Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs les présidents,
directeurs et directeurs-généraux de sociétés d'économie mixte,
Mesdames et messieurs,
Permettez moi, en préambule et en vous remerciant, président Loïc Le Masne, de votre accueil, de vous dire tout le plaisir qui est le mien d'être aujourd'hui parmi vous, à l'occasion de la clôture de votre Congrès annuel.
Ce rendez vous nous permet de faire le point, ensemble, sur la situation de vos sociétés et de l'économie mixte.
Cette rencontre permet également de faire le point sur les perspectives qui s'offrent à nous et les chantiers sur lesquels nous travaillons. Merci donc, de votre invitation.
Je veux également saluer, Président Le Masne, la tonalité très positive de vos propos, qui reflètent, je le crois, la qualité des rapports qui se sont noués, depuis quelques années entre nous et nos collaborateurs, et qui font que, même si -vous l'avez dit- nos positions ne convergent pas toujours, nous essayons, les uns comme les autres, de parvenir à un point d'équilibre.
La fédération des SEM est un partenaire exigeant, parfois même tenace, mais toujours loyal, ouvert au dialogue et qui sait se faire force de proposition.
Il faut constater que cette méthode ne doit pas être la plus mauvaise puisqu'en effet, au cours de l'année qui vient de s'écouler, plusieurs dossiers importants qui concernent vos secteurs d'activité ont connu des avancées significatives : mise en uvre de la réforme du financement du logement social à l'automne 1999, loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains présentée en février 2000, réforme des aides personnelles annoncée en juin dernier par le Premier ministre Lionel Jospin.
Si vous le voulez bien, je vous propose de revenir en quelques mots sur chacun de ces sujets majeurs qui concernent naturellement les SEM de construction, mais aussi, pour certaines de leurs incidences, l'ensemble de vos organismes.
En premier lieu, le financement du logement social.
Pour construire, entretenir, réhabiliter, il faut des moyens et, je le crois, avec la création du PLUS, avec la restitution des moyens du 1% logement, mais aussi l'application du taux réduit de TVA à 5,5% sur les travaux d'entretien, toutes mesures qui ont été mises en uvre à l'automne dernier, nous avons là autant d'avancées importantes pour le logement social.
Rien n'est jamais parfait et j'ai entendu le souhait que vous avez exprimé de voir ces aides encore progresser. Il n'en reste pas moins que, structurellement, le retour d'une aide à la pierre et l'allongement de la durée de remboursement des prêts relatifs au foncier -portée à 50 ans- doivent contribuer à un meilleur équilibre des opérations, y compris en acquisition-amélioration, qui constitue un dispositif, vous l'avez dit, président Le Masne, de diversification géographique du logement social.
En second lieu, vous y avez fait allusion, l'année écoulée aura été celle de la réforme des aides personnelles au logement, qui concerne 4,8 millions de familles. Cette réforme s'inscrit dans le cadre d'une politique continue visant, en particulier par l'actualisation annuelle des barèmes depuis 1997, à consolider les aides personnelles au logement comme l'un des vecteurs du droit au logement pour tous. Elle permet d'harmoniser et d'améliorer les aides au logement pour les ménages les plus modestes, par la création d'un barème unique dans le secteur locatif, prenant en compte tous les revenus de la même manière et sans qu'aucun bénéficiaire ne voit son allocation diminuer du fait de la réforme. Cette réforme ambitieuse, d'un coût de 6,5 MdsF, sera mise en uvre sur deux exercices, dès le début 2001.
A n'en pas douter, par une meilleure solvabilisation des locataires, elle ne peut qu'aider à prévenir les impayés et donc à mieux protéger les bailleurs.
Le troisième chantier important est, naturellement, celui de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Les dernières lectures devant les deux assemblées sont prévues en octobre et novembre prochain, et vous me permettrez d'en rappeler quelques axes fondamentaux.
Il s'agit d'abord par la réforme des documents d'urbanisme d'insuffler plus de cohérence dans le fonctionnement des agglomérations. Il faut que demain, les principaux choix en matière d'habitat, de déplacements, d'implantations commerciales, de localisation des grands équipements publics et privés, soient exprimés à l'échelle de cohérence que constitue le bassin de vie: c'est l'enjeu de la réforme des schémas directeurs - qui deviendront des schémas de cohérence territoriale -, et des plans d'occupation des sols -qui deviendront des plans locaux d'urbanisme- pour mieux illustrer qu'ils devront être de plus en plus le support d'un véritable projet de développement.
