Texte intégral
Je suis heureux de vous présenter aujourd'hui, avec Jean-Paul Delevoye, le projet de loi de décentralisation que le Gouvernement soumettra à l'examen du Parlement au cours de l'automne.
- Conformément aux dispositions de l'article 9 de la loi du 26 janvier 1984, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale doit être saisi pour avis par le ministre chargé des collectivités territoriales des projets de loi relatifs à la fonction publique territoriale. Vous êtes donc appelés à rendre un avis sur les dispositions du titre V du projet de loi de décentralisation, lesquelles sont relatives aux transferts de services et aux garanties individuelles des agents.
- Au-delà des dispositions de ce titre V, le Gouvernement a néanmoins souhaité présenter au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale l'économie de l'ensemble du projet de loi, comme nous en étions d'ailleurs convenus avec votre président M. Le Breton. C'est à cet exercice que je me livrerai dans un instant avant que Jean-Paul Delevoye ne revienne plus longuement sur les dispositions du titre V.
- Auparavant, je crois utile de rappeler que les dispositions du projet de loi seront mises en uvre dans le nouveau cadre constitutionnel défini par la loi du 28 mars 2003 et de souligner que ce texte a été élaboré à l'issue d'une concertation approfondie.
1. Les dispositions du projet de loi seront mises en uvre dans un nouveau cadre constitutionnel qui apporte des garanties importantes aux collectivités territoriales
- Des principes nouveaux ont été insérés dans la Constitution. Outils d'une modernisation de notre République, ils sont destinés à produire leurs effets dans le temps : l'organisation décentralisée de la République inscrite à l'article premier de la Constitution à côté des principes fondateurs que sont l'indivisibilité de la République et l'égalité des citoyens devant la loi ; l'expérimentation ; l'objectif constitutionnel de subsidiarité ; le pouvoir réglementaire des collectivités territoriales ; l'absence de tutelle d'une collectivité sur l'autre, qui devra se combiner avec la notion de collectivité chef de file.
- La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a, en outre, apporté aux collectivités territoriales de nouvelles et importantes garanties financières, qui leur permettront de mettre en uvre leurs compétences dans des conditions plus sûres : libre disposition des ressources ; faculté pour la loi d'autoriser les collectivités territoriales à fixer l'assiette et le taux des impôts qu'elles reçoivent ; garantie de la part des ressources fiscales dans l'ensemble des ressources ; garantie aussi de la compensation des transferts de compétences ; obligation pour la loi de déterminer des ressources en cas de création ou d'extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales ; obligation de mettre en place des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales.
2. Une concertation approfondie a été menée pour la préparation du projet de loi de décentralisation
- Le Gouvernement a, en effet, décidé d'engager une grande concertation dans tous les territoires, pour que soient définis au plus près des réalités les besoins et les projets : tel fut l'objet des Assises des libertés locales qui se sont déroulées dans les 26 régions de métropole et d'outre-mer entre le mois d'octobre 2002 et le mois de janvier 2003. Ces assises ont connu un vif succès : au total, 55 000 personnes y ont participé ; précédées d'ateliers thématiques sur les sujets les plus divers, elles ont donné lieu à des débats très intenses. Elles ont témoigné d'une forte demande de décentralisation, faisant émerger plus de 600 propositions de nouveaux transferts de compétences ou d'expérimentations. Ainsi, le projet de loi de décentralisation se fonde directement sur les attentes exprimées par les collectivités locales et les citoyens. La synthèse des Assises des Libertés locales a été faite, le 28 février dernier, à Rouen. A cette occasion, le Premier Ministre a fixé les grandes orientations qui ont servi de base à l'élaboration du projet de loi de décentralisation.
- Le Gouvernement a par ailleurs mené une concertation étroite avec les associations d'élus, les maires, les présidents d'intercommunalité, les présidents de conseil général et régional. Cette même concertation a été conduite avec les organisations syndicales. Outre les entretiens que Jean-Paul Delevoye et moi-même avons eus, deux tables rondes ont permis des échanges sur les transferts de compétences envisagés et sur les modalités retenues pour les agents concernés. Des réunions bilatérales ont par ailleurs permis à chaque organisation de faire connaître ses préoccupations et d'appeler l'attention du Gouvernement sur tel ou tel aspect des transferts de personnel.
