Texte intégral
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs
Et c'est pour défendre en Europe les intérêts de votre profession que votre Association s'est constituée, en mobilisant auprès de l'ensemble des autorités de l'Union européenne, sur les sujets d'intérêt commun, une force d'influence collective. Vos représentants se sont entretenus hier avec la ministre de la culture et de la communication des sujets qui vous préoccupent. Le Gouvernement français ne ménagera pas ses efforts pour favoriser à Bruxelles la discussion sur certains dossiers qui vous tiennent à cur. Il entend par dessus tout défendre votre liberté.
Défendre la liberté de la presse, c'est d'abord assurer son développement. L'Europe s'est bâtie sur un vaste marché : il doit vous permettre de vous développer. Certes, la presse quotidienne reste avant tout une presse nationale ou locale. Les lecteurs aspirent en effet à trouver dans leur journal quotidien une information proche de leurs préoccupations et ancrée dans la réalité du pays où ils vivent. Mais aujourd'hui nous faisons face ensemble aux mêmes bouleversements. A l'heure de la globalisation des économies et de la société de l'information, la liberté de communication prend des formes nouvelles : celles de la multiplication, du foisonnement d'informations, d'oeuvres, de services. L'internet peut devenir un formidable multiplicateur de diffusion de ces créations. A condition que nous sachions défendre des intérêts essentiels. Il est de votre intérêt de pouvoir exploiter en toute sécurité juridique ces nouveaux moyens de communication. Il est de notre intérêt commun d'affirmer la présence, la diversité, la richesse des créations européennes. Afin notamment d'éviter que cette liberté démultipliée ne conduise à l'hégémonie de contenus venus notamment d'outre-Atlantique.
Il est donc nécessaire d'harmoniser les règles relatives à la propriété intellectuelle, d'une part, et au commerce électronique, d'autre part. Deux directives sont en préparation, qui permettront aux organes de presse de mettre rapidement les contenus de vos publications en ligne, de protéger ceux-ci de toute tentative de pillage et de reproduction illicite et d'assurer aux éditeurs la sécurité juridique dont ils estiment légitimement avoir besoin. La négociation de ces deux textes a connu des avancées importantes -et c'est une excellente chose. Le Gouvernement français a, de son côté, engagé une réflexion en vue de proposer au Parlement une loi sur la société de l'information. Ce projet comprendra un volet relatif aux questions de propriété intellectuelle, sur lequel le ministère de la culture et de la communication a lancé une large concertation.
La presse n'est pas seulement une libre entreprise mais aussi une entreprise de liberté.
Défendre la liberté de la presse, c'est aussi affirmer un droit fondamental. L'Europe repose sur un socle de valeurs communes. Cette réunion des quotidiens de l'Europe entière est comme le symbole de ces valeurs qui nous unissent, par-delà les divergences d'appréciation ou les choix politiques. La liberté de la presse est parmi ces valeurs une des plus irremplaçables.
" La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme " : l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen le souligne. Proclamé en termes aussi généraux, ce principe impose la protection la plus exigeante de la liberté de communication. L'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précise que la liberté de recevoir ou de communiquer des informations sans ingérence des autorités publiques est un élément fondamental de la liberté d'expression. Et vos journaux sont un des moyens par lesquels cette liberté s'exerce effectivement.
Il est donc naturel que vous suiviez avec beaucoup d'attention l'élaboration, au sein de l'Union européenne, de la Charte européenne des droits fondamentaux. Les discussions se poursuivent actuellement entre experts afin d'en préciser le contenu et de déterminer la liste des droits qu'elle consacrera. Vous souhaitez voir figurer expressément parmi ces droits la liberté de la presse. Soyez assurés que le Gouvernement français veillera à ce qu'elle trouve dans la Charte la place qui lui revient, à travers la claire réaffirmation de la liberté de communication dans toutes ses dimensions.
La liberté de la presse suppose évidemment que les États ne s'ingèrent pas dans le contenu des publications. Elle n'exclut pas pour autant que l'Etat intervienne au service de la liberté.
Il lui revient de préserver le pluralisme de la presse. Il n'est pas souhaitable de laisser les seules lois du marché régir son fonctionnement. Certes, la rentabilité est pour vos entreprises la condition première de leur indépendance. Mais il n'est de vraie liberté de la presse pour nos concitoyens que celle qui garantit au lecteur le pluralisme des titres. C'est ainsi que la presse, et tout particulièrement la presse quotidienne, peut jouer pleinement son rôle : celui d'un contre-pouvoir dont l'existence permet un fonctionnement transparent des pouvoirs publics. Or à l'heure des concentrations et de la constitution des grands groupes de médias, ce pluralisme peut se trouver menacé.