Il nous faut adapter nos règles et nos outils opérationnels à la nouvelle dimension de la reconstruction de la ville sur elle-même, alors que ceux dont nous disposions depuis 30 ans, depuis la loi d'orientation foncière de 1967, visaient très clairement l'extension urbaine comme mode de développement. C'est là un formidable enjeu pour la décennie prochaine, pour l'avenir de nos villes. Et les opérateurs que vous êtes sont les premiers concernés et interpellés par cet enjeu.
Il s'agit également de créer des villes plus solidaires, plus accueillantes, à toutes les catégories de la population. C'est le sens des dispositions qui visent à faire en sorte que chaque commune urbaine offre, à terme, au minimum 20% de logements sociaux. Étalé sur 20 ans et visant constructions et acquisitions, ce nous semble être un objectif raisonnable et réaliste, tant il est vrai que personne ne peut accepter la ségrégation sociale et spatiale qui existe dans nos agglomérations, nos villes et nos banlieues, porteuse de tensions qui risquent, si l'on n'y prend pas garde, de miner progressivement les valeurs fondatrices du pacte républicain.
Là encore, en tant que constructeurs et aménageurs, vous êtes en première ligne.
Il s'agit enfin d'accompagner le renouvellement urbain des quartiers qui en ont besoin, qu'il s'agisse de quartiers d'habitat social ou de quartiers anciens qui se sont progressivement dégradés.
En ce sens, le projet de loi renforce les possibilités d'intervention dans les copropriétés dégradées, notamment avec un portage immobilier amélioré pour les opérateurs HLM et SEM. De même la loi renforcera et simplifiera les procédures publiques de lutte contre les logements insalubres.
Le débat parlementaire a également permis d'inscrire dans la loi la notion de logement décent qui s'imposera désormais à tout bailleur, au besoin sous le contrôle du juge. Enfin, dans ce texte, le gouvernement a tenu à inscrire le principe de la pérennisation du parc locatif social, HLM et SEM, par-delà même la durée des conventions conclues avec l'Etat, afin de dire clairement la place que doit continuer de tenir, durablement, le logement social dans notre pays. Toutes ces mesures contribueront, c'est notre volonté, à améliorer les conditions de logement de beaucoup de locataires souvent très modestes et à consolider le droit au logement.
La réforme de la Caisse de garantie du logement social vient compléter ce dispositif de modernisation du logement social. L'objectif est de renforcer la solidité de chaque organisme, au travers d'un mécanisme de solidarité impliquant l'ensemble des organismes HLM et des SEM de construction et recentré sur l'activité locative: la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social. La contribution qui l'alimentera sera dorénavant assise sur les loyers, mais d'une manière modulée, avec pour contrepartie la suppression de la taxe sur les surloyers et de la redevance sur les encours de prêts.
Le rôle des SEM de construction dans la production et la gestion du logement social, dont vous souhaitiez de longue date qu'il soit pleinement reconnu par la loi, en particulier par la suppression de différences de traitement entre les familles d'organismes, a bien été pris en compte au cours de l'examen de ce projet de loi. Ce qui a permis de donner une base juridiquement certaine aux conventions par lesquelles les collectivités locales peuvent participer au financement des opérations que vous menez sur leur territoire. Nous avons ainsi réglé un problème lancinant pour le plus grand bénéfice du logement social et de ces opérateurs.
Comme vous avez bien voulu le relever également, le projet de loi S.R.U. apporte des améliorations importantes à l'aménagement urbain public. En effet, le gouvernement a supprimé le terme de concession d'aménagement, dans la mesure où cette notion créait parfois une confusion avec celle, fort différente, de concession de services publics.
Je sais que cette évolution sémantique a pu susciter, dans un premier temps, quelques craintes parmi vous. La concertation a permis de lever ces inquiétudes et nous convenons les uns et les autres aujourd'hui que la nouvelle " convention publique d'aménagement " apporte plus de sécurité et de précision que l'ancienne " concession d'aménagement ".
Les conditions dans lesquelles les aménageurs pourront se voir confier le suivi des études préalables à la création des ZAC ont été bien définies, les rapports entre la collectivité et son aménageur ont été précisés, notamment en ce qui concerne la participation financière des collectivités aux opérations et leur contrôle corrélatif sur le bilan.
Il s'agit là de réformes importantes et très positives, de nature à conforter le dynamisme de vos organismes.
Elles ont pu être mises au point grâce au dialogue permanent que nous avons instauré avec les professionnels de l'aménagement, et en particulier vous-même, Monsieur le président, vos collaborateurs, notamment Monsieur PETER, et, au niveau de mon ministère, Jean-Philippe DEVILLERS, Jean-François DEBAT, et bien sûr, la DGUHC.
Je tiens à vous remercier encore une fois de votre disponibilité et de vos contributions.
