Texte intégral
Monsieur le président, Jean le Foll,
Madame la députée-maire, Brigitte le Brethon,
Monsieur le président du Conseil régional, René Garrec,
Monsieur le président du Conseil général de l'Orne, Gérard Burel,
Madame le procureur général près de la Cour des comptes, Hélène Gisserot,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs,
Je suis heureux, Monsieur le président, de votre invitation à clôturer le colloque du 20e anniversaire de la Chambre régionale des comptes de Basse-Normandie.
Outre le plaisir de connaître cette belle région et d'y résider, trois raisons me valent sans doute plus particulièrement l'honneur de prendre la parole pour cette commémoration, en ce lieu chargé d'histoire.
Ministre en charge directe des comptes de l'État, et en charge indirecte des comptes des collectivités publiques, je suis naturellement attentif à l'exercice de votre première attribution : le contrôle juridictionnel des comptes.
Ministre en charge des finances publiques, je porte un intérêt majeur à votre seconde attribution : le contrôle de l'efficacité de la gestion publique.
Enfin, comme ministre de la réforme budgétaire, je suis chargé de mettre en oeuvre la loi organique du 1er août 2001, la nouvelle constitution financière de la France, qui ouvre aux chambres régionales des comptes des perspectives que je souhaite vous faire partager.
Je voudrais évoquer devant vous ces trois points, en clôture de vos travaux. J'espère que vous me pardonnerez de ne pas aborder d'autres sujets, comme le contrôle budgétaire ou les relations entre les juridictions financières et les autres services de l'État.
Le jugement des comptes
Monsieur le président, je me dois, en premier lieu, de saluer en votre personne et dans la personne des membres qui composent la Chambre, votre qualité de magistrats, appartenant à une juridiction de l'État.
C'est en ayant cette qualité bien présente à l'esprit que j'évoquerai l'aspect juridictionnel du contrôle des comptes.
Il découle de la séparation traditionnelle de l'ordonnateur et du comptable et ne soulève pas de difficulté majeure : les responsabilités sont claires, le sujet et l'objet du contrôle définis avec précision, de même que les garanties de procédures.
Je crois que l'on peut néanmoins travailler à l'améliorer encore. Dans cet esprit, les juridictions financières et la direction de la comptabilité publique ont engagé le chantier des simplifications tant sur l'examen des comptes, le classement des pièces comptables, que sur l'indispensable dématérialisation des comptes et des pièces justificatives.
D'un commun accord, l'objectif est de dépoussiérer les procédures de jugement des comptes, enjeu d'efficacité et de gains de productivité.
J'ajoute que je suis attaché à l'expérimentation du contrôle hiérarchisé des dépenses, mise en oeuvre par la comptabilité publique, qui proportionne l'étendue des contrôles aux enjeux financiers et aux risques identifiés,
Interrogeons-nous également sur la liste des pièces exigées à l'appui des paiements tant au regard de l'enjeu, que de l'exigence du paiement rapide des fournisseurs et des créanciers. La chaîne de la dépense doit être plus fluide et les délais de paiement plus courts.
Bref, l'effort de réengénierie des procédures que nous avons engagé au ministère des finances doit aussi s'appliquer au contrôle des comptes des collectivités locales.
Le contrôle de la gestion des collectivités
J'évoquerai à présent le second aspect du contrôle des collectivités, à savoir le contrôle de la gestion.
Je sais vos relations avec les collectivités apaisées et sereines, en Basse-Normandie. La réunion de ce jour en fournit une preuve éclatante. Preuve qu'en vingt ans, les juridictions comme les collectivités locales ont atteint le degré de maturité qu'espéraient les auteurs des premières lois de décentralisation.
La loi du 21 décembre 2001 a, il est vrai, beaucoup aidé en clarifiant la nature du contrôle de gestion. Elle a mis fin au débat récurrent sur la distinction entre contrôle de régularité et contrôle d'opportunité.
C'est donc sur des bases solides que s'annoncent aujourd'hui, avec la nouvelle étape de la décentralisation, de nouveaux transferts de compétences aux collectivités et, pour certaines d'entre elles, un accroissement très significatif des ressources gérées.
Je le dis sans hésitation : si les pouvoirs publics, Gouvernement et Parlement, n'avaient pas mis leur confiance dans le contrôle a posteriori exercé par les chambres régionales des comptes, jamais la seconde vague de décentralisation n'aurait pris l'ampleur qui lui a été donnée par la loi constitutionnelle du 7 mars 2003.