C'est pourquoi le Gouvernement français s'est depuis quelques années efforcé de mieux cibler les aides à la presse. Ces dernières doivent d'abord être justifiées par le souci d'aider au maintien d'une diversité de titres, s'agissant de la presse d'information politique et générale. Aider cette presse à se moderniser pour conserver et acquérir de nouveaux lecteurs, compenser la faiblesse des ressources publicitaires de certains de ses titres, alléger les coûts de transports et de distribution : voilà quelques objectifs légitimes pour une intervention publique qui entend garantir effectivement la liberté de la presse. Préserver un système de distribution efficace où les journaux à diffusion plus restreinte soient offerts au choix du lecteur dans les mêmes conditions que les grands titres : c'est une préoccupation que, je crois, les responsables que vous êtes peuvent partager avec les pouvoirs publics.
L'Europe aussi doit aider la presse à remplir ce rôle démocratique. La presse -aussi pluraliste soit-elle- ne peut vivre sans lecteur. L'érosion du lectorat qui touche la presse quotidienne est un de vos plus grands sujets d'inquiétude. Ce phénomène ne concerne pas également tous nos pays. La France est malheureusement depuis longtemps à cet égard dans le peloton de queue. Les multiples sollicitations dont les jeunes en particulier sont l'objet contribuent parfois à les détourner de la lecture d'un quotidien. Pourtant, tous ceux qui prennent part à la vie politique savent combien l'information écrite est irremplaçable pour la compréhension des événements. Elle permet que s'établisse entre le citoyen -l'électeur- et ses élus cette forme de distance critique et réfléchie que l'image ne peut à elle seule garantir. D'ores et déjà, l'édition électronique bénéficie de programmes d'aides communautaires. Je pense notamment aux programmes Média et Info 2000 mis en uvre par la Commission européenne. Je souhaite donc vivement qu'au-delà, l'Europe soit le lieu d'initiatives en faveur de l'écrit sous toutes ses formes.
Mesdames, Messieurs,
Libre diffusion des créations, libre communication, pluralisme des idées sont les différents visages d'une même liberté -celle de la presse- qui est pour nos démocraties comme l'air qu'elles respirent et qui les fait vivre. Elle est non seulement un des fondements des systèmes politiques européens, mais encore une des expressions de nos sociétés, de nos cultures, d'une vie de l'esprit qui depuis des siècles façonne notre identité d'Européens. Elle est un bien précieux que ni l'Union européenne, ni les Etats qui la composent ne peuvent accepter de laisser entamer. Ce bien inestimable, il vous appartient aussi de le préserver. Cela suppose une réflexion sur la modernisation de vos titres, sur la formation des journalistes et bien entendu sur la déontologie. Nous sommes prêts à vous accompagner dans cet effort vital pour nos démocraties.
(Source : http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 10 avril 2000)
Mesdames, Messieurs
Et c'est pour défendre en Europe les intérêts de votre profession que votre Association s'est constituée, en mobilisant auprès de l'ensemble des autorités de l'Union européenne, sur les sujets d'intérêt commun, une force d'influence collective. Vos représentants se sont entretenus hier avec la ministre de la culture et de la communication des sujets qui vous préoccupent. Le Gouvernement français ne ménagera pas ses efforts pour favoriser à Bruxelles la discussion sur certains dossiers qui vous tiennent à cur. Il entend par dessus tout défendre votre liberté.
Défendre la liberté de la presse, c'est d'abord assurer son développement. L'Europe s'est bâtie sur un vaste marché : il doit vous permettre de vous développer. Certes, la presse quotidienne reste avant tout une presse nationale ou locale. Les lecteurs aspirent en effet à trouver dans leur journal quotidien une information proche de leurs préoccupations et ancrée dans la réalité du pays où ils vivent. Mais aujourd'hui nous faisons face ensemble aux mêmes bouleversements. A l'heure de la globalisation des économies et de la société de l'information, la liberté de communication prend des formes nouvelles : celles de la multiplication, du foisonnement d'informations, d'oeuvres, de services. L'internet peut devenir un formidable multiplicateur de diffusion de ces créations. A condition que nous sachions défendre des intérêts essentiels. Il est de votre intérêt de pouvoir exploiter en toute sécurité juridique ces nouveaux moyens de communication. Il est de notre intérêt commun d'affirmer la présence, la diversité, la richesse des créations européennes. Afin notamment d'éviter que cette liberté démultipliée ne conduise à l'hégémonie de contenus venus notamment d'outre-Atlantique.
Il est donc nécessaire d'harmoniser les règles relatives à la propriété intellectuelle, d'une part, et au commerce électronique, d'autre part. Deux directives sont en préparation, qui permettront aux organes de presse de mettre rapidement les contenus de vos publications en ligne, de protéger ceux-ci de toute tentative de pillage et de reproduction illicite et d'assurer aux éditeurs la sécurité juridique dont ils estiment légitimement avoir besoin. La négociation de ces deux textes a connu des avancées importantes -et c'est une excellente chose. Le Gouvernement français a, de son côté, engagé une réflexion en vue de proposer au Parlement une loi sur la société de l'information. Ce projet comprendra un volet relatif aux questions de propriété intellectuelle, sur lequel le ministère de la culture et de la communication a lancé une large concertation.