Pour illustrer en direct ce dialogue permanent, vous avez évoqué à l'instant le souhait d'une meilleure prise en compte des dépenses d'aménagement dans le fonds de compensation de la TVA. Vous comprendrez qu'à cette étape, je puisse difficilement prendre position sur cette question qui concerne mes collègues Laurent FABIUS, et Daniel VAILLANT. Néanmoins, je pense que le Gouvernement n'est pas opposé à une discussion avec vous sur ce sujet, pour examiner les conséquences éventuelles de la nouvelle rédaction du code de l'urbanisme en ce qui concerne la prise en charge d'une partie du coût des opérations d'aménagement par la collectivité.
Financement du logement social, réforme des aides au logement, réformes de structures : beaucoup a été fait -même si beaucoup reste encore à faire. Mais, précisément, le Gouvernement est décidé à continuer son effort et il attend, réciproquement, de tous les opérateurs du logement social -donc également des SEM- des efforts à la hauteur des enjeux : produire -par constructions et par acquisitions- du logement de qualité, en nombre suffisant pour répondre aux besoins ; engager résolument le vaste chantier du renouvellement urbain ; gagner le défi de la gestion de proximité et de la qualité du service rendu aux habitants ; assurer l'accès de tous au logement.
Poursuivre les efforts en matière de logement, cela va se traduire dans la loi de finances pour 2001, qui a été présentée voici quelques jours. Chacun a pu constater que l'effort public en faveur du logement social, accru de manière constante depuis 3 ans, ne se dément pas : le budget du logement atteint globalement 49 MdsF, en faveur de l'accession à la propriété, de l'amélioration de l'habitat privé, et, naturellement, du logement social. Les crédits existent pour réaliser ou acquérir annuellement 70 000 logements, dont 10 000 PLA d'intégration et autant de PLUS-construction-démolition. De même, les subventions pour les démolitions proprement dites sont en augmentation de plus de 20%, à 170 MF, permettant de s'approcher de la perspective de la démolition de 10 000 logements par an. Par ailleurs, en application des décisions du comité interministériel des villes, le budget 2001 prévoit un doublement de l'enveloppe dite "qualité de service", destinée à financer des travaux de proximité.
Ce budget prend également en compte la mise en uvre de la réforme des aides personnelles au logement dont je viens à l'instant d'évoquer les enjeux.
En second lieu, je veux également confirmer le plein accord du Gouvernement pour poursuivre, dans les prochaines semaines, avec le Parlement, les voies d'un allègement substantiel de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui pèse aujourd'hui lourdement, en particulier sur le parc social ancien, qui est aussi celui qui concentre les difficultés et dont le renouvellement progressif nécessite de lourds investissements. La préférence du Gouvernement irait à un système simple et souple, prenant par exemple la forme d'un abattement uniforme à la base, significatif, sur la valeur foncière. Il est clair que les économies ainsi réalisées devraient revenir directement aux locataires, par exemple sous forme de services de proximité bien identifiés, ou de maintien du gel des loyers actuellement en cours pour 2000 et 2001. Nous aurons, j'en suis sûr, l'occasion de suivre ensemble ce dossier, qui concerne aussi, bien sûr, les HLM.
Le troisième sujet concerne la poursuite de la réforme des produits de financement du logement. Le Gouvernement traduira sous forme de texte, d'ici la fin de l'année en cours, la mise en place d'un prêt destiné au financement du logement intermédiaire, ouvert aux bailleurs sociaux et susceptible d'intéresser vos organismes. Ce nouveau produit prendra le relais de l'ancien PLA du Crédit foncier, avec quelques différences qui doivent lui assurer plus d'efficacité : son taux sera assis sur les ressources des fonds d'épargne, ce qui devrait lui permettre de mieux se situer par rapport aux taux des prêts du marché et de se trouver réduit d'un point environ. Ce produit viendra consolider la réforme des financements, en offrant aux organismes un outil supplémentaire de diversification de l'offre locative.
Enfin, permettez moi de dire un mot d'un dernier sujet qui concerne de près le fonctionnement des organismes, qui est celui des conséquences du relèvement du taux du livret A. Cette mesure, naturelle et juste envers les détenteurs de livrets, a mécaniquement des conséquences sur les charges financières qui pèsent sur les sociétés dont vous avez la charge. Je puis vous confirmer que le Gouvernement est très attaché à ce que les engagements de gel des loyers qui ont été pris l'an dernier envers les locataires soient tenus.
Pour garantir cet acquis, il a donc décidé la neutralisation complète des charges nettes supplémentaires constatées en 2001 dans vos comptes, du fait de la hausse du taux du livret A. Cette mesure sera mise en oeuvre en liaison, bien entendu, avec la Caisse des Dépôts et Consignations.