Mesdames et Messieurs les membres de la chambre régionale, c'est votre capacité d'expertise qui contribuera à la solidité du nouvel édifice institutionnel à construire. Mais plus encore, c'est l'union de vos compétences et de votre indépendance qui diffusera dans tout le corps social le respect pour les nouveaux pouvoirs issus de la décentralisation.
Vous comportant en tout comme de dignes et loyaux magistrats, selon la formule de votre serment, vous entretiendrez la confiance. Elle est indispensable à toute action humaine d'envergure et une condition de succès pour l'oeuvre de réforme engagée par le gouvernement, pour la modernisation de l'État et le succès économique.
Plus précisément, les juridictions financières peuvent aider à l'avènement d'une culture de l'évaluation des politiques publiques.
Les élus ont besoin d'un regard constructif sur la gestion, sur l'organisation des services, l'exactitude des prévisions budgétaires et financières, l'existence ou non d'une capacité de contrôle interne. J'attends beaucoup de la complémentarité entre le contrôle interne, au sein de la collectivité, et le contrôle externe que vous représentez.
J'encourage, au sein de mon ministère, le développement, à l'initiative de la direction de la comptabilité publique, d'un contrôle partenarial entre le comptable public et les services des différents organismes dont il est le payeur. Ce partenariat peut utilement inspirer les travaux des juridictions financières dans leur mission d'examen des gestions locales; et, pour répondre à la question posée à l'instant par le président Gérard Burel, je l'appelle de mes voeux.
Les juridictions ont également un rôle essentiel à jouer pour mettre à jour les complexités, voire les contradictions des innombrables réglementations, le maquis des textes, la lourdeur des procédures, l'excès de formalisme et d'interdits sur les points mineurs, mais aussi, parfois, à l'inverse, l'absence de garde-fou ou les blocages qui peuvent empêcher, retarder, alourdir le coût de certaines politiques locales.
Allez de l'avant, soyez une force de propositions et de simplification des réglementations et des procédures. Je vous y invite. Les transferts de compétences prévus dans la loi de décentralisation vous offrent un champ immédiat ! Et la nouvelle constitution financière de l'État vous donne, ainsi qu'aux élus, un modèle pour bâtir ensemble la démocratie locale du XXIe siècle.
Les perspectives ouvertes par la Loi organique
Certes, à l'heure actuelle, l'État est seul concerné par la loi organique du 1er août 2001. Et il est prématuré d'en dessiner les conséquences sur l'organisation des services de l'État dans les régions et les départements.
Mais tous savent ici qu'elle offre un levier majeur pour réformer l'État, améliorer sa performance, offrir une véritable évaluation des politiques publiques et renforcer le rôle du Parlement dans l'autorisation budgétaire et le contrôle de la dépense.
Le principe fondamental qui est au coeur de la loi organique, est celui de la responsabilisation des gestionnaires qui se verront assigner des objectifs, allouer des moyens pour les atteindre et évaluer les résultats obtenus. Une démarche aussi ambitieuse conduit à réfléchir à l'ensemble de la chaîne des contrôles. Ce point fait d'ailleurs partie des propositions que j'ai récemment transmises au Premier ministre en vue de simplifier la dépense de l'État.
C'est dans cette perspective que, vous le savez, la loi organique va entraîner une évolution des missions de la Cour des comptes. En particulier celle-ci sera appelée à certifier, à partir de 2006, les comptes annuels de l'État.
Il s'agit d'une évolution générale dans les pays de l'Union européenne, et qui n'est d'ailleurs pas propre au secteur public. Elle ne tardera donc plus à atteindre les collectivités locales. Il est trop tôt pour détailler ce que pourrait être une certification des comptes de ces collectivités, mais je crois la voie tracée pour les juridictions financières régionales. Deux grands axes s'ouvrent devant elles :
- Garantir que les comptes des collectivités et des établissements rattachés reflètent bien la réalité des opérations, qu'ils sont sincères, qu'ils comportent tous les engagements pris,
- Éclairer les exécutifs locaux et les assemblées délibérantes sur l'existence et la qualité de leurs propres contrôles internes, sur la mesure de leurs performances, sur les pistes d'améliorations possibles.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, il y a mille ans, dans cette salle dite de l'Échiquier, a commencé de s'élaborer une méthode de reddition des comptes qui était déjà quasi juridictionnelle. Elle s'appuyait sur la conviction que les ressources provenant de l'activité collective devaient être mises au service exclusif de la puissance publique.
Après la conquête, ces principes ont formé le germe de la souveraineté parlementaire d'où sont issues nos démocraties modernes.