La presse n'est pas seulement une libre entreprise mais aussi une entreprise de liberté.
Défendre la liberté de la presse, c'est aussi affirmer un droit fondamental. L'Europe repose sur un socle de valeurs communes. Cette réunion des quotidiens de l'Europe entière est comme le symbole de ces valeurs qui nous unissent, par-delà les divergences d'appréciation ou les choix politiques. La liberté de la presse est parmi ces valeurs une des plus irremplaçables.
" La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme " : l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen le souligne. Proclamé en termes aussi généraux, ce principe impose la protection la plus exigeante de la liberté de communication. L'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précise que la liberté de recevoir ou de communiquer des informations sans ingérence des autorités publiques est un élément fondamental de la liberté d'expression. Et vos journaux sont un des moyens par lesquels cette liberté s'exerce effectivement.
Il est donc naturel que vous suiviez avec beaucoup d'attention l'élaboration, au sein de l'Union européenne, de la Charte européenne des droits fondamentaux. Les discussions se poursuivent actuellement entre experts afin d'en préciser le contenu et de déterminer la liste des droits qu'elle consacrera. Vous souhaitez voir figurer expressément parmi ces droits la liberté de la presse. Soyez assurés que le Gouvernement français veillera à ce qu'elle trouve dans la Charte la place qui lui revient, à travers la claire réaffirmation de la liberté de communication dans toutes ses dimensions.
La liberté de la presse suppose évidemment que les États ne s'ingèrent pas dans le contenu des publications. Elle n'exclut pas pour autant que l'Etat intervienne au service de la liberté.
Il lui revient de préserver le pluralisme de la presse. Il n'est pas souhaitable de laisser les seules lois du marché régir son fonctionnement. Certes, la rentabilité est pour vos entreprises la condition première de leur indépendance. Mais il n'est de vraie liberté de la presse pour nos concitoyens que celle qui garantit au lecteur le pluralisme des titres. C'est ainsi que la presse, et tout particulièrement la presse quotidienne, peut jouer pleinement son rôle : celui d'un contre-pouvoir dont l'existence permet un fonctionnement transparent des pouvoirs publics. Or à l'heure des concentrations et de la constitution des grands groupes de médias, ce pluralisme peut se trouver menacé.
C'est pourquoi le Gouvernement français s'est depuis quelques années efforcé de mieux cibler les aides à la presse. Ces dernières doivent d'abord être justifiées par le souci d'aider au maintien d'une diversité de titres, s'agissant de la presse d'information politique et générale. Aider cette presse à se moderniser pour conserver et acquérir de nouveaux lecteurs, compenser la faiblesse des ressources publicitaires de certains de ses titres, alléger les coûts de transports et de distribution : voilà quelques objectifs légitimes pour une intervention publique qui entend garantir effectivement la liberté de la presse. Préserver un système de distribution efficace où les journaux à diffusion plus restreinte soient offerts au choix du lecteur dans les mêmes conditions que les grands titres : c'est une préoccupation que, je crois, les responsables que vous êtes peuvent partager avec les pouvoirs publics.
L'Europe aussi doit aider la presse à remplir ce rôle démocratique. La presse -aussi pluraliste soit-elle- ne peut vivre sans lecteur. L'érosion du lectorat qui touche la presse quotidienne est un de vos plus grands sujets d'inquiétude. Ce phénomène ne concerne pas également tous nos pays. La France est malheureusement depuis longtemps à cet égard dans le peloton de queue. Les multiples sollicitations dont les jeunes en particulier sont l'objet contribuent parfois à les détourner de la lecture d'un quotidien. Pourtant, tous ceux qui prennent part à la vie politique savent combien l'information écrite est irremplaçable pour la compréhension des événements. Elle permet que s'établisse entre le citoyen -l'électeur- et ses élus cette forme de distance critique et réfléchie que l'image ne peut à elle seule garantir. D'ores et déjà, l'édition électronique bénéficie de programmes d'aides communautaires. Je pense notamment aux programmes Média et Info 2000 mis en uvre par la Commission européenne. Je souhaite donc vivement qu'au-delà, l'Europe soit le lieu d'initiatives en faveur de l'écrit sous toutes ses formes.
Mesdames, Messieurs,
Libre diffusion des créations, libre communication, pluralisme des idées sont les différents visages d'une même liberté -celle de la presse- qui est pour nos démocraties comme l'air qu'elles respirent et qui les fait vivre. Elle est non seulement un des fondements des systèmes politiques européens, mais encore une des expressions de nos sociétés, de nos cultures, d'une vie de l'esprit qui depuis des siècles façonne notre identité d'Européens. Elle est un bien précieux que ni l'Union européenne, ni les Etats qui la composent ne peuvent accepter de laisser entamer. Ce bien inestimable, il vous appartient aussi de le préserver. Cela suppose une réflexion sur la modernisation de vos titres, sur la formation des journalistes et bien entendu sur la déontologie. Nous sommes prêts à vous accompagner dans cet effort vital pour nos démocraties.
(Source : http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 10 avril 2000)