Effort de l'État en faveur des bailleurs sociaux, efforts des bailleurs sociaux en faveur des locataires : nous avons là un point d'équilibre à établir, et a consolider, par exemple, - et je puis dire que je n'y serais pas hostile -, par un accord entre nous, Monsieur le Président.
Parallèlement à ces efforts dont j'ai plaisir à constater que vous les avez pour la plupart salués, je le disais à l'instant, les attentes du Gouvernement envers vous sont bien réelles. Permettez moi de n'en exprimer que deux, qui concernent les attributions de logements et la production de logements nouveaux.
En matière d'attributions, le Gouvernement entend poursuivre la mise en uvre résolue de la loi de lutte contre les exclusions. Deux ans après son entrée en vigueur, ce bilan fait apparaître des points très positifs : les PDALPD et les FSL ont été renforcés, des moyens importants ont été engagés, au bénéfice de plus de 500 000 personnes depuis 2 ans, ce qui est considérable.
En ce qui concerne la réforme des procédures d'attributions, trois mesures étaient prévues, dont deux : -la mise en place de conférences intercommunales d'attributions et la signature d'accords collectifs entre l'Etat et les bailleurs sociaux -, commencent à se mettre en place sur le terrain.
Je veux redire ici toute l'importance de votre participation active à ces dispositifs de travail, qui doivent permettre une plus grande mixité de l'habitat entre les quartiers, tout en améliorant les conditions d'accès des plus démunis au logement social. S'agissant de la dernière mesure prévue par la loi, qui n'avait pas encore reçu de texte d'application - la mise en place du numéro unique départemental d'enregistrement des demandes de logements sociaux- je puis vous indiquer qu'après une phase d'expérimentation dans 10 départements, le décret prévoyant sa généralisation, au plus tard au 31 mai 2001, à tous les départements est actuellement en cours d'examen par le Conseil d'Etat et devrait être publié très prochainement.
Dernier enjeu : celui de la production de logements. Chacun connaît la situation du logement social : le parc, dont plus de la moitié massivement construit en deux décennies, vieillit et, dans certains quartiers, ne répond plus vraiment à la demande. Un effort profond de renouvellement est nécessaire, afin d'adapter l'offre de logements. Des petits programmes, bien intégrés dans la ville, permettront mieux de faire progresser la mixité sociale. Les financements existent pour engager cet effort, qui est d'autant plus urgent qu'il devra se prolonger sur plusieurs années. Or, vous le savez, là où les financements existent pour réaliser 70 000 logements, nous en construisons moins de 50 000. Je n'ignore pas que l'activité de construction des SEM se maintient, globalement, à un niveau proportionnellement plus élevé que celui d'autres constructeurs, mais qui reste en retrait par rapport aux besoins et aux possibilités. Je ne peux donc que vous inciter à poursuivre et à intensifier les efforts en ce sens, pour que, par la construction neuve, par l'acquisition-amélioration, par la reconstruction- démolition, nous produisions les logements dont la France a aujourd'hui besoin.
Mesdames et messieurs, l'économie mixte est, vous le savez, une particularité française. Outil au service des collectivités locales, les SEM se doivent d'allier la souplesse de la gestion aux objectifs de la commande publique: c'est leur légitimité et leur mission.
Et j'ai la conviction que la construction de la société urbaine dans laquelle la France est entrée, avec la mutation de nos villes, la montée en puissance des agglomérations, passera demain, davantage par le renouvellement urbain que par l'extension non maîtrisée, et que votre rôle dans cette nouvelle phase de notre développement sera essentiel.
Pour concevoir leurs projets urbains, pour les suivre et pour les mener à bien, ils auront besoin de vous et, peut-être, d'une manière différente d'aujourd'hui. Si j'osais une métaphore, je dirais que le savoir-faire de la couture de précision sera, demain, de plus en plus utile, que la maîtrise de la production en série. Passer d'une logique à une autre est toujours délicat. Cela impose des efforts, de l'imagination, du travail pour adapter chacun à de nouveaux enjeux. Je suis certain que vous saurez relever ce défi.
Votre enthousiasme que je perçois aujourd'hui et la qualité de vos débats que m'ont relatés mes collaborateurs, sont le témoignage de votre capacité à le faire.
Vous pouvez toujours compter sur nous comme nous savons pouvoir compter sur vous, car nous poursuivons les mêmes objectifs : faire que nos villes continuent de se développer et de se renouveler de manière équilibrée et harmonieuse au service de tous les citoyens, qu'elles conjuguent et solidarité, qu'elles soient les creusets de la cohésion sociale et de l'urbanité.
C'est en formant ce vu que je veux vous remercier, très sincèrement, de votre invitation et de votre attention.
Plein succès aux SEM et à leur Fédération !