- Enfin, les transferts envisagés dans le domaine de l'Education nationale ont fait l'objet de plusieurs séances de travail avec les syndicats. Ces discussions ont permis d'apporter des précisions sur le rôle de l'Etat, sur les missions des agents et sur les conditions d'intervention des collectivités territoriales dans le domaine de l'Education. Le projet de loi tient compte des points d'accord qui ont pu être dégagés à cette occasion. Cette concertation se poursuivra dans la mise en uvre de la réforme.
3. Etabli sur ces bases, le projet de loi opère d'importants transferts de compétences au profit des collectivités territoriales tout en favorisant une meilleure identification de leurs missions respectives
- La décentralisation est, aux yeux du Gouvernement, l'aiguillon de la nécessaire modernisation de notre pays et de l'évolution de ses structures administratives. Rapprochant la décision publique du citoyen, elle la rendra plus simple, plus efficace et plus démocratique. Clarifiant la répartition des compétences, elle permettra aux citoyens de mieux identifier les responsables des politiques publiques.
a) Le département sera, en subsidiarité avec les communes et les intercommunalités, en charge des politiques de solidarité et de la gestion des équipements de proximité
- Le rôle social du département est pleinement affirmé. Outre le transfert de la responsabilité complète du RMI/RMA, opéré par ailleurs, le département bénéficie du transfert des autres fonds sociaux de l'Etat (FSL, FAJ,) et de l'achèvement du transfert de responsabilités en ce qui concerne les personnes âgées. Il assurera, à ce titre, la coordination des organismes publics et privés susceptibles d'allouer des aides aux personnes en grande difficulté, compétence précédemment exercée par l'Etat à travers les commissions d'action sociale d'urgence. L'initiative, le pilotage et la responsabilité d'arrêter le schéma départemental de l'action sociale et médico-sociale reviendront au président du conseil général, à charge pour lui d'assurer les concertations nécessaires. En matière d'action sociale, l'Etat ne sera plus en charge que de la très grande exclusion (CHRS, hébergement d'urgence) et de l'intégration.
- Dans le domaine des infrastructures, les départements bénéficieront d'un transfert des routes nationales, en dehors du réseau national structurant qui sera réduit des deux tiers, soit un transfert portant sur 20 000 km.
- La compétence dévolue au département par les premières lois de décentralisation en ce qui concerne la gestion des collèges sera confortée par le transfert des personnels TOS qui y sont affectés.
- Les communes et les intercommunalités sont également pleinement concernées par les dispositions du projet de loi, dans une relation de subsidiarité avec les départements et dans certains cas les régions. C'est ainsi que le titre IX du projet de loi, en particulier, renforce la place des communes et des maires dans le tissu local et vise à consolider les structures intercommunales en simplifiant leur fonctionnement. Les intercommunalités pourront notamment demander à exercer sur leur territoire les compétences des autres collectivités, par convention avec celles-ci.
- En matière de logement, l'ensemble des aides à la pierre sera délégué par l'Etat aux structures intercommunales et, là où elles n'existent pas, aux départements. Leur montant restera donc fixé par l'Etat mais elles seront individualisées librement par les collectivités. Les communes et leurs groupements assureront également la responsabilité du logement étudiant que l'Etat leur transférera en pleine propriété. La gestion des logements fera l'objet d'une convention entre la commune ou le groupement propriétaire et le CROUS territorialement compétent.
- Les communes et les départements pourront également, s'ils le souhaitent, demander à exercer des compétences relatives aux grands équipements, tels que les ports d'intérêt national, les ports intérieurs, certains aérodromes d'intérêt local ou encore certains monuments historiques. - En outre, les communes resteront responsables de l'enseignement artistique initial en vue d'une pratique en amateur, ainsi que de l'offre d'éducation artistique en partenariat avec les établissements scolaires.
b) La région, en subsidiarité avec l'Etat, assurera les compétences d'orientation et de programmation
- En ce qui concerne le soutien au développement économique, la région exercera une mission de coordination des interventions économiques sur le territoire régional et recevra les moyens financiers que l'Etat y consacre. L'Etat ne conservera qu'un rôle institutionnel vis à vis des institutions communautaires et un devoir d'alerte, voire d'intervention subsidiaire, en cas de difficultés particulières des entreprises. Le rôle de la région sera également renforcé en matière de formation professionnelle. Elle bénéficiera du transfert de la quasi-totalité des outils financiers qui y concourent, notamment la commande publique à l'AFPA. Elle décidera de la carte des formations professionnelles.
