Texte intégral
Bonjour Philippe Douste-Blazy. Peut-on dire qu'avec Laurent Fabius et Lionel Jospin les rêves fiscaux de la droite deviennent réalité ?
Ecoutez Monsieur Fabius a écrit il y a quelques jours un article dans un quotidien bien connu.
Le Monde.
Le Monde, il disait : pour avoir un bon budget, il faut diminuer les dépenses publiques et il faut mieux rémunérer le travail. Jusqu'à maintenant les annonces du gouvernement disent qu'on va augmenter de 17 000 le nombre de fonctionnaires, donc pour les dépenses publiques il faut repasser et je n'ai pas vu non plus de grande annonce pour mieux rémunérer le travail.
120 milliards d'impôts en moins sur trois ans, c'est pas mal non ?
La question qui est posée aujourd'hui c'est la question qui vient d'être posée par Monsieur Hollinger dans cette même antenne. Quelle est la cohérence, quelle est la logique économique du plan fiscal du gouvernement ? Vous savez, il y a une seule anomalie en France sur la fiscalité française par rapport aux autres pays d'Europe, c'est le poids excessif des cotisations sociales par rapport aux autres pays du monde. Ces cotisations sociales elles sont payées par les salariés et par l'employeur. Il faut donc que nous baissions ces cotisations. Pourquoi ? parce qu'aujourd'hui il y a trois problèmes : le pouvoir d'achat des français qui ne monte pas vous savez, le rendement de l'impôt sur le revenu a augmenté de 9,5% en un an, le pouvoir d'achat uniquement de 2,5. Donc il faut augmenter les salaires directs. Deuxièmement, vous avez une pénurie de main d'oeuvre dans tous les emplois, les métiers qui sont à bas salaires, en particulier dans le bâtiment et dans la restauration. Et enfin, vous avez aujourd'hui une injustice terrible, c'est que vous avez les revenus du travail qui sont pratiquement égaux pour les Smic aux revenus des prestations. Ceux qui gagnent 6 500F en travaillant, parfois peuvent comparer à des 6 200/6 300 en accumulant les revenus des prestations sociales. Eh bien a cela, il y a une double cohérence, une cohérence d'efficacité et une cohérence, aujourd'hui de justice sociale, qui doit faire que le gouvernement doit prendre une décision : diminuer les cotisations sociales sur les bas salaires de 1 Smic à 1,4 Smic, c'est sept millions de salariés. Voilà ce que nous avons proposé nous, hier.
Ca, plutôt que la baisse d'impôts ?
Alors attendez, Il faut qu'il y ait une cohérence. Il peut baisser les cotisations, il peut baisser les impôts il peut le faire la première année, nous nous demandons 40 milliards sur la base des cotisations, il peut faire la deuxième année, l'année prochaine, une diminution d'impôts sur le revenu très significative mais saupoudrer serait la pire des choses, Il faut savoir ce qu'ils veulent !
Alors attendez, vous avez vu Laurent Fabius hier, vous l'avez aidé à concocter son plan?
Ecoutez, une des principales critiques que Monsieur Jospin nous fait depuis deux ans, c'est de dire : cette opposition, elle n'a rien a proposer. Eh bien nous sommes allés proposer hier, avec Monsieur Méhaignerie, à Monsieur Fabius un certain nombre d'idées, dont celle-là, pour qu'il y ait aujourd'hui des prélèvements obligatoires moins douloureux et plus efficaces en France.
la CSG, notamment pour les plus bas revenus, le Smic. C'est ça justement, c'est ce que vous disiez tout-à-l'heure, les trappes à la reprise du travail, voilà c'est pris en compte.
Oui, mais alors combien ? 30 milliards sur trois ans. Ca fait 10 milliards par an. Si vous faites 10 milliards par an, vous ne touchez que les gens qui sont au Smic ou à 1,1 Smic. Et là vous avez ce que l'on appelle "un effet de seuil". Autrement dit, les gens vont avoir plutôt intérêt à rester dans cette tranche là. Dans un pays, à mon avis, un projet fiscal doit non seulement mieux récompenser le travail mais aussi mieux récompenser la motivation. Il faut aujourd'hui avoir un seul objectif : ne pas casser la croissance en France. Si vous ne voulez pas casser la croissance, il faut évidemment qu'il n'y ait pas de pénurie de main d'oeuvre.
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu tout de même, on a beaucoup glosé sur le fait que les socialistes n'accepteraient jamais que la tranche supérieure soit diminuée, il semble bien qu'elle va l'être.