(Source http://www.logement-equipement.gouv.fr, 11 octobre 2000)
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs les présidents,
directeurs et directeurs-généraux de sociétés d'économie mixte,
Mesdames et messieurs,
Permettez moi, en préambule et en vous remerciant, président Loïc Le Masne, de votre accueil, de vous dire tout le plaisir qui est le mien d'être aujourd'hui parmi vous, à l'occasion de la clôture de votre Congrès annuel.
Ce rendez vous nous permet de faire le point, ensemble, sur la situation de vos sociétés et de l'économie mixte.
Cette rencontre permet également de faire le point sur les perspectives qui s'offrent à nous et les chantiers sur lesquels nous travaillons. Merci donc, de votre invitation.
Je veux également saluer, Président Le Masne, la tonalité très positive de vos propos, qui reflètent, je le crois, la qualité des rapports qui se sont noués, depuis quelques années entre nous et nos collaborateurs, et qui font que, même si -vous l'avez dit- nos positions ne convergent pas toujours, nous essayons, les uns comme les autres, de parvenir à un point d'équilibre.
La fédération des SEM est un partenaire exigeant, parfois même tenace, mais toujours loyal, ouvert au dialogue et qui sait se faire force de proposition.
Il faut constater que cette méthode ne doit pas être la plus mauvaise puisqu'en effet, au cours de l'année qui vient de s'écouler, plusieurs dossiers importants qui concernent vos secteurs d'activité ont connu des avancées significatives : mise en uvre de la réforme du financement du logement social à l'automne 1999, loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains présentée en février 2000, réforme des aides personnelles annoncée en juin dernier par le Premier ministre Lionel Jospin.
Si vous le voulez bien, je vous propose de revenir en quelques mots sur chacun de ces sujets majeurs qui concernent naturellement les SEM de construction, mais aussi, pour certaines de leurs incidences, l'ensemble de vos organismes.
En premier lieu, le financement du logement social.
Pour construire, entretenir, réhabiliter, il faut des moyens et, je le crois, avec la création du PLUS, avec la restitution des moyens du 1% logement, mais aussi l'application du taux réduit de TVA à 5,5% sur les travaux d'entretien, toutes mesures qui ont été mises en uvre à l'automne dernier, nous avons là autant d'avancées importantes pour le logement social.
Rien n'est jamais parfait et j'ai entendu le souhait que vous avez exprimé de voir ces aides encore progresser. Il n'en reste pas moins que, structurellement, le retour d'une aide à la pierre et l'allongement de la durée de remboursement des prêts relatifs au foncier -portée à 50 ans- doivent contribuer à un meilleur équilibre des opérations, y compris en acquisition-amélioration, qui constitue un dispositif, vous l'avez dit, président Le Masne, de diversification géographique du logement social.
En second lieu, vous y avez fait allusion, l'année écoulée aura été celle de la réforme des aides personnelles au logement, qui concerne 4,8 millions de familles. Cette réforme s'inscrit dans le cadre d'une politique continue visant, en particulier par l'actualisation annuelle des barèmes depuis 1997, à consolider les aides personnelles au logement comme l'un des vecteurs du droit au logement pour tous. Elle permet d'harmoniser et d'améliorer les aides au logement pour les ménages les plus modestes, par la création d'un barème unique dans le secteur locatif, prenant en compte tous les revenus de la même manière et sans qu'aucun bénéficiaire ne voit son allocation diminuer du fait de la réforme. Cette réforme ambitieuse, d'un coût de 6,5 MdsF, sera mise en uvre sur deux exercices, dès le début 2001.
A n'en pas douter, par une meilleure solvabilisation des locataires, elle ne peut qu'aider à prévenir les impayés et donc à mieux protéger les bailleurs.
Le troisième chantier important est, naturellement, celui de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Les dernières lectures devant les deux assemblées sont prévues en octobre et novembre prochain, et vous me permettrez d'en rappeler quelques axes fondamentaux.
Il s'agit d'abord par la réforme des documents d'urbanisme d'insuffler plus de cohérence dans le fonctionnement des agglomérations. Il faut que demain, les principaux choix en matière d'habitat, de déplacements, d'implantations commerciales, de localisation des grands équipements publics et privés, soient exprimés à l'échelle de cohérence que constitue le bassin de vie: c'est l'enjeu de la réforme des schémas directeurs - qui deviendront des schémas de cohérence territoriale -, et des plans d'occupation des sols -qui deviendront des plans locaux d'urbanisme- pour mieux illustrer qu'ils devront être de plus en plus le support d'un véritable projet de développement.