- En ce qui concerne la voirie, la région sera chargée d'élaborer un schéma multimodal des transports et pourra orienter les choix d'investissement de l'Etat et des départements par ses cofinancements. Pour les autres infrastructures (ports, aéroports, canaux), l'Etat ne conservera que la responsabilité des dix plus grands aéroports et des ports autonomes.
- La compétence régionale relative aux lycées sera par ailleurs confortée par le transfert des personnels TOS qui y sont affectés.
- Dans le domaine de la santé, la région pourra participer aux instances de décision en matière d'organisation de l'offre de soins ainsi qu'au financement d'équipements sanitaires. Elle pourra également contribuer à des programmes régionaux spécifiques de santé publique ainsi qu'à des investissements sanitaires. Elle assurera la gestion des écoles de formation des professions para-médicales.
- Dans le domaine de la culture, le projet de loi prévoit une décentralisation de l'inventaire du patrimoine au profit des régions, à charge pour elles de passer convention avec les autres collectivités territoriales pour la réalisation des opérations d'inventaire que ces dernières souhaitent conduire. En outre, la propriété et l'entretien des monuments historiques, dont la liste sera établie par décret en Conseil d'Etat (à l'exception des cathédrales et des monuments d'intérêt national) pourront être transférés aux collectivités territoriales qui en feront la demande. En matière d'enseignement artistique, les régions pourront apporter leur financement aux communes pour la prise en charge des cycles d'orientation professionnelle des établissements concernés.
c) La décentralisation ne remet pas en cause le rôle de l'Etat qui pourra au contraire mieux exercer ses missions essentielles
- Loin de remettre en cause le rôle de l'Etat, l'approfondissement de la décentralisation lui permettra de mieux exercer ses missions essentielles, non seulement ses missions régaliennes traditionnelles mais aussi ses missions qui concourent à la cohésion nationale en veillant à la solidarité entre les citoyens et entre les territoires. Il revient en particulier à l'Etat de veiller au respect de la loi : le contrôle de légalité sera prochainement modernisé pour le rendre plus efficace. En outre, le Gouvernement proposera au Parlement d'adopter un dispositif d'évaluation des politiques locales.
- La décentralisation est un levier de la réforme de l'Etat. Le titre VIII du projet de loi propose des dispositions pour contribuer à un Etat terrritorial plus cohérent, plus responsable et plus réactif.
4. Le projet de loi prévoit les garanties nécessaires sur la compensation financières des transferts de compétences et sur les transferts de personnels
a) Les transferts de compétences seront financés loyalement en privilégiant les ressources fiscales
- Conformément aux principes fixés par la Constitution, ces transferts de compétences seront accompagnés du transfert des moyens financiers correspondants. Les compensations financières résulteront essentiellement, afin de préserver l'autonomie financière des collectivités territoriales, de transferts de ressources fiscales jusque là attribuées à l'Etat, en particulier une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP).
- Comme l'exige la loi organique relative aux lois de finances, il reviendra à la loi de finances de fixer les montants et de procéder au partage des impôts nationaux. Le Gouvernement sera particulièrement attentif à la bonne articulation entre le projet de loi de décentralisation, qui fixera les principes régissant les transferts de ressources et la loi de finances, étant observé que les transferts de compétences prévus par le projet de loi ne pourront entrer en vigueur avant le 1er janvier 2005. Le projet de loi de décentralisation précise expressément que ces transferts entreront en vigueur sous réserve que la loi de finances en ait correctement tiré les conséquences, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, lequel devra s'assurer que l'Etat a bien transféré l'intégralité des moyens qu'il mettait en uvre jusque là et que les modalités de la compensation financière ne dégradent pas le taux d'autonomie fiscale des collectivités territoriales.
b) Les garanties nécessaires sont prévues pour les personnels concernés par les transferts de compétences
- Le titre V du projet de loi organise le transfert des services de l'Etat nécessaires à l'exercice des compétences transférées tout en donnant toutes les garanties individuelles nécessaires aux agents.