Là tout le monde peut se féliciter d'une diminution de l'impôt sur le revenu, d'ailleurs je vous signale qu'en trois ans, ce n'est pas parce qu'il y a eu une augmentation des taux, mais tout simplement parce qu'il y a un meilleur rendement des impôts, parce qu'il y a croissance, il y a à peu près 500 milliards de francs qui sont arrivés dans les caisses de l'Etat. Bon. Monsieur Fabius nous donne aujourd'hui 120 milliards sur trois ans. Je dirais que c'est un peu normal.
Puisque la croissance est là, il est normal que les impôts baissent. Moi j'aurais préférés sur l'impôt sur le revenu qu'il y ait une véritable action sur l'anomalie de l'impôt sur le revenu en France. Et en particulier il y a une très grande, très rapide, trop rapide progressivité des barèmes, entre les 8 000 et les 20 000 francs. Toujours pareil : il vaut mieux rémunérer le travail et donner envie aux gens d'être motivés pour travailler. Ca, il ne le fait pas.
Alors ce plan Fabius/Jospin sur les impôts permet tout de même au gouvernement de montrer une action, comme d'ailleurs Lionel Jospin en a montré une sur la Corse. Là, l'une des grandes querelles de la droite qui lui était adressée, c'était d'être immobiliste. Sur la Corse, on ne peut pas approuver son plan ça c'est une affaire, mais il n'est pas immobiliste.
Ecoutez, d'abord sur la Corse il faut être assez humbles, il ne faut pas être de simple donneurs de leçons. On a pu aussi en d'autres époques, nous aussi, mesurer la complexité de ce dossier, donc il faut savoir en parler doucement. Simplement ce n'est pas parce que le dossier est complexe qu'il ne faut pas. Il ne faut pas le traiter en dehors des grands principes de la démocratie. Le premier des principes c'est qu'il n'y a pas de place pour la violence dans la démocratie. Que le retour de l'Etat de droit c'est la première des urgences en Corse. Je me souviens qu'il y a un préfet qui est mort, assassiné, le préfet Erignac, justement parce qu'il voulait faire revenir l'Etat de droit en Corse.
Ca a été tenté par Jean-Pierre Chevènement, et puis vous avez vu la dérive avec le préfet Bonnet.
Oui eh bien moi je ne peux pas, parce que je me souviens de cela, je ne peux pas accepter que des responsables nationalistes demandent une amnistie pour tous les crimes, y compris les crimes de sang commis au nom de ce nationalisme. On touche là l'inacceptable, et l'Etat ne doit pas donner l'impression qu'il donne une prime à la violence et au chantage. Ca c'est la première remarque. Ensuite le vrai débat que nous devons avoir en Corse, vous savez il y a deux grands dangers : le premier danger c'est celui de Monsieur Jospin où on voit la dislocation de la République. Bon. Avec l'attaque des deux grands principes aujourd'hui auxquels sont très attachés les Français depuis deux siècles : l'unicité de la loi, et l'égalité des citoyens devant la loi. Bon. Il n'y a aucune raison pour qu'il y ait une loi Corse par rapport à la loi métropolitaine. Le deuxième danger, c'est la crispation jacobine. On voit bien que Monsieur Chevènement, ou d'autres même à droite, profitent de ça pour dire : regardez, il ne faut pas de décentralisation. Non, nous l'UDF nous avons un rôle : il faut que nous réconcilions la nation et le fait régional. Il faut que nous profitions de ce débat pour proposer une nouvelle décentralisation. Et en particulier un meilleur rapport entre le niveau central et les niveaux de proximité, une meilleure relation entre les collectivités locales elles-mêmes.
Vous souhaitez qu'on entende un peu plus le Président de la République là-dessus ?
Le Président de la République n'a pas politisé la question corse parce que cela touche à la fois aux institutions dont il est le garant, et à la paix civile. Mais il a dit deux fois oui et une fois non. Il a dit oui au dialogue, il a dit oui à la décentralisation, il a dit non au démantèlement de la République. Et nous sommes nombreux à le dire avec lui.
Et c'est assez clair pour vous comme message ?
Je pense que c'est très clair parce que ce n'est pas par des dispositions dérogatoires et des droits particuliers que l'on corrigera en France les erreurs de l'Histoire ou les injustices de la géographie. Et donc il a raison de dire : il y a une unicité de la loi. On ne doit pas démanteler la République, sous quelque corporatisme que ce soit, qu'il soit ethnique, religieux ou particulariste.