Il nous faut adapter nos règles et nos outils opérationnels à la nouvelle dimension de la reconstruction de la ville sur elle-même, alors que ceux dont nous disposions depuis 30 ans, depuis la loi d'orientation foncière de 1967, visaient très clairement l'extension urbaine comme mode de développement. C'est là un formidable enjeu pour la décennie prochaine, pour l'avenir de nos villes. Et les opérateurs que vous êtes sont les premiers concernés et interpellés par cet enjeu.
Il s'agit également de créer des villes plus solidaires, plus accueillantes, à toutes les catégories de la population. C'est le sens des dispositions qui visent à faire en sorte que chaque commune urbaine offre, à terme, au minimum 20% de logements sociaux. Étalé sur 20 ans et visant constructions et acquisitions, ce nous semble être un objectif raisonnable et réaliste, tant il est vrai que personne ne peut accepter la ségrégation sociale et spatiale qui existe dans nos agglomérations, nos villes et nos banlieues, porteuse de tensions qui risquent, si l'on n'y prend pas garde, de miner progressivement les valeurs fondatrices du pacte républicain.
Là encore, en tant que constructeurs et aménageurs, vous êtes en première ligne.
Il s'agit enfin d'accompagner le renouvellement urbain des quartiers qui en ont besoin, qu'il s'agisse de quartiers d'habitat social ou de quartiers anciens qui se sont progressivement dégradés.
En ce sens, le projet de loi renforce les possibilités d'intervention dans les copropriétés dégradées, notamment avec un portage immobilier amélioré pour les opérateurs HLM et SEM. De même la loi renforcera et simplifiera les procédures publiques de lutte contre les logements insalubres.
Le débat parlementaire a également permis d'inscrire dans la loi la notion de logement décent qui s'imposera désormais à tout bailleur, au besoin sous le contrôle du juge. Enfin, dans ce texte, le gouvernement a tenu à inscrire le principe de la pérennisation du parc locatif social, HLM et SEM, par-delà même la durée des conventions conclues avec l'Etat, afin de dire clairement la place que doit continuer de tenir, durablement, le logement social dans notre pays. Toutes ces mesures contribueront, c'est notre volonté, à améliorer les conditions de logement de beaucoup de locataires souvent très modestes et à consolider le droit au logement.
La réforme de la Caisse de garantie du logement social vient compléter ce dispositif de modernisation du logement social. L'objectif est de renforcer la solidité de chaque organisme, au travers d'un mécanisme de solidarité impliquant l'ensemble des organismes HLM et des SEM de construction et recentré sur l'activité locative: la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social. La contribution qui l'alimentera sera dorénavant assise sur les loyers, mais d'une manière modulée, avec pour contrepartie la suppression de la taxe sur les surloyers et de la redevance sur les encours de prêts.
Le rôle des SEM de construction dans la production et la gestion du logement social, dont vous souhaitiez de longue date qu'il soit pleinement reconnu par la loi, en particulier par la suppression de différences de traitement entre les familles d'organismes, a bien été pris en compte au cours de l'examen de ce projet de loi. Ce qui a permis de donner une base juridiquement certaine aux conventions par lesquelles les collectivités locales peuvent participer au financement des opérations que vous menez sur leur territoire. Nous avons ainsi réglé un problème lancinant pour le plus grand bénéfice du logement social et de ces opérateurs.
Comme vous avez bien voulu le relever également, le projet de loi S.R.U. apporte des améliorations importantes à l'aménagement urbain public. En effet, le gouvernement a supprimé le terme de concession d'aménagement, dans la mesure où cette notion créait parfois une confusion avec celle, fort différente, de concession de services publics.
Je sais que cette évolution sémantique a pu susciter, dans un premier temps, quelques craintes parmi vous. La concertation a permis de lever ces inquiétudes et nous convenons les uns et les autres aujourd'hui que la nouvelle " convention publique d'aménagement " apporte plus de sécurité et de précision que l'ancienne " concession d'aménagement ".
Les conditions dans lesquelles les aménageurs pourront se voir confier le suivi des études préalables à la création des ZAC ont été bien définies, les rapports entre la collectivité et son aménageur ont été précisés, notamment en ce qui concerne la participation financière des collectivités aux opérations et leur contrôle corrélatif sur le bilan.
Il s'agit là de réformes importantes et très positives, de nature à conforter le dynamisme de vos organismes.
Elles ont pu être mises au point grâce au dialogue permanent que nous avons instauré avec les professionnels de l'aménagement, et en particulier vous-même, Monsieur le président, vos collaborateurs, notamment Monsieur PETER, et, au niveau de mon ministère, Jean-Philippe DEVILLERS, Jean-François DEBAT, et bien sûr, la DGUHC.
Je tiens à vous remercier encore une fois de votre disponibilité et de vos contributions.
