Déclaration de M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur le bilan économique de l'année 2003 et sur les perspectives pour 2004 : le retour à la croissance, la poursuite des réformes, la maîtrise des dépenses publiques, Paris le 16 janvier 2004.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Présentation des voeux à la presse à Paris le 16 janvier 2004

Texte intégral


Mesdames et Messieurs,
Bonjour à tous.
Je suis heureux de vous accueillir avec Nicole Fontaine et Alain Lambert. Je voudrais excuser François Loos et Renaud Dutreil, en déplacement aujourd'hui.
Je remercie Serge Marty d'avoir exprimé avec franchise les souhaits de l'Association des journalistes économiques et financiers pour mieux travailler ensemble.
Une bonne nouvelle pour commencer : en plus des " briefings " que nous nous efforçons de tenir régulièrement, nous allons vous adresser, à partir de cette année, deux nouvelles brochures d'analyse économique mises au point par cette maison : " Conjoncture et prévision " et "Analyses économiques ", réalisées par la direction de la prévision. L'objectif est de traiter, de manière pédagogique, une ou plusieurs questions d'actualité avec des chiffres, des comparaisons internationales, des commentaires. C'est une contribution de plus à vos réflexions qui, je l'espère, ira dans le sens de vos attentes.
Mais avant tout, en notre nom à tous, je voudrais, pour vous et vos familles, exprimer nos voeux les plus sincères et les plus chaleureux pour cette année 2004. Et quoi de plus sympathique pour un ministre de l'Economie que de le faire à un moment où l'horizon s'éclaircit pour notre économie.
En effet, je crois qu'on peut le dire : la croissance, après avoir été longtemps dans les têtes, est aujourd'hui une réalité.
Cette croissance retrouvée, il ne faut pas la gaspiller. Nous devons au contraire l'accompagner, l'accélérer et la consolider au service de l'emploi. C'est le voeu que je forme aujourd'hui.
Avant de nous projeter sur l'année qui commence, regardons d'abord d'où nous venons.
La conjoncture ne nous a pas gâtés en 2003 et notre pays n'a pas échappé à la panne de croissance européenne. 2003 restera, avec 1975 et 1993, l'une des années les plus difficiles depuis 50 ans.
Dans ce contexte peu porteur, nous avons su cependant mener des réformes essentielles pour remettre notre pays dans le " bon sens ".
Permettez-moi de revenir brièvement sur quelques unes de ces réformes :
- la réforme des retraites d'abord, pour sauvegarder un régime qui est un des piliers de notre pacte républicain, tout en améliorant la soutenabilité de nos finances publiques ;
- la baisse des impôts et des charges pour revaloriser le travail et l'effort ;
- la loi sur l'Initiative économique, portée par Renaud Dutreil, pour faciliter la création d'entreprises avec les excellents résultats que l'on connaît ;
- le plan Innovation de Nicole Fontaine pour donner aux entreprises les moyens de répondre au défi de la recherche et du développement ;
- le plan d'action de François Loos pour renforcer la présence de nos PME à l'international.
2003 a aussi marqué un tournant dans la maîtrise de nos finances publiques : pour la première fois depuis de longues années, les dépenses de l'État ont été contenues au niveau voté par le Parlement. C'est à Alain Lambert que nous le devons. Et la loi de finances pour 2004, qui vient d'être votée, permettra - c'est historique - de stabiliser le volume des dépenses publiques sur deux années consécutives.
2003 aura permis également de redéfinir le rôle de l'État. Nous avons poursuivi le désengagement de l'État des entreprises du secteur concurrentiel. Et pour celles dans lesquelles il garde une participation, nous nous sommes donnés les moyens de les gérer plus efficacement avec l'Agence des Participations de l'État.
Enfin, de nombreux chantiers ont été menés à bien dans le domaine financier : je pense en particulier à la Loi de sécurité financière qui contribue à restaurer la confiance dans les marchés et à la réforme de l'épargne réglementée.
Au total, je retiens de 2003 que même dans l'adversité, nous pouvons - à condition de le vouloir - mener les réformes fondamentales que les Français sont en droit d'attendre.
Avec le retour de la croissance, l'enjeu de 2004 est de poursuivre ces réformes, pour accélérer la reprise et, plus important encore, la transformer en croissance durable et créatrice d'emplois. C'est la première exigence qu'a rappelée le Président de la République. C'est la priorité du gouvernement. C'est notre priorité à Bercy.