Merci Philippe Douste-Blazy.
(Source http://www.udf.org, le 31 août 2000)
Ecoutez Monsieur Fabius a écrit il y a quelques jours un article dans un quotidien bien connu.
Le Monde.
Le Monde, il disait : pour avoir un bon budget, il faut diminuer les dépenses publiques et il faut mieux rémunérer le travail. Jusqu'à maintenant les annonces du gouvernement disent qu'on va augmenter de 17 000 le nombre de fonctionnaires, donc pour les dépenses publiques il faut repasser et je n'ai pas vu non plus de grande annonce pour mieux rémunérer le travail.
120 milliards d'impôts en moins sur trois ans, c'est pas mal non ?
La question qui est posée aujourd'hui c'est la question qui vient d'être posée par Monsieur Hollinger dans cette même antenne. Quelle est la cohérence, quelle est la logique économique du plan fiscal du gouvernement ? Vous savez, il y a une seule anomalie en France sur la fiscalité française par rapport aux autres pays d'Europe, c'est le poids excessif des cotisations sociales par rapport aux autres pays du monde. Ces cotisations sociales elles sont payées par les salariés et par l'employeur. Il faut donc que nous baissions ces cotisations. Pourquoi ? parce qu'aujourd'hui il y a trois problèmes : le pouvoir d'achat des français qui ne monte pas vous savez, le rendement de l'impôt sur le revenu a augmenté de 9,5% en un an, le pouvoir d'achat uniquement de 2,5. Donc il faut augmenter les salaires directs. Deuxièmement, vous avez une pénurie de main d'oeuvre dans tous les emplois, les métiers qui sont à bas salaires, en particulier dans le bâtiment et dans la restauration. Et enfin, vous avez aujourd'hui une injustice terrible, c'est que vous avez les revenus du travail qui sont pratiquement égaux pour les Smic aux revenus des prestations. Ceux qui gagnent 6 500F en travaillant, parfois peuvent comparer à des 6 200/6 300 en accumulant les revenus des prestations sociales. Eh bien a cela, il y a une double cohérence, une cohérence d'efficacité et une cohérence, aujourd'hui de justice sociale, qui doit faire que le gouvernement doit prendre une décision : diminuer les cotisations sociales sur les bas salaires de 1 Smic à 1,4 Smic, c'est sept millions de salariés. Voilà ce que nous avons proposé nous, hier.
Ca, plutôt que la baisse d'impôts ?
Alors attendez, Il faut qu'il y ait une cohérence. Il peut baisser les cotisations, il peut baisser les impôts il peut le faire la première année, nous nous demandons 40 milliards sur la base des cotisations, il peut faire la deuxième année, l'année prochaine, une diminution d'impôts sur le revenu très significative mais saupoudrer serait la pire des choses, Il faut savoir ce qu'ils veulent !
Alors attendez, vous avez vu Laurent Fabius hier, vous l'avez aidé à concocter son plan?
Ecoutez, une des principales critiques que Monsieur Jospin nous fait depuis deux ans, c'est de dire : cette opposition, elle n'a rien a proposer. Eh bien nous sommes allés proposer hier, avec Monsieur Méhaignerie, à Monsieur Fabius un certain nombre d'idées, dont celle-là, pour qu'il y ait aujourd'hui des prélèvements obligatoires moins douloureux et plus efficaces en France.
la CSG, notamment pour les plus bas revenus, le Smic. C'est ça justement, c'est ce que vous disiez tout-à-l'heure, les trappes à la reprise du travail, voilà c'est pris en compte.
Oui, mais alors combien ? 30 milliards sur trois ans. Ca fait 10 milliards par an. Si vous faites 10 milliards par an, vous ne touchez que les gens qui sont au Smic ou à 1,1 Smic. Et là vous avez ce que l'on appelle "un effet de seuil". Autrement dit, les gens vont avoir plutôt intérêt à rester dans cette tranche là. Dans un pays, à mon avis, un projet fiscal doit non seulement mieux récompenser le travail mais aussi mieux récompenser la motivation. Il faut aujourd'hui avoir un seul objectif : ne pas casser la croissance en France. Si vous ne voulez pas casser la croissance, il faut évidemment qu'il n'y ait pas de pénurie de main d'oeuvre.
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu tout de même, on a beaucoup glosé sur le fait que les socialistes n'accepteraient jamais que la tranche supérieure soit diminuée, il semble bien qu'elle va l'être.
