qui demeure pour tout ce qui est travaux à 20,6 % et d'autre part le crédit d'impôts qui est ramené de 20 à 5 %. C'est-à-dire, sauf erreur de ma part, que la masse de déduction globale reste la même, elle change simplement de nom.
Pour prendre les crédits d'impôts, par exemple cette année, jusqu'au 14 septembre on avait 20 % de crédits d'impôts possible, maintenant on a 15 %... 12,5 % en fait de baisse de TVA, plus 5 % en résiduel en crédits d'impôts. On arrive donc semble-t-il au même montant.
M. STRAUSS-KAHN.- Non, dans le système actuel, les l30 milliards de chiffre d'affaires ... Oublions une seconde les gros travaux pour lesquels rien ne change par rapport à avant... Cela chance un peu quand même parce que comme le disait Christian, avant c'était une réduction d'impôts donc on ne bénéficiait que si on payait de l'impôt sur le revenu, maintenant c'est un crédit d'impôts et on en bénéficie.
Pour le reste, le chiffre d'affaires du secteur fait en gros 130 milliards et donc les 20,6 % de TVA représentent grosso modo 26 milliards. La réduction que nous proposons fait 19 milliards. Ces 19 milliards vont effectivement disparaître car personne ne va s'amuser à payer plus de TVA qu'il n'a droit.
Dans l'ancien système, si tous ceux qui font des travaux étaient venus demander, cela aurait été pareil, sauf que ce n'était pas le cas et qu'au total il n'y a eu que 2,5 milliards de remboursement. En théorie vous avez raison, et si le système antérieur avait totalement marché, on n'aurait pas eu besoin de baisser la TVA, vous la payiez à 20,6 et vous demandiez le remboursement. Mais comme il n'y a pas une personne sur dix qui le faisait, en réalité cela n'aura pas du tout le même effet.
Un Intervenant.- D'accord, ce sont donc les négligeants et les oublieux qui vont en bénéficier.
Deuxième chose, on a vu il y a quelques années, quand Juppé avait augmenté la TVA de 2 points, qu'en fait, du fait de la concurrence et d'autres facteurs, cela n'avait pas été répercuté intégralement. Pensez-vous que la baisse de la TVA va être répercutée intégralement -c'est difficile à dire avec précision à l'avance- ? Vous vous attendez à peu près à quelle part de répercussion ?
M. STRAUSS-KAHN.- C'est difficile à dire mais c'est un vrai sujet. C'est cette réflexion qui conduit, si on veut faire de la baisse de TVA, à ne pas privilégier des baisses du taux de 20,6 car pour la même masse, par exemple 20 milliards, baisser le taux de 20,6 conduit à le baisser à 20. Là, pour le coup, on est sûr qu'il n'y a pratiquement pas de répercussion. Ce sont les intermédiaires qui le gardent.
Evidemment, quand on passe de 20,6 à 5,5, les clients qui le savent vont demander d'avoir la baisse, mais on ne peut pas être sûr que l'intégralité sera répercutée, c'est-à-dire que certains artisans n'en profiteront pas pour augmenter les prix hors taxes. Là, il n'y a pas d'argument, c'est simplement la concurrence qui fait que cela jouera ou que cela ne jouera pas. Globalement, les expériences étrangères montrent -et l'expérience française, lors de la disparition du taux majoré pour les automobiles- qu'assez rapidement quand même la quasi totalité du coût est répercuté, mais on ne peut pas le mesurer à l'avance.
Un Intervenant.- Concernant la baisse de la TVA, vous avez dit que cela se traduirait par un manque à gagner pour le budget de l'Etat d'une petite vingtaine de milliards de francs en année pleine. Est-ce que vous incluez dans ce chiffre les rentrées fiscales qui découleront du fait que du travail qui était au noir sera blanchi ?
M. STRAUSS-KAHN.- Non, on ne l'inclut pas parce qu'on est incapable de le mesurer. Tous les travaux d'universitaires et de spécialistes qui ont été faits sur le travail au noir semblent indiquer que la seule vraie mesure efficace pour lutter contre le travail au noir c'est ce genre de mesure. Mais combien cela fait à l'arrivée ? Honnêtement on n'en sait rien.
Donc il n'est pas impossible que l'on constate après coup qu'en effet, pour un chiffre d'affaires.... Il y a deux causes, il y a ce que vous dites et aussi le fait que comme c'est moins cher, le volume des travaux peut augmenter. Donc ces deux effets peuvent conduire à ce qu'au total l'Etat s'y retrouve en partie et cela permettra de faire d'autres baisses d'impôts l'année suivante.