- Jean-Paul Delevoye vous exposera plus en détail le dispositif prévu, lequel se déroulera en plusieurs étapes. Je voudrais néanmoins souligner que le projet de loi apporte plusieurs garanties aux quelque 140 000 personnels d'Etat qui seront transférés aux collectivités territoriales :
1) L'intégration des agents dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale sera de droit, à leur demande présentée dans le délai prévu pour le droit d'option ;
2) Ces agents seront intégrés dans une fonction publique qui bénéficie des mêmes garanties que la fonction publique d'Etat et qui a fait la preuve depuis 1983 de son attractivité ;
3) Les agents qui le souhaiteront pourront conserver un lien statutaire avec leur administration d'origine, en étant placés en position de détachement sans limitation de durée ;
4) les agents qui auront fait ce choix de maintenir leur lien statutaire avec l'Etat auront la faculté de demander à tout moment leur intégration dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale, les collectivités étant alors libres des suites à réserver à cette demande ;
5) les contrats en cours des agents non titulaires de droit public seront repris par la collectivité d'accueil ;
6) les missions des personnels de l'éducation nationale seront maintenues dans les établissements ;
7) le bénéfice des services actifs sera maintenu aux agents de l'Etat concernés après leur intégration dans la fonction publique territoriale.
En conclusion, je veux vous indiquer que le Conseil d'Etat devrait rendre son avis sur le texte d'ici la fin du mois. Après son adoption par le conseil des ministres, le projet de loi sera déposé sur le bureau du Sénat. Compte tenu de sa portée, il devra faire l'objet d'un examen particulièrement approfondi par le Parlement. Je veux vous exprimer ma conviction que l'adoption de ce dispositif sera de nature à donner un nouvel élan à la décentralisation, ce qui sera bénéfique pour notre démocratie et pour la vie quotidienne de nos concitoyens. Je tiens également à souligner à nouveau que les dispositions qui concernent les agents de l'Etat concernés par les transferts sont pleinement respectueuses de leur liberté et qu'elles leur apportent toutes les garanties statutaires auxquelles ils peuvent légitimement prétendre. Ceux qui feront le choix d'intégrer la fonction publique territoriale n'auront pas à le regretter.
(source http://www.interieur.gouv.fr, le 11 septembre 2003)
- Conformément aux dispositions de l'article 9 de la loi du 26 janvier 1984, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale doit être saisi pour avis par le ministre chargé des collectivités territoriales des projets de loi relatifs à la fonction publique territoriale. Vous êtes donc appelés à rendre un avis sur les dispositions du titre V du projet de loi de décentralisation, lesquelles sont relatives aux transferts de services et aux garanties individuelles des agents.
- Au-delà des dispositions de ce titre V, le Gouvernement a néanmoins souhaité présenter au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale l'économie de l'ensemble du projet de loi, comme nous en étions d'ailleurs convenus avec votre président M. Le Breton. C'est à cet exercice que je me livrerai dans un instant avant que Jean-Paul Delevoye ne revienne plus longuement sur les dispositions du titre V.
- Auparavant, je crois utile de rappeler que les dispositions du projet de loi seront mises en uvre dans le nouveau cadre constitutionnel défini par la loi du 28 mars 2003 et de souligner que ce texte a été élaboré à l'issue d'une concertation approfondie.
1. Les dispositions du projet de loi seront mises en uvre dans un nouveau cadre constitutionnel qui apporte des garanties importantes aux collectivités territoriales
- Des principes nouveaux ont été insérés dans la Constitution. Outils d'une modernisation de notre République, ils sont destinés à produire leurs effets dans le temps : l'organisation décentralisée de la République inscrite à l'article premier de la Constitution à côté des principes fondateurs que sont l'indivisibilité de la République et l'égalité des citoyens devant la loi ; l'expérimentation ; l'objectif constitutionnel de subsidiarité ; le pouvoir réglementaire des collectivités territoriales ; l'absence de tutelle d'une collectivité sur l'autre, qui devra se combiner avec la notion de collectivité chef de file.