Là tout le monde peut se féliciter d'une diminution de l'impôt sur le revenu, d'ailleurs je vous signale qu'en trois ans, ce n'est pas parce qu'il y a eu une augmentation des taux, mais tout simplement parce qu'il y a un meilleur rendement des impôts, parce qu'il y a croissance, il y a à peu près 500 milliards de francs qui sont arrivés dans les caisses de l'Etat. Bon. Monsieur Fabius nous donne aujourd'hui 120 milliards sur trois ans. Je dirais que c'est un peu normal.
Puisque la croissance est là, il est normal que les impôts baissent. Moi j'aurais préférés sur l'impôt sur le revenu qu'il y ait une véritable action sur l'anomalie de l'impôt sur le revenu en France. Et en particulier il y a une très grande, très rapide, trop rapide progressivité des barèmes, entre les 8 000 et les 20 000 francs. Toujours pareil : il vaut mieux rémunérer le travail et donner envie aux gens d'être motivés pour travailler. Ca, il ne le fait pas.
Alors ce plan Fabius/Jospin sur les impôts permet tout de même au gouvernement de montrer une action, comme d'ailleurs Lionel Jospin en a montré une sur la Corse. Là, l'une des grandes querelles de la droite qui lui était adressée, c'était d'être immobiliste. Sur la Corse, on ne peut pas approuver son plan ça c'est une affaire, mais il n'est pas immobiliste.
Ecoutez, d'abord sur la Corse il faut être assez humbles, il ne faut pas être de simple donneurs de leçons. On a pu aussi en d'autres époques, nous aussi, mesurer la complexité de ce dossier, donc il faut savoir en parler doucement. Simplement ce n'est pas parce que le dossier est complexe qu'il ne faut pas. Il ne faut pas le traiter en dehors des grands principes de la démocratie. Le premier des principes c'est qu'il n'y a pas de place pour la violence dans la démocratie. Que le retour de l'Etat de droit c'est la première des urgences en Corse. Je me souviens qu'il y a un préfet qui est mort, assassiné, le préfet Erignac, justement parce qu'il voulait faire revenir l'Etat de droit en Corse.
Ca a été tenté par Jean-Pierre Chevènement, et puis vous avez vu la dérive avec le préfet Bonnet.
Oui eh bien moi je ne peux pas, parce que je me souviens de cela, je ne peux pas accepter que des responsables nationalistes demandent une amnistie pour tous les crimes, y compris les crimes de sang commis au nom de ce nationalisme. On touche là l'inacceptable, et l'Etat ne doit pas donner l'impression qu'il donne une prime à la violence et au chantage. Ca c'est la première remarque. Ensuite le vrai débat que nous devons avoir en Corse, vous savez il y a deux grands dangers : le premier danger c'est celui de Monsieur Jospin où on voit la dislocation de la République. Bon. Avec l'attaque des deux grands principes aujourd'hui auxquels sont très attachés les Français depuis deux siècles : l'unicité de la loi, et l'égalité des citoyens devant la loi. Bon. Il n'y a aucune raison pour qu'il y ait une loi Corse par rapport à la loi métropolitaine. Le deuxième danger, c'est la crispation jacobine. On voit bien que Monsieur Chevènement, ou d'autres même à droite, profitent de ça pour dire : regardez, il ne faut pas de décentralisation. Non, nous l'UDF nous avons un rôle : il faut que nous réconcilions la nation et le fait régional. Il faut que nous profitions de ce débat pour proposer une nouvelle décentralisation. Et en particulier un meilleur rapport entre le niveau central et les niveaux de proximité, une meilleure relation entre les collectivités locales elles-mêmes.
Vous souhaitez qu'on entende un peu plus le Président de la République là-dessus ?
Le Président de la République n'a pas politisé la question corse parce que cela touche à la fois aux institutions dont il est le garant, et à la paix civile. Mais il a dit deux fois oui et une fois non. Il a dit oui au dialogue, il a dit oui à la décentralisation, il a dit non au démantèlement de la République. Et nous sommes nombreux à le dire avec lui.
Et c'est assez clair pour vous comme message ?
Je pense que c'est très clair parce que ce n'est pas par des dispositions dérogatoires et des droits particuliers que l'on corrigera en France les erreurs de l'Histoire ou les injustices de la géographie. Et donc il a raison de dire : il y a une unicité de la loi. On ne doit pas démanteler la République, sous quelque corporatisme que ce soit, qu'il soit ethnique, religieux ou particulariste.
Merci Philippe Douste-Blazy.
(Source http://www.udf.org, le 31 août 2000)