La géographie fait de vous les héritiers de cette dynamique inscrite dans l'histoire politique du monde. Elle augure un très grand avenir pour la Chambre régionale des Comptes de Basse-Normandie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 17 juin 2003)
Madame la députée-maire, Brigitte le Brethon,
Monsieur le président du Conseil régional, René Garrec,
Monsieur le président du Conseil général de l'Orne, Gérard Burel,
Madame le procureur général près de la Cour des comptes, Hélène Gisserot,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs,
Je suis heureux, Monsieur le président, de votre invitation à clôturer le colloque du 20e anniversaire de la Chambre régionale des comptes de Basse-Normandie.
Outre le plaisir de connaître cette belle région et d'y résider, trois raisons me valent sans doute plus particulièrement l'honneur de prendre la parole pour cette commémoration, en ce lieu chargé d'histoire.
Ministre en charge directe des comptes de l'État, et en charge indirecte des comptes des collectivités publiques, je suis naturellement attentif à l'exercice de votre première attribution : le contrôle juridictionnel des comptes.
Ministre en charge des finances publiques, je porte un intérêt majeur à votre seconde attribution : le contrôle de l'efficacité de la gestion publique.
Enfin, comme ministre de la réforme budgétaire, je suis chargé de mettre en oeuvre la loi organique du 1er août 2001, la nouvelle constitution financière de la France, qui ouvre aux chambres régionales des comptes des perspectives que je souhaite vous faire partager.
Je voudrais évoquer devant vous ces trois points, en clôture de vos travaux. J'espère que vous me pardonnerez de ne pas aborder d'autres sujets, comme le contrôle budgétaire ou les relations entre les juridictions financières et les autres services de l'État.
Le jugement des comptes
Monsieur le président, je me dois, en premier lieu, de saluer en votre personne et dans la personne des membres qui composent la Chambre, votre qualité de magistrats, appartenant à une juridiction de l'État.
C'est en ayant cette qualité bien présente à l'esprit que j'évoquerai l'aspect juridictionnel du contrôle des comptes.
Il découle de la séparation traditionnelle de l'ordonnateur et du comptable et ne soulève pas de difficulté majeure : les responsabilités sont claires, le sujet et l'objet du contrôle définis avec précision, de même que les garanties de procédures.
Je crois que l'on peut néanmoins travailler à l'améliorer encore. Dans cet esprit, les juridictions financières et la direction de la comptabilité publique ont engagé le chantier des simplifications tant sur l'examen des comptes, le classement des pièces comptables, que sur l'indispensable dématérialisation des comptes et des pièces justificatives.
D'un commun accord, l'objectif est de dépoussiérer les procédures de jugement des comptes, enjeu d'efficacité et de gains de productivité.
J'ajoute que je suis attaché à l'expérimentation du contrôle hiérarchisé des dépenses, mise en oeuvre par la comptabilité publique, qui proportionne l'étendue des contrôles aux enjeux financiers et aux risques identifiés,
Interrogeons-nous également sur la liste des pièces exigées à l'appui des paiements tant au regard de l'enjeu, que de l'exigence du paiement rapide des fournisseurs et des créanciers. La chaîne de la dépense doit être plus fluide et les délais de paiement plus courts.
Bref, l'effort de réengénierie des procédures que nous avons engagé au ministère des finances doit aussi s'appliquer au contrôle des comptes des collectivités locales.
Le contrôle de la gestion des collectivités
J'évoquerai à présent le second aspect du contrôle des collectivités, à savoir le contrôle de la gestion.
Je sais vos relations avec les collectivités apaisées et sereines, en Basse-Normandie. La réunion de ce jour en fournit une preuve éclatante. Preuve qu'en vingt ans, les juridictions comme les collectivités locales ont atteint le degré de maturité qu'espéraient les auteurs des premières lois de décentralisation.
La loi du 21 décembre 2001 a, il est vrai, beaucoup aidé en clarifiant la nature du contrôle de gestion. Elle a mis fin au débat récurrent sur la distinction entre contrôle de régularité et contrôle d'opportunité.
C'est donc sur des bases solides que s'annoncent aujourd'hui, avec la nouvelle étape de la décentralisation, de nouveaux transferts de compétences aux collectivités et, pour certaines d'entre elles, un accroissement très significatif des ressources gérées.
Je le dis sans hésitation : si les pouvoirs publics, Gouvernement et Parlement, n'avaient pas mis leur confiance dans le contrôle a posteriori exercé par les chambres régionales des comptes, jamais la seconde vague de décentralisation n'aurait pris l'ampleur qui lui a été donnée par la loi constitutionnelle du 7 mars 2003.
Mesdames et Messieurs les membres de la chambre régionale, c'est votre capacité d'expertise qui contribuera à la solidité du nouvel édifice institutionnel à construire. Mais plus encore, c'est l'union de vos compétences et de votre indépendance qui diffusera dans tout le corps social le respect pour les nouveaux pouvoirs issus de la décentralisation.
