Texte intégral
O. Mazerolle Dernièrement, la Cour de cassation a décidé de faire verser des dommages et intérêts à un jeune handicapé au prétexte qu'en le laissant vivre, on lui avait occasionné en quelque sorte un préjudice. Beaucoup de médecins redoutent que cette décision ouvre la voie à l'eugénisme. Quel est l'avis du ministre qui a aussi la santé sous sa responsabilité ?
- "C'est une décision de la Cour de cassation, donc n'attendez pas de l'ancien Garde des Sceaux de commentaires sur cette décision. Nicolas Perruche a reçu une indemnité, on ne peut que s'en réjouir pour lui puisque si ses parents venaient à disparaître, il serait ainsi mieux protégé matériellement. En même temps, c'est vrai que nous avons posé à l'occasion de cette décision la question de la place du handicapé dans notre société et je trouve que nous avons à dire et à faire en sorte que les handicapés aient toute leur place. Ils n'ont pas seulement le droit d'être indemnisés et d'être parqués dans des établissements spécialisés, ils ont le droit à une vie à part entière, du travail lorsqu'ils peuvent, de pouvoir accéder aux loisirs, de pouvoir mener une vie familiale normale. C'est la politique que nous allons mener. Il y a des questions d'éthique, je pense qu'il est souhaitable en effet, qu'on développe un débat à ce sujet - je pense que nous l'aurons d'ailleurs dans les semaines et mois à venir. Je pense qu'il faut prendre ce débat dans toute sa complexité, je ne pense pas qu'on puisse avoir une vision unilatérale des choses. Je souhaiterais surtout qu'on ne caricature pas parce que, de l'indemnisation à l'eugénisme, il y a quand même une marge."
Indemnisation, est-ce que cela veut dire que du côté de l'Etat, on pourrait envisager de faire en sorte que les handicapés qui se trouvent démunis lorsque leurs parents décèdent pourront subvenir à leurs besoins.
- "On a un problème de la place des handicapés adultes et vieillissants dans notre société. Pour ceux qui ne peuvent pas être autonomes et qui n'ont plus d'entourage familial qui les prenne en charge, nous avons encore trop peu d'établissements. Et puis ensuite, il y a le problème plus général d'ailleurs, des personnes qui étaient handicapées au départ et qui vieillissent et puis de ces personnes qui ne l'étaient pas au départ et qui deviennent handicapées : c'est tout le problème des personnes âgées dépendantes, des personnes atteintes de la malade d'Alzheimer. Le professeur Girard m'a remis un rapport hier à ce sujet, c'est plusieurs centaines de milliers de personnes qui sont atteintes. Nous avons là un problème de société majeur, massif même ; comment allons-nous prendre en charge ces personnes ? Nous avons le devoir de prendre en charge ces personnes, en faisant en sorte qu'elles puissent au maximum être maintenues à domicile, continuer à mener une vie aussi normale que possible, ne pas être encore une fois ostracisées, écartées, pouvoir jouir des droits qu'elles peuvent exercer. C'est une charge très lourde pour la société, c'est la raison pour laquelle le Gouvernement proposera très prochainement un projet de loi pour les personnes âgées, sur l'autonomie des personnes âgées, pour faire en sorte que par une indemnisation - le versement d'une prestation - à la fois plus juste, plus égalitaire sur l'ensemble du territoire, et plus élevée qu'aujourd'hui, ces personnes puissent être prises en charge correctement dans toute la mesure du possible à domicile par leur entourage."
Autre problème de santé, la vache folle, A . Juppé sur cette antenne hier matin disait : "la psychose, c'est Mme Gillot, ministre de la Santé - donc sous votre tutelle - qui l'a provoquée en déclarant qu'il y aurait en France des dizaines de maladies de Creutzfeldt-Jakob ?
- "C'est facile de s'attaquer à Dominique Gillot."
C'est ce qu'elle a dit, c'est un peu imprudent, non ? Avait-elle raison ou pas ?