La reprise mondiale est désormais bien enclenchée, même si certains déséquilibres subsistent. La priorité au niveau international est de prolonger ce mouvement de reprise en favorisant une résorption ordonnée de ces déséquilibres, qui se manifestent notamment au niveau des changes. Le G7 doit nous y aider en favorisant un diagnostic partagé et en facilitant la mise en oeuvre des politiques appropriées dans chacune des grandes zones :
- On a parlé depuis longtemps des difficultés du Japon. Constatons que ce pays a commencé à engager les réformes nécessaires pour retrouver le chemin de la croissance. L'horizon économique semble enfin se dégager sur l'archipel nippon.
- De leur côté, les États-Unis ont mobilisé d'importantes marges de manoeuvre monétaires et budgétaires et ils ont retrouvé une croissance forte. Pour la rendre soutenable, l'enjeu est d'engager, dès que possible, la réduction des déficits sur le moyen terme, afin de stimuler l'épargne et de conforter la confiance des marchés financiers.
- En Europe, il nous faut prendre également la mesure de nos lacunes et agir de manière énergique pour y remédier. Le principal mot d'ordre, le Président l'a rappelé, doit être la mobilisation pour la croissance, la mobilisation pour l'emploi.
Pour ce faire, il nous faut avancer dans les réformes, conformément à l'Agenda de Lisbonne, afin de renforcer l'efficacité et le dynamisme de nos économies. Cela passe par un effort renforcé de recherche-développement des entreprises, en liaison notamment avec l'initiative de croissance que nous mettons sur pied. Cela passe aussi par la mise en oeuvre d'une action déterminée pour lutter plus efficacement contre la désindustrialisation.
Pour concrétiser ce potentiel de croissance, il nous faut également poursuivre vigoureusement l'assainissement de nos finances publiques.
Aujourd'hui, notre dette publique est de 1 000 milliards d'euros, soit près de 15 000 euros par Français. Chacun comprend, qu'au delà des exigences européennes, notre devoir est de ne pas faire peser davantage la charge de nos choix sur nos enfants et petits-enfants : la réduction des déficits est impérative. Nous respecterons nos rendez-vous de 2004 et de 2005.
La clef de voûte de cette politique de consolidation, c'est la maîtrise des dépenses. Nous nous sommes donc engagés formellement à stabiliser, sur l'ensemble de la législature, les dépenses de l'État en volume. Cet engagement, nous l'avons pris, non seulement vis-à-vis des Français et de la représentation nationale, mais aussi vis-à-vis de nos partenaires européens.
La maîtrise des dépenses, c'est ce qui nous permet de mener une politique de croissance dans la durée.
À court terme, la reprise doit être consolidée.
C'est ce que nous faisons, en accentuant en 2004 les baisses d'impôts et de charges. Dans quelques jours, les Français pourront constater très concrètement la baisse de 3 % supplémentaire de l'impôt sur le revenu puisqu'elle s'appliquera dès le premier " tiers ". Nous continuons à revaloriser les bas salaires en augmentant au 1er juillet prochain le SMIC horaire de plus de 5 %, hausse qui sera renouvelée en 2005. En 3 ans, le coup de pouce sur le Smic, déduction faite de l'inflation, aura été de plus de 11 % ! C'est un encouragement à la reprise d'activité, au travail et à l'effort qui se répercutera sur la consommation. En 2004, nous allons continuer à nous battre pour une baisse de la TVA dans le secteur de la restauration : c'est une décision qui doit être prise à l'unanimité à Bruxelles. Nous sommes donc déterminés à convaincre nos partenaires européens de l'efficacité de cette mesure.
Consolider la reprise, nous le faisons également en engageant, comme le Président de la République l'a annoncé, la réforme de la taxe professionnelle. Elle arrive au bon moment pour catalyser la relance de l'investissement. Elle s'inscrit dans une réflexion plus globale sur la fiscalité des entreprises pour favoriser l'innovation, l'attractivité et l'emploi.
Consolider la reprise, c'est enfin simplifier les embauches avec le Titre Emploi Entreprise. C'est aussi permettre à ceux qui sont en difficulté de retrouver un emploi, grâce au redéploiement de nos dispositifs d'insertion professionnelle avec le contrat sans charge pour les jeunes et le revenu minimum d'activité (RMA) que le Gouvernement vient de mettre en place.
Mais si nous voulons consolider la croissance dans la durée, nous devons aussi poursuivre les réformes.