- La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a, en outre, apporté aux collectivités territoriales de nouvelles et importantes garanties financières, qui leur permettront de mettre en uvre leurs compétences dans des conditions plus sûres : libre disposition des ressources ; faculté pour la loi d'autoriser les collectivités territoriales à fixer l'assiette et le taux des impôts qu'elles reçoivent ; garantie de la part des ressources fiscales dans l'ensemble des ressources ; garantie aussi de la compensation des transferts de compétences ; obligation pour la loi de déterminer des ressources en cas de création ou d'extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales ; obligation de mettre en place des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales.
2. Une concertation approfondie a été menée pour la préparation du projet de loi de décentralisation
- Le Gouvernement a, en effet, décidé d'engager une grande concertation dans tous les territoires, pour que soient définis au plus près des réalités les besoins et les projets : tel fut l'objet des Assises des libertés locales qui se sont déroulées dans les 26 régions de métropole et d'outre-mer entre le mois d'octobre 2002 et le mois de janvier 2003. Ces assises ont connu un vif succès : au total, 55 000 personnes y ont participé ; précédées d'ateliers thématiques sur les sujets les plus divers, elles ont donné lieu à des débats très intenses. Elles ont témoigné d'une forte demande de décentralisation, faisant émerger plus de 600 propositions de nouveaux transferts de compétences ou d'expérimentations. Ainsi, le projet de loi de décentralisation se fonde directement sur les attentes exprimées par les collectivités locales et les citoyens. La synthèse des Assises des Libertés locales a été faite, le 28 février dernier, à Rouen. A cette occasion, le Premier Ministre a fixé les grandes orientations qui ont servi de base à l'élaboration du projet de loi de décentralisation.
- Le Gouvernement a par ailleurs mené une concertation étroite avec les associations d'élus, les maires, les présidents d'intercommunalité, les présidents de conseil général et régional. Cette même concertation a été conduite avec les organisations syndicales. Outre les entretiens que Jean-Paul Delevoye et moi-même avons eus, deux tables rondes ont permis des échanges sur les transferts de compétences envisagés et sur les modalités retenues pour les agents concernés. Des réunions bilatérales ont par ailleurs permis à chaque organisation de faire connaître ses préoccupations et d'appeler l'attention du Gouvernement sur tel ou tel aspect des transferts de personnel.
- Enfin, les transferts envisagés dans le domaine de l'Education nationale ont fait l'objet de plusieurs séances de travail avec les syndicats. Ces discussions ont permis d'apporter des précisions sur le rôle de l'Etat, sur les missions des agents et sur les conditions d'intervention des collectivités territoriales dans le domaine de l'Education. Le projet de loi tient compte des points d'accord qui ont pu être dégagés à cette occasion. Cette concertation se poursuivra dans la mise en uvre de la réforme.
3. Etabli sur ces bases, le projet de loi opère d'importants transferts de compétences au profit des collectivités territoriales tout en favorisant une meilleure identification de leurs missions respectives
- La décentralisation est, aux yeux du Gouvernement, l'aiguillon de la nécessaire modernisation de notre pays et de l'évolution de ses structures administratives. Rapprochant la décision publique du citoyen, elle la rendra plus simple, plus efficace et plus démocratique. Clarifiant la répartition des compétences, elle permettra aux citoyens de mieux identifier les responsables des politiques publiques.
a) Le département sera, en subsidiarité avec les communes et les intercommunalités, en charge des politiques de solidarité et de la gestion des équipements de proximité
- Le rôle social du département est pleinement affirmé. Outre le transfert de la responsabilité complète du RMI/RMA, opéré par ailleurs, le département bénéficie du transfert des autres fonds sociaux de l'Etat (FSL, FAJ,) et de l'achèvement du transfert de responsabilités en ce qui concerne les personnes âgées. Il assurera, à ce titre, la coordination des organismes publics et privés susceptibles d'allouer des aides aux personnes en grande difficulté, compétence précédemment exercée par l'Etat à travers les commissions d'action sociale d'urgence. L'initiative, le pilotage et la responsabilité d'arrêter le schéma départemental de l'action sociale et médico-sociale reviendront au président du conseil général, à charge pour lui d'assurer les concertations nécessaires. En matière d'action sociale, l'Etat ne sera plus en charge que de la très grande exclusion (CHRS, hébergement d'urgence) et de l'intégration.
- Dans le domaine des infrastructures, les départements bénéficieront d'un transfert des routes nationales, en dehors du réseau national structurant qui sera réduit des deux tiers, soit un transfert portant sur 20 000 km.