Pour illustrer en direct ce dialogue permanent, vous avez évoqué à l'instant le souhait d'une meilleure prise en compte des dépenses d'aménagement dans le fonds de compensation de la TVA. Vous comprendrez qu'à cette étape, je puisse difficilement prendre position sur cette question qui concerne mes collègues Laurent FABIUS, et Daniel VAILLANT. Néanmoins, je pense que le Gouvernement n'est pas opposé à une discussion avec vous sur ce sujet, pour examiner les conséquences éventuelles de la nouvelle rédaction du code de l'urbanisme en ce qui concerne la prise en charge d'une partie du coût des opérations d'aménagement par la collectivité.
Financement du logement social, réforme des aides au logement, réformes de structures : beaucoup a été fait -même si beaucoup reste encore à faire. Mais, précisément, le Gouvernement est décidé à continuer son effort et il attend, réciproquement, de tous les opérateurs du logement social -donc également des SEM- des efforts à la hauteur des enjeux : produire -par constructions et par acquisitions- du logement de qualité, en nombre suffisant pour répondre aux besoins ; engager résolument le vaste chantier du renouvellement urbain ; gagner le défi de la gestion de proximité et de la qualité du service rendu aux habitants ; assurer l'accès de tous au logement.
Poursuivre les efforts en matière de logement, cela va se traduire dans la loi de finances pour 2001, qui a été présentée voici quelques jours. Chacun a pu constater que l'effort public en faveur du logement social, accru de manière constante depuis 3 ans, ne se dément pas : le budget du logement atteint globalement 49 MdsF, en faveur de l'accession à la propriété, de l'amélioration de l'habitat privé, et, naturellement, du logement social. Les crédits existent pour réaliser ou acquérir annuellement 70 000 logements, dont 10 000 PLA d'intégration et autant de PLUS-construction-démolition. De même, les subventions pour les démolitions proprement dites sont en augmentation de plus de 20%, à 170 MF, permettant de s'approcher de la perspective de la démolition de 10 000 logements par an. Par ailleurs, en application des décisions du comité interministériel des villes, le budget 2001 prévoit un doublement de l'enveloppe dite "qualité de service", destinée à financer des travaux de proximité.
Ce budget prend également en compte la mise en uvre de la réforme des aides personnelles au logement dont je viens à l'instant d'évoquer les enjeux.
En second lieu, je veux également confirmer le plein accord du Gouvernement pour poursuivre, dans les prochaines semaines, avec le Parlement, les voies d'un allègement substantiel de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui pèse aujourd'hui lourdement, en particulier sur le parc social ancien, qui est aussi celui qui concentre les difficultés et dont le renouvellement progressif nécessite de lourds investissements. La préférence du Gouvernement irait à un système simple et souple, prenant par exemple la forme d'un abattement uniforme à la base, significatif, sur la valeur foncière. Il est clair que les économies ainsi réalisées devraient revenir directement aux locataires, par exemple sous forme de services de proximité bien identifiés, ou de maintien du gel des loyers actuellement en cours pour 2000 et 2001. Nous aurons, j'en suis sûr, l'occasion de suivre ensemble ce dossier, qui concerne aussi, bien sûr, les HLM.
Le troisième sujet concerne la poursuite de la réforme des produits de financement du logement. Le Gouvernement traduira sous forme de texte, d'ici la fin de l'année en cours, la mise en place d'un prêt destiné au financement du logement intermédiaire, ouvert aux bailleurs sociaux et susceptible d'intéresser vos organismes. Ce nouveau produit prendra le relais de l'ancien PLA du Crédit foncier, avec quelques différences qui doivent lui assurer plus d'efficacité : son taux sera assis sur les ressources des fonds d'épargne, ce qui devrait lui permettre de mieux se situer par rapport aux taux des prêts du marché et de se trouver réduit d'un point environ. Ce produit viendra consolider la réforme des financements, en offrant aux organismes un outil supplémentaire de diversification de l'offre locative.
Enfin, permettez moi de dire un mot d'un dernier sujet qui concerne de près le fonctionnement des organismes, qui est celui des conséquences du relèvement du taux du livret A. Cette mesure, naturelle et juste envers les détenteurs de livrets, a mécaniquement des conséquences sur les charges financières qui pèsent sur les sociétés dont vous avez la charge. Je puis vous confirmer que le Gouvernement est très attaché à ce que les engagements de gel des loyers qui ont été pris l'an dernier envers les locataires soient tenus.
Pour garantir cet acquis, il a donc décidé la neutralisation complète des charges nettes supplémentaires constatées en 2001 dans vos comptes, du fait de la hausse du taux du livret A. Cette mesure sera mise en oeuvre en liaison, bien entendu, avec la Caisse des Dépôts et Consignations.