La première de ces réformes est celle de l'assurance maladie. L'immobilisme condamnerait notre système de santé. Il s'agit donc d'une réforme essentielle pour les Français et indispensable pour nos finances publiques.
La réforme du marché du travail constitue un autre chantier majeur du gouvernement pour 2004. Il ne peut y avoir d'économie saine sans un marché du travail dynamique et réactif. Les nombreux contacts que j'ai avec les chefs d'entreprises, en France comme à l'étranger, montrent que le manque d'attractivité du " site France " est largement lié à cette question.
L'attractivité et la compétitivité de notre économie seront au centre des priorités de ce ministère, comme l'a souhaité le Premier ministre. Nous y contribuerons en incitant les entreprises à accroître leurs efforts d'innovation dans le cadre du chantier ouvert par le Président de la République sur la recherche-développement.
Renforcer notre compétitivité, préparer l'avenir, c'est aussi donner à nos entreprises publiques les moyens de devenir des champions européens : c'est pourquoi, nous transformerons avant la fin de l'année la forme juridique d'EDF et GDF. Cet engagement du gouvernement sera lui aussi tenu.
De même, nous sommes déterminés à moderniser l'État.
Cela veut dire plus de transparence dans nos finances publiques. La mise en place progressive de la nouvelle constitution financière rendra l'utilisation des deniers publics plus lisible pour tous.
Cela veut dire aussi plus de souplesse dans le fonctionnement de l'État :
- grâce à la rémunération au mérite, nous nous donnons la possibilité de mieux motiver les agents de l'État.
- avec le nouveau code des marchés publics, nous faisons en sorte que l'État achète mieux, dans l'intérêt du contribuable.
- pour 2004, nous nous sommes fixés également l'obligation de mieux gérer le patrimoine de l'État et notamment notre immobilier de bureaux.
- enfin, les partenariats Public-Privé, nous permettront de nouer de nouvelles collaborations avec le secteur privé.
La modernisation de l'État, c'est aussi poursuivre et amplifier la réforme du Minéfi, c'est-à-dire " Bercy en mouvement ".
Notre programme " Pour vous faciliter l'impôt " sera mis en place afin d'améliorer le service fiscal aux particuliers, grâce au développement des télédéclarations d'impôts sur le revenu et à l'amélioration des conditions de prélèvement automatique. Cela se fera aussi par un accueil plus réactif dans les services fiscaux. Les PME, quant à elles, auront très rapidement un interlocuteur fiscal unique grâce à la fusion des centres des impôts et des recettes des impôts.
Ce ministère est au service des contribuables, il est aussi au service des consommateurs.
À ce titre, nous sommes à leur écoute. Je suis ainsi conscient des préoccupations que suscite le rythme de l'inflation depuis deux ans. Elles sont excessives. Je rappelle que l'inflation n'a été que de 1,6 % en 2003, dès lors que l'on exclut le tabac dont l'évolution des prix relève d'une logique de santé publique.
Ces préoccupations, je les prends néanmoins au sérieux et ce ministère continue à veiller à ce que la concurrence s'exerce pleinement au bénéfice des consommateurs.
Dans cet esprit, je souhaite que les Français puissent bénéficier des bons résultats enregistrés en matière de sécurité routière. C'est le sens de la concertation qui se tiendra, à ma demande, le 29 janvier prochain avec les associations de consommateurs et les sociétés d'assurance.
Mesdames et Messieurs, chers amis,
2003 a montré la maturité et la clairvoyance des Français. Conscients des enjeux, ils ont compris la nécessité et l'urgence des réformes engagées, essentielles pour leur avenir, essentielles pour notre économie.
Notre défi est maintenant d'utiliser au mieux le retour de la croissance : sans en gaspiller les fruits, comme l'ont fait nos prédécesseurs, sans faire le choix de la facilité, c'est-à-dire de l'immobilisme.
N'ayons pas peur de convaincre les Français de la nécessité et de l'intérêt de bouger. C'est à cette condition que nous garderons leur confiance.
Dans cette tâche, sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, vous pouvez compter sur mon énergie et sur ma détermination à servir notre pays.
Et je vais vous faire une confidence, je le fais avec un grand enthousiasme et beaucoup de plaisir.
C'est cet enthousiasme et ce plaisir que je souhaite à chacune et à chacun d'entre vous, aussi bien dans sa vie personnelle que professionnelle.
Bonne et heureuse année 2004 à vous et à vos proches.
Je vous remercie.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 19 janvier 2004)