Vous comportant en tout comme de dignes et loyaux magistrats, selon la formule de votre serment, vous entretiendrez la confiance. Elle est indispensable à toute action humaine d'envergure et une condition de succès pour l'oeuvre de réforme engagée par le gouvernement, pour la modernisation de l'État et le succès économique.
Plus précisément, les juridictions financières peuvent aider à l'avènement d'une culture de l'évaluation des politiques publiques.
Les élus ont besoin d'un regard constructif sur la gestion, sur l'organisation des services, l'exactitude des prévisions budgétaires et financières, l'existence ou non d'une capacité de contrôle interne. J'attends beaucoup de la complémentarité entre le contrôle interne, au sein de la collectivité, et le contrôle externe que vous représentez.
J'encourage, au sein de mon ministère, le développement, à l'initiative de la direction de la comptabilité publique, d'un contrôle partenarial entre le comptable public et les services des différents organismes dont il est le payeur. Ce partenariat peut utilement inspirer les travaux des juridictions financières dans leur mission d'examen des gestions locales; et, pour répondre à la question posée à l'instant par le président Gérard Burel, je l'appelle de mes voeux.
Les juridictions ont également un rôle essentiel à jouer pour mettre à jour les complexités, voire les contradictions des innombrables réglementations, le maquis des textes, la lourdeur des procédures, l'excès de formalisme et d'interdits sur les points mineurs, mais aussi, parfois, à l'inverse, l'absence de garde-fou ou les blocages qui peuvent empêcher, retarder, alourdir le coût de certaines politiques locales.
Allez de l'avant, soyez une force de propositions et de simplification des réglementations et des procédures. Je vous y invite. Les transferts de compétences prévus dans la loi de décentralisation vous offrent un champ immédiat ! Et la nouvelle constitution financière de l'État vous donne, ainsi qu'aux élus, un modèle pour bâtir ensemble la démocratie locale du XXIe siècle.
Les perspectives ouvertes par la Loi organique
Certes, à l'heure actuelle, l'État est seul concerné par la loi organique du 1er août 2001. Et il est prématuré d'en dessiner les conséquences sur l'organisation des services de l'État dans les régions et les départements.
Mais tous savent ici qu'elle offre un levier majeur pour réformer l'État, améliorer sa performance, offrir une véritable évaluation des politiques publiques et renforcer le rôle du Parlement dans l'autorisation budgétaire et le contrôle de la dépense.
Le principe fondamental qui est au coeur de la loi organique, est celui de la responsabilisation des gestionnaires qui se verront assigner des objectifs, allouer des moyens pour les atteindre et évaluer les résultats obtenus. Une démarche aussi ambitieuse conduit à réfléchir à l'ensemble de la chaîne des contrôles. Ce point fait d'ailleurs partie des propositions que j'ai récemment transmises au Premier ministre en vue de simplifier la dépense de l'État.
C'est dans cette perspective que, vous le savez, la loi organique va entraîner une évolution des missions de la Cour des comptes. En particulier celle-ci sera appelée à certifier, à partir de 2006, les comptes annuels de l'État.
Il s'agit d'une évolution générale dans les pays de l'Union européenne, et qui n'est d'ailleurs pas propre au secteur public. Elle ne tardera donc plus à atteindre les collectivités locales. Il est trop tôt pour détailler ce que pourrait être une certification des comptes de ces collectivités, mais je crois la voie tracée pour les juridictions financières régionales. Deux grands axes s'ouvrent devant elles :
- Garantir que les comptes des collectivités et des établissements rattachés reflètent bien la réalité des opérations, qu'ils sont sincères, qu'ils comportent tous les engagements pris,
- Éclairer les exécutifs locaux et les assemblées délibérantes sur l'existence et la qualité de leurs propres contrôles internes, sur la mesure de leurs performances, sur les pistes d'améliorations possibles.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, il y a mille ans, dans cette salle dite de l'Échiquier, a commencé de s'élaborer une méthode de reddition des comptes qui était déjà quasi juridictionnelle. Elle s'appuyait sur la conviction que les ressources provenant de l'activité collective devaient être mises au service exclusif de la puissance publique.
Après la conquête, ces principes ont formé le germe de la souveraineté parlementaire d'où sont issues nos démocraties modernes.
La géographie fait de vous les héritiers de cette dynamique inscrite dans l'histoire politique du monde. Elle augure un très grand avenir pour la Chambre régionale des Comptes de Basse-Normandie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 17 juin 2003)