Effort de l'État en faveur des bailleurs sociaux, efforts des bailleurs sociaux en faveur des locataires : nous avons là un point d'équilibre à établir, et a consolider, par exemple, - et je puis dire que je n'y serais pas hostile -, par un accord entre nous, Monsieur le Président.
Parallèlement à ces efforts dont j'ai plaisir à constater que vous les avez pour la plupart salués, je le disais à l'instant, les attentes du Gouvernement envers vous sont bien réelles. Permettez moi de n'en exprimer que deux, qui concernent les attributions de logements et la production de logements nouveaux.
En matière d'attributions, le Gouvernement entend poursuivre la mise en uvre résolue de la loi de lutte contre les exclusions. Deux ans après son entrée en vigueur, ce bilan fait apparaître des points très positifs : les PDALPD et les FSL ont été renforcés, des moyens importants ont été engagés, au bénéfice de plus de 500 000 personnes depuis 2 ans, ce qui est considérable.
En ce qui concerne la réforme des procédures d'attributions, trois mesures étaient prévues, dont deux : -la mise en place de conférences intercommunales d'attributions et la signature d'accords collectifs entre l'Etat et les bailleurs sociaux -, commencent à se mettre en place sur le terrain.
Je veux redire ici toute l'importance de votre participation active à ces dispositifs de travail, qui doivent permettre une plus grande mixité de l'habitat entre les quartiers, tout en améliorant les conditions d'accès des plus démunis au logement social. S'agissant de la dernière mesure prévue par la loi, qui n'avait pas encore reçu de texte d'application - la mise en place du numéro unique départemental d'enregistrement des demandes de logements sociaux- je puis vous indiquer qu'après une phase d'expérimentation dans 10 départements, le décret prévoyant sa généralisation, au plus tard au 31 mai 2001, à tous les départements est actuellement en cours d'examen par le Conseil d'Etat et devrait être publié très prochainement.
Dernier enjeu : celui de la production de logements. Chacun connaît la situation du logement social : le parc, dont plus de la moitié massivement construit en deux décennies, vieillit et, dans certains quartiers, ne répond plus vraiment à la demande. Un effort profond de renouvellement est nécessaire, afin d'adapter l'offre de logements. Des petits programmes, bien intégrés dans la ville, permettront mieux de faire progresser la mixité sociale. Les financements existent pour engager cet effort, qui est d'autant plus urgent qu'il devra se prolonger sur plusieurs années. Or, vous le savez, là où les financements existent pour réaliser 70 000 logements, nous en construisons moins de 50 000. Je n'ignore pas que l'activité de construction des SEM se maintient, globalement, à un niveau proportionnellement plus élevé que celui d'autres constructeurs, mais qui reste en retrait par rapport aux besoins et aux possibilités. Je ne peux donc que vous inciter à poursuivre et à intensifier les efforts en ce sens, pour que, par la construction neuve, par l'acquisition-amélioration, par la reconstruction- démolition, nous produisions les logements dont la France a aujourd'hui besoin.
Mesdames et messieurs, l'économie mixte est, vous le savez, une particularité française. Outil au service des collectivités locales, les SEM se doivent d'allier la souplesse de la gestion aux objectifs de la commande publique: c'est leur légitimité et leur mission.
Et j'ai la conviction que la construction de la société urbaine dans laquelle la France est entrée, avec la mutation de nos villes, la montée en puissance des agglomérations, passera demain, davantage par le renouvellement urbain que par l'extension non maîtrisée, et que votre rôle dans cette nouvelle phase de notre développement sera essentiel.
Pour concevoir leurs projets urbains, pour les suivre et pour les mener à bien, ils auront besoin de vous et, peut-être, d'une manière différente d'aujourd'hui. Si j'osais une métaphore, je dirais que le savoir-faire de la couture de précision sera, demain, de plus en plus utile, que la maîtrise de la production en série. Passer d'une logique à une autre est toujours délicat. Cela impose des efforts, de l'imagination, du travail pour adapter chacun à de nouveaux enjeux. Je suis certain que vous saurez relever ce défi.
Votre enthousiasme que je perçois aujourd'hui et la qualité de vos débats que m'ont relatés mes collaborateurs, sont le témoignage de votre capacité à le faire.
Vous pouvez toujours compter sur nous comme nous savons pouvoir compter sur vous, car nous poursuivons les mêmes objectifs : faire que nos villes continuent de se développer et de se renouveler de manière équilibrée et harmonieuse au service de tous les citoyens, qu'elles conjuguent et solidarité, qu'elles soient les creusets de la cohésion sociale et de l'urbanité.
C'est en formant ce vu que je veux vous remercier, très sincèrement, de votre invitation et de votre attention.
Plein succès aux SEM et à leur Fédération !
(Source http://www.logement-equipement.gouv.fr, 11 octobre 2000)