Nous calculons cela selon les règles habituelles de l'Etat, c'est-à-dire de façon précautionneuse, sans tenir compte d'un éventuel effet volume. Mais vous avez raison de dire cela. L'année dernière, la baisse des droits de mutation qui a été mise en place, donc la première tranche sur les frais de notaires, a donné lieu à une très grande croissance des transactions qui étaient bloquées depuis des années et qui se sont débloquées. Donc finalement, le coût est moins important parce que le taux a baissé, mais il y a eu plus de transactions.
Cet effet volume dure on ne sait pas combien de temps, et de toute façon on ne sait pas le comptabiliser à l'avance. Mais il est exact qu'il est probable qu'une mesure de ce genre, parce qu'elle relance l'activité -travail au noir d'une part et effet volume d'autre part parce que plus de gens voudront faire des travaux- peut permettre de dégager des ressources nouvelles l'année prochaine pour d'autres choses. Mais ce n'est pas comptabilisé.
Un Intervenant.- Deuxième question très précise à propos des droits de mutation : est-ce que vous nous confirmez que la baisse des droits de mutation intervient au 15 septembre ?
M. STRAUSS-KAHN.- Absolument. La baisse de la TVA, comme la baisse des droits de mutation, intervient aujourd'hui.
Un Intervenant.- Je connais cela un peu, je suis à La vie ouvrière impôts, mais sur la TVA réduction d'impôts et crédits d'impôts, je commence à m'y perdre complètement.
Jusqu'ici cela concerne uniquement l'habitation principale qui existe actuellement. Dans les réductions d'impôts, on a des gros travaux, améliorations, revêtements. Dans les crédits d'impôts, on a dépenses d'entretien courants qui bénéficiaient uniquement pour les crédits d'impôts locataires-propriétaires, autres uniquement propriétaires habitation principale, copropriétés et autres.
Aujourd'hui, on me dit que les gros travaux ne rentrent pas par rapport à la baisse de la TVA. Au passage, je ne comprends pas très bien. Mais c'est un point de vue personnel. Si on fait faire une chaudière collective, il y a 100 personnes qui font une chaudière collective, 100 personnes qui font des chauffe-bains individuels et je ne vois pas pourquoi d'un côté on bénéficie et pas de l'autre.
Sur les dépenses de gros travaux, il y a les gros travaux mais aussi l'amélioration et la limite entre améliorations et dépenses d'entretien, on ne sait pas très bien où sont les limites et c'est une source de contentieux. Là on a une liste qui passe dans le bulletin officiel des impôts ou la DB qui est extrêmement complexe. Les entrepreneurs qui font leurs déclarations sont des professionnels et non des spécialistes en droit, c'est la confusion totale.
Quand ils tombent sur une personne comme moi, je leur dis : il faut me marquer cela". Je reprends la DB et je leur dis "il faut me recopier cela surtout, parce que je vais rentrer dans le cadre". C'est la boîte à Canigou !
M. SAUTTER.- Nous n'allons pas entrer dans un débat technique alors que vous êtes à l'évidence un orfèvre. Sur cette baisse de la TVA, nous avons fait un double effort de clarté, et même un triple effort de clarté.
Premièrement, on a inclus à 5,5 % pratiquement tout et il a fallu batailler à Bruxelles -Dominique Strauss-Kahn l'a fait pour ce point.
Deuxièmement, vous trouverez dans le dossier de presse un document particulier où une bonne partie des réponses à vos questions figurent, c'est-à-dire que nous avons fait un fascicule particulier pour les professionnels, pour vous journalistes, pour les particuliers, sur la baisse de la TVA sur les travaux dans le logement.
Troisièmement, et c'est vraiment exceptionnel, ce matin au Bulletin officiel des impôts, nous avons publié une instruction fiscale qui détaille dans les termes techniques très remarquables que vous avez employés tout ceci pour les professionnels.
C'est la première fois que l'instruction fiscale sort en même temps que la disposition fiscale et je dirais même avant que ceci ait été voté par le Parlement. Donc je crois qu'on a fait un effort de clarté. Nous en avons beaucoup discuté tout l'été avec les professionnels, ceci a été fait avec les professionnels et avec les services compétents, direction de la législation fiscale notamment, avec le secrétaire d'Etat au logement.
Cela aurait pu être très compliqué, comme vous le craignez, je pense que cela va être simple et vous pourrez vous en rendre compte dans les documents qui ont été préparés à cet effet.
Une Intervenante. - Je voudrais aborder un autre sujet : les dépenses de solidarité. Avez-vous prévu d'autres mesures que la CMU en faveur des populations précarisées ?