- "Nous devons d'abord souligner ce que la France a fait. Aucun autre pays européen n'a fait plus en matière de contrôle de la sécurité alimentaire, et en matière de mesures sanitaires pour contrecarrer les effets de cette maladie qui est une maladie terrible parce qu'on ne sait ni la soigner ni la guérir - il y en a d'autres comme cela, mais c'est une maladie qui ne laisse aucun espoir. Ce que je préfère faire, c'est parler de ce qu'il faut faire : la priorité absolue qui prime sur toutes les autres, sur les considérations économiques, sur les considérations financières, c'est la santé publique. C'est cela qui guide le Gouvernement. Depuis le début, c'est ce principe qui a guidé L. Jospin et je pense que ce que nous avons à dire - parce que c'est vrai- qu'aucun autre pays d'Europe n'a pris les mesures que nous avons prises. Nous allons continuer, nous avons bien entendu plusieurs questions. Dans le domaine de la sécurité alimentaire, nous avons fait tout ce que nous pouvions faire dans l'état des connaissances. D'abord nous avons assuré le maximum de transparence, je crois qu'il faut dire la vérité même si elle est difficile à évaluer - je ne parlerai que de ce qui est sûr et pas de spéculations dans l'avenir. Deuxièmement, nous avons à dire la vérité, c'est-à-dire l'état des connaissances qui souvent est très flou. Nous avons à dire les initiatives que nous prenons dans les différents champs ; on connaît celles de l'alimentation, elles ont abondamment alimenté les commentaires, mais nous avons à prendre des initiatives en matière de soins. Il faut que nous soyons plus rigoureux en matière de stérilisation et de désinfection des instruments dans les hôpitaux et, d'autre part, nous devons aussi veiller à bien protéger les personnes qui travaillent dans ces professions qui peuvent être exposées. Nous le faisons, j'ai demandé un rapport au directeur des relations du travail sur les mesures qui ont été prises pour protéger ces professions, par exemple, les équarrisseurs, par exemple les gens qui travaillent dans les abattoirs. D'après un premier rapport qui m'a été remis, les surveillances paraissent être suffisantes. Nous devons contrôler parce que nous voyons bien que ce qui s'est produit : il y a eu des fraudes ces dernières années. Donc, nous faisons, mon collègue J. Glavany, L. Fabius qui est chargé du contrôle des douanes et moi, des contrôles conjoints. "
Les 35 heures : on parle beaucoup d'assouplissements pour un certain nombre d'entreprises, est-ce que cela va se faire ?
- "Ma position est simple depuis le début. Le Parlement a voté deux lois sur les 35 heures. Ces lois ont produit des effets : 270 000 emplois créés ou préservés, ce n'est pas rien. Nous appliquerons ces lois, il n'est pas question de changer la loi. En même temps, ces lois prévoient des assouplissements et des mesures progressives pour les entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises et spécialement pour celles qui ont moins de 20 salariés. Ces possibilités, qui ne sont pas toujours connues, il faut les expliquer. Rien ne serait pire que de laisser penser aux entreprises que la loi ne sera pas appliquée car elle sera appliquée. Je pense que se serait les induire en erreur."
Est-ce que vous allez toucher aux gains, par exemple, des heures supplémentaires.
- "Nous ne toucherons pas à la loi. Il y a plusieurs questions qui ont été posées par les organisations professionnelles, nous y réfléchissons. Ce que nous voulons - ce que je veux - , c'est un diagnostic précis. Pour l'instant, on parle dans le flou, il y a une confusion mentale totale. On met sur le dos des 35 heures les difficultés de recrutements, qui ne datent pas d'hier ou d'aujourd'hui et qui ne sont pas imputables aux 35 heures, dans certains métiers qui sont particulièrement difficiles, d'ailleurs sujets à des variations saisonnières importantes comme par exemple l'hôtellerie. Ce sont des métiers difficiles parce qu'on y travaille beaucoup, la nuit, le soir, le week-end, que ce n'est pas très bien payé. Donc il faut pouvoir avoir des diagnostics précis, bassin d'emploi par bassin d'emploi. Je l'ai demandé aux organisations professionnelles, je vais le demander à mes services aussi : "donnez-moi un diagnostic précis et nous traiterons les problèmes". Nous en avons la possibilité dans le cadre de la loi et bien entendu nous ferons en sorte d'aider les PME à passer aux 35 heures parce que rien ne serait pire que d'avoir deux sortes d'entreprises, celles qui massivement sont déjà passées aux 35 heures et puis celles qui n'y passeraient pas. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas modifier la loi, parce que cela créerait les entreprises à deux vitesses. D'ailleurs, je vous signale que l'Union professionnelle artisanale n'en veut pas."
Avec M. Seillière, ça va bien ?
- "Aussi bien que possible .."
C'est détendu ?
- "C'est détendu mais nous avons un désaccord sur les 35 heures. Je dis à M. Seillière "Que vous le vouliez ou non, les 35 heures ont créé des emplois. Les emplois, c'est de la croissance, par conséquent, vous devriez vous réjouir de cela même si vous n'êtes pas d'accord sur toutes les modalités de la loi". Nous avons un dialogue vif que nous allons entretenir certainement parce que je ne le vois pas changer d'avis, et moi non plus."