- La compétence dévolue au département par les premières lois de décentralisation en ce qui concerne la gestion des collèges sera confortée par le transfert des personnels TOS qui y sont affectés.
- Les communes et les intercommunalités sont également pleinement concernées par les dispositions du projet de loi, dans une relation de subsidiarité avec les départements et dans certains cas les régions. C'est ainsi que le titre IX du projet de loi, en particulier, renforce la place des communes et des maires dans le tissu local et vise à consolider les structures intercommunales en simplifiant leur fonctionnement. Les intercommunalités pourront notamment demander à exercer sur leur territoire les compétences des autres collectivités, par convention avec celles-ci.
- En matière de logement, l'ensemble des aides à la pierre sera délégué par l'Etat aux structures intercommunales et, là où elles n'existent pas, aux départements. Leur montant restera donc fixé par l'Etat mais elles seront individualisées librement par les collectivités. Les communes et leurs groupements assureront également la responsabilité du logement étudiant que l'Etat leur transférera en pleine propriété. La gestion des logements fera l'objet d'une convention entre la commune ou le groupement propriétaire et le CROUS territorialement compétent.
- Les communes et les départements pourront également, s'ils le souhaitent, demander à exercer des compétences relatives aux grands équipements, tels que les ports d'intérêt national, les ports intérieurs, certains aérodromes d'intérêt local ou encore certains monuments historiques. - En outre, les communes resteront responsables de l'enseignement artistique initial en vue d'une pratique en amateur, ainsi que de l'offre d'éducation artistique en partenariat avec les établissements scolaires.
b) La région, en subsidiarité avec l'Etat, assurera les compétences d'orientation et de programmation
- En ce qui concerne le soutien au développement économique, la région exercera une mission de coordination des interventions économiques sur le territoire régional et recevra les moyens financiers que l'Etat y consacre. L'Etat ne conservera qu'un rôle institutionnel vis à vis des institutions communautaires et un devoir d'alerte, voire d'intervention subsidiaire, en cas de difficultés particulières des entreprises. Le rôle de la région sera également renforcé en matière de formation professionnelle. Elle bénéficiera du transfert de la quasi-totalité des outils financiers qui y concourent, notamment la commande publique à l'AFPA. Elle décidera de la carte des formations professionnelles.
- En ce qui concerne la voirie, la région sera chargée d'élaborer un schéma multimodal des transports et pourra orienter les choix d'investissement de l'Etat et des départements par ses cofinancements. Pour les autres infrastructures (ports, aéroports, canaux), l'Etat ne conservera que la responsabilité des dix plus grands aéroports et des ports autonomes.
- La compétence régionale relative aux lycées sera par ailleurs confortée par le transfert des personnels TOS qui y sont affectés.
- Dans le domaine de la santé, la région pourra participer aux instances de décision en matière d'organisation de l'offre de soins ainsi qu'au financement d'équipements sanitaires. Elle pourra également contribuer à des programmes régionaux spécifiques de santé publique ainsi qu'à des investissements sanitaires. Elle assurera la gestion des écoles de formation des professions para-médicales.
- Dans le domaine de la culture, le projet de loi prévoit une décentralisation de l'inventaire du patrimoine au profit des régions, à charge pour elles de passer convention avec les autres collectivités territoriales pour la réalisation des opérations d'inventaire que ces dernières souhaitent conduire. En outre, la propriété et l'entretien des monuments historiques, dont la liste sera établie par décret en Conseil d'Etat (à l'exception des cathédrales et des monuments d'intérêt national) pourront être transférés aux collectivités territoriales qui en feront la demande. En matière d'enseignement artistique, les régions pourront apporter leur financement aux communes pour la prise en charge des cycles d'orientation professionnelle des établissements concernés.
c) La décentralisation ne remet pas en cause le rôle de l'Etat qui pourra au contraire mieux exercer ses missions essentielles
- Loin de remettre en cause le rôle de l'Etat, l'approfondissement de la décentralisation lui permettra de mieux exercer ses missions essentielles, non seulement ses missions régaliennes traditionnelles mais aussi ses missions qui concourent à la cohésion nationale en veillant à la solidarité entre les citoyens et entre les territoires. Il revient en particulier à l'Etat de veiller au respect de la loi : le contrôle de légalité sera prochainement modernisé pour le rendre plus efficace. En outre, le Gouvernement proposera au Parlement d'adopter un dispositif d'évaluation des politiques locales.