M. SAUTTER. - Je peux vous répondre sur ce point. Vous avez peut-être remarqué que, durant le mois d'août, nous avons sorti un document budgétaire un peu technique, qui s'appelle un décret d'avance, qui comprend 3 milliards de francs de dépenses supplémentaires pour 1999. On s'interroge pour 1999 de façon à financer les accroissements des minima sociaux qui ont été décidés durant l'hiver précédent, trop tard pour que cela soit inscrit dans la loi de finances. Evidemment, dans le budget de la 1 solidarité dont je vous ai parlé, il y a ce qu'il faut pour faire progresser les minima sociaux de façon tout à fait conforme à la volonté du Gouvernement.
Je pense qu'en regardant un peu en détail, Madame, le budget de la solidarité, que Mme AUBRY présentera, vous verrez qu'il y a une réponse positive à votre question.
Un Intervenant. - Pour la baisse de la TVA sur les travaux à domicile, comment cela s'imbrique-t-il avec les crédits d'impôts sur les emplois familiaux ? Cela se cumule-t-il ?
M. SAUTTER. - Oui.
Juste un mot sur la TVA sur les emplois à domicile. Actuellement, dans notre pays, il y a deux systèmes de services à domicile. Le principal, c'est celui qui est assuré par des associations, qui sont très nombreuses, qui font un formidable travail pour aider les personnes âgées, garder les enfants notamment. Ces associations sont exonérées de TVA. Elles ne sont absolument pas concernées. Elles n'ont pas à s'inquiéter de la disposition qui est prise.
Dans notre pays, à la différence de ce qui existe en Europe du Nord par exemple, peu d'entreprises assurent des services à domicile. La mesure qui est prise a pour but, à côté du secteur associatif qui va continuer de se développer, de renforcer l'intervention des entreprises avec un taux de TVA, mais les autres systèmes fiscaux restent.
Un Intervenant. - L'année dernière, pour revenir au retour à l'universalité des allocations familiales, vous avez passé pour une demi part pour enfant à charge le quotient de 16 380 à 11 000 francs. Cela a eu des répercussions sur les pensions alimentaires pour enfants majeurs de 30 000 à 20 000 francs. Aujourd'hui, des gens doivent solder leur solde avant minuit. Ils ont eu leur alimentation d'impôt. Les gens qui sont à 24 % sont autour de 100.000. Cela leur a fait 2400 francs en plus d'impôt. Ce ne sont pas des riches. Ils ne touchent pas d'allocations familiales. Ils sont seuls. Ils ont une augmentation d'impôt de 2400 francs. Pensez-vous remonter le plafond des pensions alimentaires pour les enfants majeurs, notamment pour les gens défavorisés ?
M. SAUTTER. - Vous posez une question de citoyen. Le débat reviendra peut-être devant l'Assemblée. Nous avons effectivement diminué parallèlement le quotient familial et ces allocations pour les enfants majeurs parce que, parallèlement, le gouvernement a décidé, en accord avec les associations familiales, de déplafonner les allocations familiales. Il est vrai que, pour un très petit nombre de foyers, le coût peut être substantiel. L'essentiel des familles ont retrouvé leurs allocations familiales et, grosso modo, ne doivent pas subir le préjudice que vous indiquez.
Un Intervenant. - Pour revenir à la conjoncture, plusieurs économistes anticipent un relèvement des taux de la Banque centrale européenne d'ici six mois ou un an. Est-ce un risque pour la croissance française ?
M. STRAUSS-KAHN. - Si les taux d'intérêt se relèvent, c'est toujours un risque pour la croissance. Cela dépend de quelle ampleur. Mais, pour le moment, ceux qui prennent un risque sont ceux qui anticipent une hausse des taux.
Une Intervenante. - Je reviens sur les mesures en faveur de la création d'entreprises, la suppression de tous les impôts d'Etat qui pénalisaient ces créations. Je voudrais savoir si vous avez des prévisions d'impact et de déblocage. Il y a beaucoup de porteurs de projets en France. Avez-vous une idée du déclic, du nombre d'entreprises qui vont être créées et du nombre d'emplois ?
M. STRAUSS-KAHN. - Honnêtement pas. Je pense que cela a un effet fort. Toutes les prévisions que nous pouvons faire dans ce domaine sont sujettes à caution. Les chiffres dont nous disposons se situent autour de 140 000 entreprises concernées. Quel est l'effet démultiplicateur ou de déclic, comme vous dites, d'une mesure de ce genre ? C'est très difficile à estimer à l'avance. C'est une demande répétée dans le secteur de créations d'entreprises. On voit bien qu'il y avait un frein. On lève petit à petit les freins. L'effet dynamique que cela aura est difficile à estimer à l'avance.
Merci beaucoup.