(Source http.sig.premier-ministre.gouv.fr, le 23 novembre 2000)
- "C'est une décision de la Cour de cassation, donc n'attendez pas de l'ancien Garde des Sceaux de commentaires sur cette décision. Nicolas Perruche a reçu une indemnité, on ne peut que s'en réjouir pour lui puisque si ses parents venaient à disparaître, il serait ainsi mieux protégé matériellement. En même temps, c'est vrai que nous avons posé à l'occasion de cette décision la question de la place du handicapé dans notre société et je trouve que nous avons à dire et à faire en sorte que les handicapés aient toute leur place. Ils n'ont pas seulement le droit d'être indemnisés et d'être parqués dans des établissements spécialisés, ils ont le droit à une vie à part entière, du travail lorsqu'ils peuvent, de pouvoir accéder aux loisirs, de pouvoir mener une vie familiale normale. C'est la politique que nous allons mener. Il y a des questions d'éthique, je pense qu'il est souhaitable en effet, qu'on développe un débat à ce sujet - je pense que nous l'aurons d'ailleurs dans les semaines et mois à venir. Je pense qu'il faut prendre ce débat dans toute sa complexité, je ne pense pas qu'on puisse avoir une vision unilatérale des choses. Je souhaiterais surtout qu'on ne caricature pas parce que, de l'indemnisation à l'eugénisme, il y a quand même une marge."
Indemnisation, est-ce que cela veut dire que du côté de l'Etat, on pourrait envisager de faire en sorte que les handicapés qui se trouvent démunis lorsque leurs parents décèdent pourront subvenir à leurs besoins.
- "On a un problème de la place des handicapés adultes et vieillissants dans notre société. Pour ceux qui ne peuvent pas être autonomes et qui n'ont plus d'entourage familial qui les prenne en charge, nous avons encore trop peu d'établissements. Et puis ensuite, il y a le problème plus général d'ailleurs, des personnes qui étaient handicapées au départ et qui vieillissent et puis de ces personnes qui ne l'étaient pas au départ et qui deviennent handicapées : c'est tout le problème des personnes âgées dépendantes, des personnes atteintes de la malade d'Alzheimer. Le professeur Girard m'a remis un rapport hier à ce sujet, c'est plusieurs centaines de milliers de personnes qui sont atteintes. Nous avons là un problème de société majeur, massif même ; comment allons-nous prendre en charge ces personnes ? Nous avons le devoir de prendre en charge ces personnes, en faisant en sorte qu'elles puissent au maximum être maintenues à domicile, continuer à mener une vie aussi normale que possible, ne pas être encore une fois ostracisées, écartées, pouvoir jouir des droits qu'elles peuvent exercer. C'est une charge très lourde pour la société, c'est la raison pour laquelle le Gouvernement proposera très prochainement un projet de loi pour les personnes âgées, sur l'autonomie des personnes âgées, pour faire en sorte que par une indemnisation - le versement d'une prestation - à la fois plus juste, plus égalitaire sur l'ensemble du territoire, et plus élevée qu'aujourd'hui, ces personnes puissent être prises en charge correctement dans toute la mesure du possible à domicile par leur entourage."
Autre problème de santé, la vache folle, A . Juppé sur cette antenne hier matin disait : "la psychose, c'est Mme Gillot, ministre de la Santé - donc sous votre tutelle - qui l'a provoquée en déclarant qu'il y aurait en France des dizaines de maladies de Creutzfeldt-Jakob ?
- "C'est facile de s'attaquer à Dominique Gillot."
C'est ce qu'elle a dit, c'est un peu imprudent, non ? Avait-elle raison ou pas ?