- La décentralisation est un levier de la réforme de l'Etat. Le titre VIII du projet de loi propose des dispositions pour contribuer à un Etat terrritorial plus cohérent, plus responsable et plus réactif.
4. Le projet de loi prévoit les garanties nécessaires sur la compensation financières des transferts de compétences et sur les transferts de personnels
a) Les transferts de compétences seront financés loyalement en privilégiant les ressources fiscales
- Conformément aux principes fixés par la Constitution, ces transferts de compétences seront accompagnés du transfert des moyens financiers correspondants. Les compensations financières résulteront essentiellement, afin de préserver l'autonomie financière des collectivités territoriales, de transferts de ressources fiscales jusque là attribuées à l'Etat, en particulier une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP).
- Comme l'exige la loi organique relative aux lois de finances, il reviendra à la loi de finances de fixer les montants et de procéder au partage des impôts nationaux. Le Gouvernement sera particulièrement attentif à la bonne articulation entre le projet de loi de décentralisation, qui fixera les principes régissant les transferts de ressources et la loi de finances, étant observé que les transferts de compétences prévus par le projet de loi ne pourront entrer en vigueur avant le 1er janvier 2005. Le projet de loi de décentralisation précise expressément que ces transferts entreront en vigueur sous réserve que la loi de finances en ait correctement tiré les conséquences, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, lequel devra s'assurer que l'Etat a bien transféré l'intégralité des moyens qu'il mettait en uvre jusque là et que les modalités de la compensation financière ne dégradent pas le taux d'autonomie fiscale des collectivités territoriales.
b) Les garanties nécessaires sont prévues pour les personnels concernés par les transferts de compétences
- Le titre V du projet de loi organise le transfert des services de l'Etat nécessaires à l'exercice des compétences transférées tout en donnant toutes les garanties individuelles nécessaires aux agents.
- Jean-Paul Delevoye vous exposera plus en détail le dispositif prévu, lequel se déroulera en plusieurs étapes. Je voudrais néanmoins souligner que le projet de loi apporte plusieurs garanties aux quelque 140 000 personnels d'Etat qui seront transférés aux collectivités territoriales :
1) L'intégration des agents dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale sera de droit, à leur demande présentée dans le délai prévu pour le droit d'option ;
2) Ces agents seront intégrés dans une fonction publique qui bénéficie des mêmes garanties que la fonction publique d'Etat et qui a fait la preuve depuis 1983 de son attractivité ;
3) Les agents qui le souhaiteront pourront conserver un lien statutaire avec leur administration d'origine, en étant placés en position de détachement sans limitation de durée ;
4) les agents qui auront fait ce choix de maintenir leur lien statutaire avec l'Etat auront la faculté de demander à tout moment leur intégration dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale, les collectivités étant alors libres des suites à réserver à cette demande ;
5) les contrats en cours des agents non titulaires de droit public seront repris par la collectivité d'accueil ;
6) les missions des personnels de l'éducation nationale seront maintenues dans les établissements ;
7) le bénéfice des services actifs sera maintenu aux agents de l'Etat concernés après leur intégration dans la fonction publique territoriale.
En conclusion, je veux vous indiquer que le Conseil d'Etat devrait rendre son avis sur le texte d'ici la fin du mois. Après son adoption par le conseil des ministres, le projet de loi sera déposé sur le bureau du Sénat. Compte tenu de sa portée, il devra faire l'objet d'un examen particulièrement approfondi par le Parlement. Je veux vous exprimer ma conviction que l'adoption de ce dispositif sera de nature à donner un nouvel élan à la décentralisation, ce qui sera bénéfique pour notre démocratie et pour la vie quotidienne de nos concitoyens. Je tiens également à souligner à nouveau que les dispositions qui concernent les agents de l'Etat concernés par les transferts sont pleinement respectueuses de leur liberté et qu'elles leur apportent toutes les garanties statutaires auxquelles ils peuvent légitimement prétendre. Ceux qui feront le choix d'intégrer la fonction publique territoriale n'auront pas à le regretter.
(source http://www.interieur.gouv.fr, le 11 septembre 2003)