- "Nous devons d'abord souligner ce que la France a fait. Aucun autre pays européen n'a fait plus en matière de contrôle de la sécurité alimentaire, et en matière de mesures sanitaires pour contrecarrer les effets de cette maladie qui est une maladie terrible parce qu'on ne sait ni la soigner ni la guérir - il y en a d'autres comme cela, mais c'est une maladie qui ne laisse aucun espoir. Ce que je préfère faire, c'est parler de ce qu'il faut faire : la priorité absolue qui prime sur toutes les autres, sur les considérations économiques, sur les considérations financières, c'est la santé publique. C'est cela qui guide le Gouvernement. Depuis le début, c'est ce principe qui a guidé L. Jospin et je pense que ce que nous avons à dire - parce que c'est vrai- qu'aucun autre pays d'Europe n'a pris les mesures que nous avons prises. Nous allons continuer, nous avons bien entendu plusieurs questions. Dans le domaine de la sécurité alimentaire, nous avons fait tout ce que nous pouvions faire dans l'état des connaissances. D'abord nous avons assuré le maximum de transparence, je crois qu'il faut dire la vérité même si elle est difficile à évaluer - je ne parlerai que de ce qui est sûr et pas de spéculations dans l'avenir. Deuxièmement, nous avons à dire la vérité, c'est-à-dire l'état des connaissances qui souvent est très flou. Nous avons à dire les initiatives que nous prenons dans les différents champs ; on connaît celles de l'alimentation, elles ont abondamment alimenté les commentaires, mais nous avons à prendre des initiatives en matière de soins. Il faut que nous soyons plus rigoureux en matière de stérilisation et de désinfection des instruments dans les hôpitaux et, d'autre part, nous devons aussi veiller à bien protéger les personnes qui travaillent dans ces professions qui peuvent être exposées. Nous le faisons, j'ai demandé un rapport au directeur des relations du travail sur les mesures qui ont été prises pour protéger ces professions, par exemple, les équarrisseurs, par exemple les gens qui travaillent dans les abattoirs. D'après un premier rapport qui m'a été remis, les surveillances paraissent être suffisantes. Nous devons contrôler parce que nous voyons bien que ce qui s'est produit : il y a eu des fraudes ces dernières années. Donc, nous faisons, mon collègue J. Glavany, L. Fabius qui est chargé du contrôle des douanes et moi, des contrôles conjoints. "
Les 35 heures : on parle beaucoup d'assouplissements pour un certain nombre d'entreprises, est-ce que cela va se faire ?
- "Ma position est simple depuis le début. Le Parlement a voté deux lois sur les 35 heures. Ces lois ont produit des effets : 270 000 emplois créés ou préservés, ce n'est pas rien. Nous appliquerons ces lois, il n'est pas question de changer la loi. En même temps, ces lois prévoient des assouplissements et des mesures progressives pour les entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises et spécialement pour celles qui ont moins de 20 salariés. Ces possibilités, qui ne sont pas toujours connues, il faut les expliquer. Rien ne serait pire que de laisser penser aux entreprises que la loi ne sera pas appliquée car elle sera appliquée. Je pense que se serait les induire en erreur."
Est-ce que vous allez toucher aux gains, par exemple, des heures supplémentaires.
- "Nous ne toucherons pas à la loi. Il y a plusieurs questions qui ont été posées par les organisations professionnelles, nous y réfléchissons. Ce que nous voulons - ce que je veux - , c'est un diagnostic précis. Pour l'instant, on parle dans le flou, il y a une confusion mentale totale. On met sur le dos des 35 heures les difficultés de recrutements, qui ne datent pas d'hier ou d'aujourd'hui et qui ne sont pas imputables aux 35 heures, dans certains métiers qui sont particulièrement difficiles, d'ailleurs sujets à des variations saisonnières importantes comme par exemple l'hôtellerie. Ce sont des métiers difficiles parce qu'on y travaille beaucoup, la nuit, le soir, le week-end, que ce n'est pas très bien payé. Donc il faut pouvoir avoir des diagnostics précis, bassin d'emploi par bassin d'emploi. Je l'ai demandé aux organisations professionnelles, je vais le demander à mes services aussi : "donnez-moi un diagnostic précis et nous traiterons les problèmes". Nous en avons la possibilité dans le cadre de la loi et bien entendu nous ferons en sorte d'aider les PME à passer aux 35 heures parce que rien ne serait pire que d'avoir deux sortes d'entreprises, celles qui massivement sont déjà passées aux 35 heures et puis celles qui n'y passeraient pas. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas modifier la loi, parce que cela créerait les entreprises à deux vitesses. D'ailleurs, je vous signale que l'Union professionnelle artisanale n'en veut pas."
Avec M. Seillière, ça va bien ?
- "Aussi bien que possible .."
C'est détendu ?
- "C'est détendu mais nous avons un désaccord sur les 35 heures. Je dis à M. Seillière "Que vous le vouliez ou non, les 35 heures ont créé des emplois. Les emplois, c'est de la croissance, par conséquent, vous devriez vous réjouir de cela même si vous n'êtes pas d'accord sur toutes les modalités de la loi". Nous avons un dialogue vif que nous allons entretenir certainement parce que je ne le vois pas changer d'avis, et moi non plus."
(Source http.sig.premier-ministre.gouv.fr, le 23 novembre 2000)